Prêt en copropriété : la loi de 1965 enfin complétée, mais pas encore applicable
Le vide juridique vient enfin d’être comblé : ce vide concerne les conditions de majorité en cas de vote d’un prêt en copropriété.
En effet la loi de 1965 n’avait jamais explicitement tranché le problème de savoir quelle était la majorité nécessaire pour faire voter un prêt collectif s’imposant à tous.
Nous (l’ARC et l’UNARC) et la majorité des juristes disions : « Dès lors que des travaux sont votés, on ne peut pas imposer à un copropriétaire - qui a peut-être par ailleurs une source de financement très bon marché ou même gratuite (une subvention) - de payer sa quote-part d’un prêt collectif (pouvant être désavantageux) ».
La conséquence de cette position était la suivante : nous estimions que pour voter un prêt collectif applicable à tous, il fallait l’unanimité .
Naturellement les banquiers et de nombreux syndics, dont des syndics proches des banquiers, voulaient imposer une autre vision : « Du moment que la majorité est d’accord, un prêt collectif peut s’imposer à TOUS ». Position évidemment non justifiée juridiquement et injuste, ceci d’autant plus que les prêts collectifs sont souvent assez coûteux surtout lorsque l’on rajoute les frais de syndic.
Voilà pourquoi nous avions demandé au Ministère de la Justice et au Ministère du Logement d’une part d’interroger la Commission Relative à la Copropriété (CRC) sur ce point, d’autre part de compléter la loi de 1965 pour trancher une bonne fois pour toutes le problème.
Les deux ministères et la CRC donnèrent rapidement un avis conforme à celui de l’ARC et de l’UNARC, mais il a fallu néanmoins presque deux ans avant que la loi soit enfin complétée sur ce point.
- Pour qu’un prêt soit imposé à TOUS les copropriétaires, il doit être voté à l’unanimité.
- À défaut le prêt ne s’appliquera qu’aux seuls copropriétaires ; il faut à ce moment qu’il soit voté à la même majorité que celle nécessaire pour les travaux (ou acquisitions) à financer.
- L’adhésion des copropriétaires doit être confirmée ou adressée au syndic par écrit après l’assemblée générale.
- Le prêt doit être obligatoirement garanti par une caution pour éviter la solidarité entre copropriétaires.
Nous attendons encore, maintenant (décidément), un décret pour que la loi soit appliquée.
Nous reviendrons très vite dans les semaines qui viennent - et dès parution du décret - sur ces problèmes.
En attendant voici le texte de loi : (article 103 de la loi WARSMANN) :
- Article 103
I. ― La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° Après l'article 26-3, sont insérés des articles 26-4 à 26-8 ainsi rédigés :
« Art. 26-4. - L'assemblée générale ne peut, sauf à l'unanimité des voix des copropriétaires, décider la souscription d'un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires pour le financement soit de travaux régulièrement votés concernant les parties communes ou de travaux d'intérêt collectif sur parties privatives régulièrement votés, soit des actes d'acquisition conformes à l'objet du syndicat et régulièrement votés.
« Par dérogation au premier alinéa, l'assemblée générale peut également, à la même majorité que celle nécessaire au vote des travaux concernant les parties communes ou de travaux d'intérêt collectif sur parties privatives, voter la souscription d'un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires lorsque cet emprunt a pour unique objectif le préfinancement de subventions publiques accordées au syndicat pour la réalisation des travaux votés.
« Par dérogation au premier alinéa, l'assemblée générale peut, à la même majorité que celle nécessaire au vote soit des travaux concernant les parties communes ou de travaux d'intérêt collectif sur parties privatives, soit des actes d'acquisition conformes à l'objet du syndicat, voter la souscription d'un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires au bénéfice des seuls copropriétaires décidant d'y participer.
« Les copropriétaires qui décident de participer à l'emprunt doivent notifier leur décision au syndic en précisant le montant de l'emprunt qu'ils entendent solliciter, dans la limite de leur quote-part des dépenses. A peine de forclusion, la notification au syndic doit intervenir dans le délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée générale pour les copropriétaires opposants ou défaillants et, pour les autres copropriétaires, à compter de la tenue de l'assemblée générale.
« Art. 26-5. - Le contrat de prêt conclu en application de l'article 26-4, conforme aux conditions générales et particulières du projet de contrat de prêt jointes à l'ordre du jour de l'assemblée générale, ne peut être signé par le syndic avant l'expiration du délai de recours de deux mois prévu au deuxième alinéa de l'article 42.
« Art. 26-6. - Le montant de l'emprunt mentionné à l'article 26-4, qui ne peut excéder le montant total des quotes-parts de dépenses des copropriétaires décidant d'y participer, est versé par l'établissement bancaire au syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic.
« Seuls les copropriétaires bénéficiant de l'emprunt sont tenus de contribuer :
« 1° A son remboursement au syndicat, en fonction du montant pour lequel ils participent à l'emprunt et selon la grille générale établie pour la répartition des quotes-parts de dépenses selon les principes prévus aux articles 10, 10-1 et 30 ;
« 2° Au paiement au syndicat des intérêts, des frais et des honoraires y afférents, en fonction du montant pour lequel ils participent à l'emprunt et selon la grille spécifique établie pour la répartition des accessoires.
« Art. 26-7. - Le syndicat des copropriétaires est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire après constat de la défaillance d'un copropriétaire bénéficiant de l'emprunt mentionné à l'article 26-4 pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu'au paiement des accessoires.
« Le cautionnement solidaire ne peut résulter que d'un engagement écrit fourni par une entreprise d'assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit ou une institution mentionnée à l'article L. 518-1 du code monétaire et financier.
« Au regard du privilège prévu au 1° bis de l'article 2374 du code civil, les sommes correspondant au remboursement de l'emprunt ainsi qu'au paiement des accessoires sont assimilées au paiement des charges et travaux. Après mise en œuvre de la caution, celle-ci est subrogée de plein droit dans l'exercice du privilège du syndicat des copropriétaires prévu au même 1° bis.
« Art. 26-8. - Lors d'une mutation entre vifs du lot d'un copropriétaire bénéficiant de l'emprunt mentionné à l'article 26-4, même si cette mutation est réalisée par voie d'apport en société, les sommes restant dues par le copropriétaire au titre du remboursement de l'emprunt ainsi que du paiement des accessoires deviennent immédiatement exigibles. Toutefois, en cas d'accord du prêteur et de la caution, l'obligation de payer ces sommes peut être transmise au nouveau copropriétaire avec son accord. Le notaire informe le syndic de ces accords. » ;
2° Après la première phrase du premier alinéa de l'article 33, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Les copropriétaires qui entendent bénéficier de cette possibilité doivent, à peine de forclusion, notifier leur décision au syndic dans le délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal d'assemblée générale. »
II. ― Les modalités d'application des articles 26-4 à 26-8 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
III. ― Le I est applicable à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la publication du décret en Conseil d'Etat prévu au II.