Des conseils syndicaux viennent de nous faire part d’une proposition de leur syndic professionnel de régularisation des charges 2019 auprès des copropriétaires, sans que l’assemblée générale n’ait pu se tenir en raison des restrictions sanitaires.
Il s’interroge sur la légalité de cette option formulée, ainsi que des conditions évoquées par le syndic.
I. Illégalité d’une réédition des charges auprès des copropriétaires par le syndic sans adoption antérieure des comptes clos du syndicat par l’assemblée générale
Au motif de prétendues demandes de régularisation des charges 2019 par des copropriétaires, l’un de ces syndics professionnels prétend que cette réédition s’avère régulière, même sans approbation préalable des comptes clos du syndicat en assemblée générale :
- moyennant un accord du conseil syndical ;
- en prenant soin de « noter » toute remarque (des copropriétaires ?) dans le procès-verbal de l’assemblée générale à venir et de la « rectifier » en 2020 (corrections des imputations erronées de 2019 dans les comptes 2020 ?).
Cette proposition d’un des syndics professionnels se révèle triplement irrégulière :
- d’une part, l’assemblée est exclusivement compétente pour l’adoption des comptes clos du syndicat des copropriétaires, c’est-à-dire qu’elle ne peut consentir la moindre délégation de pouvoir sur ce point à quiconque, Cass. 3e civ. 25 mai 1976, n° 75 - 1026 ;
- d’autre part, l’approbation en assemblée générale des comptes clos du syndicat constitue un préalable impératif à la régularisation ultérieure des charges auprès des copropriétaires par le syndic, Cass. 3e civ. 21 novembre 2006, n° 04 - 20473 ;
- enfin, les dépenses doivent être affectées dans l’exercice comptable concerné (année de l’engagement de la dépense) et non dans un exercice comptable postérieur (art. 8 du décret comptable du 14 mars 2005).
II. Illicéité d’une réédition des charges et incidences juridiques
Cette offre parfaitement illicite du syndic a pour conséquence :
- de rendre la réédition des charges par celui-ci inopposable aux copropriétaires, que le solde se révèle créditeur, ou débiteur, que la demande intervienne par la voie amiable ou contraignante (par exemple, syndic qui engagerait une action judiciaire en paiement à l’égard d’un copropriétaire présumé défaillant dans le règlement de ses charges) ;
- de l’exposer lui, tout comme les conseillers syndicaux qui auraient donné leur assentiment dans cette initiative comptable individuelle à une action judiciaire de la part des copropriétaires lésés en réparation de leur préjudice sur le terrain de la responsabilité civile pour faute extracontractuelle (art. 1240 du Code civil).
En conclusion, les copropriétaires et les conseils syndicaux ne doivent pas respectivement requérir et avaliser la proposition d’un syndic de régularisation des charges, sans adoption préalable des comptes clos du syndicat par l’assemblée générale souveraine.
Dans le cas contraire, l’opération comptable s’avérerait strictement illégale, inopposable aux copropriétaires et susceptible d’une procédure judiciaire légitime en indemnisation des personnes lésées à l’égard des co-responsables fautifs.