L’automne, période relativement calme pour les assemblées générales de copropriétaires trouve un regain inhabituel en cette fin d’année 2020, en raison du confinement du printemps dernier lié à la pandémie.
Si cette situation exceptionnelle et les évolutions réglementaires constantes peuvent entrainer des chamboulements organisationnels logiques pour des syndics bénévoles, il ne devrait pas en être de même pour leurs homologues professionnels.
Malheureusement, les errements semblent plus affecter ces derniers, comme le révèle notamment une convocation d’assemblée générale du 10 décembre 2020 établie par le syndic AXIMONIAL pour une copropriété parisienne.
I. Confusions sur les modalités de participation des copropriétaires à cette assemblée générale à distance
En sa qualité de syndic, d’une copropriété parisienne comprenant un peu moins de 50 lots principaux, AXIMONIAL notifie aux copropriétaires la convocation pour leur assemblée générale annuelle fixée au 10 décembre 2020, sans présentiel du fait des restrictions sanitaires.
Jusque-là aucune irrégularité, en effet l’article 13 de l’ordonnance du 20 mai 2020 autorise le syndic à convoquer à titre exceptionnel, l’assemblée générale annuelle sans présentiel, en raison de la pandémie, avec pour date butoir le 31 janvier 2021.
Et ce texte de préciser, que le syndic peut alors déterminer deux voies de participation des copropriétaires à cette assemblée générale, à savoir à titre :
- principal, la visio/audio conférence et le vote par correspondance ;
- accessoire, uniquement le vote par correspondance, s’il est dans l’incapacité technique à proposer la visio ou l’audio-conférence.
C’est là, que tout se complique avec le syndic AXIMONIAL :
- tout d’abord, il précise dans la convocation de l’assemblée générale du 10 décembre 2020, que le lien et les codes de connexion pour la visioconférence seront adressés postérieurement aux copropriétaires, à savoir 10 jours avant cette réunion.
Cette expédition dissociée se révèle irrégulière, car non prévue par l’ordonnance du 20 mai 2020 ;
- il semble entendre de plus et surtout la nécessité d’un vote à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 (sans pour autant mentionner dans le projet de résolution que l’assemblée générale décide…) pour le recours par les copropriétaires :
* au vote par correspondance (question n° 4) : alors que cette faculté résulte d’une disposition d’ordre public (c’est-à-dire juridiquement incontournable), à savoir l’article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965 complété par l’ordonnance du 30 octobre 2019.
Ce mode d’expression du vote des copropriétaires trouve à s’appliquer de manière systématique à toutes les assemblées générales postérieures au 4 juillet 2020, comme en l’espèce, suite à la publication du formulaire type par un arrêté du 2 juillet 2020 ;
* à la visioconférence (question n° 5).
Si ce principe est effectivement prévu par l’article 13-1 du décret du 17 mars 1967 institué par le décret du 27 juin 2019, l’ordonnance du 20 mai 2020 érige néanmoins une dérogation exceptionnelle du fait de la pandémie.
Elle autorise effectivement le syndic à décider unilatéralement et provisoirement des modalités techniques de la visio-conférence pour l’assemblée générale sans présentiel.
Dans ce cas cette assemblée générale devra se prononcer sur l’option technique ponctuellement retenue par le syndic.
Or, comme souligné précédemment, si la convocation notifiée par le syndic AXIMONIAL comprend bien une référence à une majorité (au demeurant erronée, puisqu’elle relève de l’article 24 et non de celle restrictive du 25), il ne prend pas soin de souligner dans le projet de résolution que l’assemblée générale décide.
Ces deux omissions dans le projet de résolution n° 4 et 5 ne peuvent que nous interpeller, c’est-à-dire si elles traduisent un simple oubli sans incidence sur la nature juridique de ces questions soumises au vote (comme l’induit la majorité indiquée) ou au contraire, si elles correspondent à des points d’information (sans vote), pour lesquels AXIMONIAL aurait malencontreusement précisé une majorité.
II. Confusions et inadéquations de résolutions relatives au fonctionnement du syndicat des copropriétaires
Outre ces errements sur la participation des copropriétaires à cette assemblée générale extraordinaire sans présentiel, AXIMONIAL soumet une question au vote des copropriétaires sur :
- l’actualisation du budget en cours du 1er janvier au 31 décembre 2020.
Si cette question ne revêt pas d’irrégularité, on peut cependant s’interroger sur la pertinence de soumettre aux copropriétaires la revalorisation d’un budget déjà adopté lors d’une précédente assemblée générale et dont l’échéance se révèle toute proche.
Autrement dit, en cas d’approbation par l’assemblée générale cela permettrait au syndic d’actualiser auprès des copropriétaires sur le seul mois de décembre leurs provisions, ce qui :
* peut être financièrement très contraignant pour les copropriétaires en cas de budget fortement revalorisé, et ce, sur période circonscrite ;
* s’avère peu approprié, alors que les comptes vont se clôturer 21 jours après, ce qui doit entrainer leur présentation par le syndic pour adoption des copropriétaires lors d’une nouvelle assemblée générale devant se tenir à moyen terme, en principe au plus tard dans un délai de six mois à compter de celle-ci (art. 2 du décret comptable du 14 mars 2005) ;
- les modalités d’accès aux pièces justificatives des charges par les copropriétaires.
AXIMONIAL prévoit donc dans cette convocation une question n° 16 ayant pour objet de faire voter les copropriétaires sur les conditions pour leur vérification annuelle des comptes clos dans ses locaux, et ce, par un vote relevant de la majorité relative de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965.
Cette question délibérative est non seulement sans objet, mais également totalement irrégulière, dans la mesure où un décret du 30 décembre 2015 a complété le décret du 17 mars 1967 soulignant qu’en ce qui concerne l’accès des copropriétaires à ce contrôle annuel des documents attestant de la gestion du syndic, ce dernier :
- le fixe désormais, autrement dit, l’assemblée générale n’est plus compétente ;
- a uniquement l’obligation réglementaire d’en aviser les copropriétaires dans la convocation (point d’information, c’est-à-dire une résolution sans vote) sur le choix qu’il a convenu unilatéralement, et qui doit néanmoins correspondre a minima à un jour ouvré selon les horaires de réception du public stipulés dans son contrat de mandat adopté en assemblée générale (décret du 26 mars 2015 sur le contrat type de syndic).
La tenue des assemblées générales sans présentiel implique une concertation accrue du conseil syndical à l’égard du syndic, l’amendement en cours de cette réunion du syndicat se révélant juridiquement plus litigieux, puisque :
- celui-ci appartient en principe au président de séance, et qu’il ne peut l’exercer qu’en cas de visio ou l’audio conférence ;
- les copropriétaires recourant au formulaire de vote par correspondance ne peuvent se prononcer de manière anticipée (expédition de celui-ci au syndic au moins trois jours francs avant l’assemblée générale selon l’article 9 bis du décret du 17 mars 1967 instauré par le décret du 2 juillet 2020) sur un projet de résolution qui serait modifié a posteriori.
A ce titre l’article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965 dispose, qu’en cas d’amendement de la résolution lors de l’assemblée générale, le copropriétaire ayant préalablement voté favorablement sur celle-ci par correspondance doit être assimilé à un copropriétaire défaillant sur cette résolution.
Cela revient à dire, qu’il n’a pas participé à cette décision, et qu’il bénéficie de la capacité de requérir sa nullité judiciaire (s’il démontre bien évidemment une illégalité), et ce, dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965).