Le conseil syndical ou tout copropriétaire, peut être amené à contrôler les engagements conventionnels liant le syndicat des copropriétaires à une entreprise.
Alors, que le contrat doit constituer une source limpide des obligations respectives des parties contractantes, la pratique se révèle souvent bien plus opaque, comme l’a expérimenté récemment le conseil syndical d’un immeuble parisien alimenté en gaz pour son chauffage collectif, à l’égard de son fournisseur ENGIE.
I. Contrat de distribution de gaz : irrégularités dans sa rédaction
Le Code civil pose en son article 1102 le principe selon lequel toute convention doit définir les engagements des parties contractantes, librement consentis entre elles, avec pour seule restriction de ne pas enfreindre les dispositions légales ou réglementaires d’ordre public, c’est-à-dire impératives.
La lecture d’un contrat devrait donc permettre aux parties contractantes ou à leur ayant droit de pouvoir identifier clairement leurs obligations.
Le conseil syndical d’une petite copropriété parisienne comportant moins de 20 lots, sollicite de son syndic le contrat d’alimentation en gaz de son chauffage collectif.
Il s’aperçoit alors de contradictions manifestes de la convention entérinée avec GDF SUEZ (désormais ENGIE), qui le conduit à s’interroger légitimement :
- sur les parties contractantes, puisque la convention précise à la fois en page 1 que le bénéficiaire est le SYNDIC COPRO et en page 5 le SDC suivi de l’adresse de l’immeuble, abréviation signifiant aussi bien syndic de copropriété, que syndicat des copropriétaires ;
- aussi et surtout sur sa durée et ses conditions divergentes, la page 1 soulignant que le contrat est conclu pour trois ans du 1er août 2015 au 31 juillet 2018 sans tacite reconduction, alors que la page 5 des Conditions générales prévoit une souscription d’une durée d’un an avec renouvellement par tacite reconduction pour la même durée, sauf « durée différente dans les conditions particulières. »
II. Contrat de distribution de gaz : irrégularités dans son exécution
Alors que la durée de validité de la convention semblait donc de trois ans, sans tacite reconduction (p.1), clause dérogatoire particulière à celle prévue dans les conditions générales (p.5), la situation matérielle atteste cependant du contraire en 2020.
En effet, l’équipement collectif demeure alimenté au gaz en 2020 par ENGIE, les copropriétaires bénéficiant du chauffage collectif du syndicat et de factures correspondantes à la consommation, dont notamment celle de mars 2020.
Pourtant, le syndicat ne semble pas avoir conclu de nouveau contrat avec ce fournisseur de fluide, depuis la convention échue au 31 juillet 2018, sans tacite reconduction, que ce soit par la voie :
- régulière, résolution de l’assemblée générale souveraine (art. 17 de la loi du 17 juillet 1965) selon les éléments essentiels « devis » annexés à sa convocation (art. 11 alinéa 3 du décret du 17 mars 1967) ;
- irrégulière, autrement dit par une initiative unilatérale de son syndic en exercice.
Pire, la facture du mois de mars 2020 éditée au nom du client « SYNDIC de copro » parait démontrer, qu’ENGIE a procédé à une mixture totalement illicite pour poursuivre le contrat au-delà du 31 juillet 2018, date d’expiration du contrat initial sans tacite reconduction.
En effet, la seconde page de la facture précise que le contrat « actuel » vient à échéance au 31 juillet 2021.
On peut donc déduire de cette mention, qu’ENGIE a donc prorogé au 31 juillet 2018, la convention initiale de trois ans, sans tacite reconduction, pour une durée supplémentaire de trois ans, en croisant sans aucune gêne deux clauses totalement contradictoires du contrat de 2015/2018, à savoir en extirpant de la page :
- 1, la durée de trois ans plus favorable, mais sans tenir compte de l’interdiction du renouvellement ;
- 5, la tacite reconduction plus propice, tout en écartant la durée correspondante d’un an, moins opportune.
Cette situation juridique ubuesque doit rappeler aux conseils syndicaux et aux copropriétaires la nécessité d’effectuer une vérification approfondie des dépenses courantes du syndicat, qui ne se résume pas à un contrôle superficiel des factures.
Autrement dit, il convient d’analyser les contrats du syndicat et d’exiger du syndic :
- la dénonciation de toute reconduction illicite d’une société, à compter du renouvellement douteux ;
- l’établissement par des professionnels de propositions légales, compétitives, cohérentes et compréhensives pour les néophytes, afin de les soumettre à l’approbation de l’organe souverain décisionnaire, l’assemblée générale.
En attendant, la régularisation, l’assemblée générale se doit a minima de rejeter de la résolution d’adoption des comptes clos du syndicat, les dépenses contractuelles suspectes, ainsi que tout quitus à son syndic pour sa gestion juridique sur l’exercice concerné (refus recommandé d’ailleurs de manière permanente par l’ARC).