A la suite de la réalisation des travaux illégaux, si la remise en état des lieux porte atteinte à la copropriété, alors elle ne sera pas ordonnée
Nouvelle ligne jurisprudentielle qui se dessine.
Si la remise en état des lieux porte atteinte à la copropriété, elle ne sera pas ordonnée.
Pour effectuer des travaux en copropriété, les copropriétaires doivent dissocier les travaux qui n’affectent que les parties privatives, de ceux qui affectent également les parties communes.
Dans ce dernier cas, les copropriétaires ne peuvent effectuer les travaux qu’avec l’autorisation de l’assemblée générale, et ce conformément à l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965.
Autrement dit, les copropriétaires doivent dans un premier temps s’assurer que les travaux ne concernent que les lots privatifs, ou obtenir l’autorisation de l’assemblée générale si les travaux affectent les parties communes. A défaut, le syndicat des copropriétaires peut demander en Justice la remise en état des lieux.
Néanmoins, dans cet arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 28 mai 2020 (n°19-11.995), elle nous rappelle que si la remise en état porte atteinte aux améliorations apportées, alors elle ne sera pas ordonnée et il faut trouver des alternatives.
- Détermination des parties communes
Des copropriétaires ont aménagé les combles en créant des escaliers, des fenêtres de toit… Ils sont assignés en justice pour remettre en état sous astreinte, les combles.
La première question qui se pose est celle de savoir si les combles sont des parties communes.
C’est le règlement de copropriété qui détermine ce que sont les parties communes et les parties privatives. Le règlement de copropriété est muet à ce sujet, il appartient donc au juge de déterminer si les combles sont des parties communes ou privatives. Pour ce faire, il va regarder ce qui est mentionné sur l’état descriptif de division (document qui liste les lots d’une copropriété avec la description de ce qu’ils sont et de ce qu’ils comprennent, leur situation et leur usage). Dans l’état descriptif de division il n’est pas mentionné que les combles font parties du lot privatif.
Dès lors, les juges concluent que les combles sont des parties communes à usage privatif.
L’argument de l’acquisition par l’appropriation pendant le délai de 30 ans est également évoqué mais écarté car l’appropriation des combles est plus récente.
Ainsi, les combles sont des parties communes, et il était donc nécessaire de demander l’autorisation de l’assemblée générale pour effectuer des travaux.
- Une exception à la remise en état des lieux
Le syndicat des copropriétaires demande la remise en état des combles. Néanmoins les copropriétaires à l’origine des travaux, produisent un rapport d’expertise qui préconise de laisser les combles en l’état actuel car les travaux permettent une meilleure isolation thermique profitant à l’ensemble du bâtiment ainsi qu’une meilleure accessibilité à la toiture.
La Cour d’appel ne tient pas compte du rapport et applique automatiquement la sanction en ordonnant la remise en état des combles, à défaut d’avoir obtenu l’autorisation de l’assemblée générale.
Les juges doivent-ils ordonner automatiquement la remise en état, sans prendre en compte les améliorations apportées par les travaux entrepris illégalement?
Il est de jurisprudence constante que dès la réalisation de travaux sans autorisation de l’assemblée générale, le juge peut ordonner sous astreinte la remise en état des lieux. Cette remise en état peut être demandée par le syndicat des copropriétaires sans à démontrer un quelconque préjudice à la copropriété.
Toutefois, la Cour de cassation juge qu’en raison du rapport de l’expert, la Cour d’appel n’aurait pas dû ordonner la remise en état des lieux. En effet, elle aurait dû trouver des alternatives à cette remise en état.
Dans ce cas précis, la remise en état des lieux revenait à rendre de nouveau « l’accès au toit inaccessible, supprimer les fenêtres de toit, déposer en enlevant les deux escaliers bois du séjour, enlever le plancher bois construit au-dessus du niveau plafond, déposer et enlever les lambris et le matelas isolant, remettre en état le plafond avec trappes d’accès. »
Autrement dit, on supprimerait les améliorations apportées à la copropriété, en ce qui concerne l’accès au toit.
Cependant, cet arrêt est dans une nouvelle ligne de conduite de la Cour de cassation. En effet, dans son arrêt du 08 juin 2017, réaffirmé dans son arrêt du 12 septembre 2012, la Haute juridiction a jugé que si la remise en état des lieux était contraire à l’intérêt de la copropriété, il n’y a pas lieu de l’ordonner. Il faut donc trouver des solutions alternatives à la remise en état.
Cette nouvelle tendance jurisprudentielle, met un frein à l’automaticité de la remise en état des parties communes.