Le registre d'immatriculation des copropriétés : attention aux projets irréalistes et dangereux

13/06/2013 Actions Action

Le registre d'immatriculation des copropriétés : attention aux projets irréalistes et dangereux

 
Dans le projet de loi DUFLOT quelques dispositions concernant l'immatriculation des copropriétés sont envisagées.  ,
Nous sommes satisfaits, sur le principe, car cela fait de nombreuses années que nous demandons la mise en place d'un système (simple) d'immatriculation.
Néanmoins, dans l'esprit du projet de Cécile DUFLOT, l'expression «d'immatriculation » semble renvoyer à un dispositif ambitieux de recensement de données physiques et financières devant permettre de repérer les copropriétés « fragiles » ou en voie de fragilisation. Nous avouons que ce dispositif ambitieux (qui peut paraître à première vue intéressant) nous semble à la fois irréaliste, mais aussi peu efficace, voire dangereux.
Ce projet est-il simplement en discussion ou déjà en construction ? Est-il esquissé ou déjà bien dessiné ? Nous n'en savons rien. Nous savons simplement que le ministère du logement a chargé le CSTB d'une « étude » sur ces problèmes à ce sujet.
C'est d'ailleurs dans le cadre de cette étude que nous avons été auditionnés par le CSTB.
Nous livrons ci-après les raisons des grandes réticences que nous inspirent ce projet (encore confus) et les contre-propositions que nous formulons. Nos réflexions et propositions ont déjà été adressées au CSTB, au ministère et à la ministre elle-même.

I.   L'importance  qu'il  y  a   de   mettre  en   place   des   dispositifs d'observation en matière de copropriétés fragiles

depuis quelques années l'État, les Agences (ANaH), les collectivités territoriales, mais aussi les grandes associations concernées par le bon fonctionnement du secteur de la copropriété - au premier rang desquelles on trouve l'ARC et les associations de l'UNARC - sont préoccupés par la mise en place de dispositifs d'intervention précoce (voire préventif) en copropriété. Il apparaît en effet qu'une partie de plus en plus importante de ce parc s'avère structurellement fragile pour des raisons :
  • juridiques ;
  • financières (coût d'entretien) ;
  • de gestion ;
  • sociales.
Il apparaît aussi que le « redressement » est très difficile et très coûteux lorsque les copropriétés sont « en difficulté » alors qu'il est possible et peu coûteux si une intervention se fait de façon précoce.
Le « Rapport BRAYE» (du nom du Président de l'ANaH, Dominique BRAYE qui a cherché avec efficacité et pertinence à mettre en évidence de nouvelles pistes de traitement des copropriétés fragiles ou en difficulté) a permis de relayer l'impérieuse nécessité où nous sommes de nous « attaquer » à ces problèmes d'intervention publique trop tardive. Ce rapport a proposé un certain nombre de moyens :
  • pour favoriser l'action préventive : la mise en place d'un fonds travaux obligatoire et de plans pluriannuels appuyés sur un dispositif d'audit ;
  • pour favoriser une intervention précoce : la mise en place d'un registre d'immatriculation passant par l'instauration d'une fiche synthétique par copropriété favorisant l'échange d'informations entre copropriétaires, mais aussi avec l'« environnement » de la copropriété.
Partant de cette idée simple d’« immatriculation », certains ont pensé opportun de proposer la création d'un outil très sophistiqué et ambitieux d'Observatoire, à partir de la centralisation et de l’étude - pour chaque copropriété - des cinq annexes comptables obligatoires. Toute la question est de savoir si cet outil serait pertinent et efficace et s'il n'y a pas des voies plus simples, moins coûteuses et plus opératoires d'action préventive et précoce.
Ajoutons à cela que le registre des immatriculations proposé par ces mêmes personnes intégrerait aussi un descriptif technique et complexe des copropriétés.
L'ARC et l'UNARC sont particulièrement impliquées sur cette thématique et concernées par ces problèmes pour diverses raisons :
  1. nos associations regroupent essentiellement des propriétaires occupants ;
  2. nos copropriétés adhérentes (près de 14.000 syndicats de copropriétaires représentant près d'un million de logements) sont situées partout, y compris bien sûr dans les quartiers populaires dits « sensibles » ;

  1. nos associations participent depuis vingt ans - aux côtés des opérateurs historiques - au traitement des copropriétés en difficulté ou dégradées ;
  2. nos associations travaillent avec un certain nombre de collectivités qui connaissent un fort taux de « fragilité », relations parfois anciennes (exemple : Ville Nouvelle de Cergy-Pontoise depuis plus de vingt ans) ;
  3. enfin nos associations ont pour objet social premier :
o   l'aide à la maîtrise de la gestion et des charges ;
o   la formation des organes de gestion des copropriétés.
Ainsi nos associations sont-elles :
  • non seulement, très concernées par ces problèmes de fragilité ;
  • mais aussi reconnues comme « expertes » en matière de traitement et de redressement des copropriétés fragiles ou en difficulté, ce qui nous donne une légitimité à aborder ces questions d'un point de vue également méthodologique et à faire des contre-propositions éventuelles.
 

II.  Un outil de repérage ou de dépistage via l'analyse et le suivi des annexes comptables

La première hypothèse formulée par les tenants d'un registre d'immatriculation sophistiqué est que le suivi financier des copropriétés permettrait de favoriser le repérage précoce des difficultés et le repérage des « basculements » éventuels.
La deuxième hypothèse est que ce suivi pourrait facilement se faire grâce à l'analyse des annexes comptables normalisées que toutes les copropriétés ont l'obligation de produire.
D'où l'idée d'une centralisation et d'un traitement de ces annexes par un établissement public permettant de créer et d'alimenter un fichier central au service du dépistage.
Nous allons expliquer :
  • pourquoi cette proposition nous laisse très sceptiques pour des raisons intrinsèques (difficultés diverses pour recueillir les données) ;
  • pourquoi cette proposition nous laisse (encore plus) sceptiques pour des raisons extrinsèques (la méthode n'est, selon nous - et nous verrons pourquoi - ni vraiment pertinente, ni efficace) ;
  • ce que nous proposons, de notre côté, de mettre en place (à partir de ce qui existe déjà ou non) pour résoudre les problèmes réels qui se posent déjà et se poseront de plus en plus.

 

III.  Les diverses raisons qui expliquent notre scepticisme

La proposition faite a le mérite de chercher des solutions aux problèmes soulevés. Toutefois l'outil proposé ne nous semble ni réalisable, ni pertinent pour les raisons suivantes :
 
1. Difficultés qu'il y aura à renseigner ce fichier (au départ et dans le temps)
-     Il sera sans doute renseigné partiellement dès le départ, ceci pour deux
raisons :
o fortes réticences (ou refus) des copropriétés « normales » à communiquer des données financières dont elles ne savent pas comment ni par qui elles pourraient être utilisées (en dehors de l'ANaH)... ; le fait que les données issues des exploitations des annexes pourraient être utilisées à des fins « commerciales » ou autres et entraîner des crispations (ou abus) ne doit pas être négligé.
o difficulté, voire incapacité pour un certain nombre de copropriétés désorganisées à satisfaire à la demande.
  • Il y aura par ailleurs - au fil des ans - des difficultés de mise à jour de ces données, ceci pour les mêmes raisons.
  • On répondra peut-être que pour combattre le refus, la mauvaise volonté ou les difficultés, il faudra instituer des sanctions (et les faires appliquer), ce qui serait source d'autres problèmes et paraît peu réaliste.
2. Faible efficacité voire inefficacité du dispositif proposé
Outre les risques concernant la faisabilité même du dispositif, nous sommes également peu convaincus par cette proposition d'un point de vue méthodologique.
 
-     Nous pensons, plus précisément, que cette méthode de registre centralisé est
à la fois peu pertinente (elle ne permettra pas vraiment de repérer des
fragilités qui ne seraient pas déjà identifiées localement) et à la fois très peu
efficace en ce qui concerne le traitement proprement dit (des fragilités ou des
difficultés).
•    En effet, abstraction faite de la méthode de repérage, que se passera-t-il une
fois que l'on aura repéré grâce à cette méthode des fragilités qui n'auraient
pas été révélées autrement ?
D'après nous, rien ou pas grand-chose. Ni l'État ni l'ANaH ni les Collectivités ou les opérateurs n'auront pour autant les moyens de proposer une intervention adaptée et ce dépistage précoce en restera là.
Enfin - et c'est le plus important - ni le conseil syndical, ni les copropriétaires ni le syndic n'ayant été associés au « diagnostic », celui-ci restera inopérant.
•    Cette absence d'articulation entre observation statistique et traitement a déjà
été mise en évidence à l'occasion de certaines expériences
« d'observatoires ».
Le cas des études départementales (exemple : en Essonne par Ville et Habitat) réalisées à partir des fichiers des impôts croisés avec les fichiers INSEE le prouvent : en réalité, on ne fait que confirmer par des chiffres une connaissance diffuse de la situation, mais cette confirmation n'apporte ni élément de diagnostic supplémentaire, ni stratégie d'intervention, ni, surtout, de mobilisation des acteurs.
 
•   On nous répondra peut-être que l'analyse croisée des données financières permettra de fournir un diagnostic et d'indiquer les remèdes (stratégie de redressement ou traitements).
Il s'agirait là, à notre avis, d'une pure illusion « techniciste ». Certes une analyse fine des comptes et des charges (analyse comptable, mais surtout extracomptable) permet de repérer certaines pathologies et de poser des hypothèses, mais notre expérience en matière de contrôle de gestion des copropriétés comme en matière de redressement nous permet de dire que la seule analyse financière issue des annexes comptables reste quasi-inopérante.
  • Nous allons, par contre, montrer au point V comment un autre dispositif de dépistage et d'analyse peut - lui - être opérant et efficace.
  • Nous proposons, en effet, une voie très différente, partant du bas (du terrain), c'est-à-dire des copropriétaires eux-mêmes et des collectivités territoriales et qui permet :
•    non seulement de garantir un repérage précoce ;
 •  mais aussi - et c'est l'essentiel - d'opérer un premier diagnostic impliquant   directement les acteurs concernés, donc de permettre le lancement d'un traitement précoce.
  • On va d'ailleurs constater que cette « voie » s'appuie aussi sur un « fichier» des copropriétés (mais un fichier beaucoup plus léger) et une analyse de certaines données financières (mais uniquement celles concernant les charges).
  • Avant cela, répondons à une autre question : « Faut-il intégrer dans le registre des immatriculations une fiche descriptive concernant le bâti et les équipements ? ».

 

IV. Introduire une fiche technique de renseignement sur chaque copropriété ?

Les pouvoirs publics souhaitent profiter de la mise en place de ce registre d'immatriculation pour intégrer une fiche technique par immeuble.
Même si l'idée - a priori - peut sembler judicieuse, chacun sent bien que l'on rentre là dans une complexité supplémentaire qui va aussi entraîner des réticences, des rejets, des surcoûts (honoraires de syndic), des difficultés de mise à jour, des possibilités également de sur-utilisation ou d'utilisation détournée à des fins commerciales.
 
Nous pensons qu'au lieu de créer un ficher central compliqué en partant de rien, il faut d'abord inciter les copropriétés à mieux se connaître de façon dynamique (comme l'a préconisé d’ailleurs le rapport BRAYE) et renvoyons donc à notre proposition du point VI concernant la réforme du décret sur le carnet d'entretien et la mise en place d'un vrai carnet de gestion et d'entretien au service des copropriétaires.
 
Pour conclure - et même si notre démonstration est très succincte - nous pensons que si l'idée de registre d'immatriculation est bonne, mais que :
  • le contenu proposé est trop sophistiqué ;
  • sa lourdeur est forcément « énorme » ;
  • son efficacité sera en fait limitée à la simple confirmation d'un constat déjà effectué localement par les collectivités ou acteurs locaux.
Beaucoup de travail (et de conflits), beaucoup d'argent aussi pour des résultats forcément décevants à notre avis.

 

V.   Une   proposition   alternative   de   l'ARC   reposant  sur  quatre dispositifs complémentaires

Notre proposition opérationnelle repose sur quatre dispositifs qui sont en interaction et peuvent être « construits » successivement ou parallèlement. A noter que notre proposition est en cohérence totale avec les propositions du rapport BRAYE.
 
A.  Premier dispositif : Les « Observatoires locaux des copropriétés » associant les collectivités, les copropriétaires et leurs associations, les professionnels, dont les syndics, les travailleurs sociaux, les entreprises, les différentes associations locales, etc..
B.  Deuxième dispositif : Le fichier des copropriétés (immatriculation) intégrant le recensement des « incidents », double fichier qui sera d'abord utilisé par les « Observatoires locaux des copropriétés ».
C.  Troisième dispositif : L'« étiquette charges » et  l'« étiquette gestion patrimoniale ».
D.  Quatrième dispositif : La généralisation de la mise en place de la « procédure d'alerte » dès que le niveau des impayés dépasse 25 %.
 
Présentons plus en détail ces quatre dispositifs.
 

Premier dispositif : les « Observatoires locaux des copropriétés »

Partenaires : les collectivités, les copropriétaires et leurs associations, les professionnels, dont les syndics, les travailleurs sociaux, les entreprises, les différentes associations locales, etc.
 
Malgré le nom de ce dispositif (« observatoire »), précisons qu'il s'agit - dans notre esprit - d'un dispositif local simple (pouvant exister sous forme d'une simple commission) qui pourra avoir trois rôles :
 
  1. centraliser localement les renseignements sur les copropriétés qui commencent à avoir des problèmes - y comprit, bientôt, en utilisant les données fournies par les « fichiers » et les « étiquettes » (voir deuxième et troisième dispositifs) ;
  2. mettre les partenaires de ces observatoires en relations (élus ; agents territoriaux ; travailleurs sociaux ; associations ; syndics ; conseils syndicaux...) ;
  3. enfin mettre au point localement et/ou diffuser les bonnes pratiques et bonnes recettes en matière de mobilisation ou de traitement des fragilités des copropriétés.
L'intérêt méthodologique de ces observatoires est que le repérage participe déjà au début du traitement des fragilités. C'est ce qui a pu être observé - par exemple - avec l'étiquette charges, comme on le verra avec le troisième dispositif: lorsqu'une copropriété est repérée, via l'« étiquette de charges », comme ayant un niveau trop élevé de charges, ce repérage - grâce à une information détaillée par poste de charges - induit déjà une feuille de route et de traitement des fragilités (identification des postes les plus citriques et sur lesquels il faut agir en priorité pour faire baisser les charges).
Par ailleurs le fait que tous les acteurs locaux soient associés aux échanges qui ont lieu dans le cadre de cette commission fait que l'on agrège - d'emblée - observation, identification et action.
Actuellement nous pensons qu'il serait beaucoup plus efficace d'inciter et d'aider les Villes et agglomérations à mettre en place des « Observatoires locaux des copropriétés » et de leur donner des outils simples pour le faire, dont les « fichiers » et outils d'analyse des charges que nous présentons ci-après.

Deuxième dispositif : le fichier d'immatriculation des copropriétés intégrant le recensement des « incidents », et utilisable par les « Observatoires locaux des copropriétés »

Il est absolument nécessaire de mettre en place un « fichier» des copropriétés : cela fait des années que beaucoup d'acteurs - dont l'ARC et l'UNARC - demandent la mise en place d'une « immatriculation » des copropriétés.
Nous proposons, en ce qui nous concerne, la mise en place d'un fichier assez simple, mais à deux niveaux.
 
1.  Premier niveau : fichier de simple immatriculation
  • description  de  la  copropriété :   date  de  construction,   date  de  mise  en copropriété, nombre de lots ; affectation des lots, etc. ;
  • précisions de base concernant l'organisation de la gestion et les organes de gestion :
o   syndicat principal ;
o   syndicat secondaire ;
o   adhésion à une ASL ou AFUL ;
o nom des syndics successifs et statut - c'est-à-dire professionnel ou non, ou coopératif (a contrario, surtout pas le nom du président du conseil syndical...).
Comme on le voit, nous sommes pour un système simple d'immatriculation qui ne concernerait aucune donnée sensible, car « confidentielle » ou « stratégique », ni aucune donnée « technique ». Soyons modestes et réalistes. Par contre, comme nous le verrons plus loin, il convient de « muscler » le carnet d'entretien des copropriétés pour un usage interne.
 
2. Deuxième niveau : fichier des incidents importants de la copropriété, avec des indicateurs à la fois facilement identifiables et très pertinents. Ce fichier enregistrerait  simplement  des   situations   ou   événements   connus,   voire « publics » mais non recensés ailleurs:
  • absence de syndic (via les notaires) ;
  • arrêté d'insalubrité /de péril / ou sur les équipements (via les Villes ou la Préfecture) ;
  • nomination d'un administrateur provisoire ou d'un mandataire ad hoc selon les procédures 29-1 .A ou 29.1 de la loi de 1965 (via le Tribunal de Grande Instance ou l'Administrateur provisoire désigné) ;
  • existence de procédures judiciaires engagées contre le syndicat des copropriétaires (via TGI) ;
  • incidents de paiements des factures d'eau, de gaz ou d'électricité (via les fournisseurs).
Le fichier simple que nous souhaitons mettre en place (immatriculation avec recensement des incidents) doit pouvoir directement alimenter les « observatoires locaux » (qui l'interrogeront) en permettant de repérer les copropriétés fragiles ou fragilisées d'identifier rapidement la situation et de commencer à orienter l'action.
Tel que nous le concevons, ce fichier non seulement sera très utile (centralisation de données « publiques ») mais sera bien vécu par tous, car non intrusif (basé sur des données publiques ou facilement accessibles par les partenaires).
Par ailleurs les collectivités pourront plus rapidement être informées des « incidents de parcours » des copropriétés - information jugée manquante actuellement - et pourront agir vite avec les instances de la copropriété et les partenaires éventuels (fournisseurs d'eau ou d'énergie par exemple, mais aussi les administrateurs provisoires, les mandataires ad hoc, etc.).
 
 

Troisième dispositif : l'« étiquette charges » et l'« étiquette gestion patrimoniale ».

L'« étiquette charges » et l'« étiquette gestion patrimoniale » sont sans doute appelées à révolutionner totalement l'approche et l'action au sein des copropriétés, donc à révolutionner l'intervention « précoce ».
L'idée (en quelques mots) est la suivante :
  • le niveau de charges et la qualité (ou non) en matière de gestion patrimoniale sont deux indicateurs très puissants concernant la situation d'une copropriété ;
  • par ailleurs ces deux étiquettes fournissent, en plus, une ligne de conduite en matière de maîtrise des charges et de mise en place d'une action adaptée de gestion patrimoniale.
Dès lors, toute personne dans une copropriété pourra elle-même savoir « où » se situe sa copropriété dans l'échelle des difficultés potentielles et engager une action corrective ou faire savoir (à l'« Observatoire local », par exemple) ce qu'il en est.
Voici pourquoi il faut pouvoir développer ce qui a déjà été fait dans ce sens et le consolider.
En ce qui concerne « l'étiquette charges », grâce au logiciel mis au point par l'ARC et à notre banque de données (OSCAR +), il va être bientôt possible de savoir très vite (uniquement par la communication volontaire d'un seul copropriétaire de deux des cinq annexes comptables) à quel niveau de charges se situe une copropriété (en matière de charges et de gestion), quels sont les postes médiocres (à traiter donc pour maîtriser la situation).
Or, maîtriser les charges, c'est déjà redresser la copropriété.
Cette étiquette est déjà opérationnelle et nécessite juste une :
  • consolidation ;
  • puis une « reconnaissance » officielle et une diffusion.
Nous allons lancer une expérience de consolidation en 2013 avec la société PAP (de Particulier A Particulier) et serions tout à fait ouverts à une reprise « publique » de ce dispositif (CSTB - Ministère du Logement - QUALITEL, etc.).

Quatrième dispositif : la généralisation de la mise en place de la « procédure d'alerte » dès que le niveau des impayés dépasse 25 %

L'article 29-1 .A (de loi du 10 juillet 1965) créé par la loi du 25 mars 2009 aurait dû être un outil essentiel de prévention et de diagnostic de fonctionnement pour les copropriétés fragiles. Malheureusement bien que son déclenchement soit obligatoire, il n'est pas utilisé, car aucune sanction ne pèse sur les syndics qui ne mettent pas en œuvre cette procédure.
 
Nous proposons donc une disposition simple pour réformer la procédure : faire en sorte que - si le syndic n'a pas mis en route la procédure COMME LA LOI L'Y OBLIGE, il soit automatiquement condamné à payer les honoraires de mission du mandataire ad hoc.
La mise en place systématique de la procédure d'alerte aura deux vertus :
-    préventive : les syndics - pour ne pas avoir à déclencher celle-ci - agiront pour maintenir la barre en dessous des 25 % d'impayés ;
 
-     curative : si les syndics n'arrivent pas à rester en dessous des 25 %, alors la
procédure d'alerte permettra de mettre en place d'autres moyens.
À noter qu'il faudra aussi se pencher sur la nomination des professionnels désignés comme mandataires ad hoc ainsi que sur la formation de ces mandataires, chantier également en cours en ce qui nous concerne.
 
*
On le voit, grâce à ces quatre dispositifs conjugués, nous pouvons mettre en marche une dynamique profonde, efficace, basée sur des informations simples, des objectifs également simples et une dynamique collective essentielle pour obtenir des résultats.
 
C'est tout le contraire - pensons-nous - du dispositif « aérien », complexe, et donc coûteux, mais aussi déconnecté des réalités du fonctionnement des copropriétés et non porteur de dynamique d'amélioration, qu'est celui de la centralisation des annexes comptables et de leur exploitation également « centrale ».
La proposition présentée ici permet de répondre dans le sens des améliorations portées par le projet d'immatriculation des copropriétés tout en évitant l'écueil de faire appel à des données qui seront difficilement accessibles faute de confiance et de mobilisation des acteurs, difficilement exploitables faute de moyens pour traiter les informations, et pour lesquelles une suite sera difficile à donner.

 

VI.   Deux   pistes   complémentaires   pour   agir   mieux   dans   les copropriétés

 
Pour favoriser une meilleure connaissance des performances des copropriétés, mais aussi favoriser l'action continue et simple des copropriétaires eux-mêmes, nous renouvelons deux propositions que nous faisons maintenant depuis plusieurs années et qui concernent le Ministère du Logement.
  1. améliorer le plan comptable adapté aux copropriétés (décret de mars 2005) ;
  1. améliorer le décret concernant le « carnet d'entretien », qui pourrait devenir
un « carnet de gestion et d'entretien » (décret du 30 mai 2001).
 
 
1. Amélioration du décret concernant le plan comptable
En résumé, il s'agit d'abord d'introduire dans les annexes comptables des données simples et nouvelles :
  • le taux d'impayés (permettant le déclenchement de la procédure d'alerte) ;
  • le nombre de kWh consommés par mètre carré de surface habitable.
Ces données permettent de dégager deux critères essentiels concernant soit la fragilité soit la performance (ou le manque de performance plutôt) d'une copropriété.
Par ailleurs, il faudrait aussi pouvoir alléger les annexes comptables (préalable à l'amélioration du décret) comme tout le monde le demande depuis leur mise en place (janvier 2007).
 
Pour cela, la mise en place d'un « bilan » de l'application du décret comptable s'impose, bilan qui peut facilement et rapidement être conduit par une commission paritaire (syndics/copropriétaires) sous la présidence du Conseil National de la Comptabilité.
 
2. Réforme du décret concernant le « carnet d'entretien » et mise en place d'un vrai « carnet de gestion et d'entretien »
Tout le monde est bien d'accord : l'actuel carnet d'entretien des copropriétés est très pauvre et, étant renseigné a minima, ne sert à rien.
Cela tient à ce que ce carnet a une double fonction contradictoire et doit à la fois servir au suivi de la gestion patrimoniale de la copropriété (et donc être complet) mais aussi à la fois servir à l'information des candidats acquéreurs
(et donc être synthétique).
Pour ces raisons contradictoires, le décret n'impose finalement que le strict minimum et donc ne sert à rien.
Il faudrait - là encore - faire un « bilan » rapide de la mise en œuvre de ce « carnet » et proposer une réforme (simple) de ce décret de façon à obliger les copropriétés à établir un vrai « carnet de gestion et d'entretien » associé à une fiche synthétique à l'usage des acquéreurs.
Ce carnet - en favorisant la connaissance de ce qui a été fait / n'a pas été fait -participera à la connaissance de l'immeuble et à l'action d'entretien permanent, gage de traitement préventif.
Nous proposons :
  1. qu'un  modèle de « carnet (simple)  de gestion et d'entretien »  soit élaboré ;
  2. que les copropriétés puissent le mettre en place de façon progressive en leur donnant cinq ans pour le faire.
*
Conclusion
Les propositions du rapport du Président de l'ANaH sont, comme chacun sait,  très stimulantes, et nous sommes très satisfaits que le rapport de Dominique BRAYE permette de lancer une réflexion sur l'opportunité et la pertinence de dispositifs d'action préventive et précoce.
 
Nul besoin, néanmoins, d'aller au-delà de ce qui a été proposé, étant ici rappelé que le mieux est l'ennemi du bien.
 
Nous espérons par ailleurs avoir contribué à éclairer le débat et avoir fourni, à notre tour, quelques pistes opératoires.
 
ARC, Mai 2013