VERS LA FIN DU RACCORDEMENT "FIBRE" GRATUIT ?....

27/03/2014 Actions Action

VERS LA FIN DU RACCORDEMENT "FIBRE" GRATUIT ?....

 
 
 
I - Une ordonnance passée inaperçue.
 
Vous n'avez sans doute pas remarqué l'ordonnance n° 2014-329 du 12 mars 2014…. Rassurez-vous, vous n'êtes pas les seuls dans le contexte actuel et rien n'a été fait pour "promouvoir" ce texte….
 
Alors, que dit-il ?...
 
Rappelons d'abord qu'il émane du Ministère du Redressement Productif et s'inscrit dans le cadre des ordonnances destinées à favoriser les petites et moyennes entreprises et - pour le présent texte - s'inscrivant dans le domaine de l'innovation et de l'économie numérique.
 
Le titre I est effectivement orienté vers les PME au travers de dispositions concernant l'attribution des noms de domaine internet… peu d'entre nous seront concernés à titre privé….
 
Le titre II, par contre, "rétablit le pouvoir de sanction de l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes"… l'ARCEP pour faire court. Celle-ci peut désormais "d’office ou à la demande du ministre chargé des postes, d’une organisation professionnelle, d’une association agréée d’utilisateurs, d’une personne physique ou morale concernée, du prestataire du service universel postal ou d’un titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 3, prononcer des sanctions à l’encontre du prestataire du service universel… des exploitants de réseau et des fournisseurs de services de communications électroniques".  Un texte qui s'inscrit dans l'esprit de ce que l'on nomme la "loi Hamon" et des "class actions". Sauf que, s'agissant de l'ARCEP, celle-ci nous a plutôt habitués jusqu'à présent à "botter en touche" et à renvoyer vers les tribunaux à chaque fois que notre association ou un adhérent demandait son intervention dans le cadre d'un litige….
 
 
II - Et la fibre optique, alors ?
 
Bon, en quoi cela concerne t'il la fibre optique, nous direz-vous ?....
 
Patience, nous y venons avec le titre III qui remet partiellement en cause le principe de gratuité du déploiement de la fibre érigé par la Loi de Modernisation de l'Economie du 4 août 2008 et les différents textes qui en découlent… rien moins que cela…. Dans les faits, cette ordonnance stipule que les opérations d’installation, de gestion, d’entretien et de remplacement des lignes se font aux frais de l’opérateur "sauf lorsque le propriétaire, le syndicat de copropriétaires ou l’association syndicale de propriétaires a refusé deux offres consécutives de cet opérateur dans les deux ans qui précèdent" et modifie dans ce sens les textes de loi concernés. En d'autres termes, cela signifie :
  • que l'article 24-2 de la loi du 10 juillet 1965 vous fait obligation d'inscrire à l'ordre du jour de la prochaine A.G. toute proposition émanant d'un opérateur de communication électronique…,
  • que vous devrez payer votre raccordement à la fibre optique si vous refusez plus de deux fois en deux ans cette proposition….
 
 
III - Une ordonnance regrettable.
 
Vous avez dit "abusif" ?... et vous avez bien raison….
 
Car cette décision est évidemment regrettable… :
  • regrettable car, avec un taux d'abonnements Très Haut Débit ne dépassant guère 16% des logements éligibles… seulement…, le THD ne mobilise guère les usagers quand il est gratuit et le rendre payant après deux propositions refusées n'améliorera surement pas cette situation…,
  • regrettable, car il faudrait peut être déjà analyser pourquoi nombre de copropriétés repoussent - à juste titre - leur décision de raccordement : absence de concurrence d'un second opérateur d'immeuble dans la plupart des zones de moyenne densité, remise en question des clauses de la première convention ARCEP de juin 2009… pourtant perfectible…, refus systématique de négocier la convention type actuelle… pourtant réputée négociable dans son article 14… etc…et…,
  • regrettable, car elle instaure une nouvelle discrimination entre usagers ayant signé "avant"… et "après"… tout comme la révision de la convention type ARCEP en mai 2011 a généré une discrimination par rapport à ceux ayant signé sur la base de la convention de juin 2009… notamment en allongeant sa durée de 15 à 25 ans… exemple malheureusement non limitatif….
 
 
IV - … et maladroite.
 
 
Et car cette décision est également très maladroite… :
  • maladroite car, s'inscrivant dans le cadre des ordonnances destinées à accélérer le déploiement du Très Haut débit, elle apparait en fait aux propriétaires comme un moyen de forcer leur décision de raccordement à la fibre… ce qui leur rappellera le "forcing" fait par NUMERICABLE en 2008 pour raccorder autoritairement à la fibre ses abonnés câblés…,
  • maladroite car, alors que le déploiement peine à maintenir son rythme (désengagement de FREE comme opérateur d'immeuble, incertitudes sur l'avenir de SFR, conjoncture économique…), les capacités de déploiement des opérateurs FttH sont elles à la hauteur de ce "forcing" ?...,
  • maladroite car, en cas de refus, les copropriétaires seront tentés de se tourner vers des technologies moins performantes (fibre / câble FttLa, VDSL2…) … mais légalement bien moins contraignantes…,
  • maladroite car, depuis le début du plan fibre, ARCEP et pouvoirs publics ont toujours pris en compte les désidératas des opérateurs… mais rarement les attentes et intérêts des usagers….
 
L'ARC est d'autant plus libre de faire ces constations qu'elle fut la seule association d'usagers ayant soutenu le déploiement du Très Haut Débit FttH depuis 2007 et ayant signé trois conventions avec des opérateurs avant que l'ARCEP ne finalise la sienne. Ce qui nous permet de résumer notre position dans cette formule :
 
LA FIBRE OPTIQUE… OUI, MAIS PAS A N'IMPORTE QUEL PRIX… MEME SI ELLE EST GRATUITE…
 
Alors, au moment où l'on tente de remettre en question cette gratuité, nous appelons nos adhérents à être encore plus vigilants et exigeants dans leurs négociations avec les opérateurs….
 
 
De son côté, l'ARC se tient à la disposition de Madame la Ministre des PME, de l'innovation et de l'économie numérique pour lui expliquer en quoi l'attentisme actuel est le reflet des attentes déçues des usagers et lui rappeler qu'il est vain de vouloir leur "forcer la main", car c'est oublier un peu vite que ce sont eux qui signent… ou ne signent pas les conventions….
 
 
 

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