Abus 4993 SOGIRE : un syndic professionnel qui devrait aussi demander un almanach au Père Noël

21/12/2023 Abus Abus

Comme nous l’évoquions dans un précédent abus n° 4991 sur le cabinet L.L.D.S., l’administration régulière d’une copropriété requière pour le syndic de bénéficier d’un mandat. Tout comme son confrère, SOGIRE ne s’encombre pas de ces futiles détails juridiques. 

I. Nécessité d’un mandat pour convoquer régulièrement une assemblée générale

SOGIRE convoque les copropriétaires d’une résidence vendéenne à leur assemblée générale annuelle fixée au 27 octobre 2023, destinée entre autres à se prononcer sur le renouvellement de son mandat. 

Chose pour le moins surprenante, le projet de résolution sur cette question prévoit une prise d’effet rétroactive à la tenue de l’assemblée générale, soit au 21 mai 2023.

Que traduit cette présentation ?

Un mandat de syndic expiré à la date de la tenue de l’assemblée générale. En effet, la fonction du cabinet SOGIRE résulte de la résolution n° 7-1 de l’assemblée générale du 2 décembre 2021, le nommant pour une durée de 18 mois avec une échéance au 22 mai 2023.

Cette formulation se révèle-t-elle licite ?

La jurisprudence souligne, que les résolutions des assemblées générale prennent effet au plus tôt au jour de sa tenue, Cass 3e civ. 9 juin 2010, n°08 - 19696.

La rétroaction, par l’assemblée générale, d’un mandat de syndic s’avère donc proscrite, CA Paris, 4 octobre 2017 n° 15 - 09721.

Autrement dit, le mandat de SOGIRE peut prendre effet au plus tôt le 27 octobre 2023, jour de l’assemblée générale, et aucunement antérieurement à celle-ci, comme en l’espèce au 21 mai 2023.

Il est pour le coup logique que des copropriétaires soient dans l’incapacité de décider de l’application d’une résolution à une date totalement révolue, sauf à pouvoir voyager dans le temps !

Il est à noter, que SOGIRE est coutumier du fait, sa précédente désignation par l’assemblée générale du 2 décembre 2021 comportant également une prise d’effet rétroactive au 22 novembre 2021.

Quelle est la conséquence de cette assemblée générale convoquée par un syndic sans mandat ?

Comme nous le soulignions pour son collègue L.L.D.S., l’assemblée générale, notifiée par un syndic dépourvu de mandat, encourt tout bonnement la nullité dans son ensemble.

Cette sanction implique une action engagée par un copropriétaire opposant ou défaillant dans le délai de deux mois suivant l’expédition du procès-verbal par le « syndic » selon l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, Cass. 3e civ. 30 janvier 2007, n° 05 - 19475.

II. Nécessité d’un mandat pour procéder aux appels de charges auprès des copropriétaires

L’illégalité de l’assemblée générale s’explique par l’incapacité d’un syndic professionnel à exercer le moindre acte de gestion, dès lors qu’il ne dispose plus d’un mandat.

SOGIRE ne peut donc plus recouvrer les provisions et les charges courantes, voire exceptionnelles (travaux) à l’égard des copropriétaires, au-delà de son mandat.

Ce cabinet commet pourtant un double impair, puisqu’il réclame à des copropriétaires la régularisation des charges de l’exercice, en l’absence :

  • de mandat de syndic ;
  • d’approbation préalable des comptes du syndicat par l’assemblée générale. Or, les charges ne sont dues par les copropriétaires qu’après adoption des comptes clos du syndicat en assemblée générale (art. 14-3 de la loi), Cass 3e civ. 21 novembre 2006, n° 04 - 20473.

 

Cela revient à dire, que si ce syndic, sans mandat, assigne un copropriétaire débiteur en paiement, le juge civil écartera sa demande, puisqu’il ne représente plus légalement le syndicat créancier, Cass 3e civ. 21 novembre 2006, n° 04 - 20473.

Un syndic ne se confond pas avec un prestidigitateur. Il ne peut ni remonter le temps sur mon mandat, ni modifier la date et la condition d’exigibilité des charges par les copropriétaires.

Outre les solutions licites pour doter le syndicat d’un syndic, évoquées dans notre précédent abus, il nous faut insister sur un point crucial, celui de la prescription de l’action en annulation de l’assemblée générale illégale.

A défaut d’une procédure en nullité introduite par un copropriétaire opposant ou défaillant dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal, l’irrégularité s’en trouve purgée.

Autrement dit, passé ce délai, l’illicéité ne peut plus être dénoncée.