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L’action en restitution d’une partie commune appropriée illégalement appartient à tout copropriétaire et se prescrit dans le délai de 30 ans

Catégories Prescription Règles procédurales Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
24 octobre 2019 (18-19.172)
Observations

Il faut bien distinguer la réalisation de travaux affectant les parties communes de l'appropriation des parties communes. 

En effet, les régimes juridiques en découlant sont différents. 

Principe retenu

La contestation d'une appropriation d'une partie commune se prescrit par trente ans. 

Analyse de la décision

Face à des occupations illicites de parties communes, certains syndicats hésitent à engager une procédure pour faire cesser cette situation pour divers motifs (indifférence, coût et aléa d’une instance, qui pourrait se révéler au demeurant prescrite).

La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 24 octobre 2019 les fondamentaux du contentieux de remise en état de parties communes occupées illégalement par un copropriétaire.

I. Droit collectif, mais également individuel

Conformément à l’article 4 de la loi du 10 juillet 1965, les parties communes générales de la résidence appartiennent à tous les propriétaires d’un lot, les parties communes spéciales uniquement à certains d’entre eux.

Ces parties communes ne peuvent donc faire l’objet d’une appropriation illicite par un copropriétaire qui empêcherait les autres résidents de pouvoir également en disposer, sans autorisation préalable de l’assemblée générale. L’article 9 de la même loi proscrit ce genre de comportement.

Si tel est le cas, et sans restitution volontaire de celle-ci par le copropriétaire dans le cadre d’un règlement amiable, la seule alternative prend la forme d’une action judiciaire.

Cette dernière peut être introduite par le syndicat des copropriétaires. L’objet du syndicat consiste dans l’administration des parties communes et dans le respect du règlement de copropriété, qui définit les parties communes et les parties privatives.

Dans ce cas, le syndic doit bénéficier d’une habilitation de l’assemblée générale consentie à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 (article 55 du décret du 17 mars 1967).

Cette action peut aussi être engagée par le propriétaire d’un lot qui doit pouvoir également utiliser cette partie commune. Cette occupation exclusive par un copropriétaire s’analyse en une dépossession d’un bien immobilier lui appartenant ainsi qu’à d’autres ou tous les autres copropriétaires.

Ce copropriétaire peut, dans la même procédure, assigner le syndicat des copropriétaires pour n’avoir pas fait cesser ce trouble de jouissance et rechercher sa responsabilité civile si cela lui cause un préjudice.

II. Délai de prescription de l’action judiciaire

Une telle action est possible dans le cadre de délais fixés par la loi.

Les travaux illicites (sans l’aval de l’assemblée générale) réalisé par un propriétaire peuvent avoir des conséquences différentes, qui conditionnent les délais de prescriptions pour engager une action en vue de leur suppression.

D’une part, si ce sont de simples aménagements (remplacement de la fenêtre de son lot par un autre modèle, de sa porte palière par un modèle divergent de la référence collective, destruction d’un mur porteur…), la procédure se prescrit désormais dans un délai de 5 ans (depuis la loi ELAN du 23 octobre 2018, 10 ans sous l’ancien régime juridique) à compter de leur exécution (article 42 de la loi du 10 juillet 1965).

D’autre part, si ce sont des opérations permettant ou représentant une appropriation des parties communes (par exemple : la construction d’un mur pour annexer une fraction du couloir à son lot), la poursuite se prescrit dans ce cas par 30 ans (article 2272 du Code civil). Nous sommes alors dans le cadre d’une action réelle, car elle porte sur le droit de propriété d’un bien immobilier.

Dans une résidence en copropriété nancéenne (54), les propriétaires d’un lot intègrent illégalement un tronçon de couloir à leur lot par l’édification d’un mur, et empêchent le propriétaire d’un autre lot d’avoir accès à ce couloir.

Face au laxisme du syndicat, le propriétaire du lot lésé assigne la copropriété ainsi que les contrevenants en restitution des parties communes et en indemnisation de son préjudice personnel.

La Cour d’appel de Nancy rejette cette demande au motif qu’elle serait soumise au délai de 10 ans et donc prescrite.

La Cour de cassation n’analyse pas cette affaire de la même manière, dans son arrêt n° 18-19172 du 24 octobre 2019 :

« […] Attendu que, pour déclarer irrecevable, comme prescrite, l'action de M. N..., l'arrêt retient que celle-ci ne tend pas à la revendication des parties communes, mais à contraindre M. et Mme M... à mettre fin au trouble résultant de cette occupation et à libérer ces parties communes, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une action réelle et qu'elle est en conséquence soumise à la prescription décennale ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'annexion au lot de M. et Mme M... du fond du couloir du rez-de-chaussée de l'immeuble ne caractérisait pas un acte d'appropriation d'une partie commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision [] ».

Cet arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans sa jurisprudence constante, soulignant la distinction de travaux privatifs illicites affectant les parties communes constituant de simples aménagements de ceux représentant une appropriation et de la prescription applicable à l’action judiciaire en suppression de ceux-ci.

Cette action peut être engagée aussi bien collectivement par le syndicat, représenté par son syndic, qu’individuellement par le propriétaire d’un lot dans la résidence concernée.

La désignation du syndic ne vaut que pour l’avenir, elle ne peut rétroagir

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
17 juillet 1996 (94-15.140)
Observations

Jurisprudence constante. 

Pour une précision supplémentaire sur les dates du contrat de syndic: Pour être validé, le contrat de syndic doit préciser ses dates calendaires d'échéance

Principe retenu

Le contrat de syndic ne vaut que pour l'avenir, il ne peut pas prévoir une date de commencement antérieure à celle de l'assemblée générale. 

Analyse de la décision

Cet arrêt de 1996 a été précisé par un arrêt de 1999, suivant lequel le mandat du syndic prend effet immédiatement, à l'instant même des résultats du vote, sauf décision contraire de l’assemblée générale (Cass., 3e civ., 20 janvier 1999, n° 97-14747).

Cette jurisprudence, bien qu’antérieure à l’instauration du contrat-type de syndic, reste pertinente à l’heure actuelle.

En effet, alors que l’article 29 du décret de 1967 précise bien que le contrat de syndic doit faire mention de sa durée (qui ne peut pas excéder 3 ans) et de ses dates de prise d’effet et d’échéance, certains syndics croient bon de fixer une date de prise d’effet de mandat antérieure à la date de l’assemblée générale les désignant.

Ainsi, ils font parfois coïncider les dates de début et de fin de mandat avec la période de l’exercice comptable, par exemple avec un mandat d’un an allant du 1er janvier au 31 décembre de l’année N, au lieu du 30 juin de l’année N (jour de l’assemblée générale) au 29 juin de l’année N+1.

Ce procédé est illégal et les copropriétaires doivent être particulièrement vigilants sur ce point, et de manière plus générale sur le respect des clauses du contrat-type par le syndic, avant d’approuver l’un des contrats soumis au vote en assemblée.

En cas de pluralité de candidatures de syndics, chacune des candidatures doit être soumise au vote à la majorité absolue avant qu’il puisse être procédé à un second vote à la majorité simple

Catégories Tenue de l'assemblée générale Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 novembre 2014 (13-26768)
Observations

Arrêt important pour la désignation du syndic en cas de pluralité des candidats, qui pose un principe clair. 

Pour un autre exemple de jurisprudence : La mise en concurrence du contrat de syndic à l'initiative d'un copropriétaire : modalité d'inscription de la question et vote en assemblée générale.

Principe retenu

Chacune des candidatures doit être soumise au vote à la majorité de l'article 25 avant qu'l puisse être procédé à un second vote à la majorité de l'article 24. 

Analyse de la décision

Comme évoqué plus haut, la désignation du syndic peut faire l’objet du procédé de passerelle prévu à l’article 25-1 de la loi de 1965 : si la majorité absolue n’a pas été atteinte mais que le vote a recueilli au moins 1/3 des voix des copropriétaires, il peut être procédé immédiatement à un second vote à la majorité simple.

En cas de pluralité de candidatures, s’est posée la question de savoir si la passerelle pouvait être utilisée pour un candidat qui n’a pas obtenu la majorité absolue de l’article 25, sans attendre d’examiner les candidatures suivantes, ou si chaque candidature devait d’abord être soumise au vote de l’article 25 avant que la passerelle puisse être utilisée.

La réponse donnée par la Cour de cassation est très claire : en cas de pluralité de candidatures, l’assemblée générale ne peut valablement procéder à un second vote à la majorité de l’article 24 sur l’une des candidatures qu’après avoir soumis au vote à la majorité de l’article 25 les autres candidatures.

Chacune des candidatures doit donc être soumise au vote à la majorité absolue de l’article 25 avant qu’il puisse être procédé à un second vote à la majorité simple.

L’intérêt de cet arrêt est notamment d’éviter que le syndic en place, qui ferait examiner sa candidature en premier, ne se fasse réélire par un second vote plus facile à obtenir alors qu’il n’a pas obtenu la majorité de l’article 25, sans attendre l’examen par l’assemblée des autres candidatures.

Cet arrêt important doit permettre d’éviter toute tentative de syndics de se faire reconduire à tout prix dans leurs fonctions, en utilisant de manière abusive la passerelle de l’article 25-1 sans examen préalable des candidatures concurrentes, qui pourraient être privilégiées par les copropriétaires déçus de leur syndic.

Le mandat d'un syndic de copropriété peut être révoqué à tout moment, mais ce droit, susceptible d'abus, ne peut être exercé que pour une cause légitime

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
27 avril 1988 (86-11.718)
Observations

Depuis le décret du 02 juillet 2020 qui a réformé le contrat de syndic, on ne parle plus de révocation mais de résiliation du contrat de syndic à l'initiative du conseil syndical. 

Principe retenu

Seul un manquement du syndic à ses obligations peut justifier une révocation sans indemnité. 

Analyse de la décision

Conformément à l’article 29 du décret du 17 mars 1967, modifié par le décret du 26 mars  2015, le contrat du syndic doit expressément indiquer sa durée (qui ne peut pas excéder trois ans), ainsi que les dates calendaires de prise d’effet et d’échéance.

C’est un contrat à durée déterminée, qui est censé se poursuivre jusqu’à son terme.

Mais en pratique, les copropriétaires sont souvent confrontés à des difficultés plus ou moins graves, liées à la gestion de la copropriété faite par leur syndic.

Face à ces difficultés, qui paralysent parfois le fonctionnement de la copropriété, les copropriétaires peuvent vouloir remplacer rapidement le syndic en exercice, sans avoir à attendre la fin de son mandat.

La révocation n’est pas un non-renouvellement du contrat du syndic en cours, mais il s’agit d’une rupture anticipée de son contrat.

Cette révocation est décidée à la majorité absolue de l’article 25 et si un nouveau syndic est désigné en assemblée pour entrer en fonction avant la fin du contrat de son prédécesseur, ce dernier est automatiquement révoqué (article 18-V, alinéa 3, de la loi du 10 juillet 1965).

Mais parfois, les syndics vont jusqu’à saisir un juge, non pas pour contester leur révocation, mais pour demander à être indemnisés lorsque leur contrat a été rompu de manière anticipée.

Pour cela, ils font valoir que leur révocation par l’assemblée était abusive.

Dans ce cas, le syndic ne peut pas se faire justice lui-même en facturant des honoraires pour la période postérieure à sa révocation (Cour d’appel de Paris, 19e ch. A, 30 septembre1998, n° 1996/16113) ; mais il peut prétendre à une indemnité dans le cadre d’une action en justice.

La jurisprudence considère que seul un manquement du syndic à ses obligations peut justifier une révocation sans indemnité.

En l’absence d’un motif légitime, le syndic peut prétendre à être indemnisé par le syndicat.

Il est donc nécessaire pour le syndicat des copropriétaires, notamment à travers le conseil syndical, d’anticiper tout contentieux et de conserver toutes les preuves des manquements du syndic et de mentionner ces griefs dans la résolution d’assemblée relative à sa révocation.

Invoquer une simple rupture de confiance n’est pas suffisant.

Un arrêt de la Cour d’appel de Paris a même considéré abusive la révocation d’un syndic qui n’avait pas pu présenter sa défense devant l’assemblée générale (Cour d’appel de Paris, 12 janvier1990, Rev. Administrer, janv.1991, p.65).

En revanche, ont été retenus comme motifs légitimes, par exemple le fait que le syndic engage des travaux sans autorisation d’assemblée générale et en contradiction avec une résolution imposant la tenue d’une assemblée générale extraordinaire (Cour d’appel de Paris, 23e ch. A, 6 novembre 1996, n° 95/11679), ou encore le fait que l’un de ses préposés a reçu des mandats de vote (14 en tout) pour représenter des copropriétaires en assemblée générale alors que l’article 22 de la loi de 1965 l’interdit (Cass., 3e civ., 7 mai 2014, n° 12-26426).

Si révoquer le syndic n’est pas suffisant et que le préjudice est important, la copropriété peut aller plus loin en agissant en responsabilité contre le syndic, en vue d’obtenir des dommages et intérêts.

L’action qui tend à obtenir une remise en état après un acte d’appropriation des parties communes est une action réelle qui se prescrit par 30 ans

Catégories Prescription Non-respect du règlement de copropriété
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
11 janvier 1989 (87-13.605)
Observations

Jurisprudence constante, pour un autre arrêt en ce sens : 

L'action en restitution d'une partie commune appropriée illégalement appartient à tout copropriétaire et se prescrit par 30 ans civ.24 octobre 2019 (18-1972)

Principe retenu

En cas d'appropriation d'une partie commune, le délai d'action judiciaire est de 30 ans. 

Analyse de la décision

Le délai de 30 ans concerne les actions réelles, c’est-à-dire portant sur une chose, tandis que le délai de droit commun de 5 ans concerne les actions dites personnelles, c’est-à-dire les actions tendant à faire reconnaître un droit d’une personne contre une autre (on parle aussi de droit de créance).

Les actions personnelles concernent les actions entre le syndicat des copropriétaires et un copropriétaire (ou plusieurs), ou entre des copropriétaires entre eux, par exemple en matière de recouvrement de charges, d’actions en responsabilité…

L’action d’un syndicat de copropriétaire qui tend à faire cesser une emprise sur une partie commune et à faire condamner un copropriétaire à remettre en état les lieux concerne un droit réel du syndicat sur ce bien. Il peut donc agir dans le délai trentenaire.

Un syndic révoqué sans justification peut prétendre à une indemnisation

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic Rémunération du syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
08 mars 2018 (17-12.506)
Observations

L'ordonnance du 30 octobre 2019 est venue apporter une modification sur la révocation du syndic. Si le nouveau syndic est élu dans les trois mois précédant le terme du mandat du syndic en place, le syndic ne pourra réclamer une indemnité. 

Principe retenu

La révocation du syndic sans justification peut exposer le syndicat à une action judiciaire en indemnisation

Analyse de la décision

Lorsqu’une copropriété mécontente souhaite se séparer rapidement de son syndic, elle ampute parfois la durée contractuelle initiale de son mandat lors de la mise en concurrence de son syndic.

En effet, il peut arriver que l’assemblée générale se déroule avant la fin initialement prévue du mandat du syndic sortant, qui ne mène alors pas son mandat jusqu’à son terme.

Dans un arrêt du 8 mars 2018, la Cour de Cassation rappelle le cadre légal applicable en pareil cas, si la révocation est possible (I) elle reste soumise à conditions (II).

I. La révocation d’un mandat de syndic est autorisée par la loi

L’assemblée générale désigne souverainement son syndic, selon la proposition de contrat annexée à sa convocation (art. 29 du décret du 17 mars 1967), qui doit notamment déterminer :

  • sa durée de mandat, avec ses dates calendaires de prise d’effet et d’échéance ;
  • sa rémunération correspondante pour cette période.

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, complété par la loi A.L.U.R. du 24 mars 2014, prévoit maintenant que la nomination d’un nouveau syndic en assemblée générale avec date de prise d’effet immédiate vaut révocation du mandat de syndic en cours, c’est-à-dire la rupture anticipée de son contrat.

Cette révocation est automatique et ne nécessite pas une résolution particulière.

Le point n°3 du contrat type de syndic dispose pour sa part que la révocation doit être fondée sur un motif légitime.

II. La révocation doit être légitime pour ne pas exposer le syndicat à une action judiciaire en indemnisation

Si la nouvelle rédaction de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 autorise de facto la révocation d’un syndic, en cas d’élection en assemblée générale d’un nouveau syndic avec prise d’effet immédiate de son mandat, les principes généraux du droit des contrats doivent néanmoins être respectés.

L’article 1217 du Code Civil prévoit notamment qu’une partie lésée par l’inexécution de la convention qui les lie peut poursuivre son cocontractant défaillant en réparation de son dommage matériel, donc financier.

L’attribution de dommages et intérêts se fera alors par voie judiciaire, l’ancien syndic ne pouvant décider seul de la somme qui lui reviendrait pour une rupture du contrat qu’il considérerait comme abusive.

Ce principe a donc été repris dans le contrat type de syndic.

C’est ce que rappelle la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation dans un arrêt n° 17 - 12506 du 8 mars 2018 :

« Attendu, selon le jugement attaqué (juridiction de proximité de Nice, 7 décembre 2016), rendu en dernier ressort, le Cabinet SAFI a assigné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble C.M. en indemnisation de son préjudice du fait de la révocation anticipée de son contrat de syndic à durée déterminée ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, le jugement retient qu’une mise en concurrence normale intervenant pendant l’exercice du mandat a entrainé le terme immédiat des fonctions du Cabinet SAFI, pour en déduire qu’il ne peut plus percevoir d’honoraires postérieurement à cette date ;

Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le Cabinet SAFI avait commis un manquement à ses obligations de nature à justifier sa révocation sans indemnité, la juridiction de proximité n’a pas donné de base légale à sa décision ;

Par ces motifs Casse et annule… »

Le syndicat des copropriétaires - qui nomme en assemblée générale un nouveau syndic avec date de prise d’effet immédiate, révoquant donc le mandat en cours - doit donc constituer un dossier solide (courriels réitérés, télécopies, lettres recommandées, mises en demeure…) attestant des carences manifestes de son syndic.

Ainsi, il disposera, en cas d’action judiciaire, de preuves démontrant que la rupture anticipée de son contrat de syndic était parfaitement justifiée (caractère non abusif), et que celui-ci ne peut donc pas prétendre à la moindre indemnité pour cette révocation légitime.  

Conseil :

Si la copropriété met fin au contrat de son ancien syndic quelques jours avant son échéance, les risques d’une action judiciaire pour rupture abusive du contrat sont faibles. C’est pourquoi nous préconisons de limiter le mandat à 12 mois et de refuser un contrat de 18 mois très engageant.

S’il est mis fin au contrat en plein milieu du mandat, il faut alors détenir des éléments tangibles et solides prouvant les fautes du syndic, il ne s’agit pas de procéder à une révocation pour bénéficier d’un tarif plus attractif, ou parce que le syndic n’a pas répondu à quelques emails.

Pour être validé, le contrat de syndic doit préciser ses dates calendaires d’échéance

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
31 mai 2018 (17-18.046)
Observations

Jurisprudence constante.

Pour une autre précision relative à la date du contrat de syndic : La désignation ne vaut que pour l'avenir, elle ne peut rétroagir.

Principe retenu

 Il est indispensable que les dates de prise d’effet et de fin de contrat soient mentionnées.

Analyse de la décision

Pendant de longues années, les convocations d’assemblées générales faisaient seulement figurer, en matière de fixation du terme du contrat de syndic, la mention : « à la date de tenue de l’assemblée générale approuvant les comptes de l'exercice ».

Il en résultait un flou et une vraie incertitude quant à la durée du mandat, puisque la fin du contrat du syndic était subordonnée à la tenue de l’assemblée, dont on ne savait pas avec précision quand elle aurait lieu.

La 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation a rendu son verdict le 31 mai dernier (Pourvoi 17-18-046), en cassant un arrêt, dans lequel une cour d’appel avait jugé que : « Le contrat du syndic a été consenti et accepté pour une durée minimal d’une année, … entrera en vigueur le 6 février 2014…et se terminera lors de l’assemblée générale appelée à statuer sur les comptes de l’exercice arrêtés au 31 décembre 2013 ».

Voyons ensemble l’analyse de la Cour de Cassation, et les conséquences en découlant.

I. Un dispositif juridique déjà bien en place

L’article 29 du décret du 17 mars 1967 organise déjà que « le contrat de mandat du syndic fixe sa durée et précise ses dates calendaires de prise d'effet et d'échéance ».

Depuis le décret du 26 mars 2015, la mention des dates calendaires de début et de fin du mandat, a été intégrée au contrat type de syndic, ce qui devait à priori mettre un terme aux débats.

Malgré ces dispositions pourtant bien claires, nombre de contrats n’étaient toujours pas en conformité, comme l’illustre ce cas.

En l’espèce, la cour d’appel saisie du dossier ne prend pas en considération la mention faite d’un renouvellement du « mandat de syndic de la société Cabinet G jusqu’à l’assemblée générale appelée à approuver le compte de l’exercice arrêté au 31/12/2013 » mais se base sur le fait que la durée dudit mandat n’excédant pas trois années, pour juger qu’il n’a pas été dérogé aux dispositions des articles 28 et 29 du décret du 17 mars 1967.

II. Une position ferme de la Cour de Cassation

Saisie de ce cas, la Cour de Cassation vient réaffirmer la portée du dispositif existant, tant via l’article 29 du décret de 1967, qu’avec le contrat type.

Elle le réaffirme avec force dans cet arrêt, il est indispensable que les dates de prise d’effet et de fin de contrat soient mentionnées et elle conclut que « commet une faute la cour d’appel qui n'avait pas recherché si la résolution renouvelant le syndic dans ses fonctions respectait cette exigence. »

Les juges du fond, qui avaient rejeté la demande de nullité de la décision par laquelle le syndic en place était reconduit jusqu'à la prochaine assemblée générale d'approbation des comptes, en prenant position sur le fait que son mandat n'avait pas une durée supérieure à 3 ans, n’ont pas eu une analyse appropriée et auraient dû vérifier la présence d’une date de prise d’effet ET de fin de contrat.

Nous espérons que les nombreux syndics attentifs à nos publications tiendront compte de cette dernière décision pour la rédaction de leurs contrats, mettant ainsi un terme à une période de jurisprudence abondante et fluctuante liée aux lacunes des contrats quant à leur date de début et de fin.

L’ouverture par un copropriétaire d’un mur « partie commune » constitue une appropriation : le délai pour engager l’action judiciaire de remise en état est de 30 ans

Catégories Prescription Non-respect du règlement de copropriété
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
16 décembre 2014 (13-25.024)
Observations

Jurisprudence constante.

Il est mentionné un délai de prescription pour les actions personnelles de 10 ans, les faits ayant eu lieu avant le 25 novembre 2018.

Notons que depuis l'entrée en vigueur de la loi ELAN (soit le 25 novembre 2018) le délai de prescription pour les actions personnelles est de 5 ans. 

Principe retenu

L'ouverture par un copropriétaire d'un mur "partie commune" est une appropriation de cette partie et l'action judiciaire se prescrit par trente ans. 

Analyse de la décision

Nous sommes dans le cadre d’une copropriété composée de deux bâtiments, les bâtiments A et B, séparés par un mur mitoyen. Ce mur est qualifié de partie commune par le règlement de copropriété.  

Un copropriétaire, la SCI V. est copropriétaire de plusieurs lots, deux lots dans le bâtiment A et un troisième lot, dans le bâtiment B. Depuis l’origine, les lots n° 159 et 160 du bâtiment A sont référencés à usage commercial dans le règlement de copropriété (ils sont utilisés pour une activité de restauration). Le lot situé dans le bâtiment B est à usage d’habitation.  

À une date indéterminée (il y a plus de dix ans), le mur séparatif entre les deux bâtiments a été percé et le lot du bâtiment B (à usage d’habitation), a été transformé en cuisine pour les besoins de l’activité de restauration des locaux commerciaux du bâtiment A. De nombreuses années après le percement du mur, les copropriétaires d’un autre lot, situé dans le bâtiment B, ont assigné la SCI V. et ont demandé, entre autres, la remise en état des lieux.  

Ces copropriétaires, demandeurs à l’action, motivent leur demande en invoquant le fait que le mur est qualifié de partie commune dans le règlement de copropriété. La SCI fait valoir qu’on ne pouvait plus engager d’action, puisque le délai de prescription de 10 ans prévu par l’article 42, alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 est écoulé. Les copropriétaires qui ont engagé l’action invoquent de leur côté que ce n’est pas la prescription de 10 ans qu’il faut retenir, mais la prescription trentenaire, dans la mesure où il ne s’agit pas d’une action personnelle (délai de 10 ans), mais d’une action réelle (30 ans).

Tout le monde s’accorde à dire que l’ouverture du mur constitue bien des travaux, mais la question est de savoir s’il s’agit de travaux privatifs affectant les parties communes ou, au contraire, si la nature et l’étendue de ces travaux est telle, qu’ils constituent une appropriation de parties communes.    

Deux interprétations sont, à priori, possibles :  

  • 1ère lecture :

Les travaux affectent simplement une partie commune. Le copropriétaire, en l’occurrence, la SCI, aurait dû demander, préalablement à la réalisation des travaux, l’autorisation de l’assemblée générale, conformément à l’article 25 b) de la loi du 10 juillet 1965 (« Autorisation donnée à M. et Mme… d’effectuer les travaux de percement du mur… »).  

À défaut de demande d’autorisation, en cas de contestation, on pourrait considérer qu’il s’agit d’une action personnelle dont l’action se prescrit par 10 ans (c’est ce que la SCI  prétendait).  

  • 2ème lecture :

Le mur constitue une partie commune. Il est expressément qualifié ainsi dans le règlement de copropriété. Selon cette seconde lecture, l’ouverture ne constitue pas de « simples » travaux affectant les parties communes, mais une véritable appropriation desdites parties communes.

L’action est donc une action réelle, se prescrivant par 30 ans.  

La Cour de cassation a opté pour la seconde interprétation. Elle a considéré que les travaux en cause ne sont pas de simples travaux qui affectent les parties communes, mais équivalaient à une appropriation puisqu’une partie de la structure a été détruite et le volume correspondant a été récupéré par la SCI V.  

La Cour de cassation, considérant qu’il s’agissait d’une action réelle, a retenu le principe de la prescription trentenaire.   La SCI V. a été condamnée à restituer le mur, partie commune, c’est-à-dire à reboucher l’ouverture réalisée.

II. Distinction entre action personnelle et action réelle

Après lecture attentive de l’arrêt de la Cour de Cassation, celle-ci semble être plus subtile puisqu’elle opère la distinction entre :  

  • action personnelle : il y a bien violation d’une clause du règlement, mais les travaux réalisés n’affectent pas de manière définitive les parties communes : à défaut d’autorisation de l’assemblée, l’action tendant à solliciter la remise en état se prescrit alors par 10 ans ;

 

  • action réelle (= action qui s’attache à une chose) : même hypothèse : les travaux sont irréguliers pour défaut d’autorisation préalable du syndicat, mais l’atteinte aux parties communes est clairement identifiée à partir du moment où le règlement qualifie expressément les parties communes concernées et affectées (ex : sont qualifiées de parties communes : la totalité du sol, des cours et des jardins, les fondations, les gros murs des façades, des pignons et des mitoyennetés, les murs de refend, tous murs et cloisons parcourus par des conduits ou canalisations servant à plusieurs copropriétaires, l'ossature en maçonnerie ou en béton armé …).

          Il s’agit d’une atteinte à une partie commune expressément qualifiée, l’action vise à récupérer ces parties communes le délai d’action est donc de 30 ans. C’est bien parce que « la transformation litigieuse s’est effectuée en ménageant une ouverture dans le mur séparatif entre le bâtiment A et B, lequel selon le règlement de copropriété constituant une partie commune, qu’il s’agit d’une action touchant sur la « chose » (= la partie commune dûment qualifiée).

D’ailleurs, la Cour précise bien pour terminer que « l’action tendait donc à restituer des parties communes et non pas uniquement à sanctionner la méconnaissance du règlement de copropriété ».   

Il n’est pas possible de désigner un syndic provisoire qui n’est pas mentionné à l’ordre du jour de l’assemblée générale.

Catégories Ordre du jour Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
03 décembre 2015 (14-25.583)
Observations

Jurisprudence constante.

Principe retenu

L'assemblée générale ne peut se prononcer que sur ce qui est inscrit à l'ordre du jour, elle ne peut pas désigné un syndic provisoire si cette question n'est pas mentionnée à l'ordre du jour. 

Analyse de la décision

En cette période doublement troublée pour les copropriétés (report des assemblées générales, absence de convocation des assemblées générales avant le 31 janvier 2021, absence de concertation avec le conseil syndical pour établir l’ordre du jour, vote uniquement par correspondance), nous avons souhaité mettre en lumière un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 03 décembre 2015 (14-25.583).

Pourquoi maintenant ? Parce-que cet arrêt reflète une certaine réalité de la situation dans laquelle se trouve un grand nombre de copropriétés, à savoir l’absence de mise en concurrence d’un contrat de syndic qui est arrivé à échéance. En effet, nous sommes les premiers témoins d’un nombre considérable de copropriétés qui voulait se séparer de leur syndic actuel, mais lequel n’a mis à l’ordre du jour que sa candidature, obligeant les assemblées générales soient à accepter cette nouvelle désignation, soient à la refuser mais dans ce cas, se retrouve sans syndic.

Alors, cet arrêt rendu par la Cour de cassation à son importance, même si la réponse apportée par la haute juridiction n’est pas favorable aux syndicats des copropriétaires. Notre rôle est aussi de vous informer sur ce qui n’est pas possible… à moins de trouver une astuce pour contourner le problème.

I. La question de la désignation du syndic doit impérativement être inscrite à l’ordre du jour

Dans cette copropriété, un syndic bénévole refuse de porter à l’ordre du jour la question de la nomination d’un syndic concurrent, imposant alors son unique désignation lors de l’assemblée générale ou l’absence de syndic.

Les copropriétaires rejettent la désignation de ce syndic bénévole et pour éviter de se retrouver sans syndic,  l’assemblée générale désigne alors un syndic bénévole provisoire dans l’unique but de pouvoir d’organiser une autre assemblée générale avec la désignation d’un autre syndic. Cependant, la nomination du syndic provisoire n’était pas prévue à l’ordre du jour de cette réunion.

Le syndic bénévole évincé et opposant à la désignation d’un syndic provisoire (autre que lui) assigne alors le syndicat des copropriétaires en annulation de ladite résolution.

En effet, conformément à l’article 13 du décret du 17 mars 1967, « l’assemblée générale ne prend que de décision valide que sur les questions inscrites à l’ordre du jour et dans la mesure où les notifications ont été faites conformément aux dispositions des articles 9 à 11-1 (dudit décret) ».

Autrement dit, la loi est claire sur ce sujet. Pour pouvoir voter sur une résolution, celle-ci doit figurer à l’ordre du jour de l’assemblée générale. La jurisprudence est tout aussi limpide à ce sujet, les juridictions ont en effet, toujours annulé les résolutions qui n’étaient pas inscrites à l’ordre du jour (si des copropriétaires opposants ou défaillants ont demandé l’annulation judiciaire de ladite résolution).

En conséquence, il y avait donc très peu de chance que la juridiction saisie rejette la demande d’annulation de la résolution. Pourtant la Cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu le 28 mai 2014 rejette la demande du syndic évincé. Pour ce faire, elle s’appuie sur la théorie de l’incident : le syndic bénévole qui a organisé l’assemblée générale a refusé expressément (en envoyant une lettre de refus au conseil syndical) d’inscrire la nomination d’un syndic concurrent, donc la seule possibilité pour désigner un syndic était de le désigner lui. Dès lors, selon la Cour d’appel, la désignation d’un autre syndic bénévole provisoire bien que non-inscrite à l’ordre du jour est valable en raison de la « théorie de l’incident ».

Cependant, ce n’est pas cet argument que retient la Cour de cassation qui casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel. La haute juridiction se base sur l’article 13 du décret susmentionné et énonce «  l’assemblée générale ne délibère valablement que sur les questions inscrites à l’ordre du jour ».

Cette cassation n’est pas surprenante, mais une décision inverse aurait permis au syndicat des copropriétaires de se retrouver dans une situation pratique plus propice à la nomination d’un meilleur syndic, sans passer par les rouages judiciaires.

Dès lors, la nomination du syndic bénévole provisoire n’est alors pas valable, le syndicat des copropriétaires est alors sans syndic…

II. La désignation judiciaire d’un syndic

C’était justement pour éviter la désignation d’un syndic judiciaire que l’assemblée générale avait élu un syndic provisoire, sauf que la Cour de cassation en annulant cette résolution, nomme également un syndic provisoire. En effet, la copropriété se retrouve sans syndic et le syndic bénévole évincé a alors demandé à la juridiction la nomination judiciaire d’un syndic provisoire.

En effet, en application de l’article 17 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965 et 46 du décret du 17 mars 1967, à défaut de nomination par l’assemblée générale des copropriétaires dûment convoqués à cet effet, le président du tribunal judiciaire désigne le syndic par ordonnance sur requête d’un ou plusieurs copropriétaires ou sur requête d’un ou plusieurs membres du conseil syndical ou du maire de la commune ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat du lieu de la situation de l’immeuble.

Autrement dit, si l’assemblée générale doit désigner un syndic, mais que le syndic candidat ou que les syndics candidats n’obtient pas la majorité requise (malgré la passerelle), la copropriété se retrouve alors sans syndic. Dans ce cas, la loi ne prévoit pas d’autre possibilité que de saisir le président du tribunal judiciaire afin que ce dernier nomme un syndic provisoire, qui aura notamment pour mission principale d’organiser une nouvelle assemblée générale aux fins de désigner un nouveau syndic.

La seule exception possible à cette situation, c’est lorsque l’assemblée générale n’a pas désigné de syndic mais que le contrat du syndic actuel est encore en cours. Par exemple si le contrat du syndic actuel se termine le 05 février 2021, il convoque l’assemblée générale qui se tient le 27 janvier 2021. Au cours de cette assemblée générale, aucun syndic n’est désigné faute de majorité, alors le syndic actuel peut jusqu’au 05 février 2021 envoyer une nouvelle convocation pour la désignation d’un syndic.

C’est le seul échappatoire à la désignation d’un syndic judiciaire en cas de refus de désigner un syndic à la majorité requise.

La sanction est terrible pour le syndicat des copropriétaires, mais par moment il vaut mieux subir la sanction que subir la mauvaise gestion de l’ancien syndic désigné une fois de plus.

Par ailleurs, nous attirons votre attention sur le fait que la désignation du syndic bénévole provisoire  a été annulée judiciaire car le copropriétaire évincé a voté contre, ce qui lui a ouvert le droit de contester cette résolution. Pour rappel, seuls les copropriétaires défaillants ou opposants peuvent contester judiciairement la décision… avis à bon entendeur !

La Cour d’appel de Basse-Terre rappelle la capacité d’annulation en cascade des assemblées générales convoquées par un syndic, dont le mandat a été invalidé judiciairement

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour d'appel de Basse-Terre
Référence
22 juin 2020 (17-016841)
Observations

Jurisprudence constante.

Principe retenu

L’annulation en cascade des assemblées générales s’avère encourue en cas de motif invalidant la première, affectant la régularité de la réunion postérieure du syndicat, et que cette dernière se voit contester dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par un copropriétaire opposant ou défaillant. 

Analyse de la décision

Face aux irrégularités des assemblées générales, les copropriétaires opposants ou défaillants décident parfois d’engager une action judiciaire en annulation de celles-ci.

Outre cette première procédure contentieuse, la poursuite des illégalités peut entrainer un nouveau contentieux en nullité fondé sur l’irrégularité initiale constatée par la juridiction judiciaire, comme le rappelle la cour d’appel de Basse-Terre dans un arrêt du 22 juin 2020.

I. Annulation judiciaire d’une assemblée générale : règles ordinaires requises

Une copropriété sise dans les Antilles française tient deux assemblées générales le 3 juin et 30 juillet 2015 convoquées par un syndic professionnel I. D.

Au cours de ces assemblées générales, le syndicat désigne à nouveau I.D. pour un mandat d’un an, ayant pour échéance le 20 juin 2016.

Ces assemblées générales font l’objet d’une action judiciaire en annulation (pour diverses irrégularités) par des copropriétaires opposants dans le délai de deux mois suivant la notification de leur procès-verbal par le syndic selon l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Cette procédure contentieuse aboutit à l’annulation des assemblées générales dans leur ensemble par un arrêt de la cour d’appel de Basse-Terre du 26 novembre 2018.

II. Annulation judiciaire d’une assemblée générale : conditions pour la nullité en cascade

Malgré l’invalidation des assemblées générales de 2015, comprenant notamment l’annulation de la résolution sur l’élection du syndic professionnel I.D, ce dernier poursuit néanmoins la gestion de la résidence, et décide de convoquer deux assemblées générales en 2016.

Sans attendre le résultat de l’action judiciaire en cours, tendant à la nullité des assemblées générales de 2015, deux personnes opposantes détenant des lots assignent, dès le 29 juillet 2016, le syndicat en annulation des assemblées générales de 2016 :

- afin, de ne pas se voir opposer une éventuelle prescription, en raison d’une action judiciaire introduite hors délai, autrement dit au-delà du délai légal de deux mois suivant la notification de leur procès-verbal par le syndic ;

- certains de l’illégalité de ces réunions du syndicat, si celles antérieures de 2015 se révélaient invalidées par la juridiction judiciaire civile.

Leur requête en première instance étant écartée par le T.G.I. de Basse-Terre dans un jugement n° 16 - 00925 du 5 octobre 2017, les deux propriétaires opposants interjettent appel, avec entre temps, l’arrêt rendu le 26 novembre 2018 par la cour d’appel annulant les assemblées générales de 2015, intégrant entre autre la nullité de la résolution sur la nomination du syndic professionnel I.D.

La cour d’appel de Basse-Terre dans son arrêt n° 17 - 016841 du 22 juin 2020 n’a pas d’autre choix que de faire droit au recours de ces deux propriétaires à l’encontre du syndicat, un syndic ne pouvant pas réglementairement administrer un immeuble (ce qui induit la convocation des assemblées générales), lorsqu’il se trouve dénué de tout mandat légitime : «…Sur le fond, il est constant que suivant arrêt infirmatif du 26 novembre 2018, la cour d'appel de Basse-Terre a contradictoirement annulé les assemblées générales des copropriétaires de cet ensemble immobilier des 03 juin et 30 juillet 2015 désignant l'EURL I. D. en qualité de syndic pour une durée d'un an soit jusqu'au 20 juin 2016.

Or, il est admis que l'annulation de la décision d'assemblée générale qui avait désigné le syndic rend annulable l'assemblée suivante convoquée par ce même syndic rétroactivement privé de pouvoir.

Aussi, faute de preuve d'une régularisation de la désignation du syndic l'EURL I. D., il est de juste appréciation d'annuler les assemblées générales des copropriétaires de l'ensemble immobilier [...] en date des 2 juin 2016 et 19 juillet 2016 et ce faisant, l'ensemble des résolutions y contenues.

Les demandes indemnitaires accordées par les premiers juges seront également écartées. En conséquence, le jugement querellé sera infirmé en toutes ses dispositions… »

Cet arrêt s’inscrit dans la jurisprudence judiciaire civile constante selon laquelle, l’annulation en cascade des assemblées générales s’avère encourue en cas de motif invalidant la première, affectant la régularité de la réunion postérieure du syndicat, et que cette dernière se voit contester dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par un copropriétaire opposant ou défaillant (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965).

Si cette situation juridique peut paraitre inextricable et avoir pour seule solution judiciaire la désignation d’un administrateur provisoire, il n’en est rien.

En effet, une assemblée générale destinée à la seule fin d’élire un syndic, lorsque le syndicat s’en trouve dépourvu, peut être convoquée par tout copropriétaire (art. 17 de la loi du 10 juillet 1965).