Formations (7)

Non-respect des délais de convocation d’assemblée générale et qualité pour agir en nullité

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
14 mars 2019 (18-10.379)
Observations

Confirmation de la jurisprudence fixée en 1974 concernant le non-respect des délais de convocation d'assemblée générale. 

Principe retenu

Si le délai de convocation n'a pas été respecté, le copropriétaire qui souhaite faire annuler l'assemblée générale ne doit pas voter favorablement à certaines décisions. 

Le fait de voter favorablement à certaines décisions, enlève le caractère irrégulier de la convocation. 

Analyse de la décision

Les irrégularités affectant les assemblées générales (convocation et tenue) ne se soldent pas toujours par une nullité quand une action est engagée.

La Cour de cassation réitère sa jurisprudence constante sur les conditions nécessaires pour pouvoir solliciter la nullité de l’assemblée générale dans son ensemble par un copropriétaire qui a été victime d’une notification tardive de la convocation par le syndic.

I. Forme et délai de notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires

Il incombe au syndic en exercice, en sa qualité d’unique représentant légal du syndicat (article 18 de la loi du 10 juillet 1965) de convoquer les copropriétaires en assemblée générale, et ce a minima une fois par an (article 7 du décret du 17 mars 1967).

Selon l’article 34 du décret du 17 mars 1967, la notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires s’entend soit par l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit par voie électronique (à la condition d’un accord écrit express individuel de chaque destinataire), soit par une remise contre émargement.

Cette notification doit respecter un délai minimal réglementaire de 21 jours, entre le lendemain de la première présentation de celle-ci à tous les copropriétaires et le jour de la réunion du syndicat (article 9 du décret du 17 mars 1967).

Régulièrement, les délais de notification ne sont pas respectés. Certains copropriétaires concernés se rendent quand même à l’assemblée générale et font alors consigner cette irrégularité dans le procès-verbal.

II. Irrégularité du délai de convocation : conditions requises pour agir en nullité

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que l’action judiciaire en contestation de l’assemblée générale (résolutions ou réunion complète) doit être exercée par les copropriétaires opposants (ayant voté dans le sens contraire de la décision) ou défaillants (absents non représentés) dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.

En l’espèce, le syndic professionnel d’une copropriété sise à Menton (06) notifie hors délai la convocation de l’assemblée générale du 21 juin 2010 à une SCI T.B.V. propriétaire d’un lot.

Tout en signalant et faisant retranscrire sur le procès-verbal l’irrégularité de l’assemblée générale du fait de cette convocation tardive, la SCI T.B.V. ne s’oppose pas à l’ensemble des points inscrits à son ordre du jour.

Autrement dit, elle vote favorablement certaines questions adoptées par l’assemblée générale.

Puis après la notification du procès-verbal, elle assigne le syndicat des copropriétaires pour obtenir la nullité dans son intégralité.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 18 - 10379 du 14 mars 2019 confirme sa jurisprudence, à savoir qu’un copropriétaire ne peut solliciter l’annulation d’une assemblée générale dans sa totalité, dès lors qu’il vote favorablement à l’une de ses décisions approuvées.

Le fait qu’il fasse consigner une réserve sur la validité de l’assemblée générale ne suffit pas pour obtenir la nullité de cette dernière :

« […] Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines des décisions prises et constaté que la SCI T.B.V.  avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l'assemblée générale était entachée d'illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d'opposant ou de défaillant à l'ensemble des décisions prises, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] ».

En revanche, ce copropriétaire est en mesure d’invoquer la nullité d’une ou plusieurs résolutions prises individuellement lors de l’assemblée générale illicite s’il jouit de la qualité d’opposant à la décision concernée :

« Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la demande est nouvelle, comme n'ayant pas été présentée en première instance, et a été formée après l'expiration du délai de deux mois ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n'était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ; […] ».

Le copropriétaire présent à une assemblée générale irrégulière, qui envisage de la contester judiciairement dans son intégralité, doit préserver ses droits en votant dans le sens contraire de la majorité de chacune des résolutions, afin de ne pas engager en vain une procédure contentieuse longue et onéreuse.

La désignation du syndic ne vaut que pour l’avenir, elle ne peut rétroagir

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
17 juillet 1996 (94-15.140)
Observations

Jurisprudence constante. 

Pour une précision supplémentaire sur les dates du contrat de syndic: Pour être validé, le contrat de syndic doit préciser ses dates calendaires d'échéance

Principe retenu

Le contrat de syndic ne vaut que pour l'avenir, il ne peut pas prévoir une date de commencement antérieure à celle de l'assemblée générale. 

Analyse de la décision

Cet arrêt de 1996 a été précisé par un arrêt de 1999, suivant lequel le mandat du syndic prend effet immédiatement, à l'instant même des résultats du vote, sauf décision contraire de l’assemblée générale (Cass., 3e civ., 20 janvier 1999, n° 97-14747).

Cette jurisprudence, bien qu’antérieure à l’instauration du contrat-type de syndic, reste pertinente à l’heure actuelle.

En effet, alors que l’article 29 du décret de 1967 précise bien que le contrat de syndic doit faire mention de sa durée (qui ne peut pas excéder 3 ans) et de ses dates de prise d’effet et d’échéance, certains syndics croient bon de fixer une date de prise d’effet de mandat antérieure à la date de l’assemblée générale les désignant.

Ainsi, ils font parfois coïncider les dates de début et de fin de mandat avec la période de l’exercice comptable, par exemple avec un mandat d’un an allant du 1er janvier au 31 décembre de l’année N, au lieu du 30 juin de l’année N (jour de l’assemblée générale) au 29 juin de l’année N+1.

Ce procédé est illégal et les copropriétaires doivent être particulièrement vigilants sur ce point, et de manière plus générale sur le respect des clauses du contrat-type par le syndic, avant d’approuver l’un des contrats soumis au vote en assemblée.

En cas de pluralité de candidatures de syndics, chacune des candidatures doit être soumise au vote à la majorité absolue avant qu’il puisse être procédé à un second vote à la majorité simple

Catégories Tenue de l'assemblée générale Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 novembre 2014 (13-26768)
Observations

Arrêt important pour la désignation du syndic en cas de pluralité des candidats, qui pose un principe clair. 

Pour un autre exemple de jurisprudence : La mise en concurrence du contrat de syndic à l'initiative d'un copropriétaire : modalité d'inscription de la question et vote en assemblée générale.

Principe retenu

Chacune des candidatures doit être soumise au vote à la majorité de l'article 25 avant qu'l puisse être procédé à un second vote à la majorité de l'article 24. 

Analyse de la décision

Comme évoqué plus haut, la désignation du syndic peut faire l’objet du procédé de passerelle prévu à l’article 25-1 de la loi de 1965 : si la majorité absolue n’a pas été atteinte mais que le vote a recueilli au moins 1/3 des voix des copropriétaires, il peut être procédé immédiatement à un second vote à la majorité simple.

En cas de pluralité de candidatures, s’est posée la question de savoir si la passerelle pouvait être utilisée pour un candidat qui n’a pas obtenu la majorité absolue de l’article 25, sans attendre d’examiner les candidatures suivantes, ou si chaque candidature devait d’abord être soumise au vote de l’article 25 avant que la passerelle puisse être utilisée.

La réponse donnée par la Cour de cassation est très claire : en cas de pluralité de candidatures, l’assemblée générale ne peut valablement procéder à un second vote à la majorité de l’article 24 sur l’une des candidatures qu’après avoir soumis au vote à la majorité de l’article 25 les autres candidatures.

Chacune des candidatures doit donc être soumise au vote à la majorité absolue de l’article 25 avant qu’il puisse être procédé à un second vote à la majorité simple.

L’intérêt de cet arrêt est notamment d’éviter que le syndic en place, qui ferait examiner sa candidature en premier, ne se fasse réélire par un second vote plus facile à obtenir alors qu’il n’a pas obtenu la majorité de l’article 25, sans attendre l’examen par l’assemblée des autres candidatures.

Cet arrêt important doit permettre d’éviter toute tentative de syndics de se faire reconduire à tout prix dans leurs fonctions, en utilisant de manière abusive la passerelle de l’article 25-1 sans examen préalable des candidatures concurrentes, qui pourraient être privilégiées par les copropriétaires déçus de leur syndic.

Il n’est pas possible de désigner un syndic provisoire qui n’est pas mentionné à l’ordre du jour de l’assemblée générale.

Catégories Ordre du jour Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
03 décembre 2015 (14-25.583)
Observations

Jurisprudence constante.

Principe retenu

L'assemblée générale ne peut se prononcer que sur ce qui est inscrit à l'ordre du jour, elle ne peut pas désigné un syndic provisoire si cette question n'est pas mentionnée à l'ordre du jour. 

Analyse de la décision

En cette période doublement troublée pour les copropriétés (report des assemblées générales, absence de convocation des assemblées générales avant le 31 janvier 2021, absence de concertation avec le conseil syndical pour établir l’ordre du jour, vote uniquement par correspondance), nous avons souhaité mettre en lumière un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 03 décembre 2015 (14-25.583).

Pourquoi maintenant ? Parce-que cet arrêt reflète une certaine réalité de la situation dans laquelle se trouve un grand nombre de copropriétés, à savoir l’absence de mise en concurrence d’un contrat de syndic qui est arrivé à échéance. En effet, nous sommes les premiers témoins d’un nombre considérable de copropriétés qui voulait se séparer de leur syndic actuel, mais lequel n’a mis à l’ordre du jour que sa candidature, obligeant les assemblées générales soient à accepter cette nouvelle désignation, soient à la refuser mais dans ce cas, se retrouve sans syndic.

Alors, cet arrêt rendu par la Cour de cassation à son importance, même si la réponse apportée par la haute juridiction n’est pas favorable aux syndicats des copropriétaires. Notre rôle est aussi de vous informer sur ce qui n’est pas possible… à moins de trouver une astuce pour contourner le problème.

I. La question de la désignation du syndic doit impérativement être inscrite à l’ordre du jour

Dans cette copropriété, un syndic bénévole refuse de porter à l’ordre du jour la question de la nomination d’un syndic concurrent, imposant alors son unique désignation lors de l’assemblée générale ou l’absence de syndic.

Les copropriétaires rejettent la désignation de ce syndic bénévole et pour éviter de se retrouver sans syndic,  l’assemblée générale désigne alors un syndic bénévole provisoire dans l’unique but de pouvoir d’organiser une autre assemblée générale avec la désignation d’un autre syndic. Cependant, la nomination du syndic provisoire n’était pas prévue à l’ordre du jour de cette réunion.

Le syndic bénévole évincé et opposant à la désignation d’un syndic provisoire (autre que lui) assigne alors le syndicat des copropriétaires en annulation de ladite résolution.

En effet, conformément à l’article 13 du décret du 17 mars 1967, « l’assemblée générale ne prend que de décision valide que sur les questions inscrites à l’ordre du jour et dans la mesure où les notifications ont été faites conformément aux dispositions des articles 9 à 11-1 (dudit décret) ».

Autrement dit, la loi est claire sur ce sujet. Pour pouvoir voter sur une résolution, celle-ci doit figurer à l’ordre du jour de l’assemblée générale. La jurisprudence est tout aussi limpide à ce sujet, les juridictions ont en effet, toujours annulé les résolutions qui n’étaient pas inscrites à l’ordre du jour (si des copropriétaires opposants ou défaillants ont demandé l’annulation judiciaire de ladite résolution).

En conséquence, il y avait donc très peu de chance que la juridiction saisie rejette la demande d’annulation de la résolution. Pourtant la Cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu le 28 mai 2014 rejette la demande du syndic évincé. Pour ce faire, elle s’appuie sur la théorie de l’incident : le syndic bénévole qui a organisé l’assemblée générale a refusé expressément (en envoyant une lettre de refus au conseil syndical) d’inscrire la nomination d’un syndic concurrent, donc la seule possibilité pour désigner un syndic était de le désigner lui. Dès lors, selon la Cour d’appel, la désignation d’un autre syndic bénévole provisoire bien que non-inscrite à l’ordre du jour est valable en raison de la « théorie de l’incident ».

Cependant, ce n’est pas cet argument que retient la Cour de cassation qui casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel. La haute juridiction se base sur l’article 13 du décret susmentionné et énonce «  l’assemblée générale ne délibère valablement que sur les questions inscrites à l’ordre du jour ».

Cette cassation n’est pas surprenante, mais une décision inverse aurait permis au syndicat des copropriétaires de se retrouver dans une situation pratique plus propice à la nomination d’un meilleur syndic, sans passer par les rouages judiciaires.

Dès lors, la nomination du syndic bénévole provisoire n’est alors pas valable, le syndicat des copropriétaires est alors sans syndic…

II. La désignation judiciaire d’un syndic

C’était justement pour éviter la désignation d’un syndic judiciaire que l’assemblée générale avait élu un syndic provisoire, sauf que la Cour de cassation en annulant cette résolution, nomme également un syndic provisoire. En effet, la copropriété se retrouve sans syndic et le syndic bénévole évincé a alors demandé à la juridiction la nomination judiciaire d’un syndic provisoire.

En effet, en application de l’article 17 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965 et 46 du décret du 17 mars 1967, à défaut de nomination par l’assemblée générale des copropriétaires dûment convoqués à cet effet, le président du tribunal judiciaire désigne le syndic par ordonnance sur requête d’un ou plusieurs copropriétaires ou sur requête d’un ou plusieurs membres du conseil syndical ou du maire de la commune ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat du lieu de la situation de l’immeuble.

Autrement dit, si l’assemblée générale doit désigner un syndic, mais que le syndic candidat ou que les syndics candidats n’obtient pas la majorité requise (malgré la passerelle), la copropriété se retrouve alors sans syndic. Dans ce cas, la loi ne prévoit pas d’autre possibilité que de saisir le président du tribunal judiciaire afin que ce dernier nomme un syndic provisoire, qui aura notamment pour mission principale d’organiser une nouvelle assemblée générale aux fins de désigner un nouveau syndic.

La seule exception possible à cette situation, c’est lorsque l’assemblée générale n’a pas désigné de syndic mais que le contrat du syndic actuel est encore en cours. Par exemple si le contrat du syndic actuel se termine le 05 février 2021, il convoque l’assemblée générale qui se tient le 27 janvier 2021. Au cours de cette assemblée générale, aucun syndic n’est désigné faute de majorité, alors le syndic actuel peut jusqu’au 05 février 2021 envoyer une nouvelle convocation pour la désignation d’un syndic.

C’est le seul échappatoire à la désignation d’un syndic judiciaire en cas de refus de désigner un syndic à la majorité requise.

La sanction est terrible pour le syndicat des copropriétaires, mais par moment il vaut mieux subir la sanction que subir la mauvaise gestion de l’ancien syndic désigné une fois de plus.

Par ailleurs, nous attirons votre attention sur le fait que la désignation du syndic bénévole provisoire  a été annulée judiciaire car le copropriétaire évincé a voté contre, ce qui lui a ouvert le droit de contester cette résolution. Pour rappel, seuls les copropriétaires défaillants ou opposants peuvent contester judiciairement la décision… avis à bon entendeur !

En cas de non-respect des décisions d’assemblée générale, le syndicat des copropriétaires peut agir en justice pour en demander le respect.

Catégories Action judiciaire du syndicat des copropriétaires
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
28 mai 2020 (18-20368)
Observations

Jurisprudence constante.

Principe retenu

Le syndicat des copropriétaires peut agir en justice pour faire respecter les décisions adoptées en assemblée générale. 

Analyse de la décision

En copropriété, l’assemblée générale composée de tous les copropriétaires est souveraine : c’est par elle que doit passer toutes les décisions (hors délégation de pouvoirs) relatives à la vie de la copropriété.

En l’absence de contestation de résolution, les décisions deviennent définitives et donc incontestables. Il appartient au syndic conformément à ses missions de faire respecter et exécuter les décisions, conformément à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965.

Mais que se passe-t-il si un copropriétaire refuse de respecter une résolution définitive, et ce malgré les actions du syndic, au motif que la décision porte atteinte à ses droits?

La Cour de cassation par son arrêt rendu le 28 mai 2020 n°18-20.368 répond à cette interrogation, en rappelant d’une part que le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en Justice afin de faire respecter les décisions prises en assemblée générale, lesquelles s’appliquent sans exception si elles sont définitives.

  1. Le syndicat des copropriétaires peut agir en Justice pour faire respecter les décisions adoptées en assemblée générale

Dans une copropriété dite « horizontale » c’est-à-dire composée de pavillons, il est voté lors de deux assemblées générales distinctes, des décisions concernant les modalités de pose d’un velux ainsi que d’un portail par un couple de copropriétaires sur son pavillon.

Les deux résolutions ne sont pas contestées par les copropriétaires concernés.Pour autant, ils refusent de les prendre en considération et installent le velux et le portail sans respecter les modalités définies par l’assemblée générale.

Le syndicat des copropriétaires décide alors d’engager une action en Justice pour contraindre les copropriétaires à respecter les délibérations d’assemblées générales devenues définitives. Concrètement, le syndicat des copropriétaires demande en Justice la dépose du velux et du portail sous astreinte.

Dans un premier temps, la question est de savoir si le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en Justice concernant la dépose du velux et du portail, qui sont indiqués dans le règlement de copropriété, comme étant des équipements privatifs, installées sur des parties privatives.

En effet, en vertu de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965, « le syndicat a qualité pour agir en Justice tant en demandant qu’en défendant, même contre certains des copropriétaires; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble ».

Autrement dit, le syndicat peut assigner certains copropriétaires, dès lors que ces derniers portent atteinte à la copropriété. L’une des façons de porter atteinte et de ne pas respecter les décisions prises par l’assemblée générale.

En effet, la Cour de cassation a affirmé par deux arrêts rendus les 07 juin 2006 (n°05-19.117) et 30 mars 2017 (15-24.612) que le syndicat des copropriétaires a intérêt et qualité pour agir en Justice afin de faire respecter les décisions d’assemblée générale.

Par cet arrêt du 28 mai 2020, la Cour de cassation entérine sa jurisprudence, en effet, elle énonce : « l’action du syndicat des copropriétaires avait pour objet de faire appliquer les décisions adoptées par l’assemblée générale au nom de l’intérêt collectif des copropriétaires. »

Cela signifie, que si un copropriétaire refuse de se conformer aux décisions de l’assemblée générale, et ce malgré les demandes plus ou moins coercitives du syndic, le syndicat des copropriétaires (représenté par son syndic) peut engager une action en Justice pour contraindre le copropriétaire récalcitrant, même si cela concerne des parties privatives.

La seule limite à cette action porte sur la contestation en Justice de la décision votée en assemblée générale.

  1. Si elles n’ont pas été contestées, les décisions d’assemblée générale sont définitives

Les copropriétaires assignés n’ont pas contesté les décisions d’assemblée générale, imposant des modalités quant à la pose du velux et du portail. Pour autant, ils considèrent qu’ils n’ont pas à respecter les délibérations car il s’agit d’installation d’équipements privatifs n’affectant pas les parties communes de la copropriété.

La Cour d’appel donne raison sur ce point aux copropriétaires en considérant que « la résolution adoptée par l’assemblée générale restreignait les droits des copropriétaires et cette restriction était étrangère au règlement de copropriété. »

Cependant, la Cour de cassation considère au contraire, « les décisions prises en assemblée générales s’imposent aux copropriétaires tant que la nullité n’en a pas été prononcée. En retenant (…) que cette résolution avait restreint les droits des copropriétaires sur leurs parties privatives, sans avoir été transcrite dans le règlement de copropriété, tout en constatant que les décisions prises n’avaient pas été contestées et étaient devenues définitives, ce dont il résultait qu’elles s’imposaient aux copropriétaires, alors même qu’elles porteraient atteinte à leurs parties privatives, la Cour d’appel a privé de base légale sa décision. »

Autrement dit, les décisions d’assemblée générale deviennent définitives, conformément à l’article 17 de la loi du 10 juillet 1965, si elles ne sont pas contestées.

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que même si les décisions portent atteinte aux droits privatifs des copropriétaires, si elles ne sont pas contestées, elles deviennent définitives. Par conséquent, si les décisions sont définitives, elles doivent être exécutées et respectées, faute de quoi la Justice peut les contraindre.

Ainsi, en présence d’une résolution portant atteinte aux droits privatifs de chaque copropriétaire, il faut impérativement la contester judiciairement pour en être libérée, car même dans ce cas, elle s’appliquera.

Pour ce faire, il faut respecter un certain nombre de conditions : il faut voter contre la résolution ou être absent. En conséquence, si vous votez pour, vous ne pourrez pas la contester. Par ailleurs, il faut saisir le Tribunal judiciaire dans le délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal de l’assemblée générale. Enfin, il faut prouver une irrégularité dans la décision. En l’occurrence que l’assemblée générale a pris une décision restreignant les droits des copropriétaires sur leurs parties privatives.

En conséquence, il est donc très important de contester une telle résolution, à défaut la décision deviendra définitive et il faudra la respecter malgré l’atteinte portée.  

Responsabilité du syndic : le quitus ne prive pas un copropriétaire d’exercer une action en responsabilité délictuelle

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Observations

Observation : S’inscrivant dans le cadre d’une relation contractuelle, le quitus concerne exclusivement les rapports entre le SDC et le syndic et ne saurait donc avoir d’effet envers les tiers.

Ce document exonère certes le syndic de sa responsabilité vis-à-vis du syndicat mais non des fautes délictuelles ou quasi-délictuelles qu’il a pu commettre à l’encontre d’un copropriétaire, pris individuellement, en causant à celui-ci un préjudice personnel.

Principe retenu

Le copropriétaire, qui vote en faveur d'une résolution de l'assemblée générale d'un syndicat des copropriétaires donnant quitus au syndic, s'il n'est pas recevable à demander, en application de l'article 42, alinéa 2, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, l'annulation de cette résolution, peut rechercher la responsabilité délictuelle du syndic pour obtenir réparation d'un préjudice personnel né de sa faute.

Analyse de la décision

En droit de la copropriété, le quitus continue à jouer un rôle important dans la mesure où il emporte reconnaissance que le syndic a régulièrement assumé la gestion d’ensemble de la copropriété.

En effet, ce document entraîne renonciation à rechercher ultérieurement la responsabilité du syndic pour tous les actes dont l’existence a été portée à la connaissance de l’assemblée générale.

Il découle de ce principe la conséquence suivante : Le SDC ne peut donc tenter de se rétracter en cherchant à obtenir la nullité de la décision accordant la décharge de responsabilité de son mandataire puisqu’il n’a pas qualité pour agir au sens de l’article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965.

La décision commentée envisage de façon originale la situation sous l’angle du copropriétaire ayant voté en faveur du quitus en apportant deux précisions intéressantes :

Le copropriétaire ayant voté en faveur de la résolution d’assemblée générale ayant donné quitus au syndic n’est pas recevable à en demander l’annulation ;
Quel qu’ait été le sens du vote du copropriétaire sur cette résolution, il demeure recevable à rechercher la responsabilité délictuelle du syndic pour obtenir réparation d’un préjudice né de sa faute.

Rappel des faits de l’affaire jugée :

Un immeuble soumis au statut de la copropriété, présentait de graves désordres de structures imposant son étaiement, a fait l'objet d'un arrêté de péril imminent le 15 octobre 2013.

Un copropriétaire a assigné le syndic en indemnisation de préjudice financier et de jouissance subis jusqu’à l’exécution, en 2018, des travaux de réparation.

Dans un arrêt 12 octobre 2012, la Cour d’appel de Caen a considéré que le quitus donné par l’AG des copropriétaires était dépourvu d’effet sur la responsabilité délictuelle du syndic vis-à-vis du copropriétaire ayant subi un préjudice personnel.

Il ressort ainsi de la décision des juges du fond que :

En 2010, le syndic a été alerté sur l’urgence de remédier aux infiltrations engendrées par le défaut de jointement de briques et au gondolement d’une poutre de façade mais qu’il n’avait alors pas pris soin de solliciter l’avis d’un architecte ou d’un technicien de structure ;

En 2013, le syndic a fini par saisir un architecte qui, assisté d’un bureau d’études, a préconisé la pose en urgence d’un étaiement sur l’ensemble des niveaux dans le but de stabiliser l’immeuble.
Et que le syndic n’a pas soumis à l’assemblée générale avant le 5 octobre 2016, les travaux nécessaires qui, votés, n’ont cependant été mis en œuvre qu’en 2018.

Le syndic a alors formé un pourvoi.

Quitus et réparation du préjudice personnel d’un copropriétaire :

La troisième chambre civile de la Cour de cassation a dans son arrêt de rejet du 29 février 2024 considéré que :

Le copropriétaire, qui vote en faveur d'une résolution de l'assemblée générale d'un syndicat des copropriétaires donnant quitus au syndic, s'il n'est pas recevable à demander, en application de l'article 42, alinéa 2, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, l'annulation de cette résolution, peut rechercher la responsabilité délictuelle du syndic pour obtenir réparation d'un préjudice personnel né de sa faute.

La Cour d’appel de Caen a pu a juste titre déduire que la négligence du syndic à compter de 2010 est à l'origine du retard de la réalisation des travaux et de la pose d’un étaiement qui a du être maintenu du 3 octobre 2013 au 1er octobre 2018", et a ainsi justifié sa décision de condamner le syndic à indemniser le copropriétaire des préjudices financier et de jouissance subis.

En conclusion : Le quitus n’est libératoire de responsabilité contractuelle pour le syndic que si l’assemblée a connaissance des actes de gestion qui n’ont pas été dissimulées. Sa responsabilité peut donc être engagée en dehors de ce que le quitus a approuvé.

Cette pratique est bénéfique puisqu’elle encourage le syndic et les copropriétaires puisqu’elle invite à travailler en toute transparence.

 

Un accord entre copropriétaires ne remplace pas une décision d’assemblée

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
n°22-22.758 et 30 mai 2024, n°22-23.878
Observations

Le b de l’article 25 confère à l’assemblée générale des copropriétaires l’exclusivité du pouvoir d’autoriser des travaux sur les parties communes ou affectant l’aspect extérieur de l’immeuble. Aucun accord entre copropriétaires, ni avant ni après la naissance de la copropriété ne peut s’y substituer.

Par ailleurs, le droit de construire sur les parties communes est un droit accessoire de la propriété des parties communes et ne peut être cédé comme une simple autorisation de travaux, et encore moins sur simple accord entre copropriétaires ! Il s’agit d’une aliénation de partie commune ou de droit y afférent, et dès lors qu’elle valorise la propriété de l’acquéreur, nécessairement contre paiement d’un prix.

Principe retenu

En l'absence d'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires, à laquelle un accord entre copropriétaires ne se substitue pas, tout copropriétaire est fondé à demander la cessation d'une atteinte aux parties communes ou la destruction d'un ouvrage édifié en violation du règlement de copropriété.

Les travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, dès lors qu’ils sont réalisés après la soumission de l'immeuble au statut de la copropriété, doivent être autorisés par les copropriétaires réunis en assemblée générale, peu important l'accord antérieurement obtenu du propriétaire de l'immeuble. Rappelons qu’un immeuble existant est soumis au statut de la copropriété lors du transfert de propriété d’un premier lot, mais qu’un immeuble vendu en état futur d’achèvement, ne l’est que le jour de la livraison du premier lot.

Analyse de la décision

Dans la première des deux affaires commentées, Une SCI, propriétaire de lots au rez-de-chaussée d’un immeuble en copropriété, se plaignant d'infiltrations d'eau provenant d'une terrasse accessible depuis les lots appartenant à une seconde SCI situés au premier étage, a fait assigner, après expertise, le syndicat des copropriétaires et la SCI du 1er étage aux fins d'obtenir leur condamnation à procéder aux travaux de remise en état de l'étanchéité de la terrasse.

La SCI su 1er étage demande alors reconventionnellement la condamnation de la SCI du rez-de-chaussée à supprimer les murs ayant abouti à transformer les espaces se situant sous la terrasse en locaux fermés habitables, à remettre ses lots en conformité avec le règlement de copropriété et les plans joints, ainsi qu’à supprimer cette terrasse, bien qu’elle en bénéficie de l’accès.

La Cour d’appel la déboute sur cette demande reconventionnelle, au motif que la terrasse litigieuse a été construite sur la part de jardin attribuée en jouissance privative aux lots du rez-de-chaussée par les créateurs des deux SCI, de telle manière que l'une et l'autre profitent des extensions réalisées au rez-de-chaussée, en parties habitables, et au premier étage, en terrasse, et que la SCI du 1er étage n'est, dès lors, pas fondée à obtenir la condamnation de la SCI du rez-de-chaussée à démolir l'ensemble de cette construction réalisée par leurs auteurs communs, rompant ainsi unilatéralement l'accord des deux parties.

La Cour de cassation ne l’entend pas ainsi, se fondant sur le caractère d’ordre public des dispositions de la loi du 10 juillet 1965. Elle considère qu'en l'absence d'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires, « à laquelle un accord entre copropriétaires ne se substitue pas », tout copropriétaire est fondé à demander la cessation d'une atteinte aux parties communes ou la destruction d'un ouvrage édifié en violation du règlement de copropriété, en l’occurrence l’appropriation d’un droit de construire sur une partie commune. Et ce alors même qu’au départ ils étaient d’accord et que la construction litigieuse avait des avantages pour chacun…

Dans la seconde affaire, deux SCI et deux couples de copropriétaires ont acquis en l'état futur d'achèvement divers lots dans un immeuble édifié par un promoteur. Après la livraison de leurs lots, les copropriétaires ont assigné les SCI en démontage des installations de climatisation et de chauffage qu'elles avaient installées sur la terrasse technique du huitième étage du bâtiment B et en remise en état de ces parties communes, l’assemblée générale convoquée après la livraison des lots ayant refusé d’en régulariser l’autorisation.

La Cour d'appel de Chambéry les déboute, prenant en compte que le promoteur, vendeur et propriétaire de l'immeuble, leur avait, avant la naissance de la copropriété, délivré l'autorisation de réaliser ces installations, cette autorisation s'analysant en un droit d'usage privatif sur des parties communes, de sorte qu'il importait peu que l'assemblée générale des copropriétaires ait refusé la régularisation des travaux, qui était sans objet au regard de cette autorisation antérieure à l'existence de la copropriété.

La Cour de cassation réfute cette interprétation, se fondant là aussi sur le caractère d’ordre public de l’article 25 de la loi et notamment de son b. Dès lors que les travaux litigieux, affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, avaient été réalisés après la soumission de l'immeuble au statut de la copropriété, ils devaient être autorisés par les copropriétaires réunis en assemblée générale, peu important l'accord antérieurement obtenu du propriétaire de l'immeuble.