Actualités de l'association (8754)

Détermination de l’usage d’un local avant 2024 : primauté de la loi ancienne au nom de la sécurité juridique

Catégories Juridictions
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation, AVIS du 10 avril 2025 Cour de cassation Pourvoi n° 25-70.002
Observations

Observation : apport d’un éclairage sur les conditions dans lesquelles des amendes civiles peuvent être appliquées dans le cadre des régulations des meublés de tourisme.
 

Principe retenu

Principe : Dans le cadre d’une amende civile prévue par l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation en raison d'un changement d'usage illicite intervenu avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024, la détermination de l'usage d'habitation du local doit s'effectuer à l'aune des critères de la loi ancienne. 

Analyse de la décision

Le changement d’usage d’un local d’habitation vers une activité de meublé de tourisme constitue un mécanisme encadré, soumis à autorisation préalable dans certaines communes. 
Lorsqu’il intervient sans respect de cette procédure, il peut donner lieu à des sanctions, notamment à l’amende civile prévue par l’article L. 651-2 du Code de la construction et de l’habitation.
L’entrée en vigueur de la loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024, dite « loi Le Meur », a modifié les critères permettant de déterminer si un local est à usage d’habitation, condition préalable à la caractérisation d’un changement d’usage illicite. 
Cette évolution législative soulève la question de son application dans le temps,  à laquelle la Cour de cassation a été amenée à se prononcer par un avis du 10 avril 2025. 

I.    La requalification du changement d’usage par la loi du 19 novembre 2024

Cette nouvelle loi modifie les conditions dans lesquelles un changement d'usage de locaux peut être sanctionné et élargit le champ de l’autorisation préalable pour les meublés de tourisme. 

Ainsi, en vue de renforcer les poursuites contre les changements d’usage illicites, celle-ci modifie les éléments à prendre en considération pour réputer un local à usage d'habitation. Pour ce faire, elle a notamment substitué à la seule date de référence du 1er janvier 1970, deux périodes d'une durée respective de sept et trente ans.
En l’espèce, un changement d’usage illicite avait été constaté dans le cadre de la location d’un bien meublé à une clientèle de passage. 

L’amende civile, prévue par l’article L. 651-2 du Code de la construction et de l’habitation, avait été sollicitée sur la base de ce changement d’usage. 

L’affaire met en lumière un dilemme juridique classique : celui de la rétroactivité des lois. 

A ce titre, le principe de non-rétroactivité des lois plus sévères, consacré par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, impose que la loi applicable soit celle en vigueur au moment des faits.

Il s’agissait donc de savoir si une telle législation plus sévère peut être appliquée aux faits antérieurs à son entrée en vigueur. 

II.    L’exclusion de la loi nouvelle pour les faits antérieurs : une application du principe de non-rétroactivité

La Cour de cassation souligne que la modification apportée par la loi Le Meur de 2024, affecte directement les règles de fond régissant les conditions dans lesquelles un bien peut être qualifié de changement d’usage illicite. 

Ce changement législatif a donc une portée substantielle, non seulement sur le fondement de l’action, mais également sur la sanction elle-même plus répressive, en augmentant l’amende civile encourue par les propriétaires de locaux ayant fait l’objet d’un changement d’usage illicite.

En ce sens, la Cour de cassation rappelle qu’une loi plus sévère ne pouvait s’appliquer rétroactivement aux faits antérieurs à son adoption, conformément à la règle de non-rétroactivité des lois plus sévères, et ce même en matière de sanctions civiles.

Par conséquent, l’amende civile devait être évaluée en fonction des règles applicables au moment des faits, et non en vertu des critères introduits par la loi nouvelle. 

Cette clarification apporte un éclairage sur les conditions dans lesquelles des amendes civiles peuvent être appliquées dans le cadre des régulations des meublés de tourisme. 
Par ailleurs, elle assure une meilleure sécurité juridique des propriétaires ayant agi conformément à la législation en vigueur avant cette réforme. 

FONDEMENTS JURIDIQUES : 

•    Tribunal judiciaire Paris 15 Janvier 2025 23/59258
•    loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024
 

Actu juridique

Actualité juridique - 29/04/2025

Ne pas confondre les annexes comptables 2 et 3

Le décret et l’arrêté du 14 mars 2005 imposent de joindre à la convocation d’assemblée générale approuvant les comptes de charges, cinq annexes comptables. Parmi ces documents, nous retrouvons deux an

L’interdiction de tout chevauchement de compétences entre le syndic des copropriétaires et une association syndicale libre (ASL)

Catégories ASL/AFUL/ Ensemble immobilier
Juridiction
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3,
Référence
9 mars 2023, 21-21.793, Inédit
Observations

 Les implications juridiques de l'inclusion de charges dues à une association syndicale libre dans le budget prévisionnel d'un syndicat des copropriétaires.

Principe retenu

Incompétence du syndicat des copropriétaires pour appeler les charges d’une ASL

Analyse de la décision

La coexistence entre un syndicat des copropriétaires et une association syndicale libre (ASL) peut susciter des interrogations juridiques quant à la répartition des charges et à la compétence de chaque structure.


Dans l’arrêt rendu la Cour de cassation précise les limites de l’intervention du syndicat lorsqu’il s’agit de financer des dépenses qui ne relèvent pas de son champ d’action.

I.    L’incompétence du syndicat des copropriétaires pour appeler des charges relevant d’une ASL 

Par souci de simplification, couramment, le syndic de copropriété se substitue aux copropriétaires afin de centraliser les appels de fonds émis par l’ASL. Il agit alors comme un intermédiaire, collectant lui-même les cotisations auprès des copropriétaires et en leurs noms, avant de reverser les sommes à l’association. 

Si cette pratique présente un certain confort administratif pour les copropriétaires, elle n’en reste pas moins contraire à l’article 3 de l’ordonnance du 1er juillet 2004, qui prévoit une obligation personnelle de chaque propriétaire vis-à-vis de l’ASL.

En effet pour rappel, selon l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, seuls les frais relatifs à la conservation, l’entretien et l’administration des parties communes peuvent être mis à la charge des copropriétaires. Les dépenses propres à l’ASL ne relèvent donc pas du budget du syndicat et ne peuvent y être intégrées. (Cass. 3e civ., 9 déc. 1998, n° 97-12.163)
Dans la présente affaire, des époux  étaient copropriétaires d’un lot situé dans une résidence, régie par un syndicat de copropriété, mais également intégrée à une association syndicale libre (ASL) chargée de la gestion d’équipements communs d’un ensemble immobilier.

En l’espèce, des copropriétaires contestent la validité d’une résolution d’assemblée générale approuvant des comptes intégrant des charges relevant d’une ASL, et demandent l’annulation des décisions corrélées. 

Leur recours repose sur une confusion opérée entre les obligations des copropriétaires à l’égard de l’ASL, d’une part, et celles imposées par le syndicat de copropriété, d’autre part. 

II. L’exclusion des charges de l’ASL des obligations du syndicat des copropriétaires 

L’introduction de charges étrangères à la copropriété dans le budget du syndicat nuit à la clarté des comptes et à la transparence de la gestion. Elle crée un amalgame entre deux régimes juridiques distincts, portant atteinte à la capacité des copropriétaires à apprécier la régularité des dépenses votées.

En l’espèce, les copropriétaires ont contesté l'approbation des comptes de la copropriété, en raison d'irrégularités comptables. Ils ont relevé que certaines dépenses étaient doublement mises à la charge des copropriétaires, à la fois dans le cadre du lotissement et de la copropriété Cette confusion comptable, validée à tort par la cour d’appel, a été sanctionnée par la Cour de cassation, qui a rappelé l’incompétence du syndicat à recevoir des fonds au nom d’une autre structure.

La résolution approuvant les comptes, fondée sur cette irrégularité, a donc été annulée, entraînant par effet de chaîne l’annulation d’autres résolutions dépendantes, telles que celle portant sur le quitus de gestion. 

De même, la création d’un fonds de travaux basé sur un budget incluant des charges de l’ASL a été jugée contraire à la loi.

En définitive, si la centralisation du recouvrement des charges par le syndic peut apparaître comme une solution pragmatique, elle s’avère incompatible avec le cadre juridique applicable. En intégrant les dépenses d’une association syndicale libre au budget du syndicat des copropriétaires, on dépasse les compétences de ce dernier, ce qui fragilise la légalité des résolutions adoptées en assemblée générale.