Le compte bancaire séparé (courant) du syndicat des copropriétaires constitue une source intarissable de comportements abusifs ou illicites des syndics professionnels.
Nous relevons dernièrement une nouveauté assez récurrente de ces derniers quant à l’ouverture du compte courant, ainsi que sur les modalités de paiement de provisions et charges par les copropriétaires, qui mérite un rappel succinct du cadre légal et réglementaire en vigueur.
I. Ouverture du compte bancaire séparé du syndicat des copropriétaires : droit prédominant, mais non illimité du syndic en exercice
Récemment des conseils syndicaux nous ont fait part d’un changement d’établissement financier dépositaire du compte bancaire séparé, de manière unilatérale par le syndic en exercice :
- alors même, que le syndicat des copropriétaires disposait déjà d’un tel compte courant ;
- en l’absence de désignation d’un nouveau syndic en assemblée générale.
Ils se sont interrogés sur :
- la légalité de cette pratique par le syndic en exercice, ainsi que la parade licite, y compris en présence d’une situation pleinement régulière ;
- la lisibilité de cette modification aux copropriétaires par un syndic se contentant d’une simple mention en bas de page de l’appel de provisions ou de charges, voire exclusivement via un lien à son site internet pour disposer des « nouvelles » coordonnées bancaires.
Nous pouvons apporter les réponses suivantes à ces questions compréhensibles :
- le syndic peut effectivement ouvrir, à tout moment, le compte bancaire séparé (destiné à recevoir les appels de provisions courantes et exceptionnelles, les charges correspondantes des copropriétaires, ainsi que les indemnités d’assurance) du syndicat des copropriétaires selon l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965.
Autrement dit, indépendamment de la nomination d’un autre syndic en assemblée générale, celui en exercice est en capacité d’opter unilatéralement pour un autre établissement financier au cours de son mandat, sans avoir à se justifier auprès des copropriétaires.
Cependant, ce même texte prévoit que le syndicat puisse imposer à son syndic un établissement financier pour son compte bancaire séparé à la condition d’inscrire à l’ordre du jour de l’assemblée générale, une question spécifique, son projet de résolution, voire la proposition de convention d’ouverture de compte annexée à sa convocation.
L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 précisant, que cette résolution relève de la majorité des voix du syndicat des copropriétaires, à savoir celle de l’article 25 du même texte ;
- le syndic est chargé de l’administration de l’immeuble auprès des copropriétaires (art. 18 de la loi de la loi du 10 juillet 1965), ce qui comprend le financement par ces derniers des dépenses de fonctionnement des parties communes et des équipements collectifs.
Pour ce faire, il se doit de leur apporter une information transparente, à travers principalement les appels de provisions édités par ses soins et expédiés préalablement à leur exigibilité (art. 35-2 du décret du 17 mars 1967), ce qui exclut le renvoi à d’autres supports tels que la voie électronique.
En effet, d’une part, les copropriétaires ne sont pas tenus de disposer d’un accès internet. D’autre part, le recours aux notifications électroniques suppose un accord écrit de chaque copropriétaire, rétractable à tout moment (art. 64 et s. du décret du 17 mars 1967).
II. Modalités de règlement des provisions et charges par les copropriétaires : le syndic doit se cantonner aux seules interdictions réglementaires
De nombreux conseils syndicaux ont également relevé des tentatives de restrictions de syndics professionnels quant aux modalités de paiement des provisions, des charges courantes et exceptionnelles par les copropriétaires.
Certains syndics professionnels prétendant, que ce règlement :
- devait exclusivement résulter d’un virement ou d’un prélèvement ;
- excluait le chèque, ainsi que les espèces.
Pour rappel, nulle disposition du :
- droit de la copropriété (loi du 10 juillet 1965 et son décret d’application du 17 mars 1967) n’autorise le syndic à limiter les modes de paiement des copropriétaires ;
- code monétaire et financier ne contient de telles interdictions. Son article D 112-3 dispose uniquement, que les règlements en espèces, pour les non professionnels (soit la plupart des copropriétaires, à l’exception des sociétés commerciales détentrices de lots) sont plafonnés à 3.000 €, lorsque leur résidence fiscale se situe en France et 15.000 € dans le cas contraire.
Face à un syndic défaillant, les conseils syndicaux se doivent tout bonnement de lui rappeler le cadre légal applicable et s’inscrire dans celui-ci, indépendamment des initiatives irrégulières ou abusives de professionnels de l’immobilier.
A ce titre, les copropriétaires sont fondés à régler leurs provisions, charges courantes et exceptionnelles par chèque, virement, prélèvement, voire espèces selon les seuils réglementaires pour ces dernières.
De même, si le syndic entend imposer l’ouverture du compte bancaire séparé, auprès d’un établissement financier ne convenant pas aux copropriétaires (conditions tarifaires prohibitives ou suspicions d’ententes avec l’administrateur de biens), il leur suffit d’en démarcher d’autres et d’inscrire le projet correspondant pour approbation en assemblée générale.
En cas de vote favorable de l’assemblée générale, le syndic en exercice, ainsi que ses successeurs se verront contraints de se conformer à cette résolution.