L’analyse d’un procès-verbal d’assemblée générale peut recéler des pépites dues à l’incompétence des syndics professionnels.
En effet, ce document est généralement rédigé par le syndic en exercice, chargé du secrétariat de séance, conformément à la convocation, elle-même établie en principe par ses soins.
Le compte-rendu d’une assemblée générale rédigé par le syndic parisien STARES France mérite le détour.
I. Des résolutions manifestement illicites
La première irrégularité, de ce procès-verbal de l’assemblée générale du 29 juin 2022 de cette copropriété des Hauts-de-Seine établi par le syndic parisien STARES France selon la convocation rédigée et expédiée par lui, concerne la résolution n°4 :
S’il ne s’agit pas d’une illégalité majeure, elle n’en demeure pas moins contraire aux textes.
Ce texte souligne, que chaque copropriétaire peut aller contrôler les pièces justificatives de charges auprès du syndic, entre la notification de la convocation et la tenue de l’assemblée.
Pour autant l’article 9-1 du décret du 17 mars 1967 (modifié par un décret du 27 juin 2019) précise, qu’il appartient au syndic de déterminer les modalités d’accès à ces documents.
Les seules contraintes supportées par le syndic en exercice sont de :
- les mettre à disposition des copropriétaires au moins un jour ouvré ;
- rappeler les conditions de cette vérification dans la convocation de l’assemblée.
Autrement dit, l’assemblée générale n’est plus en mesure de délibérer sur les modalités de ce droit individuel, mais uniquement d’en prendre connaissance dans la convocation.
Or, dans cette assemblée a bel et bien voté ces modalités, conformément à la question portée à son ordre du jour par le syndic la société STARES France.
La seconde irrégularité concerne des travaux d’entretien des parties communes (réfection intégrale des sols vétustes de certains étages des bâtiments).
Le syndic concède à cette assemblée d’opter pour leur financement par l’intégration de cette dépense dans le budget prévisionnel, et ce, sur celui de l’année 2021.
Cette approche est doublement illicite, dans la mesure où :
- une résolution d’assemblée ne peut pas rétroagir, autrement dit, une décision de 2022 ne peut pas modifier celle approuvée antérieurement (2020 ou 2021) ;
- les travaux d’entretien relèvent d’un budget et d’appels spécifiques (art. 14-2 de la loi et 44-1 et 2 du décret) et non du budget prévisionnel de fonctionnement (art. 14-1 et 45 du décret).
Le budget prévisionnel ne pourrait contenir que la reprise partielle d’un ou plusieurs morceaux du dallage des sols, mais nullement la réfection globale de ceux-ci, comme en l’espèce.
La troisième non-conformité, adoptée par l’assemblée selon la proposition de la société STARES France, porte sur la température des appartements générée par le chauffage collectif.
La résolution n° 19 décide de la fixer à 21°C en journée et 19°C la nuit.
Si l’on peut parfaitement comprendre que des copropriétaires souhaitent une température plus élevée pour des considérations de bien être, ils ne doivent pas pour autant enfreindre de prescriptions impératives.
En l’occurrence l’article R 421-26 du Code de l’énergie prévoit, comme température moyenne supérieure des locaux d’habitation, 19°C.
II. Des résolutions juridiquement litigieuses
Outre les illégalités explicites, ce procès-verbal comporte d’autres mentions juridiquement douteuses, à savoir :
La première concerne la désignation du syndic par le syndicat des copropriétaires qui suppose :
- que celui-ci n’ait pas un mandat en cours expirant plus d’un an après cette réunion ;
- que sa proposition de contrat soit annexée à la convocation (art. 11 du décret) ;
- aussi et surtout l’adoption de la question selon un vote favorable des copropriétaires réunissant en première lecture la majorité des voix du syndicat (art. 25 de la loi).
Cela se corse par la suite, puisque la société STARES France précise disposer d’un mandat en cours : « de septembre 2021 au 30 juin 2023 », n’impliquant pas de vote sur sa nomination : « sans objet ».
La seconde initiative juridiquement critiquable est relative au fonds de travaux obligatoire du syndicat des copropriétaires.
L’article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 impose, en principe, à tout syndicat de se doter d’une réserve destinée à financer des réfections de l’immeuble (parties communes ou équipements collectifs), qui seront soumises à l’approbation d’une prochaine assemblée.
Cette disposition légale précise que ce fonds est d’un montant annuel minimal de 5 % du budget prévisionnel. Autrement dit, il appartient à l’assemblée de se prononcer souverainement sur la fixation d’un seuil éventuellement supérieur au minimum légal.
La société STARES France ne l’entend pas ainsi, puisqu’il n’a laissé aucun choix aux copropriétaires.
En effet, cette résolution correspond à un simple point d’information (aucun vote possible) sur la dotation de 5 % du fonds travaux du syndicat pour l’année 2023.
Enfin, la résolution n° 21 est plus que suspecte.
Son caractère apparait tout d’abord ambigu dans la forme, puisque la question a fait l’objet d’une délibération, alors qu’il aurait été préférable de la présenter sous forme de résolution sans vote.
Autrement dit, la société STARES France aurait dû se contenter d’un rappel aux obligations des copropriétaires et résidents de se conformer au règlement de copropriété (art. 9 de la loi).
De plus, ce syndic semble ignorer que l’article 18 de la loi lui attribue, entre autres, pour mission de veiller au respect du règlement de copropriété.
Il lui appartient donc de rédiger toute circulaire en ce sens et la diffuser auprès des copropriétaires et résidents (affichage sur place pour les locataires), sans avoir à recourir à une décision de l’assemblée ou à tout tiers.
L’article 26 du décret dispose, que l’ordre du jour de l’assemblée générale doit être établi en concertation entre le syndic et le conseil syndical.
Il est primordial pour cet organe collégial de contrôler en amont le projet envisagé par le syndic, afin de corriger les éventuelles illégalités, limitant ainsi les contestations ultérieures de copropriétaires opposants ou défaillants.
En effet, si le président de séance jouit d’un pouvoir d’amendement, cela s’entend de la reformulation d’une question ambiguë ou irrégulière inscrite à l’ordre du jour.
En revanche, cela ne l’autorise nullement à la dénaturer (opérer une modification fondamentale telle que la transformer d’un point d’information en question soumise à vote) ou encore de compléter l’ordre du jour notifié aux copropriétaires (rajouter une question ne figurant pas dans la convocation).