Au détour d’une consultation juridique, une pièce communiquée peut se révéler particulièrement déconcertante. En l’espèce, il s’agit du procès-verbal d’une assemblée générale du 30 octobre 2025 rédigé par le cabinet MANDA sur la base d’une convocation établie également par ses soins, en tant que syndic d’une résidence parisienne.
I. Constitution litigieuse du conseil syndical
Cette assemblée doit notamment désigner son conseil syndical, conformément à l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965. Pour ce faire, MANDA porte à son ordre du jour, les questions et leur projet de résolution correspondant (art. 13 et 11 al. 7 du décret du 17 mars 1967)

Ces décisions se révèlent néanmoins juridiquement suspectes pour divers motifs.
Les conseillers syndicaux doivent en principe être désignés personnellement et individuellement. Si la jurisprudence admet exceptionnellement l’élection en bloc du conseil syndical, elle conditionne cette dérogation à l’adéquation des candidats au nombre de postes imposé par le règlement de copropriété, CA Paris, 1ère ch. G, 7 mai 2003, n° 2001 - 18208. Cette condition n’apparait pas réunie dans le cas présent, puisque la nomination, selon la trame de MANDA, prévoit à la fois un vote groupé (résolution n° 10.1), puis individualisé (10.2 et 10.3).
Une telle irrégularité expose la constitution du conseil syndical à son annulation judiciaire poursuivie par tout copropriétaire opposant, défaillant ou assimilé dans les deux mois de notification de son procès-verbal (art. 42 al. 2 de la loi du 10 juillet 1965). Autrement dit, le manque de rigueur de ce cabinet risque de priver le syndicat d’un organe essentiel au bon fonctionnement de l’immeuble.
Enfin, si l’assemblée élit une société (civile ou commerciale) au conseiller syndical, la résolution devrait indiquer la personne physique la représentant légalement ou statutairement à cette fonction.
II. Modification douteuse d’une grille de charges communes
Cette assemblée soumet un changement de la répartition des charges communes de chauffage, en raison du souhait de désolidarisation de certains lots de cet équipement collectif.


Là encore, cette décision s’avère juridiquement hasardeuse, dans la mesure où l’approbation d’une modification d’une grille de charges communes par l’assemblée :
- relève de l’unanimité des voix du syndicat (art. 11 de la loi du 10 juillet 1965) et non de celle absolue (art. 11 de la loi du 10 juillet 1965). L’analogie dérogatoire de majorité évoquée, par le bailleur social, s’entend de la création d’un service collectif, par le syndicat et donc de l’adoption par l’assemblée, à la même majorité, de l’avenant au règlement de copropriété fixant la nouvelle grille de charges communes nécessaire, TGI Paris, 25 novembre 1994, Pollet/SDC 198 rue St Jacques. Or, cette situation ne correspond pas au cas présent, à savoir la volonté de certains lots de se dissocier d’une installation collective ;
- implique, par la même occasion, l’acceptation d’une trame d’avenant au règlement de copropriété jointe à sa convocation (art. 11 al. 6 du décret du 17 mars 1967).
III. Autorisation contestable d’une saisie immobilière
Si le syndicat ne parvient pas à exécuter une condamnation ordinaire en paiement d’un copropriétaire débiteur, le créancier lésé peut requérir la vente forcée du ou des lots du contrevenant.
L’article 11 al. 11 du décret exige alors de l’assemblée de se prononcer, sur :
- le principe de l’adjudication judiciaire du ou des lots ;
- le montant de la mise à prix du ou des lots ;
- la somme considérée comme définitivement perdue (injustifiée ou prescrite) par le syndicat
En l’espèce, MANDA propose la saisie immobilière de six lots d’un copropriétaire défaillant.

L’approche envisagée par ce cabinet se révèle juridiquement problématique, en ce qui concerne la fixation du prix de cession, puisque pour une dette s’élevant en définitive à 43.984,73 € [57.386,87 - 13.402,14 € (impayé irrecouvrable)], il établit pourtant ce seuil à 400.000 €.
Outre le fait qu’en l’absence de surenchère, le syndicat se retrouve propriétaire des biens et devoir en conséquence payer les 400.000 €, le ratio envisagé contrevient aux principes fondamentaux de recouvrement d’un arriéré. Le poursuivant doit effectivement justifier judiciairement du caractère certain, liquide et exigible de sa créance, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce.
IV. Vente discutable d’un bien immobilier du syndicat des copropriétaires
Le syndicat a la faculté de céder un de ses biens, ce qui suppose de l’assemblée une décision :
- soumise à la double majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- convenant du montant et de son acquéreur.
La présentation de MANDA sur ce projet comporte des irrégularités.
Une résolution d’assemblée constitue, non pas un contrat avec une clause suspensive ou résolutoire, mais un choix précis et contraignant de son organe souverain décisionnaire. Le syndicat ne peut en conséquence se cantonner régulièrement à des termes vagues (montant plancher, acquéreur inconnu), contradictoires et incompréhensibles (vente effective, sauf si offre supérieure à 5.889 €/m2 nécessitant un entérinement par qui ? L’assemblée semble-t-il).
De plus, l’article 16-1 al. 2 de la loi oblige le syndic à reverser immédiatement aux copropriétaires bénéficiaires leur quote-part de cette transaction, dès obtention de cette somme par le notaire. Ce produit ne peut légitimement être défalqué des dépenses collectives, comme le prévoit ce cabinet.
Ces approximations juridiques sur l’assemblée soulignent l’importance de la :
- concertation entre le syndic et le conseil syndical dans l’établissement de son ordre du jour ;
- fonction du président de séance, garant de sa tenue régulière et disposant à ce titre d’un pouvoir d’amendement de toute question et/ou son projet de résolution ambigu ou illicite, avant de la soumettre au vote des copropriétaires. Outre cette modification, le président peut parfaitement écarter toute délibération sur une proposition insusceptible de correction.
Ces précautions juridiques visent à préserver le syndicat contre l’annulation judiciaire de décisions illégales poursuivie par tout copropriétaire opposant, défaillant ou assimilé.