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Le sort des portes palières en cas de travaux de réfection des cages d'escaliers

Copie de la décision
Catégories Travaux partie commune
Juridiction
Cour d'Appel de Paris
Référence
20-18455
Observations

Le syndic est en mesure de saisir le juge des référés de sa seule initiative, peu importe la stipulation contraire du règlement de copropriété

Principe retenu

La mise en peinture des portes palières des lots s’impose aux copropriétaires, en l’absence d’annulation judiciaire des résolutions correspondantes selon la procédure requise

Analyse de la décision

L’exécution de travaux d’entretien peut aboutir à des obstructions de copropriétaires, et ce, d’autant plus qu’elle concerne des installations privatives.

Dans un arrêt du 10 juin 2021, la Cour d’appel de Paris rappelle les conditions légales d’une opposition d’un copropriétaire à leur réalisation.

 

I. Rénovation de la cage d’escaliers avec peinture des portes palières privatives : compétences et modalités de contestation par un copropriétaire

Une copropriété, administrée par un syndic professionnel, décide de la réfection de la cage d’escaliers, parties communes (revêtement au sol, mur), avec peinture des portes palières des lots privatifs. 

L’assemblée générale adopte la résolution relative à la réfection de la cage d’escaliers.

En l’absence de mention du coloris des portes palières lors de la réunion du syndicat, celle-ci fait l’objet d’une décision officieuse entérinée postérieurement par une décision d’assemblée générale du 22 juin 2020.

La propriétaire d’un appartement fait barrage à la peinture de sa porte palière, par l’entreprise retenue par le syndicat, considérant que celle-ci se révèle :

- non seulement irrégulière : s’agissant entre autre d’une installation privative, dont l’entretien incombe en principe au seul détenteur du lot (art. 2 de la loi du 10 juillet 1965) ;

- mais aussi inopportune par la teinte choisie et sa réfection récente par ses soins.

Le syndic, au nom du syndicat, assigne alors la copropriétaire contrevenante en vue de sa condamnation à permettre la réalisation des décisions des assemblées générales, estimant celles-ci parfaitement régulières :

- en l’absence d’action judiciaire en annulation par cette copropriétaire dans le délai imparti de deux mois suivant la notification de leur procès-verbal (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965) ;

- du fait, que le règlement de copropriété puisse intégrer provisoirement des équipements privatifs aux parties communes, dans un souci de préservation de l’harmonie de l’immeuble.

La copropriétaire, condamnée en première instance par une ordonnance n° 19 - 59134 du 10 septembre 2020 du T.G.I. de Paris, recourt celle-ci.

La cour d’appel de Paris dans son arrêt n° 20 - 18455 du 10 juin 2021 réitère la décision légitime de la juridiction civile inférieure : «…Il ressort des procès-verbaux versés aux débats que le 28 juin 2018 l'assemblée générale a voté les travaux de réfection des paliers et décidé de retenir la proposition de la société D. pour les travaux de revêtement de sol, revêtements muraux, mise en peinture et autres embellissements pour un montant de 25 243,89 euros TTC selon le devis n° X. du 12 janvier 2018.

Ainsi que l'a retenu le premier juge, ce devis porte expressément mention de la mise en peinture des portes palières.

Si Mme Z. a contesté par un courrier du 22 mars 2021 l'utilité de cette réfection de ces portes en parfait état et ne nécessitant pas d'entretien, il a été relevé, à juste titre, par le premier juge l'absence de contestation de cette assemblée générale dont les décisions s'imposent à tous les copropriétaires quel qu'ait été leur vote ou leur opinion sur ces travaux.

Par la suite, en janvier 2019, le conseil syndical a convié les copropriétaires à choisir la couleur des divers revêtements et pris compte des demandes exprimées.

Il résulte du courriel de Mme Z. du 7 mars 2019 que celle-ci qui n'a pas exprimé son avis dans le cadre de la consultation précitée a par la suite exprimé un désaccord non sur la peinture mais sur la couleur retenue 'ce choix est ridicule au vu de la couleur grise des portes palières (...). Soit vous gardez la couleur d'origine soit vous vous conformez à la couleur grise des portes palières (...). Gris pour les portes et blanc pour les murs'.

Comme l'a retenu le juge des référés, la couleur choisie pour les portes palières a fait l'objet d'une ratification expresse par l'assemblée générale le 22 juin 2020, de sorte que même à supposer que la consultation réalisée par le conseil syndical n'ait pas été régulière, cette décision s'impose à Mme Z.

En conséquence tant les travaux de peinture des portes palières que la couleur retenue pour ces travaux ayant fait l'objet de décisions de l'assemblée générale, le juge des référés pouvait sur le fondement de l'article 835 du code de procédure civile ordonner à Mme Z. de laisser l'accès à sa porte palière pour la réalisation des travaux de peinture. Le prononcé d'une astreinte est également justifié par son opposition à la réalisation de ces travaux.

L'ordonnance sera donc confirmée en toutes ses dispositions.

 

II. Rénovation de la cage d’escaliers avec peinture des portes palières privatives : capacité du syndic à contraindre judiciairement le copropriétaire contrevenant

Outre, la régularité des travaux du syndicat, la copropriétaire conteste la légalité de la procédure judiciaire introduite par son représentant à son encontre.

Plus précisément, elle considère que l’assignation se révèle illicite, en raison de la saisine du juge des référés par le syndic de sa seule initiative (c’est-à-dire en dehors d’une habilitation expresse de l’assemblée générale), en contradiction avec une clause du règlement de copropriété, restreignant cette faculté.

Pour sa part, le syndic au nom du syndicat, conteste la licéité de cette stipulation restrictive du règlement de copropriété, au regard du dispositif impératif énoncé par l’article 55 du décret du 17 mars 1967. Cette disposition réglementaire prévoit en effet, que l’autorisation de l’assemblée générale n’est pas nécessaire pour les actions engagées par le syndic, pour le compte du syndicat, auprès du juge des référés.

Légitimement, les deux juridictions judiciaires civiles saisies successivement font prévaloir une règle d’ordre public (obligatoire pour tout un chacun et que l’on ne peut déroger) : «…Mme Z. soutient en premier lieu qu'elle ne pouvait être assignée sans que le syndicat des copropriétaires obtienne l'autorisation du syndicat des copropriétaires puisque si l'article 55 du décret du 17 mars 1967 autorise une action en référé quel qu'en soit le motif et même hors cas d'urgence, en revanche, le règlement de copropriété limite cette faculté d'agir sans autorisation aux seuls cas d'urgence, condition qui n'est pas remplie en l'espèce.

Le syndicat des copropriétaires soutient qu'il est de jurisprudence constante que dans tous les cas entrant dans la compétence du juge des référés le syndic peut agir sans autorisation amiable, que les dispositions du décret sont d'ordre public, le règlement de copropriété ne pouvant y déroger.

Aux termes de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale, mais il est cependant fait exception à cette règle pour les demandes qui relèvent des pouvoirs du juge des référés.

L'urgence n'est pas une condition d'intervention du juge des référés qui, aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite, et, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

A la différence de ces dispositions légales, l'article 13 du règlement de copropriété régissant l'immeuble dans lequel Mme Z. est copropriétaire stipule que le syndic ne peut intenter une action en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale, sauf lorsqu'il s'agit d'une action en recouvrement de créance, même par voie d'exécution forcée, d'une procédure engagée conformément à l'article 54 du décret du 30 mars 1908 et, en cas d'urgence, notamment d'une procédure engagée conformément aux articles 806 et suivants du code de procédure civile.

Ainsi que le soutient Mme Z., le règlement de copropriété restreint donc les pouvoirs conférés au syndic pour agir sans autorisation.

Selon l'article 43 de la loi du 10 juillet 1965 'toutes clauses contraires aux dispositions des articles 6 à 37, 41-1 à 42 et 46 et celles du décret prises pour leur application sont réputées non écrites'. Les articles 18, 18-1 et 18-2 relatifs au pouvoir du syndic font donc partie des dispositions impératives visées par l'article 43. Les pouvoirs reconnus au syndic par l'article 18 représentent donc le 'C B' de ses attributions qui ne peuvent être réduites par le règlement de copropriété.

En conséquence, les pouvoirs du syndic doivent être examinés au regard du seul article 55 précité.

En l'espèce le syndic pouvait donc agir en référé contre Mme Z. pour obtenir sa condamnation sur le fondement du trouble manifestement illicite et ce sans avoir à solliciter préalablement l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de nullité de l'assignation… »

Le copropriétaire, qui entend s’opposer légalement à des travaux adoptés en assemblée générale, se doit à minima de voter dans le sens contraire de la résolution et requérir leur annulation dans le délai de deux mois suivant la notification de leur procès-verbal.

Dans la négative, la décision s’avère pleinement opposable à lui sans qu’il puisse, au demeurant, invoquer en défense une mention du règlement de copropriété enfreignant une disposition légale ou réglementaire d’ordre public.

Les conditions de mise en cause de la responsabilité décennale du constructeur

Copie de la décision
Catégories Travaux
Juridiction
Cour d'Appel de Nouméa
Référence
18/00262
Observations

La responsabilité décennale suppose, que l’ouvrage reçoive un usage conforme à son affectation ou d’une non-façon à une norme de construction impérative 

Principe retenu

La mise en cause de la responsabilité décennale du constructeur implique de démontrer dans le délai de dix ans, à compter de la réception de l’ouvrage, une malfaçon affectant la solidité de celui-ci.

Analyse de la décision

Les acquéreurs d’un lot sur une résidence neuve sont de plus en plus confrontés à des désordres, qu’ils estiment imputables aux constructeurs ou aux assurances spécifiques obligatoires, à savoir la dommage-ouvrage ou la décennale de l’entreprise.

En l’absence de solution concertée avec l’une ou l’autre de ces polices impératives, le syndicat peut décider d’engager une action judiciaire civile notamment contre le constructeur et son assurance décennale pour les dommages relevés sur les parties communes.

La cour d’appel de Nouméa, dans un arrêt du 23 août 2021, rappelle les conditions requises pour la reconnaissance de la responsabilité civile de ces deux intervenants.

I. Responsabilité du constructeur et de sa décennale dans les malfaçons sur l’ouvrage : poursuite dans les dix ans de la réception pour des désordres affectant sa solidité 

La réception d’une résidence neuve sise à Nouméa (98) affectée principalement à l’habitation, disposant de deux parkings (un aérien et un souterrain) et d’une buanderie collective, intervient le 5 novembre 1995.

Les copropriétaires relèvent divers désordres, notamment de fortes infiltrations, en cas de pluie, sur les voies d’accès au garage en sous-sol, imputées à un joint non étanche de dilatation (enterré) du parking extérieur.

Les constructeurs H. et leur assurance décennale écartant leur responsabilité en la matière, le syndicat habilite son syndic, afin d’obtenir de manière contradictoire une :

- expertise judiciaire constatant les dommages et les responsabilités. Suite à une ordonnance du 20 juin 2005 désignant un expert, celui-ci rend son rapport le 26 juillet 2007, préconisant des travaux pour faire cesser ces désordres ;

- condamnation en indemnisation de leur préjudice, moyennant une assignation au fond. 

Un premier jugement du 2 mai 2011 du tribunal de première instance de Nouméa accueille la demande du syndicat et des copropriétaires.

Les deux parties condamnées recourent la décision de la juridiction civile inférieure et obtiennent son infirmation par un arrêt du 3 janvier 2017 de la cour d’appel de Nouméa.

Le syndicat et ces copropriétaires se pourvoient en cassation, la haute juridiction civile faisant droit à leur requête, par un arrêt du 3 mai 2018, pour défaut de motivation juridique, en renvoyant les parties à nouveau auprès de la cour d’appel.

Devant la cour d’appel de Nouméa, les parties réitèrent leurs arguments en ce qui concerne entre autre le joint de dilatation du parking, à savoir pour :

- le syndicat et les copropriétaires, une malfaçon de nature décennale, pour laquelle le constructeur et son assurance professionnelle doivent répondre, puisqu’elle affecte la solidité de l’ouvrage (art. 1792 al. 1 du Code civil et L 241-1 du Code des assurances) ;

- les constructeurs et leur assurance, un lien de causalité non établi, mais aussi et surtout une action prescrite, la responsabilité devant être recherchée au plus tard dans le délai de dix ans à compter de la réception de l’ouvrage selon l’article 1792-4-1 du Code civil.

La cour d’appel de Nouméa dans son arrêt n° 18 - 00262 du 23 août 2021 rejette la responsabilité des constructeurs et leur assurance civile professionnelle au motif d’une prescription de l’action, au demeurant juridiquement litigieuse.

Ces juges déclarent l’action hors délai en raison d’une constatation des désordres par l’expert judiciaire en 2007, soit au-delà de la prescription intervenue le 5 novembre 2005 (dix ans à compter de la réception de l’ouvrage au 5 novembre 1995, l’arrêt comprenant d’ailleurs une erreur sur cette date, puisqu’il évoque un transfert de l’ouvrage au 5 novembre 1996).

Or, l’assignation du syndicat et des copropriétaires au 14 et 15 octobre 2004 (soit dans le délai des dix ans) interrompt en principe le délai de prescription selon l’article 2241 du Code civil : «…Il ressort de l’expertise, que le désordre au jour où l’expert a réalisé ses opérations (rapport complémentaire de 2007) ne compromettait pas la solidité de l’ouvrage ni sa destination. Il concluait que seule l’aggravation du processus de corrosion pouvait à terme entraîner une atteinte à la solidité.

Pour mettre en jeu la responsabilité décennale des constructeurs, il faut que l’atteinte à la solidité intervienne avec certitude dans le délai de 10 ans. En l’espèce, la garantie décennale est expirée depuis le 05/11/2005. Les constatations de l’expert ont été faites en juin 2007 soit au-delà du délai.

Dès lors, la mise en jeu de la responsabilité décennale ne peut être retenue… »

II. Responsabilité décennale du constructeur et de sa décennale : usage conforme à sa destination ou non-façon à une norme de construction impérative

Dans le cadre de ce contentieux, le syndicat et les copropriétaires se plaignent également des malfaçons imputables selon eux aux promoteurs et à leur assurance décennale, soit des :

- infiltrations dues à l’absence d’étanchéité sur les balcons et dans la buanderie commune ;

- fissures sur la dalle du parking aérien, en raison d’un vice de construction.

En défense, les promoteurs et leur police professionnelle opposent :

- l’absence d’obligation d’étanchéité sur les balcons et la buanderie selon les normes techniques de construction en vigueur ;

- un usage inadapté du garage en surface par des véhicules lourds excluant en premier lieu leur responsabilité civile (art. 1792 al. 2 du Code civil), et ce d’autant plus du caractère révolu du dommage à la suite d’une utilisation conforme à sa destination.

Dans son arrêt du 23 août 2021, la cour d’appel de Nouméa se range à l’argumentation juridique des constructeurs et de leur assurance, la responsabilité civile contractuelle impliquant par principe un dommage effectif, une faute exclusive de son auteur, ainsi qu’un lien de causalité entre les deux (art. 1147 du Code civil devenu depuis le 1231-1) : « …L’expert a constaté que les balcons terrasses n’ont pas reçu d’étanchéité sous le carrelage. Les buanderies sont protégées de l’extérieur par une paroi en lames « persiennées". Quand il pleut l’eau pénètre dans ce local compte tenu de sa conception. En l’absence d’étanchéité, les plafonds présentent des décollements de peinture ou des traces d’humidité.

Le syndicat des copropriétaires considère que le désordre évolutif est de nature décennale en ce qu’à terme il entraînera la corrosion des aciers des armatures.

Les consorts H. (constructeurs) rappellent comme explicité par l’expert qu’il n’existait aucune obligation de revêtir d’un complexe d’étanchéité les terrasses et buanderies et qu’il n’y a pas atteinte à la solidité de l’ouvrage.

Sur quoi,

Le désordre ne présente pas un caractère décennal. De surcroît, les règles de l’art qui n’imposaient aucune étanchéité obligatoire. Dès lors, la mise en jeu de la responsabilité décennale sera écartée…

L’expert a relevé que les têtes de poteaux dans le parking étaient éclatées et que les deux poutres présentaient une flèche importante, les dalles de la zone de roulement présentant de nombreuses fissures. Il conclut que l’ensemble des désordres n’étaient pas apparents à la réception. Il noté également qu’après être retourné plusieurs fois sur place il a constaté que les fissures traitées par un enduit visant à les cacher étaient réapparues et qu’il était clair que les poutres bougeaient sous l’effet de la circulation sur le parking extérieur.

La cause en est le fluage du béton et la surcharge permanente de la structure lors de la réfection de l’étanchéité de la dalle due à une erreur de calcul ce qui conduit à interdire l’accès au parking extérieur au poids lourds pour éviter que la structure ne souffre davantage (p. 22 remèdes)

L’expert conclut que le parking a été dimensionné uniquement pour recevoir des véhicules de types voitures légères et que le passage de véhicules lourds (camions poubelles, camions de déménagement) est la cause des désordres.

Les consorts H. estiment que le désordre a été réglé avec l’interdiction de la circulation des poids lourds et qu’aujourd’hui, il n’est fait état d’aucun désordre affectant la solidité de l’ouvrage, le parking étant quotidiennement utilisé par les résidents de l’immeuble

Le syndicat considère que le désordre est de nature décennale recouvrant à la fois un vice de construction et de conception. Il considère que le parking a vocation à recevoir la circulation de tous types de véhicules et que le seul fait que leur circulation soit à prescrire rend le bien impropre à sa destination.

L’assureur reconnaît qu’il y a atteinte à la solidité de l’ouvrage mais que le non-respect de la destination que les parties avaient initialement entendu donner à l’ouvrage (circulation réservée aux véhicules légers) exonère les constructeurs de toute garantie ; qu’en tout état de cause, le dommage a pu être réparé à temps pour un coût inférieur à 300 000 Fcfp (francs comptoirs français du Pacifique), les recommandations de l’expert ayant été suivies d’effet puisqu’il n’y a plus d’aggravation 15 ans après la réception.

Sur quoi,

Le désordre porte atteinte à la solidité de l’ouvrage. Toutefois s’agissant d’un parking aérien (il existe un autre parking), il devait être utilisé par les seuls résidents conformément à la configuration des lieux. L’usage abusif par des poids lourds (camions de déménagement ou camion poubelles) exonère les constructeurs. Au demeurant les mesures prises (travaux de consolidation et interdiction de circulation des poids lourds) ont permis de limiter les dommages… »

Si le constructeur et son assurance professionnelle sont notamment responsables de certaines malfaçons survenues dans les dix ans de la réception de l’ouvrage, cela suppose néanmoins qu’elles affectent la solidité de l’immeuble ou le rendent impropre à sa destination, mais aussi que l’usage qui en est fait par les résidents se révèle conforme à son affectation.

De même, le promoteur ne doit devoir à répondre des non-façons dommageables constatées ultérieurement, que si celles-ci enfreignent à titre principal des normes techniques obligatoires, voire des engagements stipulés expressément dans le contrat de réservation.

Conditions de validité de la contestation d’un refus d’autorisation de travaux affectant les parties communes et/ou l’aspect extérieur de l’immeuble

Catégories Travaux privatif affectant les parties communes
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
n°22-18.908
Observations

Tout copropriétaire souhaitant effectuer des travaux affectant une partie commune ou l’aspect extérieur de l’immeuble doit obtenir une autorisation expresse de l’assemblée générale sur un projet qui lui aura été préalablement soumis, la sanction du défaut d’autorisation étant la condamnation quasi-automatique à le mettre les choses en l’état antérieur sous astreinte. Toutefois, un copropriétaire qui se voit refuser l’autorisation n’est pas sans recours : il peut en effet contester cette décision et se faire autoriser à y procéder judiciairement. Mais le succès d’une telle action, sur le fondement de l’abus de majorité, ou de l’existence d’une justification impérative, est loin d’être acquis d’avance, et la Cour de cassation en a récemment précisé les conditions.

Principe retenu

Il appartient à celui qui invoque un abus de majorité de rapporter la preuve que la décision est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu'elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires.

A défaut, dès lors que les travaux envisagés affectent les droits des autres copropriétaires, les seuls motifs à accorder à un copropriétaire une autorisation judiciaire seraient une exigence de sécurité pour l'exploitation de son lot conformément à sa destination, ou une mise en conformité indispensable à cette destination, au regard, notamment, des solutions alternatives existantes.

Analyse de la décision

Une société avait acquis la totalité du bâtiment B d’un immeuble en copropriété, et obtenu un permis de construire pour transformer ces locaux en un bâtiment à usage commercial et hôtelier. Elle a ensuite obtenu de l'assemblée générale l’autorisation de la mise en conformité du règlement de copropriété et de l'état descriptif de division à cette autorisation d'urbanisme.

Revenant quelques années après devant l’assemblée générale, elle se voit rejeter les demandes d'autorisation de travaux pour la réalisation de son projet. Elle assigne alors le syndicat des copropriétaires en autorisation desdits travaux et en annulation des résolutions de rejet adoptées par l'assemblée.

Elle conteste l'objectivité de l'architecte du syndicat des copropriétaires qui avait émis un avis défavorable, et fait valoir que le projet devait absolument comporter deux dégagements répartis l'un vers la rue, l'autre vers la cour intérieure de l'immeuble, pour permettre l'ouverture de l'exploitation au public et assurer la sécurité de l'exploitation hôtelière, et que les travaux envisagés constituaient un impératif d'intérêt public.

Sa demande est rejetée en première instance et par la Cour d'appel de Versailles, cette dernière considérant que l'emprise d’une rampe d'accès dans la cour était importante, rendant probablement nécessaire de consolider la dalle, que la rampe empêchait la sortie sur cour de l'appartement du rez-de-chaussée, condamnait le siphon d'évacuation des eaux de pluie sur la cour, et nécessitait le déplacement de la fontaine, et qu'une partie de l'édicule servant à la ventilation du garage devrait être supprimée, et, d'autre part, que les travaux portant sur les façades participaient du même projet modifié, dès lors qu'ils étaient en cohérence avec la création de l'issue de secours sur la cour. La cour d'appel a relevé que les travaux envisagés impliquaient une ouverture et un droit de passage sur la cour qui emportaient modification du règlement de copropriété quant à la jouissance d'une partie commune spéciale au bâtiment A.

La société se pourvoit en cassation, faisant valoir que doivent être autorisés judiciairement tous travaux d'amélioration conformes à la destination de l'immeuble et ne portant pas atteinte aux droits des autres copropriétaires.

Sur ce point, la Cour de cassation réfute son argumentation, estimant que les travaux envisagés relevaient de l'article 26 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 et que la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

Mais la société invoque également l’« abus de majorité » que constituerait le refus injustifié par l'assemblée générale d'autoriser l'exécution de travaux nécessaires pour assurer la sécurité d'un établissement recevant du public.

Là aussi, la Cour de cassation est claire : il appartient à celui qui invoque un abus de majorité de rapporter la preuve que la décision est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu'elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires. La cour d'appel, relevant que la société ne démontrait pas l'intention de nuire des autres copropriétaires, a constaté qu'elle ne disposait d'aucun droit indivis sur la dalle couvrant le sol de la cour, partie commune spéciale au bâtiment A affectée par les travaux, et retenu que le règlement de copropriété organisait l'isolement du bâtiment B à usage d'hôtel par rapport au bâtiment A et à la cour.

Appréciant souverainement la portée des rapports techniques produits, elle a retenu que la société n'était pas fondée à soutenir que la création de d'une issue de secours sur la cour était une exigence de sécurité pour l'exploitation de son lot à usage d'hôtel, ni qu'elle constituait une mise en conformité indispensable à cette destination, au regard, notamment, des solutions alternatives existantes.

Ainsi, selon la Cour de cassation, ayant fait ressortir que les travaux envisagés affectaient les droits des copropriétaires, et sans être tenue de suivre la société dans le détail de son argumentation, la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision.

La participation à l’assemblée d’une seule personne n’ayant pas qualité pour y participer est une cause de nullité de l’assemblée dans son ensemble

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
n°22-17.764
Observations

La vérification de la qualité à participer à une assemblée générale de copropriétaires est une condition cruciale de sa régularité. Le syndic qui accepte un participant n’ayant pas lui-même la qualité de copropriétaire, et ne justifiant pas lors de la signature de la feuille de présence d’un mandat de représentation valable, encourt le risque d’une nullité de l’assemblée dans son ensemble, même si cette participation est sans conséquence sur l’issue des votes sur les questions inscrites à l’ordre du jour, et donc la mise en cause de sa responsabilité pour le préjudice subi par le syndicat des copropriétaires.

Principe retenu

L'irrégularité affectant la composition d'une assemblée générale entraîne sa nullité sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un grief.

Analyse de la décision

Une SCI copropriétaire avait assigné le syndicat des copropriétaires de son immeuble en annulation de trois assemblées en cascade, celle en 2014 ayant désigné le syndic (non-professionnel), et les assemblées suivantes pour défaut de qualité à convoquer.

Pour la première assemblée, elle reprochait la mention sur la feuille de présence de personnes n’ayant pas la qualité de copropriétaire et ne disposant pas de pouvoir de représentation d’un copropriétaire, si bien que selon elle, une seule personne avait qualité pour participer, et que celle-ci ne pouvait seule voter en méconnaissance du caractère délibératif de l'assemblée. Autrement dit qu’une assemblée ne peut se tenir avec un seul copropriétaire présent ou représenté.

La Cour d'appel d'Aix en Provence le déboute, au motif que la présence des personnes censées ne pas avoir qualité pour participer n’avait pas été contestée lors de la tenue de l’assemblée, et que, même à admettre qu’un seul copropriétaire ait participé à l'assemblée générale, son vote favorable suffisait à l'adoption des résolutions à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés (autrement dit à l’article 24…).

Elle avait raison sur ce dernier point : avec un seul copropriétaire, l’assemblée peut être tenue valablement, ce copropriétaire pouvant la présider, avec le syndic assurant le secrétariat, à condition naturellement que le règlement n’impose pas un nombre minimal de scrutateurs…

Par contre, la Cour de cassation la censure sur son argumentation principale : en considérant qu’il n’y avait pas lieu à prononcer la nullité dès lors que n'était pas contestée l'exactitude des mentions figurant sur la feuille de présence quant à la présence des personnes en cause, « alors que l'irrégularité affectant la composition d'une assemblée générale entraîne sa nullité sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un grief, et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les personnes mentionnées à la feuille de présence avaient qualité pour voter et si, ainsi que l'indiquait le procès-verbal, les copropriétaires étaient tous présents ou représentés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».

Attention, l’oubli de la reproduction de l’article 42 alinéa 2 sur le procès-verbal, permet la contestation de l’assemblée générale pendant dix ans

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Procès-verbal
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
28 janvier 2015 (13-23.552)
Observations

La jurisprudence a longtemps été fluctuante sur cette question d'absence de reproduction de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965. 

La Cour de cassation pose un principe par cet arrêt. 

Attention, néanmoins, l'absence de reproduction n'ouvre plus un délai de 10 ans pour contester l'assemblée générale mais un délai de 5 ans. 

Principe retenu

L'absence de reproduction dans la notification du procès-verbal de l'assemblée générale du texte de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 rend cette notification irrégulière. 

Analyse de la décision

L’article 18 du décret du 17 mars 1967 dispose que le procès-verbal d’une assemblée générale doit reproduire l’article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965.

Voici le texte de l’article 42, alinéa 2 :

« Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée générale. Sauf en cas d’urgence, l’exécution par le syndic des travaux décidés par l’assemblée générale en application des articles 25 et 26 est suspendue jusqu’à l’expiration du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa ».  

Comme on le voit, cet article a pour but d’informer les copropriétaires de leur droit à faire annuler tout ou partie de l’assemblée générale correspondant au procès-verbal.

Une vieille question : « Quelle est la conséquence de l’oubli de la reproduction de l’article 42 alinéa 2 ? »

La jurisprudence des Cours d’Appel était fluctuante, certaines estimant que la reproduction n’était pas une formalité substantielle, son oubli ne pouvait entraîner l’annulation de l’assemblée générale.

D’autres Cours avaient jugé que le fait de compléter après-coup le procès-verbal était suffisant. La Cour de Cassation a mis fin le 28 janvier à cette valse-hésitation.  

L’arrêt de la Cour de cassation du 28 janvier 2015

Voici la citation exacte de l’arrêt : « L’absence de reproduction dans la notification du procès-verbal de l’assemblée générale du texte de l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 rend cette notification irrégulière ».  

C’est clair et net.      

Conséquences

Comme l’a jugé la Cour, la « notification est irrégulière ». Dès lors le délai de deux mois après notification du procès-verbal au-delà duquel on ne peut engager une procédure en annulation ne peut être invoqué et les copropriétaires peuvent agir pendant un délai de … dix ans. Comme si le procès-verbal n’avait pas été adressé….   Consultation : si vous êtes géré par un syndic professionnel, vérifiez ce point. Si vous êtes syndic bénévole, n’oubliez surtout pas l’article 42, alinéa 2.    

Non-respect des délais de convocation d’assemblée générale et qualité pour agir en nullité

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
14 mars 2019 (18-10.379)
Observations

Confirmation de la jurisprudence fixée en 1974 concernant le non-respect des délais de convocation d'assemblée générale. 

Principe retenu

Si le délai de convocation n'a pas été respecté, le copropriétaire qui souhaite faire annuler l'assemblée générale ne doit pas voter favorablement à certaines décisions. 

Le fait de voter favorablement à certaines décisions, enlève le caractère irrégulier de la convocation. 

Analyse de la décision

Les irrégularités affectant les assemblées générales (convocation et tenue) ne se soldent pas toujours par une nullité quand une action est engagée.

La Cour de cassation réitère sa jurisprudence constante sur les conditions nécessaires pour pouvoir solliciter la nullité de l’assemblée générale dans son ensemble par un copropriétaire qui a été victime d’une notification tardive de la convocation par le syndic.

I. Forme et délai de notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires

Il incombe au syndic en exercice, en sa qualité d’unique représentant légal du syndicat (article 18 de la loi du 10 juillet 1965) de convoquer les copropriétaires en assemblée générale, et ce a minima une fois par an (article 7 du décret du 17 mars 1967).

Selon l’article 34 du décret du 17 mars 1967, la notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires s’entend soit par l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit par voie électronique (à la condition d’un accord écrit express individuel de chaque destinataire), soit par une remise contre émargement.

Cette notification doit respecter un délai minimal réglementaire de 21 jours, entre le lendemain de la première présentation de celle-ci à tous les copropriétaires et le jour de la réunion du syndicat (article 9 du décret du 17 mars 1967).

Régulièrement, les délais de notification ne sont pas respectés. Certains copropriétaires concernés se rendent quand même à l’assemblée générale et font alors consigner cette irrégularité dans le procès-verbal.

II. Irrégularité du délai de convocation : conditions requises pour agir en nullité

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que l’action judiciaire en contestation de l’assemblée générale (résolutions ou réunion complète) doit être exercée par les copropriétaires opposants (ayant voté dans le sens contraire de la décision) ou défaillants (absents non représentés) dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.

En l’espèce, le syndic professionnel d’une copropriété sise à Menton (06) notifie hors délai la convocation de l’assemblée générale du 21 juin 2010 à une SCI T.B.V. propriétaire d’un lot.

Tout en signalant et faisant retranscrire sur le procès-verbal l’irrégularité de l’assemblée générale du fait de cette convocation tardive, la SCI T.B.V. ne s’oppose pas à l’ensemble des points inscrits à son ordre du jour.

Autrement dit, elle vote favorablement certaines questions adoptées par l’assemblée générale.

Puis après la notification du procès-verbal, elle assigne le syndicat des copropriétaires pour obtenir la nullité dans son intégralité.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 18 - 10379 du 14 mars 2019 confirme sa jurisprudence, à savoir qu’un copropriétaire ne peut solliciter l’annulation d’une assemblée générale dans sa totalité, dès lors qu’il vote favorablement à l’une de ses décisions approuvées.

Le fait qu’il fasse consigner une réserve sur la validité de l’assemblée générale ne suffit pas pour obtenir la nullité de cette dernière :

« […] Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines des décisions prises et constaté que la SCI T.B.V.  avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l'assemblée générale était entachée d'illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d'opposant ou de défaillant à l'ensemble des décisions prises, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] ».

En revanche, ce copropriétaire est en mesure d’invoquer la nullité d’une ou plusieurs résolutions prises individuellement lors de l’assemblée générale illicite s’il jouit de la qualité d’opposant à la décision concernée :

« Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la demande est nouvelle, comme n'ayant pas été présentée en première instance, et a été formée après l'expiration du délai de deux mois ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n'était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ; […] ».

Le copropriétaire présent à une assemblée générale irrégulière, qui envisage de la contester judiciairement dans son intégralité, doit préserver ses droits en votant dans le sens contraire de la majorité de chacune des résolutions, afin de ne pas engager en vain une procédure contentieuse longue et onéreuse.

L’assemblée générale convoquée par le syndic sans respecter le délai légal de convocation [21 jours] peut être annulée si aucune urgence n’a été constatée

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
03 octobre 1974 (73-12.634)
Observations

Cet un arrêt de principe rendu par la Cour de cassation en 1974 et toujours d'actualité. 

Pour un arrêt plus récent : Non-respect des délais de convocation d'assemblée générale et qualité pour agir en nullité de l'assemblée générale. 

Principe retenu

Si le délai de 21 jours entre la notification de la convocation et l'assemblée générale n'est pas respecté, alors l'assemblée générale peut être annulée, sauf à considérer qu'il y a une urgence. 

Analyse de la décision

Le syndic qui convoque une assemblée générale doit respecter des conditions de forme et de délai, comme nous l’avons évoqué précédemment.

L’article 9 du décret de 1967 lui impose ainsi de notifier les convocations au minimum 21 jours avant la tenue de l’AG.

S’il ne respecte pas ce délai, il commet une faute qui peut engager sa responsabilité en cas de préjudice (CA de Paris, 6 mars 1992, Loyers et copr. 1992, n° 228).

L’un des premiers éléments de vérification effectuée par les avocats concerne les conditions de forme et de délai des convocations adressées par le syndic.

Dans le cadre d’une procédure judiciaire, si le juge constate que le délai réglementaire de 21 jours n’a pas été respecté, se posera la question de savoir si c’est parce qu’une urgence particulière l’y autorisait.

En effet, le syndic n’est pas tenu à ce délai si la convocation est faite en urgence. C’est le juge qui apprécie les éléments du dossier pour se prononcer sur la réalité de l’urgence.

S’il s’avère qu’aucune urgence ne justifiait un délai plus court (« délai raisonnable »), il prononcera l’annulation de l’assemblée générale (voire d’une résolution ou de certaines résolutions si l’assemblée n’est pas contestée dans son intégralité).

Le juge de cassation en 1974 considérait que la violation d’une règle impérative en matière d’assemblée générale devait entraîner l’annulation de l’assemblée et plusieurs arrêts sont venus confirmer cette position par la suite. D’ailleurs, le même arrêt de 1974 n’exige pas du copropriétaire qu’il prouve que la convocation tardive lui a occasionné un préjudice.

La Cour de cassation est venue rappeler que même en cas d’absence de convocation ou de convocation irrégulière, le copropriétaire « opposant ou défaillant » n’a que 2 mois à compter du procès-verbal notifié pour contester l’assemblée (Cass., 3e civ., 12 octobre 2005, n° 04-14602).

Une  précision également apportée en 2007 : le copropriétaire régulièrement convoqué ne peut pas demander la nullité de l’assemblée alors que l’irrégularité de la convocation concerne un autre copropriétaire : « seul le copropriétaire non convoqué ou irrégulièrement convoqué [peut] se prévaloir de l'absence ou de l'irrégularité de la convocation à l'assemblée générale » (Cass., 3e civ., 14 novembre 2007, n° 06-16392).

L’annulation de l’assemblée générale ayant désigné le syndic entraîne l’annulation rétroactive des assemblées qu’il a convoquées

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
06 février 2002 (00-19.132)
Observations

Cet arrêt imposant la contestation de l'assemblée générale dans un délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal, a été confirmé par les arrêts postérieurs. 

Principe retenu

L'annulation de l'assemblée ayant désigné le syndic entraîne l'annulation rétroactive des assemblées qu'il a convoquées

Analyse de la décision

Parce que les copropriétés sont des lieux où les intérêts des copropriétaires divergent, entre connivences et conflits d’intérêts, ces divergences peuvent s’exprimer lorsqu’est abordée la question de l’élection du syndic.

A partir du moment où le choix du syndic ne convient pas à certains copropriétaires, ils peuvent saisir le juge d’une demande en annulation de la délibération qui l’a désigné, voire de l’assemblée en entier.

Mais le temps qu’une décision judiciaire soit rendue, le syndic désigné a pu convoquer une ou plusieurs autres assemblées. Toute la question réside ensuite dans le sort des assemblées convoquées ultérieurement, lorsque l’assemblée (ou la résolution) ayant désigné le syndic est annulée.

On peut alors assister à des annulations d’assemblées en cascade, dont il faut bien saisir la raison : lorsque la désignation du syndic a été annulée, cela revient à dire qu’il est censé ne jamais avoir été désigné lors de l’assemblée en question. Dès lors qu’il convoque une assemblée (avant que son mandat ait été annulé), la convocation est alors irrégulière car il est considéré comme n’ayant pas été régulièrement habilité pour le faire.

Conséquence : l’annulation de l’assemblée ayant désigné le syndic entraîne l’annulation rétroactive des assemblées qu’il a convoquées.

Mais là encore, ces assemblées ne sont pas nulles de plein droit, leur nullité doit être demandée au juge. Ainsi, pour obtenir ces annulations en cascade, le copropriétaire doit demander la nullité de l’assemblée (ou de la résolution) ayant désigné le syndic, ainsi que l’annulation de telle et telle assemblées irrégulièrement convoquées, chacune dans le délai de 2 mois à compter de la notification des PV correspondants.

Le principe de rétroactivité signifie que les parties concernées (copropriétaires et syndic) sont replacés dans la situation antérieure à l’acte qui a été annulé, ce qui pose de nombreuses difficultés en pratique puisque le syndic a en principe accompli des actes de gestion depuis son élection (finalement annulée), pour lesquels il devait en principe percevoir une rémunération (cette problématique est abordée ci-dessous), et que les assemblées ont pris des décisions qui se trouvent privées d’effet (désignation du syndic, élection des membres du conseil syndical, vote de travaux, approbation des comptes…).

Concrètement, cela revient à dire que toutes les résolutions votées lors de ces assemblées ne peuvent pas s’appliquer et que pour pouvoir les voter à nouveau, il faudrait tout reprendre depuis le début et prévoir une assemblée générale convoquée en bonne et due forme. Simplement, si la copropriété est dépourvue de syndic du fait de l’annulation en justice de son mandat, il sera nécessaire en amont de mettre en œuvre la procédure de requête afin qu’un administrateur provisoire soit désigné par le Président du Tribunal de grande instance (comme vu précédemment).

On constate donc que l’annulation de la désignation d’un syndic entraîne des conséquences lourdes pour la copropriété.

C’est pourquoi la jurisprudence a eu tendance à en limiter les effets, notamment en limitant le délai de contestation des assemblées convoquées par un syndic dont le mandat a été annulé.

Auparavant, elle considérait que le délai de contestation des décisions d’assemblée de 2 mois (article 42, alinéa 2, de la loi de 1965) ne s’appliquait pas à ces assemblées, de sorte qu’un copropriétaire qui avait obtenu l’annulation de la désignation du syndic pouvait contester les assemblées irrégulièrement convoquées dans le délai de droit commun de 10 ans, réduits à 5 ans depuis la loi ELAN (article 42, alinéa 1er).

Depuis plusieurs années, la jurisprudence impose désormais que le copropriétaire qui veut obtenir l’annulation de ces assemblées agisse dans le délai de 2 mois, comme c’est le cas pour toute contestation de décisions d’assemblées. Cette précision vient limiter les nullités en cascade.

L’arrêt cité du 6 février 2002 applique ce délai de 2 mois et plusieurs arrêts ultérieurs le confirment (Cass., 3e civ., 3 mars 2004, n° 02-15091 ; Cass., 3e civ., 7 avril 2004, n° 02-14496 ;  Cass., 3e civ., 30 janvier 2007, n° 05-19475).

Le défaut de signature du procès-verbal n’entraîne pas en soi l’annulation des décisions prises par l’assemblée

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Procès-verbal
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
06 décembre 2015 (04-17.630)
Observations

Cette jurisprudence est constante. 

Principe retenu

Le défaut de signature du procès-verbal n'entraine pas à lui seul l'annulation des décisions prises par l'assemblée générale. 

Analyse de la décision

L’article 17 du décret de 1967 impose l’établissement d’un procès-verbal d’assemblée générale, qui doit être signé en fin de séance par le président, le secrétaire et, le cas échéant, le(s) scrutateur(s). Cet article en détermine quelques conditions de forme, ainsi que le contenu.

Sa notification, faite conformément à l’article 18 du décret, est importante puisque c’est elle qui constitue le point de départ du délai de 2 mois en contestation des décisions prises par l’assemblée, voire de l’assemblée elle-même.

De nombreux copropriétaires s’interrogent sur les effets du procès-verbal d’assemblée qui serait irrégulier, inexact ou non signé par certains membres du bureau.

De manière générale, la jurisprudence ne considère pas qu’une erreur ou une irrégularité affectant le procès-verbal entraîne automatiquement l’annulation des décisions votées en assemblée.

Elle vient plutôt limiter les recours contre les décisions d’assemblée générale qui ne seraient fondées que sur un motif d’irrégularité du procès-verbal et n’annule la ou les décision(s) contestée(s) que si l’irrégularité ou l’erreur est déterminante pour l’adoption de la résolution concernée, par exemple en ce qui concerne le décompte des voix ou pire, la fausseté des mentions du PV.

En ce qui concerne le défaut de signature du PV, la jurisprudence considère qu’il n’entraîne pas nécessairement et à lui seule l’annulation des décisions prises par l’assemblée.

Il en va autrement si l’absence de signature s’accompagne d’éléments de nature à prouver la fausseté de ce document. Ces éléments de preuve sont soumis à l’appréciation des juges au cas par cas.

Cette jurisprudence est constante : elle a par exemple confirmé un arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation en date du 26 mars 2014, n° 13-10693.

Lorsque l’assemblée est convoquée par le président du conseil syndical, le défaut de notification au syndic n’entraîne pas la nullité de l’assemblée

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour d'appel de Paris
Référence
24 mars 2005 04/13585
Observations

La possibilité de convoquer une assemblée générale par le président du conseil syndical est soumise à un formalisme. 

Principe retenu

Si le président du conseil syndical convoque l'assemblée générale pour combler l'inertie du syndic, et qu'il omet d'envoyer la convocation au syndic, cela n'a aucune conséquence sur l'assemblée générale. 

Analyse de la décision

Un ou plusieurs copropriétaires peuvent avoir intérêt à solliciter le syndic afin qu’il convoque une assemblée.

L’article 8 du décret de 1967 impose au syndic de convoquer une assemblée dès lors que la demande émane, soit du conseil syndical, soit de copropriétaires représentant au moins un quart des voix de la copropriété. Cette demande s’accompagne des questions à inscrire à l’ordre du jour.

Pour sortir d’une situation de blocage, l’article 8 prévoit fort heureusement que si le syndic n’y procède pas, le président du conseil syndical peut valablement convoquer lui-même cette assemblée, après une mise en demeure restée infructueuse pendant plus de 8 jours.

En l’absence de conseil syndical ou si le président de ce conseil n’y procède pas, tout copropriétaire peut la solliciter auprès du président du Tribunal judiciaire.

Ce texte prévoit que la convocation est notifiée au syndic.

Mais face à un syndic peu diligent, et en fonction de l’urgence à faire convoquer cette assemblée, il se peut que le président du conseil syndical omette d’en informer le syndic.

La jurisprudence ne lui en tient pas rigueur puisque l’assemblée restera tout de même valable