Comment réagir face au chantage du fournisseur de gaz, GAZ EUROPEEN, et comment l’ARC vient en renfort de ses adhérents ?

24/10/2022 Actions Action

Dernièrement, nous avons organisé une session d’information en ligne afin d’expliquer la conjoncture liée au prix du gaz et à l’aide de l’Etat.

A la suite de l’intervention de notre avocat, nombreux adhérents ayant souscrit un contrat de fourniture de gaz avec la société GAZ EUROPEEN, nous ont fait part du courrier recommandé envoyée par cette dernière, qui n’est d’autre qu’un chantage.

Celui-ci prévoit l'alternative suivante :

  • soit le syndicat des copropriétaires accepte les nouvelles conditions tarifaires,
  • soit le syndicat des copropriétaires est invité à résilier le contrat.

Ainsi, pour se sécuriser, le fournisseur de gaz incite le syndicat des copropriétaires, soit à accepter les conditions, soit à prendre l’initiative de résilier le contrat évitant tout recours pour rupture abusive.

Face à cette conduite inacceptable, le syndic qui représente les intérêts du syndicat des copropriétaires ne doit pas laisser la situation pourrir, impliquant une action qui pourra être soutenue par l’ARC.

Pour bien comprendre le contexte juridique, nous allons expliquer pourquoi, selon nous, aucun motif légal ne permet à un fournisseur de gaz de modifier unilatéralement le prix de la molécule prévu contractuellement leur interdisant tout chantage à l’égard de la copropriété.

Nous indiquerons ensuite comment le syndic doit réagir et l’action judiciaire que l’ARC est prête à financer.

I – Des motifs juridiques non acceptables

Tout d’abord, il faut partir du postulat que conformément à l’article 1103 du code civil, « tous contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont fait. ».

Par conséquent, une partie du contrat ne peut pas modifier une clause, d’autant plus si elle traite d’un élément essentiel, sans accord de l’autre partie.

Néanmoins, en matière de contrat de gaz, des dispositions légales sont prévues pour modifier unilatéralement les conditions et en particulier le prix de la molécule, mais qui ne semble pas être applicable dans le cas d’espèce.

Le premier recours est l’article R445-5 du code de l’énergie qui permet à un fournisseur de modifier le prix du gaz.

Néanmoins, celui-ci doit respecter plusieurs étapes préalables et en l’occurrence la saisine de la commission de la régulation de l’énergie qui, après analyse des faits, doit déterminer si les conditions sont réunies pour que le fournisseur puisse proposer un nouveau tarif.

Or, compte tenu qu’il s’agit d’experts, il est peu probable que GAZ EUROPEEN les ait saisis et que ces derniers acceptent l’augmentation du tarif proposé.

La deuxième action possible relève de l’article L224-1 du code de la consommation, mais celle-ci ne s’applique que pour les copropriétés considérées comme des non-professionnelles qui ont une consommation de gaz inférieure à 30.000 KHW.

Il s’agit des petits immeubles composés de 10 à 15 lots.

Dans ce cas, le fournisseur de gaz doit malgré tout préciser les nouvelles conditions de manière claire et compréhensible qui justifient le nouveau tarif du gaz.

Le syndicat des copropriétaires dispose malgré tout de la possibilité de saisir le juge pour déterminer si les conditions préalables sont respectées.

La troisième action relève de l’article 1195 du code civil qui précise :

Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.

En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe.

Ainsi, il faut la survenance d’une circonstance imprévisible qui permettrait de demander une renégociation du contrat.

Or, le prix du gaz dépend de la bourse, impliquant une évolution dans le temps avec un risque de fluctuation liée au marché, ne permettant pas de considérer qu’il s’agit d’un évènement imprévisible.

Autrement dit, le fournisseur de gaz a accepté ce risque, à partir du moment où il entre dans ce marché.

De plus, pendant des années, les fournisseurs de gaz ont bénéficié de prix bas sans pour autant en faire profiter leurs clients, ne pouvant pas aujourd’hui leur faire supporter l’augmentation du prix.

Plus encore, même si cet article pourrait s’appliquer, il impose au préalable une renégociation obligeant le fournisseur de gaz à continuer d’exécuter son obligation au tarif prévu contractuellement.

Ainsi, comme on le constate, ces trois voies de recours ne peuvent pas être évoquées par un fournisseur de gaz et en l’occurrence la société GAZ EUROPEEN.

D’ailleurs, dans son courrier elle se réserve bien d’indiquer sur quel fondement légal elle impose sa nouvelle tarification.

II - La réaction que doit avoir le syndic

Le premier réflexe du syndic est de réagir à ce courrier recommandé en s’opposant fermement à ce chantage en précisant que la société GAZ EUROPEEN ne peut pas modifier les clauses du contrat et en l’occurrence le prix en cours d’exécution sans le consentement expresse du syndicat des copropriétaires.

Par conséquent, elle est contrainte de continuer à fournir le gaz au prix contractuellement convenu le temps d’engager une réelle tentative de négociation.

A défaut, de négociation et surtout sur un accord du nouveau tarif à appliquer, le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, devra engager une action en référé d’heure à heure à l’encontre de la société GAZ EUROPEEN pour que soit désigné un médiateur judiciaire afin qu’il engage de réelles négociations.

Pendant ce temps, le juge contraindra le fournisseur de gaz à livrer le fluide au prix mentionné dans le contrat.

III – L’action de l’ARC

Compte tenu des actions que doit mener le syndic qui peuvent prendre du temps, et ce, sans possibilité d’être rémunéré, il est probable qu’il ne va pas réagir en attendant que le fournisseur de gaz applique son nouveau tarif.

Il expliquera alors au conseil syndical qu’il ne pouvait rien faire compte tenu de la guerre en Ukraine.

Pour éviter que le syndicat des copropriétaires se retrouve encore une fois être le dindon de la farce, les conseillers syndicaux dont la copropriété a souscrit un contrat avec la société GAZ EUROPEEN, doivent agir par étapes :

  • demander impérativement à leur syndic s’il a reçu un courrier de ce fournisseur avec une date butoir pour accepter le nouveau tarif,
  • en cas d’absence de réponse du syndic, un numéro de téléphone permet de se mettre en contact avec un interlocuteur de GAZ EUROPEEN qui est le 01.57.32.68.00,
  • si le syndic refuse d’agir, l’ARC est alors prêt à engager l’action judiciaire en référé d’heure à heure pour qu’un juge nomme un médiateur judiciaire.

L’ensemble des frais (avocat, huissier) seront pris en charge par l’ARC.

Pour cela, le conseil syndical doit impérativement demander au syndic qu’il donne un mandat à notre avocat afin qu’il puisse, dans les plus brefs délais, représenter les intérêts de la copropriété contre cette société.

Si cela intéresse des conseillers syndicaux, vous pouvez envoyer le mandat signé par votre syndic accompagné du contrat gaz et de la/ou des lettres recommandées envoyés par la société GAZ EUROPEEN sur l’adresse mail suivante : abus@arc-copro.fr.

Voici un modèle de mission à compléter :

« En ma qualité de syndic du Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis xxxx, je missionne par la présente l’AARPI AUDINEAU-GUITTON, représentée par Me Eric AUDINEAU, pour :

  • Adresser une lettre de contestation à la société EUROPE GAZ du fait de sa tentative de modifier unilatéralement le contrat de fourniture gaz de l’immeuble,
  • Saisir, en cas de maintien de la position de cette société, le juge des référés du Tribunal Judicaire compétent afin de solliciter la désignation d’un médiateur judicaire et solliciter la condamnation sous astreinte de la société EUROPE GAZ à ne pas couper la fourniture en gaz de l’immeuble. »

Il convient par ailleurs que le syndic adresse avec ce pouvoir les documents suivants : le procès-verbal de la dernière assemblée générale.

A réception de ces documents, un mail de retour vous sera envoyé pour définir dans les plus brefs délais d’une réunion en télétransmission avec l’avocat pour définir la stratégie.

C’est à vous de jouer, les minutes comptent !