Audit énergétique inefficace : la colère d’un conseiller syndical

06/06/2013 Dossiers conseils Conseil

Audit énergétique inefficace :

la colère d’un conseiller syndical

 
 
Un conseiller syndical d’une copropriété (encore non adhérente à l’ARC, ceci explique cela) nous a envoyé la copie d’une lettre qu’il a adressée au bureau d’études qui a procédé à l’audit énergétique de sa copropriété.
 
Dans ce témoignage on retrouve TOUT ce qui fait le mauvais audit, l’audit inutile, l’audit qui désespère les copropriétaires.
 
C’est pour répondre à ces nombreux copropriétaires et conseils syndicaux que nous venons de réaliser avec Planète Copropriété un guide qui s’avère déjà indispensable : www.unarc.fr/iv12.
 
Voici donc le cri de colère de notre conseiller syndical :
 
« Monsieur le Directeur,
 
J’habite un appartement dans une copropriété de 7 étages, avec appartements traversant et chauffage collectif. L’immeuble a été construit en 1964.
 
Comme la loi nous en fait obligation et à l’instigation de notre syndic, les copropriétaires ont voté l’an dernier pour un audit énergétique.
 
Nous espérions beaucoup de cet audit, vu la gabegie énergétique très importante de notre bâtiment qui fait partie de ces milliers de copropriétés qu’à juste titre, l’ancienne ministre de l’Écologie, qualifiait dans l’Usine Nouvelle du 27/11/2008 de  « passoires thermiques ».
 
Cet audit énergétique global a été réalisé par une personne de votre société le 24 janvier dernier et le rapport qui nous est parvenu par la suite, nous a paru tellement illisible et extravagant, que nous avons demandé et obtenu qu’une présentation plus éclairante, nous soit faite lors de l’AG qui a eu lieu le 24 avril dernier.
 
La personne qui a réalisé cet audit est donc revenue nous faire sa présentation en projetant les 30 « slides » du rapport reçu, sans nous convaincre du moindre intérêt de celui-ci.
 
Ayant l’appartement de loin le mieux isolé (par l’intérieur) et étant depuis 10 années le plus ardent promoteur de l’isolation par l’extérieur et du changement des fenêtres & baies d’origine dans cet immeuble vieillissant en béton banché, aux murs froids et aux ponts thermiques largement identifiés par des photos thermographiques antérieures aux vôtres, je doute très sérieusement que le rapport cité en référence, avec ses diagrammes/camemberts/tableaux redondants, qui remplissent votre document, puisse nous être d’un quelconque appui pour décider de futurs travaux d’isolation et d’économie d’énergie. Bien au contraire. Je suis même persuadé que moins de 5 pages sur les 30 pages[1] du rapport, auraient largement suffi, tant l’information qu’on y trouve - outre des chiffres d’origine inconnue, voire de mauvais paramétrages -  semble provenir d’un immeuble autre que le notre - ou a fait l’objet de « copier-coller » des brochures gratuites de l’Ademe.
 Ce qui pourrait expliquer l’impression de malaise, la locution hésitante et les réponses floues ou « bifurquantes », voire très théoriques, pour ne pas dire « fumeuses », de votre représentant durant sa présentation et sa colère rentrée, lorsqu’on a osé lui demander ses références – comme nous y autorise l’arrêté du 3 avril dernier –  au point qu’en partant, il en a oublié sa veste, qu’il est venu récupérer une demi-heure plus tard.
 
Je n’étais pas le seul copropriétaire à penser, lors de cette présentation, qu’on avait nourri un ordinateur de quelques chiffres de résistance thermique de matériaux  collectés en notant certains murs, vitrages, huisseries dans une poignée d’appartements pas forcement représentatifs. Chacun sait qu’avec un tableur Excel et quelques chiffres ont peut aujourd’hui faire des pages et des pages d’illustrations, de tableaux, de camemberts et diagrammes qui peuvent facilement impressionner et leurrer beaucoup de copropriétaires, par ailleurs souvent intimidés par le prestige de l’ingénieur. Le problème, c’est que parfois les chiffres retenus ne sont pas exacts ou que le logiciel a été mal paramétré, ce qui arrive même dans les plus grands organismes.
Parmi les points qui nous semblent les plus aberrants dans ce rapport se trouve l’importance donnée à la consommation d’eau chaude sanitaire (ECS) et d’électricité qui sont chez nous du domaine privé. Joyeusement mélangés aux consommations spécifiques de la copropriété, vos calculs donnent une invraisemblable consommation d’énergie électrique (double du chauffage. Réf 2.4) alors que notre consommation de gaz pour notre chauffage collectif (sans ECS) est de loin, avec 51 % (le double de la moyenne nationale !) la plus importante des charges. Il y a là plus qu’une erreur de raisonnement, c’est une méconnaissance totale du fonctionnement d’une copropriété.
 
Passons sur le temps perdu par votre représentant à nous convaincre de l’intérêt – limité - d’une « VMC Hygro » pour des appartements traversants vieux d’un demi-siècle, dont les archives ne mentionnent aucunement la moindre trace d’humidité de confinement. Oublions également la suggestion délirante d’une production d’eau chaude sanitaire solaire sur un bâti de cet âge, oublions la préconisation tout aussi absurde d’une isolation par l’intérieur pour tous les appartements de la copropriété, oublions les pistes d’améliorations « prioritaires (?)» suggérées (Réf 3) comme l’isolation du plancher bas y compris donc, l’important plafond de chaufferie « autochauffé» sous l’immeuble, ou les autres actions préconisées. Votre rédacteur et les concepteurs de votre tableur, marchent sur la tête et vendent du vent.
 
Autant dire que dans les résidences comme la notre, où les copropriétaires sont âgés (Résidences généralement les moins bien isolées) un tel rapport n’a absolument aucune chance d’être suivi d’effet et que ce n’est pas par plaisir, si j’utilise le mot « dévoiement » -  dans le sens délinquant - pour qualifier cet audit. Je ne doute pas que s’il en avait connaissance et le temps de le lire, un premier ministre en exercice, trouverait tout comme moi ce rapport « minable».
 
Tout dans celui-ci et dans la présentation qu’en a faite votre représentant nous a semblé être « du remplissage et du copier/coller». Une formation dans le domaine de l’isolation ou la lecture de bons livres comme celui de JP OLIVA « L’isolation écologique» (Ed Terre vivante), de l’ARC « Copropriété le temps des économies d’énergie et du développement durable», ou encore « Les économies d’énergie dans l’habitat existant» d’Olivier DAVID et Adeline FABRES que vous devez connaitre, nous en apprennent beaucoup plus.
 
Les copropriétaires de notre résidence, attendent un rapport lisible, des conseils, des réponses simples et concrètes et des estimations de coûts : compte tenu des surfaces concernées, quel est le coût par façade/pignon aveugle d’une isolation par l’extérieur ? Quelle façade privilégier en premier, quel sera le temps de retour sur investissement, voire des suggestions chiffrées pour savoir s’il serait ou non intéressant de séparer le chauffage entre les deux bâtiments A et B, quelle est votre chiffrage en Euros du gaspillage actuel ; quel serait l’économie si toutes les fenêtres étaient changées dans un premier temps et quel serait la consommation d’énergie – chauffage – si une fois toutes les fenêtres changées, on y ajoute une isolation extérieure sur une ou plusieurs façades. Voilà ce qu’attendent les copropriétaires pour décider de travaux d’économie d’énergie. Et non pas des élucubrations de théoriciens qui ont détourné une idée intelligente pour en faire une usine à gaz et surtout une «machine à cash».
 
Pensant vous être utile en vous faisant remonter le ressenti d’un client de base particulièrement déçu de voir se ternir l’aura d’une entreprise que nous considérions jusqu’alors comme sérieuse, restant néanmoins à votre disposition et dans l’attente de votre réponse, je vous prie de recevoir, Monsieur le Directeur, mes salutations.
 
R............... ».
 
 
 


[1]  En ce qui nous concerne, 90 % des informations et recommandations du rapport nous étaient connues et les 10 % restants ne valent pas 1660 €.