Formations (481)

L’assemblée générale peut-elle refuser d’autoriser l’installation d’une plaque professionnelle sur la façade de la copropriété ?

Un cabinet d’avocats vient de s’installer au sein de notre copropriété, dans un appartement situé au 1er étage de notre immeuble. 

Ce cabinet souhaite apposer une plaque sur la façade de notre immeuble, à côté du portail d’entrée, et a ainsi fait porter une résolution en ce sens à l’ordre du jour de notre prochaine assemblée générale. Certains copropriétaires se montrent réticents à cette idée, évoquant des nuisances d’ordre esthétique. L’assemblée générale pourrait-elle refuser d’accorder cette autorisation sans risque ?

Chère Madame, Cher Monsieur,

Pour répondre à votre interrogation, il convient en tout premier lieu d’examiner votre règlement de copropriété.

Dans un premier temps, il s’agira de s’assurer que la destination de votre immeuble n’interdit pas l’exercice d’une activité libérale. S’il s’agit d’une destination réservée exclusivement à l’habitation (destination dite « strictement bourgeoise »), l’exercice de cette activité n’est pas autorisé, et l’assemblée générale pourra, à plus forte raison, refuser l’installation d’une quelconque plaque professionnelle.

En revanche, si votre copropriété a une destination dite « simplement bourgeoise », c’est-à-dire autorisant l’exercice d’une activité libérale ou, plus généralement, d’une activité de bureau, alors vous ne pouvez pas, par principe, refuser l’installation d’une plaque professionnelle.

Il arrive assez fréquemment que les règlements de copropriété contiennent une clause encadrant l’apposition de plaques professionnelles, que ce soit en précisant leur dimension, leur couleur, ou encore leur emplacement, et ce dans un objectif de préservation de l’esthétique de l’immeuble. Dans ces conditions, la demande d’autorisation devra se conformer aux stipulations du règlement de copropriété. Il ne devrait pas être possible, en revanche, pour le copropriétaire, de se passer de toute autorisation d’assemblée générale, même si la plaque installée respecte en tous points la clause du règlement de copropriété (cf. sur ce point un arrêt de la Cour de cassation, troisième chambre civile, 12 mars 1997, n° 95-15.953, ayant jugé que la clause autorisant un copropriétaire à effectuer sans autorisation de l’assemblée générale des travaux, même précisément définis, sur les parties communes de l’immeuble, doit être réputée non écrite ; les faits de l’espèce n’étaient toutefois pas relatifs à la pose d’un panonceau professionnel).

D’autre part, si le règlement de copropriété interdit purement et simplement l’installation de plaques professionnelles, cette clause pourrait également être réputée non écrite sur le fondement de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 prévoyant que « Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation. »

Dans le prolongement de ces développements, l’assemblée générale pourra-t-elle refuser sans motif particulier l’autorisation de cette plaque professionnelle ?

Suivant la même logique que pour les clauses du règlement de copropriété, l’assemblée générale ne peut pas, par ses décisions, empêcher une jouissance normale du lot eu égard à son affectation et à la destination de l’immeuble. Ainsi, l’éventuel refus opposé par l’assemblée générale devra pouvoir être suffisamment motivé par des désordres esthétiques ; on pourrait ainsi donner l’exemple d’une plaque qui s’avérerait surdimensionnée ou dont la couleur serait particulièrement criarde ou inadaptée à l’harmonie générale de l’immeuble… En revanche, un refus d’autorisation concernant une plaque de taille raisonnable et d’allure discrète pourrait tout à fait être sanctionné par le juge.

Réponse de l'expert
Action

Peut-on donner un pouvoir par SMS afin d’être représenté à l’assemblée générale ?

Lors de notre dernière assemblée générale, des copropriétaires ont indiqué avoir reçu des pouvoirs sur leur téléphone, par SMS. Le syndic a accepté ces pouvoirs sans faire de difficulté.

Pourriez-vous nous dire si cette pratique est bien conforme aux dispositions de la loi de 1965 ou à son décret de 1967 ?

La loi du 10 juillet 1965, et notamment son article 22 qui traite des pouvoirs que peut donner un copropriétaire à toute personne afin d’être représenté en assemblée générale, que cette personne soit elle-même copropriétaire ou non, ne régit pas la forme que doit revêtir ce pouvoir.

Aussi, il est revenu à la jurisprudence de fixer certaines règles. Le juge a ainsi notamment exigé que le pouvoir soit établi par écrit (Cour de cassation, 3e chambre civile, 30 mars 2017, n° 16-13.249), ce qui exclut un mandat donné oralement par téléphone.

Dans votre situation, deux hypothèses doivent être envisagées :

1ère hypothèse : le pouvoir constitue une pièce jointe du SMS, correspondant à un document papier ayant été numérisé, et revêtant bien la signature du copropriétaire mandant. Dans ces conditions, il ne devrait pas y avoir de difficulté particulière quant à sa validité, dans la mesure où le SMS ne constitue que le « vecteur » du pouvoir en lui-même ; la Cour de cassation a en effet admis que les copropriétaires transmettent leur pouvoir par la voie électronique (Cour de cassation, 3eme chambre civile, 9 septembre 2014, n° 13-16.495).

2nde hypothèse : c'est le texte même du SMS qui constitue le pouvoir. Dans ces conditions, celui-ci ne devrait pas être reconnu comme étant valable par le juge dans la mesure où il ne comporte pas la signature du mandant, qu'il s'agisse d'une signature "manuscrite" ou bien d'une signature électronique mais « authentifiée ». Nous ne sommes toutefois pas en possession d’un jugement sur ce point particulier. Un arrêt de la Cour de cassation a simplement précisé que le mandat devait être signé (Cour de cassation, 3e chambre civile, 13 septembre 2018, n° 17-23.292). 

En conclusion, conférer un mandat par simple SMS doit être vivement déconseillé dans la mesure où sa validité n’est pas acquise, ce qui pourrait constituer un motif de recours judiciaire contre l’assemblée générale. Il convient ainsi plutôt d’établir un mandat sous format papier, signé par le copropriétaire mandant, et remis en main propre au copropriétaire mandataire, ou numérisé et transmis par courrier électronique. Il est à noter que le pouvoir peut aussi être confié au syndic, charge à ce dernier toutefois de le redistribuer au président du conseil syndical, à défaut à un membre du conseil syndical, et à défaut encore au président de séance afin qu’il le remette à un copropriétaire, cf. article 15-1 du décret de 1967.

Réponse de l'expert
Action

Quand doit être rédigé l’original du procès-verbal de l’assemblée ?

La rédaction de l’original du procès-verbal de l’assemblée suscite des interrogations. Les usages et interprétations douteuses de syndics professionnels expliquent en partie ces questionnements. A quel moment s’impose réglementairement l’établissement du compte-rendu de l’assemblée ?

I. La rédaction de l’original du procès-verbal s’effectue en fin de séance

L’article 17 du décret du 17 mars 1967 dispose, que l’établissement de l’original du procès-verbal de l’assemblée sans distinction (qu’il soit dactylographié ou manuscrit) s’opère :

- à l’achèvement de cette réunion du syndicat ;

- par le secrétaire, le syndic, sauf décision contraire des copropriétaires (art. 15 du même décret). 

En tant que garant de la régularité de l’assemblée, le président de séance (art. 15 du décret précité), possédant nécessairement un lot sur la résidence concernée (Cass. 3e civ. 6 mars 2002, n° 00 - 10406) supporte, à cette occasion, de contrôler de sa conformité au regard :

- des prescriptions réglementaires [décision sous chaque, question, avec indication du nom et du nombre de voix des opposants (mentionnant leurs éventuelles réserves sur la régularité de la résolution), des abstentionnistes, des assimilés aux défaillants (copropriétaires s’exprimant favorablement sur son formulaire de vote sur un projet amendé en cours de réunion)] ;

- des impératifs légaux et conventionnels (majorité licite, application de la bonne clé de répartition stipulée par le règlement de copropriété) ;

- de la teneur des débats.

Pour ce faire, le président est assisté d’un ou plusieurs scrutateurs, si le règlement de copropriété impose cette fonction, Cass. 3e civ. 22 novembre 2006, n° 05 - 19042. Dans la négative, une telle nomination s’avère, certes recommandée, mais néanmoins strictement facultative.

En présence d’une irrégularité sur ce compte-rendu d’assemblée, le président de séance, devrait immédiatement exiger, du secrétaire de séance, les corrections appropriées, avant d’y apposer sa signature, tout comme celle des autres membres du bureau (art. 17 du décret susnommée).

De plus, le président de séance pourrait requérir, à cet instant, une copie (papier, voire photo, en l’absence d’imprimante disponible) de ce document, afin de se garantir contre la diffusion ultérieure d’une version divergente du syndic. En effet, si le syndic a la possibilité de notifier, aux copropriétaires opposants, défaillants ou assimilés une version dactylographiée du procès-verbal de l’assemblée (en cas d’original manuscrit), la jurisprudence requière une concomitance sur le fond entre ces deux supports, Cass. 3e civ. 22 octobre 2009, n° 08 - 22099. 

II. La signature par le bureau de l’original du procès-verbal de l’assemblée peut être décalée

Dans la mesure où l’article 17 du décret du 17 mars 1967 est assez précis, d’où viennent les confusions en la matière. Cette disposition prévoit la rédaction du procès-verbal lors de l’assemblée, ainsi que sa signature ou le renvoi de cette dernière formalité dans les huit jours de sa tenue.

Dès lors, certains syndics prétendent que ce délai consenti permettrait :

- a minima d’apporter postérieurement toute modification souhaitée au compte-rendu initial ;

- a maxima de rédiger ultérieurement le document original, en se contentant lors de l’assemblée, de la signature des membres du bureau sur la dernière page précisant leur qualité et l’heure de clôture de cette réunion.

Cette interprétation se révèle juridiquement litigieuse, dans la mesure où :

- l’article 17 du décret suscité concède explicitement, comme seule option, le report des signatures ;

- l’absence d’établissement de l’original du procès-verbal au jour de l’assemblée, expose celle-ci à son annulation judiciaire dans son intégralité, Cass 3e civ. 20 décembre 2006, n° 05 - 20384 ;

- elle favorise ultérieurement des différends sur le sens des résolutions, voire la contestation judiciaire des copropriétaires.

Comment expliquer cette faculté de décaler la signature de l’original du procès-verbal ?

Cette prérogative relativement récente (modification de l’article 17 du décret du 17 mars 1967 par un article 18 d’un décret du 2 juillet 2020) se justifie essentiellement par la possibilité, du président, d’un ou plusieurs scrutateurs, de participer à distance à l’assemblée, via principalement la visioconférence (art. 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965). En conséquence, ce ou ces membres du bureau se trouvent dans l’incapacité de signer l’original du compte-rendu en fin de séance, puisqu’ils ne sont pas présents physiquement à cette réunion du syndicat des copropriétaires.

Lors de l’assemblée, il revient au président de séance, épaulé par un ou plusieurs scrutateurs, de vérifier la correspondance de l’original du procès-verbal de l’assemblée rédigé par le secrétaire. Dans l’hypothèse d’une ambiguïté ou d’une erreur, le président réclamera les rectifications adéquates du secrétaire, avant tout départ de celui-ci de la salle de réunion.

Actions et Actus
Actualité juridique

Peut-on interdire à un restaurant l’utilisation du local poubelle de notre copropriété ?

Au rez-de-chaussée de notre copropriété se trouve un restaurant qui utilise les poubelles de notre copropriété dans le cadre de son activité. Cette utilisation engendre des salissures fréquentes et des débordements. Aussi, nous aurions souhaité interdire l’accès du local poubelle à ce restaurant, et lui imposer qu’il utilise ses propres poubelles, qu’il stockerait dans ses propres locaux, ou encore lui facturer l’accès à ce local. Est-ce possible ?

Par principe, le local poubelle constitue un élément d’équipement commun auquel tous les copropriétaires peuvent légitimement réclamer un accès. D’autre part, les déchets d’origine alimentaires issus d’une activité de restauration, d’après les règlements sanitaires départementaux, ne sont pas distingués des autres types de déchets alimentaires générés par un logement. Il est donc tout à fait fait possible pour le restaurant d’entreposer ses ordures ménagères dans les bacs communs.

A cet égard, la Cour de cassation a déjà pu juger, aux termes d’un arrêt en date du 11 mars 2009, troisième chambre civile, numéro 08-10.566, que le fait d’interdire l’accès à un restaurant de la copropriété au local poubelle commun pour y entreposer des conteneurs à ordure privatifs, était constitutif d’une rupture d’égalité fautive. Le fait de facturer l’accès à ce local serait également fautif et pourrait être sanctionné par le juge sur le même fondement de la rupture d’égalité.   

Cela étant, le surcoût engendré par le nettoyage des éventuelles salissures engendrées par ce commerce devrait pouvoir être pris en charge par ce dernier, soit de façon amiable (hypothèse peu évidente en pratique), soit, au besoin, de façon judiciaire, ce qui supposera néanmoins d’avoir la preuve que les souillures sont bien le fait du restaurant, ce qui n’est pas toujours aisé à démontrer (plusieurs témoignages pourraient être sollicités à cet effet, aux termes d’attestations nominatives de copropriétaires ou d’occupants, signées).

Une précision doit toutefois être faite au sujet des éventuelles huiles de cuisson, qui ne peuvent être déversées dans l’évier (article R. 1331-2 du Code de la santé publique), ni confiées aux services de ramassage des ordures ménagères. Un contrat de ramassage est ainsi généralement souscrit par les restaurateurs auprès d’une société spécialisée.

 Dans les cas où vous constateriez d’éventuels manquements, il est toujours envisageable de contacter les services d’hygiène de votre mairie afin qu’ils puissent se déplacer et procéder à leurs propres constatations…

Réponse de l'expert
Action