Abus 5167 : Un procès-verbal d’assemblée générale produit par le Syndic MANDA qui ne laisse pas indifférent

07/11/2025 Abus Abus

Au détour d’une consultation juridique, une pièce communiquée peut se révéler particulièrement déconcertante. En l’espèce, il s’agit du procès-verbal d’une assemblée générale du 30 octobre 2025 rédigé par le cabinet MANDA, sur la base d’une convocation établie également par ses soins, en tant que syndic d’une résidence parisienne.

I. Constitution litigieuse du conseil syndical

Cette assemblée doit notamment désigner son conseil syndical, conformément à l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965. Pour ce faire, MANDA porte à son ordre du jour les questions et leur projet de résolution correspondant (art. 13 et 11 al. 7 du décret du 17 mars 1967).

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Ces décisions se révèlent néanmoins juridiquement suspectes pour divers motifs.

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Les conseillers syndicaux doivent en principe être désignés personnellement et individuellement. Si la jurisprudence admet exceptionnellement l’élection en bloc du conseil syndical, elle conditionne cette dérogation à l’adéquation des candidats au nombre de postes imposé par le règlement de copropriété, CA Paris, 1ère ch. G, 7 mai 2003, n° 2001 - 18208. Cette condition n’apparait pas réunie dans le cas présent, puisque la nomination, selon la trame de MANDA, prévoit à la fois un vote groupé (résolution n° 10.1), puis individualisé (10.2 et 10.3).

Une telle irrégularité expose la constitution du conseil syndical à son annulation judiciaire poursuivie par tout copropriétaire opposant, défaillant ou assimilé dans les deux mois de notification de son procès-verbal (art. 42 al. 2 de la loi du 10 juillet 1965). Autrement dit, le manque de rigueur de ce cabinet risque de priver le syndicat d’un organe essentiel au bon fonctionnement de la résidence.

Enfin, si l’assemblée élit une société (civile ou commerciale) au conseiller syndical, la résolution devrait indiquer la personne physique la représentant légalement ou statutairement à cette fonction.

II. Modification douteuse d’une grille de charges communes 

Cette assemblée soumet un changement de la répartition des charges communes de chauffage, en raison du souhait de désolidarisation de certains lots de cet équipement collectif.

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Là encore, ce projet s’avère juridiquement hasardeux, dans la mesure où l’adoption d’une modification d’une grille de charges communes par l’assemblée :

- relève de l’unanimité des voix du syndicat (art. 11 de la loi du 10 juillet 1965) et non de celle absolue (art. 11 de la loi du 10 juillet 1965). L’analogie dérogatoire de majorité évoquée, par le bailleur social, s’entend de la création d’un service collectif, par le syndicat et donc de l’adoption par l’assemblée, à la même majorité, de l’avenant au règlement de copropriété fixant la nouvelle grille de charges communes nécessaire, TGI Paris, 25 novembre 1994, Pollet/SDC 198 rue St Jacques. Or, cette situation ne correspond pas au cas présent, à savoir la volonté de certains lots de se dissocier d’une installation collective ;

- implique, que cette dernière adopte, par la même occasion, le projet de règlement de copropriété  joint à sa convocation (art. 11 al. 6 du décret du 17 mars 1967).

III. Autorisation contestable d’une saisie immobilière

Si le syndicat ne parvient pas à exécuter une condamnation ordinaire en paiement d’un copropriétaire débiteur, le créancier lésé peut requérir la vente forcée du ou des lots du contrevenant. 

L’article 11 al. 11 du décret exige alors de l’assemblée de se prononcer, sur :

- le principe de l’adjudication judiciaire du ou des lots ;

- le montant de la mise à prix du ou des lots ;

- la somme considérée comme définitivement perdue par le syndicat.

En l’espèce, MANDA propose la saisie immobilière de six lots d’un copropriétaire défaillant.

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L’approche envisagée par ce cabinet se révèle juridiquement problématique, en ce qui concerne la fixation du prix de cession, puisque pour une dette s’élevant à 43.984,73 € (57.386,87 - 13.402,14 €), il détermine pourtant ce seuil à 400.000 €.

Outre le fait qu’en l’absence de surenchère, le syndicat se retrouve propriétaire des biens et  doit en conséquence payer les 400.000 €, le ratio envisagé contrevient aux principes fondamentaux de recouvrement d’un  arriéré. Le poursuivant doit effectivement justifier judiciairement du caractère certain, liquide et exigible de sa créance, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce.

IV. Vente discutable d’un bien immobilier du syndicat des copropriétaires

Le syndicat a la faculté de céder un de ses biens, ce qui suppose de l’assemblée une décision :

- soumise à la double majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ;

- convenant du montant et de son acquéreur.

La présentation de MANDA sur ce projet comporte des irrégularités.

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Le syndicat ne peut consentir une quelconque délégation de pouvoir (mandat) à un tiers pour procéder à cette aliénation. Ce transfert de compétence n’est autorisé, que pour des questions relevant initialement de la majorité relative de l’article 24 de la loi (art. 25 al. a et 21-1). Or, comme le prévoit ce texte, la mutation d’un bien immobilier du syndicat dépend en 1ère lecture de la double majorité de l’article 26.

De plus, l’article 16-1 al. 2 de la loi oblige le syndic à reverser immédiatement aux copropriétaires bénéficiaires leur quote-part de cette transaction, dès obtention de cette somme par le notaire. Ce produit ne peut légitimement être défalqué des dépenses collectives, comme le prévoit ce cabinet.

Ces approximations juridiques sur l’assemblée soulignent l’importance de la concertation entre le syndic et le conseil syndical dans l’établissement de son ordre du jour. Mais également l’importance de la fonction du président de séance qui est garant de la tenue régulière de l’assemblée.

 Il dispose à ce titre d’un pouvoir d’amendement de toute question et/ou de tout projet de résolution, ambigu ou illicite, avant de le soumettre au vote des copropriétaires. Outre cette modification, le président peut parfaitement écarter toute délibération sur une proposition insusceptible de correction.

Ces précautions juridiques visent à préserver le syndicat contre l’annulation judiciaire de décisions illégales poursuivie par tout copropriétaire opposant, défaillant ou assimilé.