Approbation des comptes du syndicat : indépendance des exercices et obligations du syndic de justifier les comptes
Jurisprudence constante et intéressante pour les adhérents, il y avait souvent confusion concernant la possibilité d'approuver les comptes postérieurement à un refus antérieur.
Le refus d'approbation des comptes pour une année comptable n'interdit pas d'approuver les comptes de l'année suivante.
La question de l’approbation des comptes clos du syndicat en assemblée générale génère son lot d’interrogations de la part des copropriétaires, quant à la régularité de leur établissement et leur présentation par le syndic.
Autre interrogation : peut-on ne pas approuver les comptes une année, mais les voter l’année suivante ?
C’est une réponse à ces questions que nous apporte un arrêt de la Cour d’Appel de Basse Terre.
I. Les règles à respecter pour établir les comptes du syndicat
Le syndic est chargé de l’administration de l’immeuble selon l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, ce qui comprend notamment : d'établir le budget prévisionnel en concertation avec le conseil syndical, les comptes du syndicat et leurs annexes, de les soumettre au vote de l'assemblée générale et de tenir pour chaque syndicat une comptabilité.
Les propriétaires disposent annuellement d’un droit de consultation, dans les locaux du syndic, des pièces justificatives des charges (contrats, factures…), entre la notification de la convocation et la date de tenue de l’assemblée générale destinée à se prononcer sur les comptes clos du syndicat des copropriétaires (art. 18-1 de la loi du 10 juillet 1965).
Ce droit de vérification des comptes du syndicat par les copropriétaires, qu’ils décident individuellement d’exercer ou pas, doit leur permettre de pouvoir se prononcer en connaissance de cause à l’assemblée générale ordinaire sur les dépenses du syndicat établis par le syndic. Autrement dit, le syndic doit être en mesure d’attester de l’intégralité des charges et produits enregistrés par ses soins.
Cette obligation s’impose aussi lorsque le syndic fait approuver les comptes établis par son prédécesseur. L'article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 impose à l'ancien syndic la remise au nouveau syndic de la situation de trésorerie, de la totalité des fonds immédiatement disponibles, de l'ensemble des documents et archives du syndicat, du solde des fonds disponibles après apurement des comptes, de l'état des comptes des copropriétaires et de celui du syndicat.
En l’espèce un ensemble immobilier des Antilles françaises n’approuve pas en assemblée générale 2014 les comptes clos du syndicat sur l’exercice 2013 (en raison d’un solde débiteur de plus de 60.000 euros, qu’elle considère comme injustifié) et désigne un nouveau syndic professionnel.
Le nouveau syndic n’obtient pas de son prédécesseur l’ensemble des pièces justificatives des dépenses de 2013. Il convoque cependant une assemblée générale pour approuver ces comptes, sans joindre les annexes comptables. Lors de cette même assemblée, et dans une résolution suivante, il propose d’approuver les comptes 2014, et joint à la convocation tous les documents obligatoires.
II. Indépendance des exercices et pièces justifiant les comptes
L’assemblée ayant approuvé ces résolutions, un copropriétaire les attaque en nullité.
La cour d’appel de Basse Terre dans son arrêt n° 18/001281 du 30 septembre 2019 accueille partiellement ses requêtes :
« Que la résolution (n°4) comprend le compte en partie double à la date du 31/12/2013 portant au débit (sommes dues au syndicat) la somme de 295.890,02 euros, et au crédit (sommes que le syndicat doit) 358.132,25 euros.
Qu’il faut comprendre qu’il s’agit du compte établi par le nouveau syndic sur la base des anciens comptes ;
Que cependant, la résolution comporte également la mention suivante ‘en l’absence de justificatif et d’information sur les soldes antérieurs’ […]
Que par ailleurs, aucun document n’est fourni concernant le détail du compte ;
Qu’en conséquence, il convient d’annuler cette résolution (n°4) […] »
L’approbation des comptes clos du syndicat des copropriétaires en assemblée générale suppose donc que les annexes comptables normalisées (attestant des charges et produits du syndicat sur l’exercice concerné) soient complétées. Le syndic doit aussi détenir les pièces justifiant les dépenses. A défaut, un seul copropriétaire peut obtenir l’annulation de la résolution ayant approuvé les comptes, même s’il est le seul opposant.
En revanche, la cour d’appel ne suit pas le copropriétaire pour la résolution suivante, et ne fait pas droit à sa demande en nullité de la résolution ayant approuvé les comptes 2014 :
« Qu’il est constant que ces pièces (comptables) ont été notifiées avec l’ordre du jour…
Que le fait que certains exercices précédents n’aient pas été approuvés ne constitue pas en soi un obstacle à l’approbation des comptes de l’exercice concerné (2014).
Qu’il n’y a donc pas lieu à annuler la résolution pour ce motif, alors qu’il n’est pas démontré en quoi les comptes présentés seraient irréguliers ou non sincères ».
Cet arrêt prouve donc que chaque exercice comptable du syndicat des copropriétaires est indépendant. Le fait qu’un exercice n’ait pas été approuvé n’empêche pas les copropriétaires d’approuver ceux qui lui succèdent. Ce n’est pas un motif suffisant pour obtenir l’annulation d’une approbation des comptes.
Il faut donc prouver le non respect des règles de comptabilité, l’absence de justificatifs des dépenses ou la non communication des annexes qui doivent être jointes à la convocation, par exemple, pour espérer obtenir, par voie judiciaire, la nullité de la résolution approuvant les comptes.