L’assurance représente un sujet sensible pour toutes les copropriétés, en raison d’une gestion souvent défaillante de ces polices par le syndic, d’un manque de visibilité sur les dossiers en cours, et du coût généralement élevé que supportent les copropriétés.
La Cour de Cassation rappelle dans un arrêt du 23 novembre 2017 que la responsabilité du syndic peut être retenue en cas de carence de celui-ci dans ce domaine.
I. Les obligations du syndic en matière d’assurance pour le syndicat des copropriétaires
Le syndic est chargé d’administrer l’immeuble (art. 18 de la loi du 10 juillet 1965), ce qui comprend notamment la gestion des divers contrats souscrits pour le compte du syndicat, en ce compris le contrat d’assurance.
Dans le cadre de l’administration courante de la copropriété (c’est-à-dire hors travaux de bâtiment), seule l’assurance de responsabilité civile se révèle impérative pour le syndicat, et ce, depuis la loi A.L.U.R. du 24 mars 2014.
Contrairement à une idée reçue, le syndicat n’est pas tenu de conclure une assurance multirisque immeuble, exception faite d’une clause du règlement de copropriété qui l’imposerait expressément.
Préalablement à toute souscription d’une assurance multirisque, le syndic doit faire établir des devis auprès des compagnies d’assurances ou des courtiers, prestation relevant de ses honoraires de gestion courante (décret du 26 mars 2015). Les propositions faites par les compagnies d’assurance tiennent compte des caractéristiques particulières de chaque copropriété, et de sa sinistralité.
Toute nouvelle police d’assurance souscrite pour le compte du syndicat, y compris pour les polices obligatoires, relève d’une résolution de l’assemblée générale souveraine (art. 17 de la loi du 10 juillet 1965) selon les éléments essentiels du contrat qui doivent être annexés à la convocation (art. 11 alinéa 3 du décret du 17 mars 1967) et entre autres les réserves émises par les assurances.
Suite à cette décision, le syndic souscrit l’assurance choisie.
II. Le syndic fautif en matière de souscription d’assurance du syndicat engage sa responsabilité civile délictuelle pour faute à l’égard des copropriétaires en cas d’incendie
En l’espèce, un incendie se déclare le 20 août 2007 sur un immeuble en copropriété situé près de Nancy. L’un des copropriétaires, qui voit ses lots détruits, décide d’assigner le syndic professionnel, Société de Gestion Immobilière Lorraine (SOGILOR), qu’il estime responsable du préjudice subi, en raison d’un défaut d’assurance multirisque immeuble, contrairement à ce qui avait été annoncé au conseil syndical.
La responsabilité civile délictuelle du syndic a été retenue par la cour d’appel et la Cour de cassation dans son arrêt n° 16 - 22053 du 23 novembre 2017 :
« … Mais attendu qu'ayant relevé que la société SOGILOR s'était abstenue de tout mettre en œuvre pour que l'ensemble immobilier qu'elle était chargée d'administrer fût couvert par une assurance contre ….et qu'il était établi que la société SOGILOR avait affirmé aux membres du conseil syndical que l'immeuble était assuré, la cour d'appel a pu retenir que la société SOGILOR avait commis une faute qui avait fait perdre … une chance d'être indemnisée de son préjudice … ».
Dans ce dossier, l’immeuble était localisé dans un quartier sinistré (friches industrielles et les locaux de 5 sociétés incendiées), en zone inondable, et avec des risques causés par certaines activités exercées dans l’immeuble.
En conséquence le courtier n’avait pas trouvé d’assurance acceptant de couvrir avec une assurance multirisque les risques incendie de cette copropriété et estimait nécessaire que chaque copropriétaire assure l’intégralité de sa part de copropriété.
C’est cette recommandation qui n’a pas été transmise, en plus de n’avoir pas informé les copropriétaires du défaut d’assurance.
Le syndic a donc été considéré comme responsable du préjudice subi. L’évaluation du préjudice faite par la Cour d’appel a tenu compte de la vétusté de l’immeuble, des caractéristiques du quartier…et ne s’est pas arrêtée à la valeur à neuf de l’immeuble.
En cas de dommage sur un immeuble en copropriété, le syndic ne peut s’exonérer de sa responsabilité, que s’il a mis en œuvre son obligation de moyen renforcée et de conseil à l’égard du syndicat des copropriétaires.
S’agissant des assurances du syndicat, le syndic doit donc a minima faire établir des devis par les compagnies ou courtiers et les soumettre pour décision à l’assemblée générale souveraine.