Face aux difficultés de recouvrement des provisions et charges des propriétaires, le syndic bénévole ou assimilé peut être tenté de déléguer cette tâche à une structure dédiée.
Outre la régularité de ce recours à un tiers au syndicat pour la gestion des impayés, c’est surtout la pertinence de cette prestation, qui prête à discussion, à l’image du contrat 2021/2022 proposé par la SOGERISQUES OUTRE-MER.
I. Contrat de recouvrement de la SOGERISQUES OUTRE-MER sur le recouvrement des créances du syndicat : une régularité contestable
Des sociétés spécialisées dans le recouvrement des créances s’attaquent désormais au marché juteux des arriérés de provisions et charges des propriétaires immobiliers.
C’est le cas d’une proposition 2021/2022 de l’entreprise antillaise Société de Gestion des Risques Clients Outre-Mer ou SOGERISQUES OUTRE-MER.
L’offre de SOGERISQUES OUTRE-MER sur les dettes des propriétaires consiste à :
- effectuer les diverses relances auprès des personnes défaillantes ;
- établir, en cas de besoin, des échéanciers selon la solvabilité des débiteurs ;
- encaisser les éventuels paiements et les reverser au syndicat dans le délai de 30 jours.
L’on peut dès lors s’interroger sur la légalité, pour une personne administrant un ensemble immobilier à titre non professionnel (syndic bénévole d’une copropriété ou président d’une A.S.L.), de recourir à cette entité extérieure pour pallier ses lacunes en la matière.
Il convient tout d’abord de distinguer le cas :
- d’une A.S.L. (Association Syndicale Libre) pour laquelle la régularité du remplacement de son président s’apprécie selon ses Statuts (art. 7 de l’ordonnance du 1er juillet 2004).
Autrement dit, le président peut faire appel à ce tiers pour cette prestation spécifique, dès lors que les Statuts de l’A.S.L. ne le proscrivent pas expressément et selon les modalités stipulées (par exemple : clause impliquant une autorisation préalable de son assemblée générale) ;
- d’un syndicat des copropriétaires, pour lequel ce recours est par principe interdit.
En effet, l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit, que le syndic est seul responsable de sa gestion de la copropriété, pour laquelle il ne peut se faire substituer.
Il existe néanmoins une dérogation. L’article 42 du décret du 17 mars 1967 dispose, qu’en cas de syndicat coopératif (syndic nommé par le conseil syndical et exerçant également sa présidence), son syndic peut confier l’exécution de certaines de ses tâches à une personne physique ou morale compétente et extérieure au syndicat.
II. Contrat de recouvrement de la SOGERISQUES OUTRE-MER sur le recouvrement des créances du syndicat : une pertinence discutable
Notre analyse porte sur une proposition de la SOGERISQUES OUTRE-MER établie en 2021 pour une année avec tacite reconduction, au profit d’une A.S.L. antillaise gérée par son président.
Si ce contrat ne se révèle pas irrégulier au regard des Statuts de l’association, son adéquation s’avère bien plus douteuse.
En effet, à y regarder de plus près, cette convention vise uniquement à procéder, en lieu et place du président, au recouvrement amiable des provisions et charges évoquées précédemment (relances, échéancier de paiement, encaissement et reversement) auprès des propriétaires d’un bien immobilier sur l’A.S.L.
Cette prestation, qui n’exige pas une aptitude étoffée, est bien évidemment effectuée moyennant une rémunération non négligeable de 20 % H.T. de la dette.
La pertinence de ce service est d’autant plus contestable, que ce professionnel du recouvrement des créances exclut conventionnellement :
- la vérification préalable de la légitimité de la créance réclamée par le syndicat et s’exonère de toute impossibilité de les récupérer.
Or, l’intérêt de recourir à une entreprise spécialisée résiderait bel et bien à ce que celle-ci contrôle a minima le caractère certain, liquide et exigible de la somme escomptée par le syndicat selon les pièces communiquées par le gestionnaire. De la sorte, cela éviterait les procédures amiables, voire judiciaires totalement vaines.
Consciente néanmoins de l’importance de cette étude initiale, SOGERISQUES OUTRE-MERC propose cette opération via une facturation annexe de 80 euros H.T./heure ;
- le volet judiciaire, soit l’atout majeur pour un administrateur bénévole de solliciter un spécialiste, afin de se dispenser des méandres de la voie contentieuse.
Bien évidemment, la SOGERISQUES OUTRE-MER ne peut ignorer les suites judiciaires d’un recouvrement amiable préalable improductif. Elle prévoit dans ce cas la conclusion d’un contrat additionnel et onéreux avec le syndicat créancier.
A titre d’exemple, cette société entend facturer à cette occasion 120 euros H.T. d’ouverture de dossier, une provision de 850 euros H.T. pour une assignation en paiement, susceptible de frais additionnels selon l’évolution de la procédure, etc.
Le syndicat, qui entend épauler par un professionnel, son administrateur bénévole dans le recouvrement des provisions et charges des propriétaires, doit prendre soin de contrôler avec minutie l’offre établie par ce spécialiste.
Il s’agit non seulement de vérifier la légalité de convention, mais aussi et surtout son intérêt et compétitivité. La plupart de ces propositions se contentent en effet d’une prestation de base inadaptée et de frais complémentaires prohibitifs.