Loi ELAN : une affectation du fonds travaux qui doit tenir compte de l’existence des parties communes spéciales ou de la clé de répartition

05/02/2019 Actions Action

Dès la mise place du fonds travaux par la loi ALUR, l’ARC a alerté les ministères sur les difficultés que cela suscitera non pas pour sa constitution mais pour son utilisation effective.

Deux ans après son entrée en vigueur, les problèmes surgissent, expliquant que le législateur ait suivi les recommandations de l’ARC en reprenant tout simplement l’amendement que nous avons rédigé.

Présentons le problème pour ensuite indiquer ce que prévoit l’article 204 de la loi ELAN qui a modifié l’article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965.

I. Un risque d’enrichissement sans cause des copropriétaires

L’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, modifié par la loi ALUR, précise que le fonds travaux doit être appelé sur la base de la clé générale, indépendamment de l’existence de clés ou de parties communes spéciales au sein de la copropriété.

Ainsi, la logique du législateur est de considérer que le fonds travaux est acquis au syndicat des copropriétaires, devant être appelé uniquement sur la clé générale.

Néanmoins, là où la réflexion devient plus complexe, c’est lorsqu’il faut utiliser le fonds travaux pour une opération qui répond à une autre clé que celle générale.

Si on devait utiliser le fonds travaux sans respecter la clé de répartition, le risque est que certains des copropriétaires bénéficient d’un enrichissement sans cause tandis que les autres seront pénalisés avec une affectation de sommes moins importantes que celles qu’ils ont constituées.

Le cas le plus flagrant est lorsque l’assemblée générale vote l’affectation du fonds travaux pour une opération qui concerne les ascenseurs.

Si l’on devait utiliser le fonds travaux de manière aveugle (en clé générale), le copropriétaire du rez-de-chaussée verrait sa quote-part de fonds travaux utilisée alors qu’il ne bénéficie pas de l’ascenseur.


En revanche, le copropriétaire du dernier étage qui a des millièmes « ascenseur » importants bénéficierait de l’affectation du fonds travaux, contribuant au final moins que ce qu’il aurait dû payer.

La loi ELAN est donc venue préciser un principe de bon sens préconisé depuis fort longtemps par l’ARC.

II. Le respect de la clé de répartition

L’article 204 de la loi ELAN a introduit une nouvelle disposition dans l’article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 qui précise :

« Cette affectation doit tenir compte de l'existence de parties communes spéciales ou de clefs de répartition des charges. »

Autrement dit, le syndic devra impérativement respecter l’affectation du fonds travaux en fonction de la clé de répartition correspondant aux travaux votés.

Pour reprendre l’exemple indiqué précédemment, le syndic devra affecter le fonds travaux en fonction de la clé « ascenseur » et non l’imputer en clé générale.

Cette disposition implique que le syndic doit tenir les comptes de la copropriété en distinguant pour chaque lot (et non par copropriétaire) la quote-part de fonds rattachée.

Ainsi, seuls les lots concernés par les travaux seront concernés par l’utilisation du fonds travaux conformément au vote de l’assemblée générale, laissant en l’état les autres lots.

Par conséquent, le copropriétaire du rez-de-chaussée qui ne bénéficie pas de l’ascenseur verra sa quote-part de fonds travaux intacte alors que celle des autres étages et surtout du dernier, verra son crédit du fonds travaux utilisé à hauteur de la clé « ascenseur » et éventuellement devra compléter la différence si sa quote-part de charges est plus importante que son crédit de fonds travaux.

Ce principe implique une vigilance accrue du conseil syndical afin de vérifier d’une part si le syndic a bien pris l’ensemble des mesures pour avoir une comptabilité qui permet de suivre la bonne affectation du fonds travaux et d’autre part qu’il existe une traçabilité permettant à chacun des copropriétaires de justifier son crédit de fonds travaux.