Si certaines notes d’honoraires de syndics professionnels ne se révélaient pas illégales, leur objet pourrait prêter à rire et/ou à féliciter son auteur pour son ingéniosité.
Une facture du 4 octobre 2023 du cabinet COLBERT-LE BRUN constitue un joyau dans ce domaine.
I. - Une visite de voisinage illicite facturée
Une résidence francilienne doit effectuer le ravalement de son mur pignon.
L’absence de retrait de cet immeuble par rapport au pavillon mitoyen implique d’installer sur cette parcelle contiguë un échafaudage.
Le propriétaire impacté doit dans ce cas une servitude dite de « tour d’échelle ». Cela signifie son obligation de faciliter l’accès à son terrain, lorsqu’elle constitue la seule solution technique pour l’exécution des travaux de conservation du bâti (CA Versailles, 7 janvier 2021, n° 20 – 01834).
En contrepartie de cette occupation précaire, le fonds servant (celui qui la supporte) peut prétendre du fonds dominant (le bénéficiaire) une réparation financière du préjudice généré.
FONCIA COLBERT-LE BRUN, syndic de cette résidence, se rend sur place afin de discuter avec le propriétaire des modalités de présence de cet équipement sur le terrain. Il établit alors une note d’honoraires au syndicat des copropriétaires de 165 € T.T.C. en date du 4 octobre 2023.
Est-ce qu’un syndic peut prétendre à des honoraires additionnels du syndicat pour sa contribution aux travaux d’entretien hors budget prévisionnel de fonctionnement, ce qui inclut le ravalement de façade ?
L’article 18-1 A de la loi du 10 juillet 1965 répond par l’affirmative.
La vacation de ce cabinet se conforme-t-elle aux prescriptions de cette loi ?
Il nous faut, dans ce cas, répliquer par la négative.
En effet, elle conditionne ces honoraires supplémentaires du syndic à leur approbation en assemblée générale :
- par une question spécifique ;
- déterminés en un pourcentage du montant hors taxe des travaux, et ce, de manière dégressive.
Or, en l’espèce, FONCIA COLBERT-LE BRUN ne fait référence à aucune résolution d’assemblée générale et applique, ce qui apparait comme une vacation horaire pour les prestations particulières (tâches hors forfait de base), résultant probablement de son contrat de mandat.
Or, cette somme ne peut concerner que des interventions déterminées, à l’exclusion justement de ses honoraires pour le suivi des travaux.
II. - La majoration optionnelle du tour de voisinage illégale et abusive
De plus, cette facturation du syndic FONCIA COLBERT-LE BRUN comporte deux clauses pénales, soit la fixation conventionnelle d’une indemnisation en cas de défaillance du cocontractant.
En l’occurrence ce syndic concède un délai de 27 jours pour le règlement de sa note d’honoraires, et dans le cas contraire une majoration de 10 % au titre du retard de paiement et 10 % supplémentaires pour frais de recouvrement :
Ce doublon se révèle juridiquement illégitime.
Il appartient au syndic d’assurer la gestion de la résidence (art. 18 de la loi), qui comprend, entre autres, le règlement des cocontractants du syndicat (ce qui inclut donc ses honoraires), prestation relevant au demeurant de son forfait de base (point III de l’annexe du décret du 26 mars 2015).
Or, FONCIA COLBERT-LE BRUN prétendrait en l’espèce, imputer des frais supplémentaires au syndicat s’il manquait à son obligation de payer sa propre note d’honoraires.
Cette approche contrevient à l’adage juridique selon lequel « nul ne peut tirer profit de sa propre turpitude ».
De même, si ce cabinet escompte justifier ces frais par un incident de trésorerie du syndicat, en raison du défaut de paiement par les copropriétaires de leurs provisions et charges, il nous faut, là encore, lui souligner que le recouvrement, amiablement ou judiciairement, de ces sommes lui incombe.
Enfin, il est manifestement excessif d’appliquer 20 % supplémentaires sur une facture de 165 € pour un simple retard de règlement, soit un montant de 198 € à la charge du syndicat des copropriétaires.
Il convient de rappeler au groupe FONCIA le cadre juridique de ses honoraires travaux. Dans l’hypothèse d’une facturation illicite imputée dans les comptes clos du syndicat, les copropriétaires se devraient de la rejeter en assemblée générale.