Le recouvrement amiable ou judiciaire des impayés de copropriétaires peut impliquer des frais supplémentaires à leur charge, afin de les sanctionner ainsi que le coût des initiatives du syndic. Il appartient néanmoins à ce dernier, poursuivant ces sommes additionnelles, d’attester de leur effectivité et licéité. Dans la négative, le juge civil écarte les frais indument facturés par le syndic, dixit le cabinet ATRIUM GESTION dans un jugement du 11 octobre 2021 du tribunal judiciaire de Nanterre.
I. Frais de recouvrement : seules les sommes licites sont dues
ATRIUM GESTION assigne une copropriétaire débitrice de provisions et charges, puisqu’il lui appartient d’obtenir (amiablement ou judiciairement) ces montants, en sa qualité de représentant légal du syndicat administrant l’immeuble (art. 18 de la loi du 10 juillet 1965). Outre ces arriérés, ce cabinet réclame de la juridiction civile la condamnation aux frais complémentaires de recouvrement affectés.
En l’espèce, se pose une double problématique juridique :
- la première sur la capacité du syndic à poursuivre l’action judiciaire pour ses frais annexes, la copropriétaire procédant en cours d’instance au paiement de ses arriérés de provisions et charges ;
- la seconde sur l’étendue des frais du syndic, leur légitimité étant contestée par la copropriétaire ;
La réponse juridique sur le premier point se révèle assez simple. La jurisprudence reconnait au syndic la faculté de maintenir ses prétentions accessoires, malgré la disparition de la dette principale, Cass. 3e civ. 7 décembre 2017, n° 16 - 23313.
En ce qui concerne la seconde interrogation, elle s’avère légèrement plus complexe du fait d’une rédaction légale imprécise, dont les syndics professionnels essaient de tirer profit.
Selon l’article 10-1 de la loi, le copropriétaire est redevable des frais nécessaires au recouvrement, à compter de la mise en demeure, celle-ci comprise. Il souligne, qu’ils comprennent notamment :
- la relance ultérieure ;
- a prise d’hypothèque ;
- les émoluments de commissaire de justice (nouvelle désignation de l’huissier) ;
- le droit de recouvrement et d’encaissement.
Il est néanmoins juridiquement inexact de prétendre à une liberté absolue des syndics en la matière. Le décret du 26 mars 2015 vient compléter l’article 10-1 en fixant restrictivement les tâches facturables dans ce domaine et les conditions réglementaires imposées.
Dans tous les cas, le juge civil demeure l’autorité souveraine pour apprécier la régularité des montants imputés.
Autrement dit, il peut parfaitement écarter des frais du syndic, qu’il considère soit :
- non conformes à l’énonciation réglementaire ;
- abusifs, ce qui s’entend de relances équivalentes pour une dette identique.
En l’occurrence le juge civil exclut des frais appliqués par ATRIUM GESTION, au motif qu’ils :
- constituent un doublon ;
- ne respectent pas une exigence réglementaire.
Le décret précise entre autres, que les frais du syndic pour transmission de dossier à l’auxiliaire de justice et/ou de suivi auprès de l’avocat ne sont dus qu’en présence de diligences exceptionnelles de sa part.
Cela correspond par exemple au recours à un commissaire de justice à l’égard d’un débiteur résidant à l’étranger ou de suivi d’un contentieux de saisie immobilière de son lot.
En l’espèce, le domicile de cette copropriétaire se situe en France et l’objet de la demande consiste en une action ordinaire de condamnation en paiement.
II. Frais de recouvrement : la charge de la preuve incombe au syndic
Cependant, quelle que soit la nature de la somme souhaitée, le requérant doit en démontrer sa matérialité (art. 9 du Code de procédure civile). En l’espèce, ATRIUM GESTION se contente d’invoquer certains frais sans pouvoir apporter la preuve écrite correspondante (édition de la relance et sa présentation à la débitrice). Le magistrat écarte à juste titre cette créance juridiquement injustifiée.
La juridiction civile concède en définitive à ALTRIUM GESTION, au titre des frais nécessaires au recouvrement, 624,20 € sur les 3.709,70 € escomptés, soit près de six fois moins que les seuils facturés.
Cette décision, conforme à la jurisprudence constante, révèle la profusion des irrégularités des cabinets sur ce point et leur annulation légitime dans le cadre d’une procédure judiciaire.