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L’assemblée générale peut-elle refuser d’autoriser l’installation d’une plaque professionnelle sur la façade de la copropriété ?

Un cabinet d’avocats vient de s’installer au sein de notre copropriété, dans un appartement situé au 1er étage de notre immeuble. 

Ce cabinet souhaite apposer une plaque sur la façade de notre immeuble, à côté du portail d’entrée, et a ainsi fait porter une résolution en ce sens à l’ordre du jour de notre prochaine assemblée générale. Certains copropriétaires se montrent réticents à cette idée, évoquant des nuisances d’ordre esthétique. L’assemblée générale pourrait-elle refuser d’accorder cette autorisation sans risque ?

Chère Madame, Cher Monsieur,

Pour répondre à votre interrogation, il convient en tout premier lieu d’examiner votre règlement de copropriété.

Dans un premier temps, il s’agira de s’assurer que la destination de votre immeuble n’interdit pas l’exercice d’une activité libérale. S’il s’agit d’une destination réservée exclusivement à l’habitation (destination dite « strictement bourgeoise »), l’exercice de cette activité n’est pas autorisé, et l’assemblée générale pourra, à plus forte raison, refuser l’installation d’une quelconque plaque professionnelle.

En revanche, si votre copropriété a une destination dite « simplement bourgeoise », c’est-à-dire autorisant l’exercice d’une activité libérale ou, plus généralement, d’une activité de bureau, alors vous ne pouvez pas, par principe, refuser l’installation d’une plaque professionnelle.

Il arrive assez fréquemment que les règlements de copropriété contiennent une clause encadrant l’apposition de plaques professionnelles, que ce soit en précisant leur dimension, leur couleur, ou encore leur emplacement, et ce dans un objectif de préservation de l’esthétique de l’immeuble. Dans ces conditions, la demande d’autorisation devra se conformer aux stipulations du règlement de copropriété. Il ne devrait pas être possible, en revanche, pour le copropriétaire, de se passer de toute autorisation d’assemblée générale, même si la plaque installée respecte en tous points la clause du règlement de copropriété (cf. sur ce point un arrêt de la Cour de cassation, troisième chambre civile, 12 mars 1997, n° 95-15.953, ayant jugé que la clause autorisant un copropriétaire à effectuer sans autorisation de l’assemblée générale des travaux, même précisément définis, sur les parties communes de l’immeuble, doit être réputée non écrite ; les faits de l’espèce n’étaient toutefois pas relatifs à la pose d’un panonceau professionnel).

D’autre part, si le règlement de copropriété interdit purement et simplement l’installation de plaques professionnelles, cette clause pourrait également être réputée non écrite sur le fondement de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 prévoyant que « Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation. »

Dans le prolongement de ces développements, l’assemblée générale pourra-t-elle refuser sans motif particulier l’autorisation de cette plaque professionnelle ?

Suivant la même logique que pour les clauses du règlement de copropriété, l’assemblée générale ne peut pas, par ses décisions, empêcher une jouissance normale du lot eu égard à son affectation et à la destination de l’immeuble. Ainsi, l’éventuel refus opposé par l’assemblée générale devra pouvoir être suffisamment motivé par des désordres esthétiques ; on pourrait ainsi donner l’exemple d’une plaque qui s’avérerait surdimensionnée ou dont la couleur serait particulièrement criarde ou inadaptée à l’harmonie générale de l’immeuble… En revanche, un refus d’autorisation concernant une plaque de taille raisonnable et d’allure discrète pourrait tout à fait être sanctionné par le juge.

Réponse de l'expert
Action

Peut-on donner un pouvoir par SMS afin d’être représenté à l’assemblée générale ?

Lors de notre dernière assemblée générale, des copropriétaires ont indiqué avoir reçu des pouvoirs sur leur téléphone, par SMS. Le syndic a accepté ces pouvoirs sans faire de difficulté.

Pourriez-vous nous dire si cette pratique est bien conforme aux dispositions de la loi de 1965 ou à son décret de 1967 ?

La loi du 10 juillet 1965, et notamment son article 22 qui traite des pouvoirs que peut donner un copropriétaire à toute personne afin d’être représenté en assemblée générale, que cette personne soit elle-même copropriétaire ou non, ne régit pas la forme que doit revêtir ce pouvoir.

Aussi, il est revenu à la jurisprudence de fixer certaines règles. Le juge a ainsi notamment exigé que le pouvoir soit établi par écrit (Cour de cassation, 3e chambre civile, 30 mars 2017, n° 16-13.249), ce qui exclut un mandat donné oralement par téléphone.

Dans votre situation, deux hypothèses doivent être envisagées :

1ère hypothèse : le pouvoir constitue une pièce jointe du SMS, correspondant à un document papier ayant été numérisé, et revêtant bien la signature du copropriétaire mandant. Dans ces conditions, il ne devrait pas y avoir de difficulté particulière quant à sa validité, dans la mesure où le SMS ne constitue que le « vecteur » du pouvoir en lui-même ; la Cour de cassation a en effet admis que les copropriétaires transmettent leur pouvoir par la voie électronique (Cour de cassation, 3eme chambre civile, 9 septembre 2014, n° 13-16.495).

2nde hypothèse : c'est le texte même du SMS qui constitue le pouvoir. Dans ces conditions, celui-ci ne devrait pas être reconnu comme étant valable par le juge dans la mesure où il ne comporte pas la signature du mandant, qu'il s'agisse d'une signature "manuscrite" ou bien d'une signature électronique mais « authentifiée ». Nous ne sommes toutefois pas en possession d’un jugement sur ce point particulier. Un arrêt de la Cour de cassation a simplement précisé que le mandat devait être signé (Cour de cassation, 3e chambre civile, 13 septembre 2018, n° 17-23.292). 

En conclusion, conférer un mandat par simple SMS doit être vivement déconseillé dans la mesure où sa validité n’est pas acquise, ce qui pourrait constituer un motif de recours judiciaire contre l’assemblée générale. Il convient ainsi plutôt d’établir un mandat sous format papier, signé par le copropriétaire mandant, et remis en main propre au copropriétaire mandataire, ou numérisé et transmis par courrier électronique. Il est à noter que le pouvoir peut aussi être confié au syndic, charge à ce dernier toutefois de le redistribuer au président du conseil syndical, à défaut à un membre du conseil syndical, et à défaut encore au président de séance afin qu’il le remette à un copropriétaire, cf. article 15-1 du décret de 1967.

Réponse de l'expert
Action

Quand doit être rédigé l’original du procès-verbal de l’assemblée ?

La rédaction de l’original du procès-verbal de l’assemblée suscite des interrogations. Les usages et interprétations douteuses de syndics professionnels expliquent en partie ces questionnements. A quel moment s’impose réglementairement l’établissement du compte-rendu de l’assemblée ?

I. La rédaction de l’original du procès-verbal s’effectue en fin de séance

L’article 17 du décret du 17 mars 1967 dispose, que l’établissement de l’original du procès-verbal de l’assemblée sans distinction (qu’il soit dactylographié ou manuscrit) s’opère :

- à l’achèvement de cette réunion du syndicat ;

- par le secrétaire, le syndic, sauf décision contraire des copropriétaires (art. 15 du même décret). 

En tant que garant de la régularité de l’assemblée, le président de séance (art. 15 du décret précité), possédant nécessairement un lot sur la résidence concernée (Cass. 3e civ. 6 mars 2002, n° 00 - 10406) supporte, à cette occasion, de contrôler de sa conformité au regard :

- des prescriptions réglementaires [décision sous chaque, question, avec indication du nom et du nombre de voix des opposants (mentionnant leurs éventuelles réserves sur la régularité de la résolution), des abstentionnistes, des assimilés aux défaillants (copropriétaires s’exprimant favorablement sur son formulaire de vote sur un projet amendé en cours de réunion)] ;

- des impératifs légaux et conventionnels (majorité licite, application de la bonne clé de répartition stipulée par le règlement de copropriété) ;

- de la teneur des débats.

Pour ce faire, le président est assisté d’un ou plusieurs scrutateurs, si le règlement de copropriété impose cette fonction, Cass. 3e civ. 22 novembre 2006, n° 05 - 19042. Dans la négative, une telle nomination s’avère, certes recommandée, mais néanmoins strictement facultative.

En présence d’une irrégularité sur ce compte-rendu d’assemblée, le président de séance, devrait immédiatement exiger, du secrétaire de séance, les corrections appropriées, avant d’y apposer sa signature, tout comme celle des autres membres du bureau (art. 17 du décret susnommée).

De plus, le président de séance pourrait requérir, à cet instant, une copie (papier, voire photo, en l’absence d’imprimante disponible) de ce document, afin de se garantir contre la diffusion ultérieure d’une version divergente du syndic. En effet, si le syndic a la possibilité de notifier, aux copropriétaires opposants, défaillants ou assimilés une version dactylographiée du procès-verbal de l’assemblée (en cas d’original manuscrit), la jurisprudence requière une concomitance sur le fond entre ces deux supports, Cass. 3e civ. 22 octobre 2009, n° 08 - 22099. 

II. La signature par le bureau de l’original du procès-verbal de l’assemblée peut être décalée

Dans la mesure où l’article 17 du décret du 17 mars 1967 est assez précis, d’où viennent les confusions en la matière. Cette disposition prévoit la rédaction du procès-verbal lors de l’assemblée, ainsi que sa signature ou le renvoi de cette dernière formalité dans les huit jours de sa tenue.

Dès lors, certains syndics prétendent que ce délai consenti permettrait :

- a minima d’apporter postérieurement toute modification souhaitée au compte-rendu initial ;

- a maxima de rédiger ultérieurement le document original, en se contentant lors de l’assemblée, de la signature des membres du bureau sur la dernière page précisant leur qualité et l’heure de clôture de cette réunion.

Cette interprétation se révèle juridiquement litigieuse, dans la mesure où :

- l’article 17 du décret suscité concède explicitement, comme seule option, le report des signatures ;

- l’absence d’établissement de l’original du procès-verbal au jour de l’assemblée, expose celle-ci à son annulation judiciaire dans son intégralité, Cass 3e civ. 20 décembre 2006, n° 05 - 20384 ;

- elle favorise ultérieurement des différends sur le sens des résolutions, voire la contestation judiciaire des copropriétaires.

Comment expliquer cette faculté de décaler la signature de l’original du procès-verbal ?

Cette prérogative relativement récente (modification de l’article 17 du décret du 17 mars 1967 par un article 18 d’un décret du 2 juillet 2020) se justifie essentiellement par la possibilité, du président, d’un ou plusieurs scrutateurs, de participer à distance à l’assemblée, via principalement la visioconférence (art. 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965). En conséquence, ce ou ces membres du bureau se trouvent dans l’incapacité de signer l’original du compte-rendu en fin de séance, puisqu’ils ne sont pas présents physiquement à cette réunion du syndicat des copropriétaires.

Lors de l’assemblée, il revient au président de séance, épaulé par un ou plusieurs scrutateurs, de vérifier la correspondance de l’original du procès-verbal de l’assemblée rédigé par le secrétaire. Dans l’hypothèse d’une ambiguïté ou d’une erreur, le président réclamera les rectifications adéquates du secrétaire, avant tout départ de celui-ci de la salle de réunion.

Actions et Actus
Actualité juridique

Peut-on interdire à un restaurant l’utilisation du local poubelle de notre copropriété ?

Au rez-de-chaussée de notre copropriété se trouve un restaurant qui utilise les poubelles de notre copropriété dans le cadre de son activité. Cette utilisation engendre des salissures fréquentes et des débordements. Aussi, nous aurions souhaité interdire l’accès du local poubelle à ce restaurant, et lui imposer qu’il utilise ses propres poubelles, qu’il stockerait dans ses propres locaux, ou encore lui facturer l’accès à ce local. Est-ce possible ?

Par principe, le local poubelle constitue un élément d’équipement commun auquel tous les copropriétaires peuvent légitimement réclamer un accès. D’autre part, les déchets d’origine alimentaires issus d’une activité de restauration, d’après les règlements sanitaires départementaux, ne sont pas distingués des autres types de déchets alimentaires générés par un logement. Il est donc tout à fait fait possible pour le restaurant d’entreposer ses ordures ménagères dans les bacs communs.

A cet égard, la Cour de cassation a déjà pu juger, aux termes d’un arrêt en date du 11 mars 2009, troisième chambre civile, numéro 08-10.566, que le fait d’interdire l’accès à un restaurant de la copropriété au local poubelle commun pour y entreposer des conteneurs à ordure privatifs, était constitutif d’une rupture d’égalité fautive. Le fait de facturer l’accès à ce local serait également fautif et pourrait être sanctionné par le juge sur le même fondement de la rupture d’égalité.   

Cela étant, le surcoût engendré par le nettoyage des éventuelles salissures engendrées par ce commerce devrait pouvoir être pris en charge par ce dernier, soit de façon amiable (hypothèse peu évidente en pratique), soit, au besoin, de façon judiciaire, ce qui supposera néanmoins d’avoir la preuve que les souillures sont bien le fait du restaurant, ce qui n’est pas toujours aisé à démontrer (plusieurs témoignages pourraient être sollicités à cet effet, aux termes d’attestations nominatives de copropriétaires ou d’occupants, signées).

Une précision doit toutefois être faite au sujet des éventuelles huiles de cuisson, qui ne peuvent être déversées dans l’évier (article R. 1331-2 du Code de la santé publique), ni confiées aux services de ramassage des ordures ménagères. Un contrat de ramassage est ainsi généralement souscrit par les restaurateurs auprès d’une société spécialisée.

 Dans les cas où vous constateriez d’éventuels manquements, il est toujours envisageable de contacter les services d’hygiène de votre mairie afin qu’ils puissent se déplacer et procéder à leurs propres constatations…

Réponse de l'expert
Action

Peut-on interdire la cession isolée d'une cave ou d'une chambre de service à une personne qui n'est pas déjà copropriétaire ?

Question :

Nous nous trouvons dans une copropriété ancienne qui comporte, au dernier étage, plusieurs chambres de service. L’un des copropriétaires a souhaité vendre isolément l’une des chambres de service qu’il possède, ainsi qu’une cave, à une personne qui n’était pas déjà copropriétaire.

Nous avons bien examiné notre règlement de copropriété, qui ne comporte pas d’interdiction spécifique à ce sujet. Afin d’éviter que la tranquillité de notre immeuble, composé exclusivement de grands appartements familiaux, ne soit perturbée, nous aurions souhaité interdire, aux termes d’un modificatif au règlement de copropriété, la cession isolée d’une cave ou d’une chambre de service à une personne qui ne serait pas déjà copropriétaire elle-même d’un appartement au sein de notre immeuble.

Cette interdiction est-elle envisageable ? Le cas échéant, suivant quelle majorité ?

Réponse :

Pour pouvoir répondre à votre problématique, il convient d’examiner en premier lieu les dispositions de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965, dont nous reproduisons un extrait ci-après.

« […] Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation. […] »

La destination de votre immeuble va ainsi être déterminante afin de savoir si une telle clause peut valablement être introduite dans votre règlement de copropriété. Mais qu’est-ce que la destination de l’immeuble ? Il s’agit en réalité d’une notion aux contours assez imprécis, qui n’est pas définie par la loi, mais dont l’importance pratique est cruciale.

Schématiquement, on peut définir la destination de l’immeuble comme étant l’usage pour lequel il a été édifié. Est-ce un immeuble d’habitation stricte ? D’habitation avec possibilité d’exercice d’une activité libérale ou d’une activité de bureau ? D’habitation et d’exercice d’une activité commerciale ou artisanale ?

Mais la destination va au-delà de ces questions ; l’article 8 précité parle en effet des « caractères » et de la « situation » de l’immeuble, ce qui renvoie notamment au type d’appartements composant l’immeuble. S’agit-il exclusivement d’appartements familiaux, ou alors de studio ou de deux pièces, plutôt destinés à des étudiants ou à des personnes seules ? On doit également tenir compte de l’environnement dans lequel se trouve l’immeuble. La destination d’un immeuble sera ainsi appréciée différemment selon que celui-ci se trouve dans une rue animée d’un quartier commerçant ou bien dans une venelle d’un quartier très calme et résidentiel.

Pour en venir plus spécifiquement à votre interrogation, la clause que vous envisagez porte une atteinte assez notable au droit de propriété, droit constitutionnellement protégé au titre de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en ce qu’elle vient apporter une restriction importante à la libre cessibilité du bien.

Dans quelle mesure cette clause pourrait-elle être néanmoins admise ?

Tel qu’esquissé précédemment, tout va dépendre de la destination de votre immeuble ; il s’agit alors d’une appréciation au cas par cas.

Plusieurs arrêts, de la Cour de cassation, mais également des juridictions du fond, peuvent ainsi être cités à ce propos.

Un arrêt du 4 juin 1998, rendu par la Cour de cassation (troisième chambre civile, n° 96-16.452) constitue un premier exemple intéressant. Aux termes de cet arrêt, la Haute juridiction a ainsi déclaré valable la clause du règlement de copropriété n’autorisant la cession des caves et chambres de service qu’au profit de personnes déjà propriétaires d’un appartement dans l’immeuble. Il est à noter qu’aux termes de cet arrêt, on comprend que les chambres de service n’étaient pas constituées en lots distincts des appartements principaux, ce qui a pu influer sur sa décision. La Cour de cassation a ainsi motivé son arrêt en relevant que l’immeuble était « cossu et bien entretenu », « occupé seulement par huit copropriétaires », « situé dans un quartier résidentiel », relevant que « la volonté exprimée dans le règlement de copropriété était d'assurer à un petit nombre de personnes un mode de vie, caractérisé par un nombre réduit d'appartements spacieux, favorisant la tranquillité de chacun par la séparation des parties d'habitation de celles réservées au service dans un immeuble à vocation essentiellement bourgeoise ».

Un autre arrêt, rendu cette fois par la Cour d’appel de Paris le 6 mai 2015, n° 12/23234, mérite d’être relevé en raison de sa motivation particulièrement détaillée. Les faits de l’espèce se rapportent à un immeuble « de type haussmannien », « de belle facture », « situé dans un secteur résidentiel du 16e arrondissement ». La Cour relève toutefois qu’il « ne présente aucun caractère historique, prestigieux, exceptionnel ou de standing particulier justifiant de restreindre les droits des copropriétaires de vendre les chambres de service à des personnes étrangères à l’immeuble ». Le juge relève que l’immeuble est doté de deux vestibules distincts, dont l’un est réservé aux occupants des chambres de service. Enfin, la Cour retient également que la plupart des chambres de service sont déjà actuellement occupées par des tiers « sans lien de subordination ou de parenté avec les propriétaires des appartements principaux », et, en outre que les propriétaires contestant l’application de cette clause restrictive n’étaient propriétaires que de deux chambres de service sans être propriétaires d’un appartement ; l’ensemble de ces éléments ayant ainsi conduit le juge à considérer la clause comme non justifiée par la destination de l’immeuble. 

La position du juge, dans cette affaire, aurait-elle été la même si l’un des éléments évoqués plus haut avait fait défaut ? Il est difficile de répondre de façon certaine, mais on peut relever que la destination d’un immeuble peut ainsi évoluer dans le temps, et est appréciée à un instant donné.

Citons enfin un arrêt de la Cour d’appel de Paris, rendu le 3 novembre 2005, 23eme chambre, à propos d’une problématique similaire. Dans cette affaire, le juge a validé l’existence de cette clause restrictive.

L’immeuble en question était un immeuble implanté « vis-à-vis du Bois de Boulogne dans un des quartiers les plus résidentiels de Paris », construit au début des années 1960 par un architecte renommé, le juge ayant relevé en outre que « le parti pris de ses concepteurs a été d'en faire un immeuble d'exception permettant à ses occupants de préserver un cadre de vie recherché de haut standing ».

Ainsi, on peut relever dans l’ensemble que le juge apprécie avec beaucoup de rigueur la validité d’une telle clause, et que la destination de l’immeuble doit véritablement être « exceptionnelle » pour qu’elle soit justifiée. Cette clause doit par conséquent être maniée avec beaucoup de précautions. Une attention particulière doit également être portée sur la situation présente de l’immeuble ; tel qu’évoqué plus haut, si les chambres de service ou les caves sont déjà occupées par des personnes non-copropriétaires d’appartements, le juge pourra en tenir compte dans son appréciation de cette clause. 

Si d’aventure vous estimiez que les caractéristiques de votre immeuble justifient une telle restriction, à quelle majorité faire approuver cette modification au règlement de copropriété ?

Dans la mesure où nous nous trouvons ici dans une modification du règlement visant à restreindre les droits des copropriétaires sur leurs lots, un vote à l’unanimité des voix de l’ensemble des copropriétaires (sans abstention ni absence) est ici nécessaire.

Réponse de l'expert
Action