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La participation à l’assemblée d’une seule personne n’ayant pas qualité pour y participer est une cause de nullité de l’assemblée dans son ensemble

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
n°22-17.764
Observations

La vérification de la qualité à participer à une assemblée générale de copropriétaires est une condition cruciale de sa régularité. Le syndic qui accepte un participant n’ayant pas lui-même la qualité de copropriétaire, et ne justifiant pas lors de la signature de la feuille de présence d’un mandat de représentation valable, encourt le risque d’une nullité de l’assemblée dans son ensemble, même si cette participation est sans conséquence sur l’issue des votes sur les questions inscrites à l’ordre du jour, et donc la mise en cause de sa responsabilité pour le préjudice subi par le syndicat des copropriétaires.

Principe retenu

L'irrégularité affectant la composition d'une assemblée générale entraîne sa nullité sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un grief.

Analyse de la décision

Une SCI copropriétaire avait assigné le syndicat des copropriétaires de son immeuble en annulation de trois assemblées en cascade, celle en 2014 ayant désigné le syndic (non-professionnel), et les assemblées suivantes pour défaut de qualité à convoquer.

Pour la première assemblée, elle reprochait la mention sur la feuille de présence de personnes n’ayant pas la qualité de copropriétaire et ne disposant pas de pouvoir de représentation d’un copropriétaire, si bien que selon elle, une seule personne avait qualité pour participer, et que celle-ci ne pouvait seule voter en méconnaissance du caractère délibératif de l'assemblée. Autrement dit qu’une assemblée ne peut se tenir avec un seul copropriétaire présent ou représenté.

La Cour d'appel d'Aix en Provence le déboute, au motif que la présence des personnes censées ne pas avoir qualité pour participer n’avait pas été contestée lors de la tenue de l’assemblée, et que, même à admettre qu’un seul copropriétaire ait participé à l'assemblée générale, son vote favorable suffisait à l'adoption des résolutions à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés (autrement dit à l’article 24…).

Elle avait raison sur ce dernier point : avec un seul copropriétaire, l’assemblée peut être tenue valablement, ce copropriétaire pouvant la présider, avec le syndic assurant le secrétariat, à condition naturellement que le règlement n’impose pas un nombre minimal de scrutateurs…

Par contre, la Cour de cassation la censure sur son argumentation principale : en considérant qu’il n’y avait pas lieu à prononcer la nullité dès lors que n'était pas contestée l'exactitude des mentions figurant sur la feuille de présence quant à la présence des personnes en cause, « alors que l'irrégularité affectant la composition d'une assemblée générale entraîne sa nullité sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un grief, et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les personnes mentionnées à la feuille de présence avaient qualité pour voter et si, ainsi que l'indiquait le procès-verbal, les copropriétaires étaient tous présents ou représentés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».

Le syndicat des copropriétaires doit prouver la réalité de la créance d’un copropriétaire

Catégories Impayés
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
n° 21-19.980
Observations

Observation : Rappel du principe de droit selon lequel il appartient à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver. Cette preuve peut être rapportée par tout moyen

Principe retenu

Principe retenu : un syndic qui engage une action contre un copropriétaire débiteur a la charge de rapporter la preuve de la réalité de la créance et doit produire tout document ou justificatif, le juge en appréciant ensuite souverainement la force probante.

Analyse de la décision

Nous allons aborder ici un cas assez classique, que nombre de copropriétaires ont rencontré, et qui souvent s’avère inextricable.

Entre dialogue de sourds avec un syndic qui raisonne mécaniquement et réel préjudice du copropriétaire, c’est le sort d’un solde débiteur reporté année après année sur son compte individuel, sans que son origine ne soit clairement identifiée, que la Cour de cassation a dû traiter, dans un arrêt du 28 septembre 2022 (CIV 3, 28 septembre 2022, N°21-19.980).

I - Le solde de charges en impayé repris sur un compte de copropriétaire au fil des ans

C’est un arrêt qui va permettre de remettre les pendules à l’heure et pousser les syndics à la plus grande minutie dans le suivi des comptes individuels de copropriétaires.

a) Les faits

Tout commence avec une somme de 397 € qui apparaît au débit du compte de copropriétaire de Monsieur O.

Ce dernier refusant visiblement de payer à l’aveugle ce qui lui est réclamé, le syndic saisit le tribunal judiciaire d’Annecy dans le but de faire condamner Monsieur O. au paiement de cet arriéré.

Le jugement est rendu le 12 avril 2021 en dernier ressort. Cela signifie que si l’une des deux parties à l’instance souhaite contester la décision rendue, elle n’aura d’autre choix que de se pourvoir directement en cassation (sans connaître l’étape de la Cour d’Appel).

b) Un jugement assez conciliant pour le syndic

Le juge d’Annecy accepte de reconnaître l’existence de la créance du syndicat des copropriétaires sur la base d’un relevé de compte de charges, de procès-verbaux d’assemblée générale et des lettres de mise en demeure produits à l’instance.

Ainsi, « pour faire droit à la demande en paiement d’un arriéré de charges dirigée à son encontre, le tribunal a relevé que le syndicat des copropriétaires versait aux débats un relevé de propriété du 16 octobre 2020, le relevé de compte de charges arrêté au 29 janvier 2021, les mises en demeure de payer des 12 août et 30 octobre 2020 et les procès-verbaux d’assemblée générale des 3 mai 2018 et 19 juin 2019, »

Sur la base de ces documents, qui correspondent globalement à des synthèses comptables et des courriers, le juge de première instance considère que le syndicat des copropriétaires « apporte la preuve du bien-fondé de sa demande en paiement ».

Mais ceci est sans compter sur la pugnacité de Monsieur O. qui tient bon et se pourvoit en cassation, là où d’autres auraient sûrement abandonné au vu du montant en jeu (397 euros rappelons-le) et des frais de justice à engager.

II - La cour de cassation sanctionne l’incertitude de la créance

a) Les décomptes de charges et procès-verbaux d’assemblée ne sont pas suffisants

La Cour de cassation profite de l’affaire portée devant elle pour rappeler des notions fondamentales, balayant par là-même le raisonnement tenu par le Tribunal judiciaire.

Les hauts magistrats commencent par reprendre les justificatifs soumis à l’appréciation du premier juge, les disqualifiant un par un.

Le décompte et les relances ne sont pas des preuves de la réalité de la créance et « Il incombe au syndicat des copropriétaires, qui poursuit le recouvrement de charges de copropriété, de produire les documents comptables relatifs aux périodes concernées » pour réellement établir la preuve de la créance.

Il faut donc que le syndic démontre d’où vient la somme réclamée, de quoi elle se compose effectivement : est-ce une quote-part de budget prévisionnel non-payée ? Est-ce une régularisation de charges d’un exercice comptable ? Si oui, lequel ?

Pour la Cour de cassation, le procès-verbal de l’assemblée générale ayant approuvé les comptes est encore moins un justificatif valable.

Elle rappelle en effet le principe posé par l’article 45-1 du décret du 17 mars 1967 qui précise que « Les charges sont les dépenses incombant définitivement aux copropriétaires, chacun pour sa quote-part. L'approbation des comptes du syndicat par l'assemblée générale ne constitue pas une approbation du compte individuel de chacun des copropriétaires. »

Dès lors, un copropriétaire peut toujours agir pour faire corriger une erreur de répartition des charges par le syndic (dans la limite de cinq ans).

b) La Cour rappelle les principes de droit commun

La Cour de cassation rappelle un principe de droit issu du code civil (articles 1353 et 1358) selon lequel il appartient à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver. Cette preuve peut être rapportée par tout moyen.

Cela signifie qu’un syndic qui engage une action contre un copropriétaire débiteur a la charge de rapporter la preuve de la réalité de la créance et peut produire tout document ou justificatif, le juge en appréciant ensuite souverainement la force probante.

Un simple relevé de compte de copropriétaire peut en effet mentionner une somme débitrice, mais cette mention ne permet pas d’en prouver la réalité. Des documents de synthèse comptable ne sont pas des preuves d’une dette.

Il faut détenir des documents qui permettent d’expliquer, sans équivoque, l’origine de la somme réclamée.

Les enseignements à tirer de cette décision de justice sont nombreux et doivent servir de gouvernail tant au syndic qu’au conseil syndical en charge du contrôle de la gestion du syndicat des copropriétaires.

Tout d’abord, si le syndic n’est pas en mesure de remonter à l’origine d’un débit de charges pour un copropriétaire, il n’y a pas d’autre solution que… d’effacer la dette !

Parallèlement, le conseil syndical pourra réfléchir à engager la responsabilité contractuelle du syndic et sanctionner sa mauvaise gestion comptable de la copropriété : la réduction des honoraires, voire la résiliation de son mandat sont ici à envisager.

Dans le même sens, si l’origine de la créance n’est pas traçable, et donc non-justifiée, le syndic ne doit pas se contenter d’effacer cette dette, mais il doit veiller à effacer aussi les frais de relance et de mise en demeure imputés à ce copropriétaire qui n’est finalement pas débiteur !

Car il n’est pas question ici que le syndicat des copropriétaires supporte de quelconques frais ou, pire, des honoraires de syndic pour des démarches visant à recouvrer une créance fantôme !

Rappelons enfin qu’une somme portée au débit d’un compte de copropriétaire de manière abusive peut causer un préjudice à ce dernier qu’il pourra vouloir chercher à faire réparer par voie de justice.

En effet, ce copropriétaire pourrait se voir entravé dans son projet de vente d’un lot si une dette est mentionnée sur l’état daté fourni au notaire. Le syndicat des copropriétaires s’expose donc à un risque de procédure et de versement de dommages-intérêts au copropriétaire.

Cet arrêt sonne donc comme un rappel aux syndics d’avoir l’exigence d’une bonne tenue de la comptabilité.

Attention, l’oubli de la reproduction de l’article 42 alinéa 2 sur le procès-verbal, permet la contestation de l’assemblée générale pendant dix ans

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Procès-verbal
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
28 janvier 2015 (13-23.552)
Observations

La jurisprudence a longtemps été fluctuante sur cette question d'absence de reproduction de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965. 

La Cour de cassation pose un principe par cet arrêt. 

Attention, néanmoins, l'absence de reproduction n'ouvre plus un délai de 10 ans pour contester l'assemblée générale mais un délai de 5 ans. 

Principe retenu

L'absence de reproduction dans la notification du procès-verbal de l'assemblée générale du texte de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 rend cette notification irrégulière. 

Analyse de la décision

L’article 18 du décret du 17 mars 1967 dispose que le procès-verbal d’une assemblée générale doit reproduire l’article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965.

Voici le texte de l’article 42, alinéa 2 :

« Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée générale. Sauf en cas d’urgence, l’exécution par le syndic des travaux décidés par l’assemblée générale en application des articles 25 et 26 est suspendue jusqu’à l’expiration du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa ».  

Comme on le voit, cet article a pour but d’informer les copropriétaires de leur droit à faire annuler tout ou partie de l’assemblée générale correspondant au procès-verbal.

Une vieille question : « Quelle est la conséquence de l’oubli de la reproduction de l’article 42 alinéa 2 ? »

La jurisprudence des Cours d’Appel était fluctuante, certaines estimant que la reproduction n’était pas une formalité substantielle, son oubli ne pouvait entraîner l’annulation de l’assemblée générale.

D’autres Cours avaient jugé que le fait de compléter après-coup le procès-verbal était suffisant. La Cour de Cassation a mis fin le 28 janvier à cette valse-hésitation.  

L’arrêt de la Cour de cassation du 28 janvier 2015

Voici la citation exacte de l’arrêt : « L’absence de reproduction dans la notification du procès-verbal de l’assemblée générale du texte de l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 rend cette notification irrégulière ».  

C’est clair et net.      

Conséquences

Comme l’a jugé la Cour, la « notification est irrégulière ». Dès lors le délai de deux mois après notification du procès-verbal au-delà duquel on ne peut engager une procédure en annulation ne peut être invoqué et les copropriétaires peuvent agir pendant un délai de … dix ans. Comme si le procès-verbal n’avait pas été adressé….   Consultation : si vous êtes géré par un syndic professionnel, vérifiez ce point. Si vous êtes syndic bénévole, n’oubliez surtout pas l’article 42, alinéa 2.    

Non-respect des délais de convocation d’assemblée générale et qualité pour agir en nullité

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
14 mars 2019 (18-10.379)
Observations

Confirmation de la jurisprudence fixée en 1974 concernant le non-respect des délais de convocation d'assemblée générale. 

Principe retenu

Si le délai de convocation n'a pas été respecté, le copropriétaire qui souhaite faire annuler l'assemblée générale ne doit pas voter favorablement à certaines décisions. 

Le fait de voter favorablement à certaines décisions, enlève le caractère irrégulier de la convocation. 

Analyse de la décision

Les irrégularités affectant les assemblées générales (convocation et tenue) ne se soldent pas toujours par une nullité quand une action est engagée.

La Cour de cassation réitère sa jurisprudence constante sur les conditions nécessaires pour pouvoir solliciter la nullité de l’assemblée générale dans son ensemble par un copropriétaire qui a été victime d’une notification tardive de la convocation par le syndic.

I. Forme et délai de notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires

Il incombe au syndic en exercice, en sa qualité d’unique représentant légal du syndicat (article 18 de la loi du 10 juillet 1965) de convoquer les copropriétaires en assemblée générale, et ce a minima une fois par an (article 7 du décret du 17 mars 1967).

Selon l’article 34 du décret du 17 mars 1967, la notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires s’entend soit par l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit par voie électronique (à la condition d’un accord écrit express individuel de chaque destinataire), soit par une remise contre émargement.

Cette notification doit respecter un délai minimal réglementaire de 21 jours, entre le lendemain de la première présentation de celle-ci à tous les copropriétaires et le jour de la réunion du syndicat (article 9 du décret du 17 mars 1967).

Régulièrement, les délais de notification ne sont pas respectés. Certains copropriétaires concernés se rendent quand même à l’assemblée générale et font alors consigner cette irrégularité dans le procès-verbal.

II. Irrégularité du délai de convocation : conditions requises pour agir en nullité

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que l’action judiciaire en contestation de l’assemblée générale (résolutions ou réunion complète) doit être exercée par les copropriétaires opposants (ayant voté dans le sens contraire de la décision) ou défaillants (absents non représentés) dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.

En l’espèce, le syndic professionnel d’une copropriété sise à Menton (06) notifie hors délai la convocation de l’assemblée générale du 21 juin 2010 à une SCI T.B.V. propriétaire d’un lot.

Tout en signalant et faisant retranscrire sur le procès-verbal l’irrégularité de l’assemblée générale du fait de cette convocation tardive, la SCI T.B.V. ne s’oppose pas à l’ensemble des points inscrits à son ordre du jour.

Autrement dit, elle vote favorablement certaines questions adoptées par l’assemblée générale.

Puis après la notification du procès-verbal, elle assigne le syndicat des copropriétaires pour obtenir la nullité dans son intégralité.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 18 - 10379 du 14 mars 2019 confirme sa jurisprudence, à savoir qu’un copropriétaire ne peut solliciter l’annulation d’une assemblée générale dans sa totalité, dès lors qu’il vote favorablement à l’une de ses décisions approuvées.

Le fait qu’il fasse consigner une réserve sur la validité de l’assemblée générale ne suffit pas pour obtenir la nullité de cette dernière :

« […] Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines des décisions prises et constaté que la SCI T.B.V.  avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l'assemblée générale était entachée d'illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d'opposant ou de défaillant à l'ensemble des décisions prises, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] ».

En revanche, ce copropriétaire est en mesure d’invoquer la nullité d’une ou plusieurs résolutions prises individuellement lors de l’assemblée générale illicite s’il jouit de la qualité d’opposant à la décision concernée :

« Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la demande est nouvelle, comme n'ayant pas été présentée en première instance, et a été formée après l'expiration du délai de deux mois ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n'était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ; […] ».

Le copropriétaire présent à une assemblée générale irrégulière, qui envisage de la contester judiciairement dans son intégralité, doit préserver ses droits en votant dans le sens contraire de la majorité de chacune des résolutions, afin de ne pas engager en vain une procédure contentieuse longue et onéreuse.

Les comptes des copropriétés : la Cour de Cassation donne raison à un copropriétaire qui entendait faire respecter les règles

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 février 2014 (12-19.047)
Observations

Les règles comptables sont régies par la loi du 10 juillet 1965, le décret du 17 mars 1967 ainsi que l'arrêté et le décret comptable du 14 mars 2005. 

Principe retenu

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. 

Analyse de la décision

I. Quand les syndics ne respectent pas les obligations comptables

Nous ne comptons plus, à l’ARC, les documents comptables soumis aux assemblées générales et qui ne respectent pas la réglementation comptable applicable aux copropriétés, beaucoup de syndics ne s’embarrassant pas avec les (nombreuses) obligations en la matière.

Et c’est ainsi que les deux principes fondamentaux que sont la comptabilité d’engagement et la séparation des exercices sont souvent bafoués, fréquemment par facilité mais aussi parfois par ruse pour arranger le résultat d’un exercice difficile à justifier.

Les copropriétaires qui votent contre l’approbation de tels comptes sont la plupart du temps minoritaires et sont tout simplement méprisés par les syndics qui voient leurs comptes approuvés à la majorité des copropriétaires présents et représentés. Mais un copropriétaire opiniâtre vient de montrer que l’on ne peut pas toujours faire n’importe quoi sans jamais avoir à en rendre compte…

II. La Cour de Cassation… casse

Le syndic en question avait omis de comptabiliser, dans les produits d’un exercice, une indemnité judiciaire obtenue dans un jugement rendu au cours de l’exercice, au motif qu’elle ne serait payée que sur l’exercice suivant.

La Cour d’appel avait cru bon de valider les comptes tels quels.

La Cour de cassation a sèchement remis les choses à leur juste place (Cass. 3ème Civ. 5 février 2014, n°12-19047) : « les charges et produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic, indépendamment de leur règlement ». Elle a donc cassé l’arrêt d’appel et donné raison au copropriétaire qui demandait l’annulation de la résolution d’approbation de ces comptes.

Qu’on se le dise : un copropriétaire isolé peut faire valoir le droit et faire annuler une approbation de comptes non conformes aux obligations comptables.

Autrement dit, un exercice doit comporter TOUTES les charges et TOUS les produits de cet exercice, qu’ils soient ou non payés / encaissés, et seulement ces charges et ces produits.

III. Les textes, chers professionnels, les textes

La Cour de cassation renvoie donc les syndics aux textes légaux et réglementaires qu’elle a cités pour justifier sa décision :

Extraits de l’article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965 (non modifié par la loi ALUR) :

Les comptes du syndicat comprenant le budget prévisionnel, les charges et produits de l'exercice, la situation de trésorerie, ainsi que les annexes au budget prévisionnel sont établis conformément à des règles comptables spécifiques fixées par décret. Les comptes sont présentés avec comparatif des comptes de l'exercice précédent approuvé.

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. L'engagement est soldé par le règlement. […]

Article 2, alinéa 2 du décret du 14 mars 2005 :

En application de l'article 14-3 de la même loi, sont rattachés à l'exercice les produits acquis (produits reçus et à recevoir) et les charges supportées (charges réglées et à régler) au titre de l'exercice.

Compte bancaire séparé : un arrêt de justice sans conséquence

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
12 mai 2016 (15-12.575)
Observations

Précision quant aux règles comptables et à l'ouverture d'un compte bancaire. 

Principe retenu

Aucune violation de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ne peut être caractérisée lorsque les sommes reçues au nom du syndicat des copropriétaires transitent par le compte du syndic avant d'être transférés sur le compte séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires. 

Analyse de la décision

Un récent arrêt de la Cour de Cassation du 12 mai 2016 (15-12.575) a jugé que le contrat de syndic ne pouvait être annulé au motif que ce dernier a fait transiter sur son compte bancaire des sommes appartenant au syndicat alors que ce dernier disposait d’un compte bancaire séparé.

Certains observateurs et syndics se sont « frotté les mains » en supposant que même en présence d’un compte bancaire séparé, le syndic pouvait tout de même déposer pendant un « certain temps » (ou plutôt dirons-nous un temps certain) les fonds sur son compte bancaire global avant de les reverser sur le compte séparé de la copropriété.

Nous allons cependant expliquer pourquoi, depuis la loi ALUR du 24 mars 2014 cette décision ne peut pas être considérée comme un arrêt de principe.

Les obligations et les sanctions en matière de compte bancaire séparé en vertu de l’ancienne version de la loi du 10 juillet 1965

L’affaire concernée par cet arrêt judiciaire remonte à novembre 2010, soit quatre ans avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR.

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, avant d’être modifié par la loi ALUR, prévoyait dans son septième alinéa  l’obligation suivante : « le syndic est chargé (…) d’ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat des copropriétaires sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs reçues au nom et pour le compte du syndicat. (... )La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois. »

Cet article prévoit que la sanction peut être prononcée uniquement en cas de non-respect de cette obligation : il s’agit donc de la première obligation citée qui concerne l’ouverture du compte bancaire séparé.

C’est donc sur ce fondement légal que la haute juridiction a jugé que la faute commise par le syndic de faire transiter les fonds du syndicat des copropriétaires sur son compte bancaire n’entraînait pas pour autant la possibilité de prononcer judiciairement la nullité du contrat de mandat.

L’ article 18 après l’entrée en vigueur de la loi ALUR

La loi ALUR a, en 2014, modifié de façon importante la loi du 10 juillet 1965 et plus particulièrement l’article 18.

En l’occurrence, elle a repris les obligations en matière de compte bancaire séparé en rajoutant cette fois-ci que « la méconnaissance par le syndic de ces obligations emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois suivants sa désignation. »

Le législateur a donc voulu étendre la sanction de la nullité du contrat, non pas à la seule obligation relative à l’ouverture du compte bancaire séparé, mais à toutes celles citées avant l’énonciation de la sanction :

  1. l’ouverture dans un établissement bancaire d’un compte bancaire séparé au nom du syndicat ;
  2. le versement sans délai de toutes les sommes ou valeurs reçues au nom ou pour le compte du syndicat ;
  3. le fait que le compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion ni d’une compensation avec tout autre compte ;
  4. le fait que les éventuels intérêts produits par le compte sont définitivement acquis au syndicat de copropriétaires.

L’arrêt de la Cour de Cassation semble donc aujourd’hui sans conséquence puisqu’il se réfère à des dispositions légales (et en l’occurrence à celles de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965) issues d’une version antérieure qui n’est plus d’actualité.

Si la même affaire devait être jugée aujourd’hui, au regard des dispositions du nouvel article 18, il est donc fort probable que le défaut de l’une de ces obligations serait susceptible d’entraîner la nullité judiciaire du contrat de syndic.

Les conséquences pratiques

Certains syndics vont profiter de cet arrêt pour placer les fonds de ses copropriétés mandantes sur leur compte bancaire global.

La logique est simple : afin d’être en conformité avec les exigences légales, le syndic  ouvre un compte bancaire séparé propre à la copropriété mais continue à bénéficier de la trésorerie de l’immeuble en faisant transiter les fonds sur son propre compte bancaire.

Il faudra donc que le conseil syndical soit vigilant afin de contrôler ce genre de pratique.

Pour cela, il suffira de vérifier sur le relevé bancaire de la copropriété que la date d’enregistrement de l’opération correspond bien à la date de règlement.

Concrètement, si un copropriétaire réalise son règlement d’appels de fonds le 26 mai par virement ou prélèvement par exemple, l’incidence de ce paiement sur le relevé bancaire devra être datée du 27 ou 28 mai.

A défaut, cela signifie que cette somme a transité sur un autre compte qui est sûrement celui du syndic…

 

Un compte bancaire séparé peut perdurer d’un syndic à un autre

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
21 décembre 2017 (16-24.587)
Observations

Précision précieuse en matière de compte bancaire séparé en cas de changement de syndic. 

Principe retenu

En cas de changement de syndic, le compte bancaire ouvert par l'ancien syndic peut être repris par le nouveau syndic. 

Analyse de la décision

Bien que la loi du 10 juillet 1965 modifiée par la loi ALUR ait supprimé la possibilité de dérogation de compte bancaire séparé, nous sommes souvent interrogés par nos adhérents pour vérifier la réalité du statut du compte bancaire présenté par le syndic.

En effet, il y a toujours un ou plusieurs éléments qui posent problème : le libellé du compte qui présente le nom du syndic, la présentation d’un numéro d’identifiant créancier SEPA dont le créditeur n’est pas la copropriété mais le syndic, des conditions générales ou particulières ambiguës ne permettant pas d’avoir l’assurance qu’il s’agit d’un vrai compte bancaire séparé où le syndic n’a aucun intérêt sur les fonds mandants.

Autrement dit, si juridiquement la situation a évolué, sur le terrain elle est devenue plus technique sachant que les syndics et leurs banques se sont organisés pour que le compte ait « l’apparence et l’odeur » d’un compte séparé mais n’en ai pas le goût. Le fameux « canada dry ».

Ceci étant, nous avons préconisé une méthode simple à mettre en place, qui fait obstacles aux stratagèmes des syndics et de leurs banques pour présenter de faux comptes bancaires séparés.

I. Une attestation de la banque qui doit confirmer la possibilité de transmission du compte bancaire au syndic repreneur

Afin de garantir que le compte bancaire est bien séparé, il est indispensable d’avoir une attestation de la banque qui confirme que le compte est bien évidemment séparé et surtout qu’il est transférable en cas de changement de syndic. Autrement dit, que le syndic repreneur puisse continuer à gérer le compte et ce peu importe les cabinets successifs qui disposeront du mandat.

Cette confirmation impliquera que le compte n’est pas rattaché au syndic en place mais bien la propriété du syndicat de copropriétaires.

Pour éviter d’écrire ce type de mention dans l’attestation, les syndics avancent un argument qui, à présent, tombe assurément à l’eau.

II. Une obligation de transmission des fonds

L’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’en cas de changement de syndic, ce dernier est tenu de remettre les archives et « la totalité des fonds immédiatement disponibles » de la copropriété.

Par ce biais, il invoque qu’il est tenu de fermer le compte bancaire afin d’être en mesure de remettre au syndic repreneur un chèque du montant du solde du compte.

Par conséquent, il évoque que la banque ne peut pas indiquer dans l’attestation une affirmation qui, légalement parlant, pose problème.

III. Une réponse très claire de la Cour de Cassation

En date du 21 décembre 2017, la Cour de Cassation a rendu un arrêt qui a dû justement traiter une demande de nullité du contrat de syndic au motif que le syndic repreneur n’avait pas ouvert un compte bancaire séparé, en continuant à gérer celui ouvert par son prédécesseur.

La Cour de Cassation n’est pas tombée dans le panneau, elle a considéré que la loi oblige à ce que le syndicat de copropriétaires dispose d’un compte bancaire séparé, ce qui était bien le cas puisque le syndic a pu présenter une attestation de la banque confirmant la situation.

Ainsi, un syndic repreneur est tout à fait habilité à continuer à faire perdurer un compte même si, rappelons-le, le syndicat de copropriétaires est en droit de lui demander de changer d’établissement bancaire.

Conclusion : la banque a le droit d’indiquer dans son attestation que le compte pourra être transmissible au nouveau syndic.

Pour preuve, voici un extrait de l’attestation de la banque Monte Paschi qui présente justement ce type de mention :

COMPTE BANCAIRE

 

Le syndic ne peut pas payer des factures après la fin de son mandat

Catégories Missions du syndic Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
16 octobre 2013 (12-20.881)
Observations

Condamnation du cabinet SERGIC. 

 

Principe retenu

Le syndic dont le mandat a expiré ne peut plus payer les factures

Analyse de la décision

La société SERGIC n’avait pas été renouvelée dans son mandat par une copropriété mécontente (on se demande bien pourquoi...).

Malgré cela, SERGIC avait perçu une indemnité d’assurance après la fin de son mandat (donc hors mandat) et payé des factures d’ailleurs contestées par le syndicat, ceci à hauteur de 1.960,80 €, intégrant des factures d’honoraires.

SERGIC avait donc rendu un chèque au syndicat égal à l’indemnité diminuée des 1.900,80 €.

Un premier juge de proximité avait estimé que :

« La société SERGIC a été contrainte de continuer la gestion des affaires courantes pour le compte de la copropriété au titre de la gestion d’affaires et qu’elle se trouvait d'ailleurs dans la même situation que si elle avait reçu un mandat exprès ».

En gros, selon le juge de proximité : un syndic peut faire ce qu’il veut même s’il n’est plus syndic.

C’est ce jugement qui a été cassé par la Cour de cassation qui précise :

« Vu l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ensemble l’article 1372 du Code civil ;

Il apparaît qu’en statuant ainsi, alors que le mandat du syndic est exclusif de l’application des règles de la gestion d’affaires, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ; par ces motifs : casse ».

La conséquence - très intéressante pour tous les copropriétaires dont les anciens syndics continuent à faire des règlements, voire à SE faire des règlements - est qu’un syndic dont le mandat est expiré ne peut plus effectuer des paiements (y compris à lui-même). À défaut, il devra rembourser.

Mots clés associés

L’assemblée générale convoquée par le syndic sans respecter le délai légal de convocation [21 jours] peut être annulée si aucune urgence n’a été constatée

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
03 octobre 1974 (73-12.634)
Observations

Cet un arrêt de principe rendu par la Cour de cassation en 1974 et toujours d'actualité. 

Pour un arrêt plus récent : Non-respect des délais de convocation d'assemblée générale et qualité pour agir en nullité de l'assemblée générale. 

Principe retenu

Si le délai de 21 jours entre la notification de la convocation et l'assemblée générale n'est pas respecté, alors l'assemblée générale peut être annulée, sauf à considérer qu'il y a une urgence. 

Analyse de la décision

Le syndic qui convoque une assemblée générale doit respecter des conditions de forme et de délai, comme nous l’avons évoqué précédemment.

L’article 9 du décret de 1967 lui impose ainsi de notifier les convocations au minimum 21 jours avant la tenue de l’AG.

S’il ne respecte pas ce délai, il commet une faute qui peut engager sa responsabilité en cas de préjudice (CA de Paris, 6 mars 1992, Loyers et copr. 1992, n° 228).

L’un des premiers éléments de vérification effectuée par les avocats concerne les conditions de forme et de délai des convocations adressées par le syndic.

Dans le cadre d’une procédure judiciaire, si le juge constate que le délai réglementaire de 21 jours n’a pas été respecté, se posera la question de savoir si c’est parce qu’une urgence particulière l’y autorisait.

En effet, le syndic n’est pas tenu à ce délai si la convocation est faite en urgence. C’est le juge qui apprécie les éléments du dossier pour se prononcer sur la réalité de l’urgence.

S’il s’avère qu’aucune urgence ne justifiait un délai plus court (« délai raisonnable »), il prononcera l’annulation de l’assemblée générale (voire d’une résolution ou de certaines résolutions si l’assemblée n’est pas contestée dans son intégralité).

Le juge de cassation en 1974 considérait que la violation d’une règle impérative en matière d’assemblée générale devait entraîner l’annulation de l’assemblée et plusieurs arrêts sont venus confirmer cette position par la suite. D’ailleurs, le même arrêt de 1974 n’exige pas du copropriétaire qu’il prouve que la convocation tardive lui a occasionné un préjudice.

La Cour de cassation est venue rappeler que même en cas d’absence de convocation ou de convocation irrégulière, le copropriétaire « opposant ou défaillant » n’a que 2 mois à compter du procès-verbal notifié pour contester l’assemblée (Cass., 3e civ., 12 octobre 2005, n° 04-14602).

Une  précision également apportée en 2007 : le copropriétaire régulièrement convoqué ne peut pas demander la nullité de l’assemblée alors que l’irrégularité de la convocation concerne un autre copropriétaire : « seul le copropriétaire non convoqué ou irrégulièrement convoqué [peut] se prévaloir de l'absence ou de l'irrégularité de la convocation à l'assemblée générale » (Cass., 3e civ., 14 novembre 2007, n° 06-16392).

L’annulation de l’assemblée générale ayant désigné le syndic entraîne l’annulation rétroactive des assemblées qu’il a convoquées

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
06 février 2002 (00-19.132)
Observations

Cet arrêt imposant la contestation de l'assemblée générale dans un délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal, a été confirmé par les arrêts postérieurs. 

Principe retenu

L'annulation de l'assemblée ayant désigné le syndic entraîne l'annulation rétroactive des assemblées qu'il a convoquées

Analyse de la décision

Parce que les copropriétés sont des lieux où les intérêts des copropriétaires divergent, entre connivences et conflits d’intérêts, ces divergences peuvent s’exprimer lorsqu’est abordée la question de l’élection du syndic.

A partir du moment où le choix du syndic ne convient pas à certains copropriétaires, ils peuvent saisir le juge d’une demande en annulation de la délibération qui l’a désigné, voire de l’assemblée en entier.

Mais le temps qu’une décision judiciaire soit rendue, le syndic désigné a pu convoquer une ou plusieurs autres assemblées. Toute la question réside ensuite dans le sort des assemblées convoquées ultérieurement, lorsque l’assemblée (ou la résolution) ayant désigné le syndic est annulée.

On peut alors assister à des annulations d’assemblées en cascade, dont il faut bien saisir la raison : lorsque la désignation du syndic a été annulée, cela revient à dire qu’il est censé ne jamais avoir été désigné lors de l’assemblée en question. Dès lors qu’il convoque une assemblée (avant que son mandat ait été annulé), la convocation est alors irrégulière car il est considéré comme n’ayant pas été régulièrement habilité pour le faire.

Conséquence : l’annulation de l’assemblée ayant désigné le syndic entraîne l’annulation rétroactive des assemblées qu’il a convoquées.

Mais là encore, ces assemblées ne sont pas nulles de plein droit, leur nullité doit être demandée au juge. Ainsi, pour obtenir ces annulations en cascade, le copropriétaire doit demander la nullité de l’assemblée (ou de la résolution) ayant désigné le syndic, ainsi que l’annulation de telle et telle assemblées irrégulièrement convoquées, chacune dans le délai de 2 mois à compter de la notification des PV correspondants.

Le principe de rétroactivité signifie que les parties concernées (copropriétaires et syndic) sont replacés dans la situation antérieure à l’acte qui a été annulé, ce qui pose de nombreuses difficultés en pratique puisque le syndic a en principe accompli des actes de gestion depuis son élection (finalement annulée), pour lesquels il devait en principe percevoir une rémunération (cette problématique est abordée ci-dessous), et que les assemblées ont pris des décisions qui se trouvent privées d’effet (désignation du syndic, élection des membres du conseil syndical, vote de travaux, approbation des comptes…).

Concrètement, cela revient à dire que toutes les résolutions votées lors de ces assemblées ne peuvent pas s’appliquer et que pour pouvoir les voter à nouveau, il faudrait tout reprendre depuis le début et prévoir une assemblée générale convoquée en bonne et due forme. Simplement, si la copropriété est dépourvue de syndic du fait de l’annulation en justice de son mandat, il sera nécessaire en amont de mettre en œuvre la procédure de requête afin qu’un administrateur provisoire soit désigné par le Président du Tribunal de grande instance (comme vu précédemment).

On constate donc que l’annulation de la désignation d’un syndic entraîne des conséquences lourdes pour la copropriété.

C’est pourquoi la jurisprudence a eu tendance à en limiter les effets, notamment en limitant le délai de contestation des assemblées convoquées par un syndic dont le mandat a été annulé.

Auparavant, elle considérait que le délai de contestation des décisions d’assemblée de 2 mois (article 42, alinéa 2, de la loi de 1965) ne s’appliquait pas à ces assemblées, de sorte qu’un copropriétaire qui avait obtenu l’annulation de la désignation du syndic pouvait contester les assemblées irrégulièrement convoquées dans le délai de droit commun de 10 ans, réduits à 5 ans depuis la loi ELAN (article 42, alinéa 1er).

Depuis plusieurs années, la jurisprudence impose désormais que le copropriétaire qui veut obtenir l’annulation de ces assemblées agisse dans le délai de 2 mois, comme c’est le cas pour toute contestation de décisions d’assemblées. Cette précision vient limiter les nullités en cascade.

L’arrêt cité du 6 février 2002 applique ce délai de 2 mois et plusieurs arrêts ultérieurs le confirment (Cass., 3e civ., 3 mars 2004, n° 02-15091 ; Cass., 3e civ., 7 avril 2004, n° 02-14496 ;  Cass., 3e civ., 30 janvier 2007, n° 05-19475).