Outre sa rémunération de base, le syndic peut prétendre à des honoraires pour des prestations particulières. Néanmoins, cette rémunération complémentaire n’est pas indéfinie quant aux tâches et montants exigibles par le syndic au syndicat, voire aux copropriétaires pris individuellement. L’appât du gain conduit de nombreux cabinets à enfreindre le cadre légal, à l’occasion notamment de la cession d’un lot par un copropriétaire, dixit ARCHIGESTIM et A.S.L. immobilier.
I. Facturation illicite du « pré état daté » et de l’actualisation de l’état daté
Deux résidences franciliennes sont concernées par la mutation de lots, la première gérée par le syndic ARCHIGESTIM (déjà épinglé récemment par l’ARC, n° 5137), la seconde par A.S.L. immobilier.
En ce qui concerne ARCHIGESTIM, un copropriétaire effectue la vérification annuelle des comptes clos du syndicat présentés pour adoption en assemblée, conformément à l’article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965. Il sollicite le Grand livre comptable et constate de nombreuses imputations associées à l’aliénation par deux copropriétaires de leur lot. Il s’interroge sur leur régularité, en raison non seulement de leur multitude, mais également de leur intitulé ambigu.
Il s’agit entre autres d’honoraires du syndic supportés par le cédant numéro :
- 1 de « pré état daté » de 338,40 €, de « mutation » de 337,27 €, soit un total de 675,67 € ;
- 2 de « mutation » de 337, 27 € et de « mise à jour vente » de 179,40 €, soit un solde de 516,67 €.





Ces facturations se révèlent illicites sur plusieurs points.
A l’occasion du transfert onéreux d’un lot (signature de l’acte authentique définitif), l’article 10-1 de la loi ne prévoit qu’un seul document impérativement complété par le syndic et transmis au notaire du copropriétaire vendeur, l’état daté, précisant sa situation financière à l’égard du syndicat. La pratique consistant, lors de la conclusion du compromis, à adresser un premier état financier du vendeur « pré état daté » constitue une invention de certains professionnels de l’immobilier, sans aucune légitimité et caractère contraignant, CA Versailles, 25 octobre 2022, n° 21 - 01238
De plus, s’il appartient au syndic de stipuler, dans son contrat de mandat, le montant dû par le vendeur (point 9.2. du décret du 26 mars 2015), celui-ci ne peut excéder la somme réglementaire de 380 € T.T.C. (art. 1er du décret du 21 février 2020).
Enfin, l’éventuelle actualisation de l’état daté s’avère irrégulière, l’article 10-1 de la loi autorisant une seule facturation par cession. La mise à jour de ce formulaire, en raison d’un report par le notaire de l’acte authentique définitif, ne peut donner à une quelconque indemnité supplémentaire du syndic.
Or, tout comme ARCHIGESTIM, son confrère A.S.L. immobilier affecte à nouveau, sur le compte du copropriétaire vendeur d’un parking, une seconde note d’honoraires de 380 €, du fait du renvoi de la date de signature de l’acte authentique définitif par le notaire. Autrement dit, pour la cession d’une place de stationnement à 8.000 €, ce cabinet exige du vendeur 760 €, ce qui équivaut à 9,5 % du prix de la transaction, soit plus que les honoraires d’un notaire et d’un agent immobilier.


Comme démontré ci-dessus, l’argumentaire de la gestionnaire, pour justifier ce doublon, est juridiquement infondé. De plus, ces cabinets disposent d’une solution évidente, pour contourner cette prétendue surcharge de travail, éditer l’état daté la veille de la date prévisionnelle de conclusion de l’acte authentique définitif.
Cette option tardive s’avère aisément envisageable, ce formulaire résultant essentiellement d’une simple extraction de données informatiques précédemment saisies lors du :
- vote du budget et des comptes clos du syndicat en assemblée (art. 14-1, 14-2, 14-3 de la loi du 10 juillet 1965) ;
- règlement par le copropriétaire de ses provisions et charges communes exigibles.
Ainsi tout report par le notaire, communiqué obligatoirement et préalablement au syndic, permettra à son comptable de ne pas effectuer antérieurement cette formalité inutilement.
II. Imputation irrégulière de frais de photocopie et de délivrance du certificat de l’article 20
A l’occasion de la cession de ces deux lots, ARCHIGESTIM ne se contente pas de facturer aux copropriétaires concernés des honoraires de « pré état daté », d’état daté et son actualisation. Il impute également au cédant des frais de tirage et de diffusion de ces documents.





Le point 7.2.1 du décret du 26 mars 2015 permet au syndic de requérir les frais d’affranchissement ou d’acheminement associés à leurs prestations particulières d’aliénation des lots. En revanche cette disposition réglementaire ne concède pas au syndic d’honoraires additionnels d’impression.
Enfin, ARCHIGESTIM facture également la délivrance du certificat de l’article 20 - II de la loi du 10 juillet 1965 aux vendeurs, trame confirmant leur absence de toute dette à l’égard du syndicat.


Ces imputations se révèlent illégales, car elles constituent des tâches ordinaires du syndic comprises dans sa rémunération de base (arrêts n° 390465 et 390491 du 5 octobre 2016 du Conseil d’Etat).
Le copropriétaire vendeur doit exhorter son syndic à annuler toute facturation illicite et/ou abusive. Pour ce faire, il peut lui expédier une mise en demeure (LRAR) par laquelle il exige cette suppression dans un délai déterminé. Et d’y souligner dans la négative, qu’il encourt, ainsi que son assurance de responsabilité civile (en copie de la missive et dont les coordonnées figurent dans son contrat de mandat), une action judiciaire civile visant à leur condamnation à indemniser son préjudice.