Un droit de surélever peut-il s’acheter contre un engagement de faire des travaux pour la copropriété ?
Le copropriétaire du lot du dernier étage souhaite réaliser une surélévation de notre immeuble à son profit personnel et en échange propose de payer le ravalement de façade que nous avions prévu de faire dans un avenir prochain. Peut-on réellement procéder ainsi ?
Le copropriétaire au dernier étage de votre immeuble souhaite réaliser des travaux de surélévation d’un étage, ce dont il n’a pas encore le droit aujourd’hui.
Il va donc acheter à la copropriété un droit de surélever, correspondant à un lot à construire en surélévation.
Pour cela, le copropriétaire doit proposer une modification de l’état descriptif de division du règlement de copropriété et présenter un projet d’acte de vente à l’assemblée générale.
L’importance et la consistance des locaux à construire doivent, à peine de nullité, figurer dans l’acte de cession du droit de surélévation.
Par ailleurs, comme l’acheteur sera le maitre d’ouvrage pour les travaux de surélévation, il devra obtenir une autorisation de l’assemblée générale pour les réaliser.
En résumé, l’assemblée générale doit arrêter les conditions techniques, juridiques et financières du projet de travaux de surélévation.
Intéressons-nous plus particulièrement aux conditions de la vente de ce droit de surélévation.
Les dispositions de l’article 35 de la loi du 10 juillet 1965 relatives à la cession du droit à construire supposent une aliénation à titre onéreux. Le prix doit en être réparti entre les copropriétaires, conformément aux dispositions de l’article 16-1 de la loi du 10 juillet 1965 : « Les sommes représentant le prix des parties communes cédées se divisent de plein droit entre les copropriétaires dans les lots desquels figuraient ces parties communes et proportionnellement à la quotité de ces parties afférentes à chaque lot. ».
Il n’en résulte pas pour autant que la contrepartie onéreuse de la cession des droits à construire doit nécessairement être une somme d’argent.
En effet, la seule contrainte est que l’opération ait lieu à titre onéreux. Si le prix peut être payé en numéraire, il peut aussi être converti en l’obligation de payer des travaux pour le compte du syndicat des copropriétaires.
La cession a bien une contrepartie et elle est bien faite à titre onéreux. Et un tel dispositif ne méconnaît pas les dispositions de l’article 16-1 dès lors que le prix de cession, consistant en la réalisation de travaux dans les parties communes qui ont vocation à profiter à tous les copropriétaires, est nécessairement réparti proportionnellement aux tantièmes des parties communes générales détenues par chaque copropriétaire.
La jurisprudence a donc validé cette hypothèse notamment dans un arrêt récent de la Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 mai 2020, 19-13.245.
Le principe étant reconnu, il est temps de s’intéresser à la gestion de la contrepartie, soit les travaux.
Il est nécessaire de traiter le dossier comme un chantier à la charge de la copropriété.
Il est donc conseillé que le maître d’ouvrage reste le syndicat tout au long des travaux de ravalement.
D’ailleurs avant d’accepter cette contrepartie, le ravalement devra être évalué par un maître d’œuvre désigné par la copropriété. Celui-ci va établir un cahier des charges.
Ensuite le maître d’œuvre aura la tâche d’évaluer le prix du droit de surélever : retirer du prix de vente brut le prix des travaux de construction. La différence entre le bénéfice du copropriétaire qui va surélever et des travaux pour la copropriété sera considéré comme une plus-value immobilière.
Cela vous permettra de vérifier que la copropriété ne vend pas à perte : si la plus-value n’est pas de votre côté, il faut réfléchir à l’intérêt de l’opération pour votre copropriété.
Vous l’avez donc compris, un droit de surélévation peut tout à fait s’acheter en contrepartie de la réalisation de travaux pour la copropriété. Mais le travail de préparation pour encadrer et évaluer cette contrepartie est conséquent.