ABUS N° 3167 - Une banque (la Banque DELUBAC) condamnée pour avoir « fusionné » des sous-comptes bancaires et empêcher un SDC de faire jouer la garantie

09/07/2012 Abus Abus

ABUS N° 3167 - Une banque (la Banque DELUBAC) condamnée pour avoir « fusionné » des sous-comptes bancaires et empêcher un SDC de faire jouer la garantie 

 

Des adhérents viennent d’obtenir la condamnation d’une banque spécialisée (la Banque DELUBAC) qui avait cru devoir fusionner les sous-comptes bancaires du syndicat des copropriétaires.

 

Voici l’histoire en quelques mots et des précisions sur cette condamnation.

 

I. Des adhérents acceptant le sous-compte bancaire avec relevé bancaire

 

Comme on le sait, quand les syndics veulent empêcher un syndicat d’ouvrir un VRAI compte bancaire séparé, ils leur proposent un FAUX compte bancaire séparé (le sous-compte avec relevé bancaire) et soutiennent que c’est la même chose.

 

On va voir qu’il n’en est rien.

 

II. La banque « fusionne »

 

Le syndic SFG (Société Foncière de gestion) étant en déconfiture, son banquier prit peur et pour s’éviter d’avoir à « éponger » les trous de trésorerie de son client décida de fusionner dans le compte unique du cabinet ouvert pour ses mandants, TOUS les sous-comptes ouverts au nom de syndicats de copropriétaires.

 

Ce qui devait arriver arriva : SFG fit rapidement faillite et le garant (les LLOYD’S, encore une fois, garant peu regardant) se réfugia derrière l’absence de relevé bancaire pour refuser sa garantie à la copropriété.

 

III. La contre-attaque

 

Nos adhérents (fous furieux) décidèrent alors d’attaquer la banque pour avoir réalisé cette « fusion » sans l’autorisation des copropriétaires concernés.

 

Cette contre-attaque était audacieuse, car non seulement une telle action n’avait jamais été tentée, mais la fusion était bien prévue dans la convention initiale passée entre le syndic et la banque (ce que NI le syndic NI la banque n’avaient dit aux copropriétaires).

 

IV. Contre-attaque victorieuse

 

Le jugement est tombé : le Tribunal de Grande Instance a estimé qu’en procédant comme elle l’a fait la banque - même si cette fusion avait été prévue - a entraîné pour le syndicat une « perte de chance » de récupérer ses fonds via le garant et a donc condamné la banque pour cela, à payer la moitié des sommes dues.

 

Il s’agit là d’une décision très singulière, très courageuse et qui - espérons-le - fera réfléchir les banques.

 

Ceci dit : nos adhérents ont quand même perdu la moitié des sommes en jeu, à savoir 43.000 euros sur 86.000 !

 

Moralité : méfiez-vous de ceux qui vous disent que « sous-compte bancaire avec relevé bancaire égal vrai compte bancaire séparé ». C’est faux (entre le banquier et le syndic, la fusion est programmée).

 

Certes, nos adhérents ont été bien défendus et ont été courageux, mais rien ne disait que le juge allait les suivre et surtout leur préjudice n’a été réparé qu’à moitié...

 

V. Extraits du jugement

(Tribunal de Grande Instance de Paris, 8ème chambre, 3è section. Jugement du 21 mars 2012)

 

La SFG, avait ouvert le 23 décembre 2002 un compte unique auprès de la banque Delubac regroupant les sous-comptes des syndicats qu'elle avait en gestion et les fonds résultant de la gérance locative pour des propriétaires.

Le syndicat avait voté l'affectation de ses propres fonds sur un sous-compte ouvert à son nom permettant l'édition de relevés bancaires individualisés.

En application de la convention d'ouverture de compte courant du 23 décembre 2002 selon laquelle les soldes respectifs des comptes ouverts au nom de la SFG pouvaient être virés de l'un à l'autre, à tout moment et sans avis, de façon à se confondre en un solde unique exigible, la banque Delubac, a fusionné, les 14, 15, 16 juin 2005 et 8 août 2005, l'ensemble des fonds mandants sur un compte bancaire unique n'a maintenu des sous-comptes que pour quelques syndicats, dont ne fait pas partie le syndicat demandeur.

(...)

La circonstance que le syndicat n'avait pas demandé l'ouverture d'un compte séparé, alors même que les résolutions votées en assemblée générale relatives aux modalités de fonctionnement du compte bancaire du syndicat exigeaient le maintien d'un sous-compte et l'émission de relevés bancaires individualisés, ne saurait valoir consentement à la convention de fusion qui était donc inopposable par la banque Delubac.

 

(...)

En procédant ainsi à la fusion des comptes, sans l'accord du syndicat, alors qu'elle ne pouvait ignorer que le syndic agissait en qualité de mandataire des différents syndicats au nom desquels des sous-comptes avaient été ouverts dans ses livres, permettant ainsi la compensation entre les soldes débiteurs et les soldes créditeurs des comptes fusionnés, la banque Delubac a commis une faute qui a causé un préjudice au syndicat en lui faisant courir le risque de ne pas obtenir la restitution des sommes déposées sur le sous-compte à son nom.

 

La fusion des comptes s'est poursuivie jusqu'à la fin du mandat de la SFG, interdisant l'individualisation des comptes de chacun des syndicats.

L'existence d'un sous-compte permettait au syndicat d'assurer l'individualisation de son compte à l'égard tant des autres syndicats que du syndic et des propriétaires ayant donné leur bien en gestion locative. La fusion des comptes a mis fin à cette autonomie du sous-compte du syndicat et a privé ce dernier d'une chance d'obtenir la restitution des fonds non représentés à la fin du mandat de la SFG, qu'il convient, au vu des relevés bancaires, du bilan de la copropriété au 31 décembre 2007 et du grand livre pour les années 2006 et 2007 produits aux débats, d'évaluer à la somme de 86.232,02 euros.

Il y a donc lieu de condamner la banque Delubac à indemniser le syndical de cette perte de chance par l’allocation d’une somme de 43.000 euros ».

 

 

C’est bien, mais on le voit : rien ne vaut le VRAI compte bancaire séparé.