Les Certificats d'Économies d'Énergie (CEE) sont un dispositif mis en place par l'État français pour encourager les économies d'énergie et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Les fournisseurs d'énergie sont tenus par l'État de faire réaliser des économies d'énergie à leurs clients. Pour prouver qu'ils ont bien réalisé ces économies, les fournisseurs d'énergie doivent obtenir des CEE qui correspondent à une quantité d'énergie économisée.
Pour les particuliers, les CEE permettent de faire baisser le montant des travaux soit directement dans le devis soit au travers d’une prime versée par un fournisseur d’énergie ou par un délégataire CEE.
Comme l’Etat ne contrôle pas directement le versement des CEE, de nombreux abus ont été mis en place de la part des entreprises qui n’hésitent pas à démarcher directement les copropriétés via leur syndic.
I - Les arnaques liées aux CEE
Certains travaux peuvent être subventionnés à 100% par les CEE, ce qui permet aux entreprises de présenter cela comme un plan 100% gagnant pour la copropriété et surtout sans risques.
En effet, dans les cas que nous avons constatés, les CEE étaient déjà intégrés dans les devis, la copropriété n’a donc aucune somme à débourser.
Mais, même si la copropriété ne débourse rien pour ces travaux, des risques existent malgré tout de signer ces devis sans vérification :
- Les travaux présentés ne sont parfois pas nécessaires car ils n’apportent aucune amélioration. Si en plus les travaux sont mal réalisés, la copropriété se retrouve au final dans une situation moins intéressante qu’au départ.
- Il n’est pas possible de bénéficier de CEE sur un poste travaux si vous en avez déjà bénéficié pour le même poste récemment. Par exemple, si les CEE ont financé votre nouvelle chaudière, il faudra attendre pour en bénéficier pour installer une pompe à chaleur. Il faut donc réfléchir à la nécessité des travaux proposés avant de les voter.
- Ces abus ou arnaques profitent à des entreprises peu compétentes au détriment des finances publiques. S’ils prolifèrent, cela aboutira à leur disparition.
Le gouvernement a d’ailleurs annoncé récemment que des sanctions ont été prises à l’encontre de grandes entreprises qui ont bénéficié des largesses dans les contrôles réalisés.
Il ne faut cependant pas constamment repousser les CEE mais il faut faire preuve de réflexion et respecter une certaine démarche :
- Déterminer si les travaux proposés sont utiles à la copropriété. Si oui, voir s’ils ne peuvent pas être intégrés dans un programme de rénovation globale afin de bénéficier également de MaPrimeRénov’.
- Vérifier le contenu des devis et exiger qu’ils soient précis (nature et quantité des matériaux utilisés notamment).
- Même si les travaux sont à 0 €, ces derniers doivent être votés en assemblée générale.
Il est conseillé de présenter plusieurs devis à cette assemblée générale : la mise en concurrence permet de voir si d’autres entreprises proposent ces travaux pris en charge à 100% et généralement une entreprise qui ne fait pas de démarchage est plus compétente.
II - Quelques exemples actuels
L’exemple le plus connu des travaux entièrement pris en charge est le calorifugeage qui consiste à isoler les canalisations de chauffage. En 2022, le niveau d’isolation nécessaire a augmenté et avant que les modifications soient effectives, les entreprises ont démarché bon nombre de copropriétés donc certaines avaient déjà du calorifugeage très performant.
Aujourd’hui encore des copropriétés sont régulièrement contactées pour cela. Si la copropriété n’a pas de calorifugeage ou si celui-ci est abimé, cette prestation est intéressante mais nous vous conseillons de demander l’avis de votre chauffagiste avant de signer ces travaux.
Plus récemment, l’Etat a mis en place un coup de pouce CEE jusqu’à la fin 2024 pour l’installation de thermostats en prévision de l’obligation d’en installer dans chaque logement d’ici 2027. Des entreprises se sont engouffrées dans ce nouveau marché en proposant des appareils de piètre qualité.
Constatant l’échec de la mesure, le gouvernement a supprimé la bonification liée à leur installation.
Le dernier exemple est de loin celui avec le plus de conséquences. La fiche BAR-TH-145 finance les projets de rénovation globale selon le gain énergétique théorique réalisé.
Cette fiche CEE est normalement utilisée en complément de MaPrimeRénov’ mais elle est ici utilisée seule et les entreprises annoncent des travaux à plus de 100 000 € entièrement remboursés.
Un projet de rénovation globale demande normalement une longue préparation avec l’aide d’une maîtrise d’œuvre et d’une assistance à maitrise d’ouvrage alors qu’ici les entreprises demandent de signer des devis alors qu’elles n’ont même pas réalisées de diagnostic technique global (DTG) ou d’audit énergétique.
Le montant de la subvention dépend du gain énergétique mais généralement les entreprises proposent un devis entièrement pris en charge avant même de fournir une analyse énergétique. Pour rappel, le gain énergétique doit être calculé selon la méthode 3CL du diagnostic de performance énergétique (DPE) qui nécessite l’accès à la chaufferie et à plusieurs appartements ce qui n’est généralement pas fait ici.
Dans les cas rencontrés, nous constatons que la rénovation globale consiste uniquement en une rénovation de la chaufferie à laquelle on rajoute un poste mineur comme l’isolation des plafonds des caves par exemple.
Le gain énergétique est largement gonflé pour permettre un financement à 100% de ces travaux. Les bureaux d’études associés nous sont toujours inconnus et la plupart du temps créés très récemment (voir n’existent déjà plus au moment de la signature du devis).
Devant l’ampleur de ces abus, le gouvernement a supprimé cette fiche pour la remplacer par une autre dont le montant est plafonné. Cependant, les copropriétés peuvent encore en bénéficier si elles votent les travaux en assemblée générale avant le 1er janvier 2025.
C’est pourquoi des syndics sollicités par des entreprises cupides forcent des copropriétés pour organiser des assemblées générales de manière anticipée pour voter ces travaux en urgence.
Devant le manque d’informations et des devis très alléchants, de nombreuses copropriétés risquent de signer dans l’urgence des travaux de rénovation de leur chaufferie et risquent de se retrouver avec des équipements mal installés.
Cet empressement empêche également les copropriétaires de réfléchir à des solutions plus vertueuses comme par exemple le raccordement à un réseau de chaleur qui peut s’avérer obligatoire dans certains cas.