Un député écologiste face aux reculades de madame duflot

16/01/2014 Actions Action

Un député écologiste face aux reculades de madame duflot
 
L’échange qui suit est à la fois très intéressant et désespérant.
 
L’ARC a interpelé nominativement tous les députés dont, spécialement, les députés écologistes.
 
On va voir que ce n’est ni parce qu’on est député ni parce qu’on est écologique qu’on est pour cela très bien renseigné ou immunisé contre l’ignorance et incidemment la « langue de bois ». Ceci dit, dans le cas présent c’est à la fois angoissant et, répétons-le, désespérant.
 
  1. La lettre de l’ARC
Aux députés Ecologiques
 
Paris, le 24 décembre 2013
Madame la députée,
Monsieur le député,
 
Il s’est passé la semaine dernière à l’Assemblée Nationale un fait particulièrement grave et préoccupant.
 
En effet, Madame Duflot, ministre du Logement, est - suite aux énormes pressions des professionnels de l’immobilier - revenue sur un certain nombre de dispositions votées en première lecture (par l’Assemblée Nationale et le Sénat) concernant directement ou indirectement la Copropriété et les copropriétaires.
 
Vous trouverez jointe une explication succincte de ce qui s’analyse pour nous comme une régression (communiqué de Presse que nous avons diffusé le 23 décembre).
 
Nous souhaiterions :
  • que vous puissiez vous faire votre opinion à ce sujet et nous sommes évidemment à votre entière disposition pour répondre à toutes vos questions ;
  • que vous puissiez - si  vous partagez notre analyse - intervenir tant qu’il est encore temps avant le vote de la loi.
 
Il semblerait que Madame Duflot ait cédé aux pressions des chambres syndicales de professionnels sur les problèmes de copropriété dans le but (compréhensible) de mieux faire passer les dispositions concernant le secteur locatif et d’apaiser la « grogne » des professionnels.
 
Nous posons cependant la question : peut-on sacrifier le secteur (aujourd’hui dominant et populaire) de la Copropriété, qui est pourtant lui aussi en souffrance, même pour favoriser l’adoption plus facile de mesures concernant la location ?
 
Souhaitant engager avec vous - en tant que dirigeants de la première association nationale représentative de conseils syndicaux - un dialogue constructif sur ces sujets avant le passage en deuxième lecture, et restons à votre disposition, nous vous prions de recevoir, Mesdames, Messieurs, l’assurance de nos salutations distinguées.
 
Fernand CHAMPAVIER                                                Bruno DHONT              
 
Président de l’ARC                                                       Directeur de l’ARC.       
 
P.J : communiqué de Presse »
(Voici le communiqué de Presse que nous avons diffusé le 23 décembre 2013).
 
 
Communiqué de presse
Copropriété : les 5 coups de poignard de Madame DUFLOT
 
 
 
 
 

En l’espace d’une semaine, Madame la Ministre du Logement Cécile DUFLOT vient - sur pression des chambres professionnelles - de céder aux syndics de copropriété sur des sujets de première importance.
 
Le recul est total. La régression est inquiétante, ceci sur 5 points essentiels.
 
  1. Madame DUFLOT accorde de fait aux professionnels de l’immobilier l’Ordre professionnel qu’ils réclament depuis des années et qui va précisément leur permettre d’imposer leur logique et leur ordre (ce que nous ne voulons en aucune mesure). Non seulement les professionnels seront majoritaires au sein du Conseil National de l’Immobilier, mais les syndicats professionnels choisiront eux-mêmes les professionnels qui en feront partie.
 
  1. Dans ce Conseil National, Madame DUFLOT accorde une place résiduelle aux usagers via les seules associations de consommateurs, ainsi les associations de copropriétaires comme l’ARC ou l’UNPI seront écartées, ce que réclamaient les professionnels depuis un an : les contre-pouvoirs associatifs seront ainsi réduits à leur plus simple expression, à la satisfaction des professionnels. Vive la démocratie ! merci Madame DUFLOT…
 
  1. Par ailleurs, Madame DUFLOT vient de supprimer d’un trait de plume la création (réclamée par tous les usagers depuis des années) des Commissions régionales de contrôle, évidemment refusées à grands cris par les syndics professionnels. Ainsi disparaît le seul dispositif adapté de contrôle et de régulation des professionnels, qui gèrent pourtant le logement de plus de 50 % des français. À la place de ces commissions régionales, Madame DUFLOT institue UNE SEULE commission nationale qui sera évidemment une commission ALIBI, capable d’étudier seulement quelques dossiers par an.
 
  1. Madame DUFLOT rétablit par ailleurs (à la surprise de tous) la possibilité de dérogation au compte bancaire séparé pour toutes les copropriétés de moins de 15 lots principaux (soit environ 60 % des copropriétés !!!). Là encore, reculade totale.
 
  1. Enfin, Madame DUFLOT - pour les copropriétés de plus de 15 lots - continue à multiplier les obstacles visant à empêcher les syndicats de copropriétaires de choisir l’établissement financier dépositaire de leur compte bancaire séparé, ce qui laissera les copropriétés totalement dépendantes ET des syndics ET des banquiers.
 
Nous allons évidement communiquer largement sur ces reculades dans les jours qui viennent et contacter l’ensemble des responsables et acteurs du monde de la copropriété qui pensent, comme nous, que Madame la Ministre du logement Cécile DUFLOT est allée beaucoup trop loin dans les concessions anti-copropriétaires et pro-syndics.
Nous allons surtout saisir les parlementaires pour qu’ils réagissent et vous invitons à le faire en diffusant cet article à votre député en attendant un dossier plus complet et argumenté.
 
*
 
 
  1. La réponse du député ALAUZET (en date du 14 janvier), député du DOUBS
Bonjour,

Je reviens vers vous pour faire suite à votre courriel en date du 24 décembre dernier, dont je vous remercie.

Sachez que j'ai bien pris connaissance de vos observations quant aux dispositions de la loi ALUR concernant les copropriétés, et que je souhaitais vous faire part de mon analyse à ce sujet.

Les trois premiers points de votre argumentaire portent sur le contrôle, et je n'ai là-dessus pas d'avis particulier.

Le quatrième point me semble représenter une bonne évolution, dans le sens où les comptes séparés allaient occasionner des coûts supplémentaires qui auraient été répercutés sur les ménages. A mon avis, un compte commun ne gêne pas pour la transparence des comptes de la copropriété.

Concernant le 5ème point, il est demandé par les syndicats de copropriétaires de pouvoir choisir la banque : cela suppose que le syndic pourrait devoir traiter avec autant de banques que de copropriétés, ce qui peut devenir vite très compliqué pour le Syndic. Le fait de disposer de compte séparé était l'objectif de la loi, il ne faut sans doute pas aller plus loin.

Aussi, ma réponse va-t-elle dans le sens de celle de la Ministre, à laquelle je m'associe donc pleinement.

Recevez, Monsieur le Président, Monsieur le Directeur, l'expression de toute ma considération.

Cordialement,

Eric Alauzet,
Député du Doubs ».
 
  1. La réponse de l’ARC
 
Monsieur ALAUZET Eric
Député  du Doubs
  • 59, rue de Belfort
  • 2500 BESANÇON
 
 
Paris, le 14 Janvier 2014
Monsieur le député,
Nous vous remercions pour votre réaction à nos analyses de la loi ALUR et voulions vous apporter quelques éclairages, car il apparaît que vous avez une information à la fois déformée et bien insuffisante sur certaines réalités de la copropriété.
 
  1. Contrôle des professionnels : nous regrettons qu’un député écologiste n’ait pas d’opinion sur le contrôle citoyen des usagers concernant trois des professions qui suscitent le plus de plaintes de la part des concitoyens sur un des sujets majeurs : le logement et la gestion des logements.
 
  1. Le compte non séparé coûte aujourd’hui très cher aux copropriétaires comme vous en aurait persuadé la lecture d’un seul des 350 articles consacrés à ce sujet par notre association depuis dix ans, et coûte encore plus cher en cas de faillite d’un syndic.
Pensez-vous que la centaine d’euros nécessaire annuellement pour l’ouverture et la gestion d’un compte séparé n’est pas très largement compensée par la transparence financière, l’impossibilité de capter la trésorerie des copropriétés, la clarté concernant les produits, l’absence de financiarisation de la gestion, etc.
Nous sommes désolés que votre naïveté vous fasse répéter l’argument le plus éculé des syndics et vous invitons à vous rapprocher de nos adhérents pour plus d’éclairage sur ce sujet. Par ailleurs vous n’expliquez pas le « revirement » de madame Duflot qui disait justement le contraire depuis plus d’un an.
 
  1. Absence de mise en concurrence des banquiers
Là encore, il est singulier d’entendre dans votre bouche les arguments les plus grossiers des syndics : qui parle d’un banquier par copropriété alors qu’il y a tout au plus quatre banquiers qui s’occupent des copropriétés ? Par ailleurs, il existe désormais des systèmes d’interopérabilité qui semblent vous avoir échappé.
Comment pouvez-vous admettre - d’emblée - qu’il n’y aura aucune possibilité de mise en concurrence  entre banquiers et que les copropriétés seront l’otage du couple banquiers-syndics ?
Le compte séparé sans la transparence financière est un leurre comme le prouve le « livre blanc du faux compte séparé » que nous avons le plaisir de vous adresser.
 
Pour conclure, nous sommes très inquiets par votre réponse.
 
Certes un député ne peut pas tout savoir, mais il peut - il DOIT - se renseigner. Or, vous n’avez visiblement lu aucun des arguments détaillés que nous opposons - en tant que principale association représentative de copropriétaires - à Madame la Ministre.
 
C’est dommage.
 
Nous allons publier votre réponse bien regrettable et notre présente réponse en espérant que les militants écologistes sauront vous faire comprendre combien vous êtes loin de la réalité et combien vous défendez mal leurs intérêts.
 
Recevez, Monsieur le Député, l’assurance de nos salutations distinguées.
 
 
Fernand CHAMPAVIER                                                                   Bruno DHONT
Président de l’ARC                                                                           Directeur de l’ARC.
 
P.J : Le livre blanc du faux compte séparé »