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La pose de panneaux publicitaires sur une façade d’une copropriété autorisant l’exercice d’activités commerciales doit être conforme à la destination de l’immeuble

Catégories Destination de l'immeuble et affectation du lot
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
26 mars 2020 (18-22441)
Observations

Cet arrêt est particulier dans la mesure où il concerne un immeuble situé dans un secteur architectural protégé. 

Principe retenu

Même si le règlement de copropriété autorise l'activité commerciale mais interdit la pose d'un panneau publicitaire sur les parties communes, alors il faut se conformer à l'interdiction. 

Analyse de la décision

Certaines copropriétés sont situées dans des zones où le patrimoine architectural est protégé. Dès lors, si les copropriétaires veulent faire des travaux relatifs à l’extérieur de l’immeuble, ils doivent au préalable obtenir une autorisation administrative attestant que les travaux ou la pose d’éléments extérieurs ne contreviennent pas à la préservation du patrimoine architectural.

Ainsi, les règlements de copropriétés peuvent fixer des interdictions aux copropriétaires concernant des travaux privatifs qui affecteraient la façade de l’immeuble tel que la pose de volets ou la pose d’enseigne publicitaire pour les locaux commerciaux, et ce, même si la copropriété autorise l’exercice de l’activité commerciale en son sein.

Or, la pose de panneaux publicitaires est un élément primordial pour des commerçants, car elle permet d’informer les potentiels clients de son existence.

La question de la licéité d’une telle clause est alors posée. Par un arrêt rendu le 26 mars 2020 (n° pourvoi 18-22441) la Cour de cassation nous informe, qu’une telle clause n’est pas contraire à la destination de l’immeuble situé dans une zone architecturale protégée, surtout lorsque cette clause ne pose pas une interdiction absolue.

  1. L’interdiction de pose de panneaux publicitaires sur la façade de l’immeuble est conforme à la destination de l’immeuble situé dans une zone architecturale protégée.

Dans un immeuble soumis au statut de la copropriété situé près des remparts d’Avignon- secteur architectural protégé- des locataires d’un local commercial ont posé des panneaux publicitaires sur la façade de l’immeuble. Le syndicat des copropriétaires les a assignés pour obtenir la dépose des panneaux publicitaires car c’est contraire au règlement de copropriété. Les propriétaires du lot commercial décident d’intervenir à la procédure judiciaire et demande que cette clause du règlement soit déclarée comme étant illicite, afin qu’elle soit supprimée.

En effet, conformément à l’alinéa 2 de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965, « le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation. »

Or, en l’espèce le règlement de copropriété autorise l’exercice des activités commerciales, donc interdire la pose de panneaux publicitaires serait contraire à la destination de l’immeuble car contraire à l’exercice de l’activité. Par conséquent, on pourrait en déduire que cette clause est illicite car étrangère à la destination de l’immeuble. D’autant que la Cour de cassation a posé ce principe par deux arrêts rendus le même jour, le 11 mars 1971.

Pour autant dans cet arrêt, la Cour de cassation considère « qu’ayant retenu que la clause (..) du règlement de copropriété, selon laquelle, « il ne pourra être placé sur la façade des immeubles aucune enseigne, réclame, lanterne ou écriteau quelconque » correspondait à la destination de l’immeuble qui était situé dans le périmètre de protection des remparts d’Avignon (…) celle-ci ne pouvait pas être illicite au motif qu’elle porterait atteinte aux droits des propriétaires ».

Si la Cour de cassation prend la peine de préciser que la situation géographique de l’immeuble, c’est parce que celle-ci est un élément constitutif de la destination de l’immeuble, conformément à l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 susmentionné. En conséquence, la clause litigieuse n’est donc pas étrangère à la destination de l’immeuble, elle est tout simplement conforme à la destination de l’immeuble.

 

  1. La clause interdit la pose de panneaux publicitaires sur la façade mais pas sur la partie privative du local commercial

La clause litigieuse prévoit « il ne pourra être placé sur la façade des immeubles aucune enseigne, réclame, lanterne ou écriteau quelconque. » Les locataires avaient procédé à la pose de panneaux publicitaires et enseignes apposés sur la façade. Ce qui contrevient totalement à ce que prévoit le règlement de copropriété.

Néanmoins, les juges apportent une subtilité très importante concernant la pose de panneaux publicitaires par un locataire commerçant exerçant une activité commerciale autorisée par le règlement de copropriété. En effet, les juges considèrent que cette clause ne « prohibe pas la pose d’enseignes « bandeaux » placée en imposte au-dessus des vitrines puisqu’il s’agit de surfaces privatives et que seules les enseignes lumineuses situées sur une partie commune sont soumises à une interdiction. »

Autrement dit, les juges procèdent à une distinction surprenante : si l’enseigne est sur la façade partie commune alors le règlement de copropriété l’interdit et la dépose de l’enseigne est exigée. Parallèlement, elle entrouvre une porte en indiquant que si c’est au-dessus de la vitrine et que l’enseigne est un bandeau, c’est-à-dire une enseigne appliquée à plat sur la façade du local commercial, alors cette enseigne est installée sur la partie privative du lot commercial. Par conséquent, elle est autorisée car positionnée sur le lot privatif et non sur la façade partie commune.

En conséquence, il faut être très vigilant aux termes utilisés pour la rédaction du règlement de copropriété.

Cette petite échappatoire trouvée par les juges permet de dire que l’interdiction de pose de panneaux publicitaires n’est donc pas générale et absolue et ne porte donc pas atteinte aux droits des copropriétaires, propriétaires d’un lot commercial.

Ainsi, les locataires d’un lot commercial ne peuvent reprocher à la copropriété, la limite dans l’exercice de l’activité commerciale en ne pouvant pas poser de panneaux publicitaires pour informer les potentiels clients de leur existence.

En conclusion, la vigilance est de rigueur pour tous les propriétaires d’un lot commercial situé dans un immeuble soumis au statut de la copropriété.

Mutation d’un lot et mandat : obligations des différents intervenants en matière de notification et incidences sur l’assemblée générale en cas de défaillances

Catégories Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
12 mars 2020 (18-11.988)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

Il ne peut être reproché au syndic de convoquer une copropriétaire décédée s'il n'a pas été prévenu à temps. 

Analyse de la décision

L’aliénation d’un bien immobilier peut parfois être fractionnée, c’est-à-dire que toutes les composantes ne sont pas transmises à la même personne. Autrement dit, une distinction est réalisée entre la propriété et l’usage de celui-ci consentis à des personnes différentes, ce que l’on appelle juridiquement un démembrement.

Cette opération s’inscrit souvent dans le cadre d’une succession, afin de favoriser un transfert de patrimoine, tout en garantissant le maintien dans les locaux de l’ancien propriétaire.  

Si cette démarche concerne un bien en copropriété, il convient de part et d’autre de se conformer à des règles précises, afin de ne pas les exposer à des confusions et contestations judiciaires, comme le souligne la cour de cassation dans un arrêt du 12 mars 2020.

I. Démembrement d’un lot en copropriété : notification impérative au syndic et conséquence en cas de carence

Sur une résidence sise à Strasbourg, une propriétaire détient quatre lots et notifie en 2002, par l’intermédiaire de son notaire, au syndic, le démembrement de deux d’entre eux.

L’acte authentique prévoit, un transfert de la nue-propriété au profit de sa fille, la conservation de l’usage, sa transmission à son époux lors de son décès et la représentation du démembrement par l’usufruitier aux assemblées générales du syndicat avec droit de vote.

Alors que le décès de l’usufruitière intervient en septembre 2010, sa notification (et transmission de l’usufruit au conjoint survivant) par le notaire au syndic n’intervient que par un courrier du 17 février 2011.

Entre temps, le syndic notifie une convocation d’une assemblée générale du 24 novembre 2010 à l’usufruitière, avec en retour une mention manuscrite sur celle-ci par les services postaux : « personne décédée ».

En 2013 et 2014 l’usufruitier et sa fille nue-propriétaire assignent le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic en nullité notamment de l’assemblée générale de novembre 2010, en l’absence de notification de celle-ci.

En défense, le syndic, au nom du syndicat, considère la notification de l’assemblée générale de novembre 2010 auprès de l’usufruitière décédée parfaitement régulière, en raison de toute notification régulière du transfert de l’usufruit imposée par l’article 6 du décret du 17 mars 1967, à la date de son expédition.

L’ensemble des juridictions suit cette interprétation littérale du syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, que ce soit le T.G.I. de Strasbourg dans son jugement du 13 janvier 2016, la cour d’appel de Colmar par une décision du 7 décembre 2017 et la cour de cassation par un arrêt n° 18 - 11988 du 12 mars 2020 : « … Mais attendu qu’ayant relevé que l’article 6 du décret du 17 mars 1967 dispose que tout transfert de propriété doit être notifié, sans délai, au syndic, soit par les parties, soit par le notaire qui établit l’acte, constaté que le procès-verbal de l’assemblée générale avait été notifié à F. G. par lettre recommandée revenue le 24 novembre 2010 avec la mention « décédée » et que le syndic s’était vu officiellement notifier le décès de celle-ci à réception de la lettre du 17 février 2011, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il ne pouvait être reproché au syndicat de ne pas avoir adressé à Mme X ou à M. X le procès-verbal de l’assemblée générale, dès lors que la preuve de ce qu’il avait connaissance du décès de F. G. n’était pas rapportée et que M. X, n’ayant pas agi en annulation de l’assemblée générale dans les deux mois de la notification, n’était plus recevable à le faire ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé … »

II. Mandat et domiciliation d’un lot : contrôle du syndic et incidence en cas de manquement

En l’espèce, ce notaire souligne au syndic, dans cet écrit du 17 février 2011, confirmé par un courrier de 2013, qu’il est en charge de la succession de l’épouse décédée et que tous documents ayant trait aux lots de copropriété (appels, convocations…), doivent en conséquence être expédiés en son étude.

Le syndic notifie donc les convocations des assemblées générales de septembre 2011, octobre 2012, janvier et novembre 2013 auprès du notaire.

Par leurs assignations de 2013 et 2014, l’époux usufruitier et sa fille nue-propriétaire sollicitent également la nullité de ces assemblées générales, au motif d’une double irrégularité, à savoir l’omission de :

- prise en compte du transfert de propriété notifié par le notaire, antérieur à leur convocation (art. 6 du décret du 17 mars 1967) ;

- la notification des convocations au représentant du démembrement à son domicile réel (art. 65 du décret du 17 mars 1967).

Et de souligner, que l’action judiciaire en nullité n’est pas soumise dans ce cas au bref délai de deux mois, mais à celui décennal (puis quinquennal avec la loi ELAN du 23 novembre 2018) à compter de la date de tenue de l’assemblée générale (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965).

Le syndic estime pour sa part, qu’il ne lui appartient pas d’exiger et de contrôler le contenu du mandat d’un notaire, la lettre de ce dernier suffisant à faire supporter une présomption quant à la régularité de la situation, dans la mesure où elle émane d’un officier ministériel assermenté.

Le T.G.I. de Strasbourg et la cour d’appel de Colmar rejettent cette demande du père usufruitier et de sa fille nue propriétaire, respectivement par une décision du 13 janvier 2016 et du 7 décembre 2017.

Ils se pourvoient alors en cassation et obtiennent gain de cause pour défaut de notification de la convocation par le syndic par l’arrêt du 12 mars 2020 : «…Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes de M. X en annulation des assemblées générales des 28 septembre 2011, 23 octobre 2012, 16 janvier 2013 et 26 novembre 2013, l’arrêt retient que Mme Y, notaire, indiquait, dans sa lettre du 17 février 2011, être chargée du règlement de la succession de F. G. et, dans une lettre ultérieure, avoir transmis aux personnes l’ayant chargé du dossier le courrier du syndicat et qu’il ne pouvait être reproché au syndicat de ne pas avoir vérifié la validité ou l’étendue du mandat apparent dont Mme Y s’était elle-même prévalue pour être rendue destinataire de toutes les informations concernant la copropriété et donc, de lui avoir notifié les procès-verbaux des assemblées générales ;

Qu’en statuant ainsi, sans constater que M. X avait élu domicile à l’étude de Mme Y ou donné mandat à celle-ci de recevoir en son nom les notifications des procès-verbaux des assemblées générales de copropriété relatives aux lots n° 14 et 15, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;"

En sa qualité de représentant du syndicat, le syndic se doit de vérifier le contenu de tout mandat ou domiciliation prétendument consenti par le propriétaire d’un lot, quand bien même le bénéficiaire serait un juriste assermenté par l’Etat pour recevoir et établir des actes.

Dans le cas contraire, le syndicat encourt des procédures judiciaires pour défaut de convocation aux assemblées générales, dans un laps de temps non négligeable de cinq ans à partir de leur déroulement.

Mots clés associés

L’ensemble immobilier peut être soumis au statut de la copropriété s’il n’existe pas de convention contraire et qu’il comprend bien un partage de terrains ou de services communs.

Catégories ASL/AFUL/ Ensemble immobilier
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
26 mars 2020 (18-16.117)
Observations

Principe retenu important. 

Principe retenu

L’ensemble immobilier doit comporter des terrains, des aménagements ou services communs pour être soumis au statut de la copropriété. 

Analyse de la décision

Le statut de la copropriété est régi par la loi du 10 juillet 1965 et par le décret du 17 mars 1967. Son champ d’application est très encadré : il faut une pluralité de propriétaires et que ces propriétaires détiennent la propriété exclusive de lots privatifs et qu’ils soient également propriétaires d’une quote-part de parties communes. C’est ainsi que l’indivision, et les lotissements sont exclus des règles de la copropriété.

Pour certaines configurations immobilières, il est plus compliqué de savoir si le statut de la copropriété s’applique. C’est le cas pour l’ensemble immobilier, c’est-à-dire un regroupement de plusieurs bâtiments unis entre eux par des installations ou ouvrages collectifs assurant leur cohésion tels que : des allés ou des emplacements de stationnement.

Par cet arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 26 mars 2020 (pourvoi n°18-16.117), il est apporté des précisions quant à l’application du statut de la copropriété à un ensemble immobilier.

I. L’application facultative du statut de la copropriété à un ensemble immobilier

Deux sociétés sont propriétaires d’un fonds contigus sur lesquels sont construits deux groupes d’immeubles, dont les garages souterrains respectifs sont desservis par une rampe d’accès commune.

L’une des sociétés assigne l’autre en Justice pour obtenir l’interdiction de traverser les parcelles de son terrain. L’autre société demande qu’il soit déclaré que l’ensemble immobilier est soumis au statut de la copropriété, lui permettant ainsi de jouir de la rampe d’accès.

Autrement dit, l’une des sociétés conteste le statut de la copropriété puisqu’elle veut interdire l’utilisation de la rampe d’accès à l’autre société, tandis que l’autre réclame l’application du régime de la copropriété.

C’est l’alinéa 2 de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 qui fixe le champ d’application du statut de la copropriété aux ensembles immobiliers. Dans cet arrêt, c’est la version de l’article avant les modifications apportées par la loi Elan du 23 novembre 2018 qui est utilisée. A savoir, « qu’à défaut de convention contraire créant une organisation différente, le statut de la copropriété est applicable aux ensembles immobiliers qui outre des terrains, des aménagements et des services communs, comportent des parcelles, bâties ou non, faisant l’objet de droits de propriétés privatifs ».

Notons que les modifications apportées par la loi ELAN, ne changent pas le champ d’application de cet article. Par ailleurs, l’ordonnance « copropriété » du 30 octobre 2019 a modifié la rédaction de cet article, la nouvelle disposition entrera en vigueur au 1er juin 2020.

En conséquence, l’ensemble immobilier peut être soumis au statut de la copropriété, si, aucune convention organise différemment l’ensemble immobilier. Il existe donc une faculté laissée aux ensembles immobiliers de convenir s’ils seront soumis ou non au régime de la copropriété.

Néanmoins, il est de jurisprudence constante qu’à défaut de régime dérogatoire, c’est le statut de la copropriété qui s’applique. C’est notamment ce que rappelle un arrêt de la Cour de cassation en date du 11 février 2009.

D’ailleurs, ici, la Cour de cassation rappelle ce principe. D’autant que la société contestant l’application de la loi du 10 juillet 1965, n’apporte pas la preuve de l’existence d’une convention contraire.

Toutefois, au-delà de l’existence ou non d’une convention contraire, il faut surtout que l’ensemble immobilier contienne les éléments constitutifs de la copropriété

II. L’ensemble immobilier doit comporter des terrains, des aménagements ou services communs pour être soumis au statut de la copropriété

Toute la difficulté de ce raisonnement juridique réside dans la définition de cet « élément » commun. A reprendre la configuration de l’ensemble immobilier, il s’agit de deux sociétés « propriétaires de fonds contigus sur lequel sont construits deux groupes d’immeubles dont les garages souterrains respectifs sont desservis par une rampe d’accès commune »

En conséquence, à la lecture de cette configuration, on pourrait penser que l’ensemble immobilier comprend bien des lots privatifs et une partie commune : la rampe d’accès aux garages souterrains. C’est d’ailleurs l’argument de la société qui souhaite l’application de la loi du 10 juillet 1965 pour régir l’ensemble immobilier, en considérant que cette rampe commune répond à la définition des aménagements et services communs.

Pour autant, comme le souligne la partie adverse, cette rampe d’accès est construite sur le terrain d’une seule société composant l’ensemble immobilier.

En d’autres termes, la rampe d’accès au garage est la propriété exclusive d’une seule société. En conséquence, il n’existe pas de pluralité de propriétaires sur un bien commun.

Ainsi, cette rampe est commune uniquement parce que la société propriétaire autorise l’autre société à l’utiliser pour accéder à ses propres garages souterrains.

Or, le droit de la copropriété exige qu’en plus d’une propriété exclusive sur des lots, il faut également être propriétaire d’une quote-part des parties communes, et ce conformément à l’alinéa 1 de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965. Ce qui n’est pas le cas dans cet arrêt.

C’est ainsi que la Cour de cassation a considéré que : « le statut de la copropriété ne peut s’appliquer qu’aux ensembles immobiliers qui, outre des terrains, des aménagements et des services communs, comportent des parcelles bâties ou non, faisant l’objet de droits de propriétés privatifs (…) qu’en appliquant le statut de la copropriété en raison de la seule présence d’une rampe d’accès permettant l’accès aux sous-sols respectifs des deux sociétés sans avoir constaté l’existence de terrains et de services communs partagés entre les deux ensembles immobiliers, la Cour d’appel a violé l’article 1er alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 ».

Dès lors, pour la Cour de cassation, l’utilisation de la rampe d’accès, propriété exclusive de l’un des propriétaires, n’est pas en tant que tel ni un terrain ni un service commun partagé.

En conclusion, le régime de la copropriété ne peut s’appliquer à cet ensemble immobilier faute de terrain ou service commun.

Mots clés associés

Dépassement de budget : la Cour de Cassation vole enfin au secours des copropriétaires et sanctionne les syndics

Catégories Inexécution ou mauvaise exécution du mandat de syndic / responsabilité du syndic Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
07 février 2012 (11-11.051)
Observations

Arrêt révolutionnaire. 

Principe retenu

Le syndic peut être tenu pour responsable en cas de dépassement d'un budget voté pour la réalisation de travaux. 

Analyse de la décision

I. Les copropriétaires face à la toute puissance des syndics

Nous le disons et le redisons : l’une des plaies majeures de la copropriété vient de ce que les syndics ne sont pratiquement JAMAIS sanctionnés pour leurs fautes parce qu’ils arrivent, quatre vingt dix fois sur cent, à faire ratifier celles-ci par des assemblées générales dans lesquelles chacun sait à quel point il est facile de faire pression et - à défaut - d’exercer des manipulations (pouvoirs, mandats de gestion, complicité de certains, passivité des autres, isolement de quelques « combatifs »).

II. Un arrêt de la Cour de Cassation qui va remettre de l’ordre

En effet, la Cour de Cassation vient remettre un peu d’ordre dans cette situation inadmissible où le droit n’existe plus et où le syndic tout puissant fait sa loi.

En l’espèce, un syndic du Groupe Foncia avait cru bon de commander pour 33 570,10 euros de travaux d’ascenseurs, en exécution d'une décision d'assemblée générale ayant voté les travaux, de manière peu claire au demeurant, pour la somme de 23 100 euros.

Le copropriétaire plaignant réclamait la somme de 853,31 €, soit sa quote-part de la différence.

Or la Cour de Cassation vient de décider le 7 février 2012, ce qui est une révolution dans le petit monde de la copropriété, que « le syndic est responsable, à l'égard des copropriétaires, sur le fondement quasi délictuel, de la faute qu'il a commise dans l'accomplissement de sa mission », et peut donc devoir réparation à l’égard de chaque copropriétaire du préjudice subi par le dépassement d’un budget voté.

Ainsi, la Cour de cassation a écarté l’objection de l’absence de lien contractuel entre le syndic et chacun des copropriétaires individuels : le préjudice individuel ne s’efface pas devant le préjudice collectif non revendiqué.

La lecture de l’arrêt (pas très long) est extrêmement intéressante, car il rappelle quelques notions un peu tombées en désuétude, telles que l’obligation de réparation d’un préjudice même individuel, le devoir de conseil du syndic, la déontologie des syndics, la rigueur de rédaction des résolutions, l’entretien, la sauvegarde et l’urgence.

III. Au-delà du problème des travaux, celui du dépassement des budgets

En ce qui concerne les dépassements budgétaires, que remarquons-nous ?

Il suffit aux syndics soit de faire entériner leur mauvaise gestion par une assemblée générale manipulée soit carrément de mépriser ladite assemblée en répartissant les comptes sans approbation.

Nos contrôleurs de comptes et de gestion, qui assistent les conseils syndicaux motivés pour contrôler les comptes de leurs copropriétés, le dénoncent régulièrement.

Là encore l’arrêt du 7 février 2012 pourrait rappeler aux syndics leur DEVOIR, en particulier celui de RESPECTER le budget voté et de ne le dépasser que pour des raisons LÉGITIMES.

Ainsi, l’époque du profond mépris des syndics professionnels à l’égard des copropriétaires quand il leur est présenté des comptes avec des déficits importants est sans doute révolue : désormais, n’importe quel copropriétaire insensible aux raisons exposées pour justifier ce qui n’est rien d’autre qu’avoir outrepassé le mandat reçu, pourra demander au syndic d’assumer sa faute de gestion.

Et comme les syndics professionnels ne sont sensibles qu’à ce qui leur coûte, on peut penser que désormais les gestionnaires auront pour consigne de faire très attention au respect des budgets votés…

En conclusion, si votre syndic adore dépasser les budgets votés (de travaux ou d’opérations courantes), faites-lui lire cette décision de Cassation

La Cour de Cassation rappelle que les travaux privatifs affectant les parties communes exigent une autorisation de l’assemblée générale

Catégories Travaux privatif affectant les parties communes
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
15 février 2018 (16-17.759)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

L'autorisation d'assemblée générale est nécessaire pour la réalisation des travaux affectant les parties communes. 

Analyse de la décision

Tout résident d’une copropriété, locataire ou copropriétaire, d’un lot d’habitation ou commercial, doit s’interroger sur la législation à respecter pour effectuer des aménagements affectant les parties communes de la résidence.

C’est ce que rappelle la Cour de Cassation dans un récent arrêt, relatif aux travaux entrepris par le locataire d’un local commercial.

La haute juridiction vient rappeler le cadre légal applicable et les incidences en cas d’infraction.

I. Légalement : l’autorisation de l’assemblée générale s’impose :

L’article 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965 dispose, que le copropriétaire, qui envisage de réaliser à ses frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, doit requérir l’autorisation de l’assemblée générale à la majorité des voix du syndicat.

Cela implique que cette demande :

- Emane du copropriétaire  que celui-ci occupe le lot ou l’ait mis en location, peu importe l’affectation de celui-ci (habitation, local professionnel ou commercial), ou  les termes du bail commercial qui autoriseraient à procéder à des travaux d’aménagement ;

- Soit notifiée (par lettre recommandée avec demande d’avis de réception) au syndic pour inscription à l’ordre de l’assemblée générale, comprenant :

● La question à inscrire à l’ordre du jour ;

● Le projet de résolution ;

● Les pièces (descriptif de travaux, plans, attestation d’assurance de l’entreprise…) permettant aux copropriétaires de voter en connaissance de cause sur le projet de travaux, annexées par le syndic à la convocation.

(articles 8 et 11 du décret du 17 mars 1967).

II. Les conséquences pour les aménagements illicites

La Cour de Cassation s’en tient à une jurisprudence constante, et considère illégaux ces travaux engagés sans autorisation préalable, ils exposent leur auteur, à compter de leur réalisation à une action judiciaire en annulation de la part du syndicat, représenté par son syndic.

L’arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation n° 16 - 17759 du 15 février 2018 va dans le même sens mais présente l’intérêt de souligner la compétence du juge des référés (pour la suspension et la suppression des travaux illégaux en cours d’exécution), pouvant être saisi concomitamment par le copropriétaire bailleur (pour des aménagements réalisés illégalement par son preneur) et le syndicat, quelle que soit l’affectation du local prévue par le règlement de copropriété :

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 mai 2016), rendu en référé, que les consorts X..., propriétaires indivis d'un local commercial situé dans un immeuble en copropriété et donné à bail à une société …laquelle y exploite une activité de restauration, ont assigné celle-ci en cessation des travaux de remplacement du conduit d'évacuation des fumées et en remise en état des lieux ; que le syndicat des copropriétaires du [...] est intervenu volontairement à l'instance ;

Attendu que la société M. fait grief à l'arrêt d'ordonner l'arrêt immédiat des travaux entrepris et de la condamner à remettre les lieux en état ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la société M. ne déniait pas avoir réalisé, sans autorisation préalable de la copropriété, la pose d'un nouveau conduit d'évacuation, dépendant des parties communes, ….. et que, en l'absence de production d'une autorisation a posteriori de l'assemblée générale des copropriétaires, la régularisation des travaux n'était qu'hypothétique et tout aménagement envisagé par le preneur pas de nature à assurer le respect du règlement de copropriété, de sorte que la seule mesure nécessaire et proportionnée à la cessation du trouble était la remise en l'état des lieux, la cour d'appel, procédant aux recherches prétendument omises, a légalement justifié sa décision »

Les règles de la copropriété sont donc opposables aux copropriétaires comme aux locataires et peuvent être mises en jeu par le syndicat des copropriétaires et/ou par le copropriétaire bailleur.

Le fait qu’une activité commerciale soit prévue dans le règlement de copropriété, et que le bail commercial autorise le locataire à réaliser des travaux d’aménagement ne sont pas suffisants : il faut aussi une autorisation préalable ou a posteriori de l’assemblée générale.

Tout contrevenant ne doit pas ignorer les risques encourus, à savoir une remise en état antérieur, sous astreinte judiciaire.

La seule division d’un lot n’entraine pas la création d’un syndicat de copropriété indépendant

Catégories Administration du syndicat des copropriétaires Syndicat secondaire
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
18 janvier 2018 (16-26.072)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

La division d’un lot de copropriété ne peut avoir pour effet de donner naissance à un nouveau syndicat des copropriétaires. 

Analyse de la décision

Mécontents d’une gestion peu optimisée de la résidence par leur syndic professionnel, des copropriétaires mettent parfois en œuvre une autonomie administrative du bâtiment, en vue de prendre leur indépendance.

Face à cette approche compréhensible et légitime (par exemple en cas de copropriété « horizontale » et d’indépendance technique des divers bâtiments), des tentatives individuelles plus hasardeuses voient le jour.

La Cour de Cassation dans un arrêt du 18 janvier 2018 a rappelé le droit applicable et sanctionné ce qui représente une infraction manifeste.

I. La constitution et l’administration du syndicat des copropriétaires résultent de son règlement de copropriété

Un syndicat des copropriétaires est constitué dès lors que l’on se trouve en présence de lots de copropriété, dans un immeuble collectif, répartis entre deux propriétaires au moins (article 1 de la loi du 10 juillet 1965). Ces lots sont détaillés dans l’état descriptif de division.

A partir de là, son administration et entretien implique de faire établir et enregistrer un règlement de copropriété par un notaire. Ce document est obligatoire (article 8 de la loi du 10 juillet 1965). Cette opération intervient normalement avant la mise en copropriété en cas de bâtiment existant en indivision, ou avant la vente du premier lot pour une copropriété neuve. A défaut c’est l’assemblée générale de la copropriété qui doit le voter à la majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965.

Si des copropriétaires souhaitent modifier la description de leur lot, ils doivent au préalable soumettre à l’assemblée générale un projet de modification de l’état descriptif divisionnaire et du règlement de copropriété.

II. Les conditions légales d’une modification de l’administration du syndicat des copropriétaires

En présence d’édifices distincts dans une même copropriété, les copropriétaires d’un ouvrage peuvent décider soit de se constituer :

- en syndicat secondaire, avec élection d’un syndic, chargé de la gestion des parties communes spéciales qui correspondent au bâtiment en question (art. 27 de la loi du 10 juillet 1965).

La gestion des parties communes générales et équipements collectifs de l’ensemble des copropriétaires demeurant de la compétence du syndic du syndicat principal.

Cette autonomie juridique implique de disposer de parties communes spéciales ou dans le cas contraire de les instaurer, selon un avenant au règlement de copropriété établi par un notaire et annexé pour adoption par l’assemblée générale à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 ;

- en syndicat de copropriétaire indépendant. On parle alors de scission, dès lors que l’on est en mesure de supprimer ou partager les biens en commun (parties communes et équipements collectifs) selon l’article 28 de la loi du 10 juillet 1965.

Le copropriétaire d’un des deux lots (chaque lot étant un bâtiment) composant une résidence horizontale sise à Boulogne-Billancourt (92), a entendu s’émanciper unilatéralement du syndicat des copropriétaires, par la simple division de son lot.

Il considérait  que la division de son bâtiment en plusieurs lots entrainait de facto la création et l’existence d’un syndicat indépendant, pleinement opposable au syndicat initial.

La 3ème chambre civile de la Cour de Cassation dans un arrêt n° 16 - 26072 du 18 janvier 2018 a déclaré illicite une telle démarche, inopposable au seul syndicat existant légitime :

«… Attendu que, pour accueillir la demande, l’arrêt retient que l’existence de ‘copropriétés verticales autonomes’, dont la création ne dépend pas de l’accord de la ‘copropriété horizontale’, mais de la seule volonté des propriétaires concernés, est consacré par le règlement de copropriété du 31 mai 1983 et que l’acte du 30 mai 1987, qui est un modificatif de l’état descriptif de division, crée une copropriété verticale soumise au statut de la loi du 10 juillet 1965, que la naissance de cette copropriété verticale implique nécessairement la mise en place d’un syndicat des copropriétaire autonome par rapport au syndicat de la copropriété horizontale, improprement intitulé ‘secondaire’, alors que sa création ne relève pas des dispositions de l’article 27 de la loi du 10 juillet 1965, et que la copropriété ainsi créée n’est pas une copropriété secondaire, mais une copropriété autonome et distincte ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la division d’un lot de copropriété ne peut avoir pour effet de donner naissance à un nouveau syndicat des copropriétaires, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

La cour de cassation considère :

  • qu’un bâtiment, même s’il profite d’une totale autonomie, ne peut sortir d’un syndicat de copropriétaires existant qu’en adoptant une des procédures déterminées par la loi du 10 juillet 1965. Un propriétaire ne peut pas s’auto proclamer autonome,
  • que la division d’un lot qui correspond à un bâtiment indépendant ne suffit pas non plus à créer un syndicat de copropriétaire vertical indépendant.

Un tel projet doit donc bien entendu être préparé à l’avance, et soumis à l’approbation de l’assemblée générale du syndic initial.

Mots clés associés

Transformation de « caves » en logements : la Cour de Cassation casse !

Catégories Destination de l'immeuble et affectation du lot
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
04 juillet 2012 (11-16.051)
Observations

Jurisprudence devenue constante. 

Principe retenu

Il n'est pas possible de transformer des caves en logements si cette transformation est contraire à la destination de l'immeuble. 

Analyse de la décision

Retour sur un arrêt (qui nous avait beaucoup inquiété) de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence

Un copropriétaire s’était vu refuser l’autorisation par une assemblée générale de transformer des locaux situés en sous-sol de l’immeuble pour créer des lots d’habitation.

La Cour d’Appel d’Aix en Provence avait rejeté la décision de refus du syndicat des copropriétaires au motif que les termes du règlement de copropriété et de l’état descriptif de division ne comportaient pas de dispositions limitant l’affectation des lots de sorte qu’ils pouvaient être affectés à toutes sortes d’usage, y compris l’habitation.

À la suite de cet arrêt, beaucoup de propriétaires « indélicats » avaient essayé d’utiliser ce jugement pour transformer des lots de caves, de parkings, d’entrepôts en logements. On imagine l’horreur.

Heureusement la copropriété en question est allée en cassation et - heureusement - la Cour de Cassation a rétabli le droit en lui donnant raison.

L’arrêt qui casse

Voici le texte exact :

Attendu que, pour rejeter la demande du syndicat, l’arrêt retient que le groupe d’immeubles est destiné à usage d’habitation, que dans le règlement de copropriété - état descriptif de division, le terme de « local » utilisé pour définir les parties privatives des lots 27 à 30 est employé distinctement du terme « appartement » et des termes « cave », « box enterré à usage de garage » et « emplacement enterré à usage de parking » (...) qu’en l’absence de toute restriction relative à la destination des lots, ceux-ci peuvent être affectés à toutes sortes d’usages, y compris l’habitation ;

Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le changement d’affectation des lots n’était pas de nature à porter atteinte à la destination de l’immeuble ou aux droits des autres copropriétaires, la Cour d’Appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

Changement de destination d’un lot et droit à une boite aux lettres

Catégories Destination de l'immeuble et affectation du lot
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
08 juin 2017 (16-13.280)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

Un copropriétaire obtiendra donc l’autorisation de poser une boite aux lettres même si les travaux et la transformation d’un lot n’ont pas été autorisés ou ratifiés par l’assemblée générale, si son lot respecte toujours la destination de l’immeuble.

Analyse de la décision

Les aménagements des lots, comme une scission, une surélévation, ou encore un changement d’affectation… peuvent entrainer des différends au sein du syndicat.

Il peut en effet s’interroger sur la légitimité d’une demande d’un copropriétaire qui souhaite installer à ses frais une boite aux lettres associée au lot qui a fait l’objet de l’aménagement.

La Cour de Cassation a été sollicitée sur le sujet et fixe dans un arrêt du 8 juin 2017 le droit en la matière.

I. Le droit à une boite aux lettres est principalement attaché à un lot d’habitation

  • Les bâtiments d'habitation doivent être pourvus de boîtes aux lettres à raison d'une boîte aux lettres par logement selon les articles R 111-14-1 du Code de la construction et de l’habitation, L1 et R1-1-5 du Code des communications électroniques.
  • Cette obligation n’est pas étendue aux lots accessoires tels que les caves et emplacements de stationnement.
  • Bien entendu, les locaux professionnels ou commerciaux peuvent aussi prétendre à une boite aux lettres dans les parties communes.
  • Les anciens lots qui n’étaient pas affectés à l’habitation (remise, combles…), mais dont le changement d’utilisation est licite au regard du règlement de copropriété ou qui a été autorisé par l’assemblée générale, bénéficient à leur tour de cet équipement.
  • Mais qu’en est-il des lots dont la transformation n’a pas été autorisée par l’assemblée générale ?

II. Transformation d’un lot en logement et installation d’une boite aux lettres dans les parties communes.

  • Le copropriétaire d’un lot initialement à usage de remise l’a transformé en logement sans autorisation préalable de l’assemblée générale. Il a sollicité l’autorisation de l’assemblée générale, à la majorité absolue des voix du syndicat, d’installer à ses frais une boite aux lettres dans les parties communes de l’immeuble (art. 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965).
  • L’assemblée générale refuse d’accorder cette autorisation. Le copropriétaire a assigné dans le délai de deux mois devant le T.G.I. du lieu de situation de l’immeuble et a demandé :

- la nullité de la résolution pour abus de droit (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965) ;

- et l’autorisation de travaux (art. 30 de la loi du 10 juillet 1965).

  • La Cour d’appel a rejeté cette demande au motif que :

« Mme X..., qui n'est pas propriétaire d'un logement mais, selon le règlement de copropriété, d'une remise, n'est pas fondée à demander la pose d'une boîte à lettres dans les parties communes de l'immeuble, que les autorisations de raccordement aux réseaux octroyées par les assemblées générales de 2002 et 2003 n'équivalent pas, ni expressément ni implicitement, à une autorisation de transformer le lot n° XX à usage de logement et qu'il incombe à Mme X... de demander à l'assemblée générale le changement d'affectation ; »

La cour d’appel considère donc que le syndicat des copropriétaires doit au préalable voter la transformation d’un lot en logement pour que le copropriétaire puisse demander la pose d’une boite aux lettres.

  • La Cour de Cassation dans l’arrêt n° 16 - 13280 du 8 juin 2017 ne suit pas la Cour d’appel :

« Qu'en statuant ainsi, sans rechercher en quoi la transformation à usage d'habitation du lot n° 27 était contraire à la destination de l'immeuble ou portait atteinte aux droits des autres copropriétaires, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision».

Elle reproche à la cour d’appel de ne pas avoir recherché si le changement d’utilisation du lot est ou non contraire à la destination de l’immeuble, indépendamment du fait qu’il n’a pas été autorisé par l’assemblée générale.

Un copropriétaire obtiendra donc l’autorisation de poser une boite aux lettres même si les travaux et la transformation d’un lot n’ont pas été autorisés ou ratifiés par l’assemblée générale, si son lot respecte toujours la destination de l’immeuble.

La cour de cassation s’est appuyée sur les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965, et a privilégié les droits du copropriétaire concernant l’usage et la jouissance de ses parties privatives par rapport au règlement de copropriété, sous réserve de la destination de l’immeuble.

Le fondement doit être bien réel pour décliner une demande d’autorisation d’un copropriétaire de réaliser à ses frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, cela afin de ne pas s’exposer à un contentieux onéreux.

La décision d’assemblée d’accéder à tous les lots pour les mesurer et refaire la grille de charge n’est pas abusive selon la Cour de Cassation

Catégories Modification de la grille de répartition de charges
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 octobre 2017 (16-21.971)
Observations

Jurisprudence intéressante concernant l'accès au lot privatif. 

Principe retenu

Le copropriétaire doit laisser pénétrer dans son lot privatif le géomètre-expert lorsqu'il a été décidé par l'assemblée générale de procéder à une nouvelle mesure des lots. 

Analyse de la décision

Certains syndicats émettent des réserves sur les charges affectées aux lots par le rédacteur du règlement de copropriété, notamment en regard du critère de la surface.   La refonte de la grille de charges est donc souvent envisagée, avec comme préalable un métré des lots, auxquels certains copropriétaires s’opposent. Un récent arrêt de la Cour de Cassation souligne la légitimité de principe de cette démarche du syndicat et oblige le copropriétaire et son locataire à laisser accéder aux lots privatifs.

I. Le vote par l’assemblée du mesurage de l’intégralité des lots  

Un immeuble parisien en copropriété décide, lors de son assemblée générale du 1er mars 2013, de mandater un géomètre-expert, afin de procéder à un métrage de tous les lots. Aucune action en nullité n’est engagée contre cette résolution conformément aux dispositions de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.Cette résolution devient donc définitive. Un copropriétaire suivi par son locataire refuse l’accès à son appartement au motif que cela porte atteinte au respect dû à la vie privée.   Face à cette obstruction du preneur et du bailleur, le syndic assigne en référé, pour le compte du syndicat des copropriétaires, les deux parties afin qu’elles se conforment à la décision de l’assemblée générale souveraine et laissent accéder le géomètre à l’appartement.   La demande du syndicat ayant été accueillie en première instance et par la Cour de d’Appel de Paris, les parties déboutées se pourvoient en cassation.

II. Une démarche validée par la cour de cassation

L’arrêt n° 16 - 21971 de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation du 5 octobre 2017 rejette le pourvoi.   Le fondement juridique de ces magistrats est limpide, à savoir qu’il :

  • appartenait au copropriétaire, s’il considérait la résolution d’assemblée générale illicite, de la contester judiciairement dans le délai imparti de deux mois, à compter de la notification du procès-verbal par le syndic (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965), ce qu’il n’a pas fait ;
  • n’y a pas d’abus de droit du syndicat des copropriétaires : l’atteinte portée au respect du domicile est limitée à une mission précise du géomètre qui est proportionnelle au but recherché dans un intérêt collectif.

Les juges soulignent ainsi :   « Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu, sans dénaturation, que la résolution de l'assemblée générale du 1er mars 2013 avait donné mission à un géomètre de procéder à un mesurage des lots de copropriété et exactement que cette décision était devenue définitive, en l'absence de recours formé dans le délai prévu à l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, la cour d'appel, …. a pu estimer que l'ingérence résultant de la décision de l'assemblée générale et impliquant que le géomètre pénètre dans le domicile de ces sociétés ne portait pas une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de celui-ci au regard du but légitime poursuivi, visant à s'assurer que la répartition des charges était en adéquation avec les surfaces respectives des différents lots, … le refus … de laisser le géomètre accomplir sa mission était constitutif d'un trouble manifestement illicite… »   Cet arrêt rappelle, que le propriétaire d’un bien immobilier n’est pas exempt d’obligations (y compris concernant ses parties privatives) à l’égard du syndicat et la seule voie à suivre, s’il entend s’opposer légitimement à une résolution qu’il perçoit comme illicite est l’action en nullité contre la résolution contestée.  

Mise en fourrière : comment la responsabilité du syndic FONCIA MANSART a été mise en cause

Juridiction
Cour d'appel de Versailles
Référence
23 novembre 2017 (16/01287)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

Si le véhicule d'un copropriétaire est stationné sur son emplacement privatif, il peut rester aussi longtemps qu'il le souhaite. 

Analyse de la décision

Le nombre de véhicules garés dans une copropriété génère souvent des tensions, en raison, d’un nombre de places souvent insuffisant et donc de stationnements anarchiques sur les parties communes.

Des solutions existent, mais leur mise en œuvre suppose de faire preuve de minutie, pour ne pas exposer le syndic, voire le syndicat des copropriétaires, à une action judiciaire en réparation par le propriétaire du véhicule enlevé.

Voyons ensemble ce cas concret, survenu avec FONCIA MANSART.

 I. Les obligations des automobilistes dans une résidence en copropriété et les solutions en cas de manquements à celles-ci

La circulation et le stationnement dans une copropriété sont principalement régis par le règlement de copropriété et non le Code de la route (art. R 110-1 du Code de la route).

Ce principe connait cependant une exception notable, à savoir la possibilité pour les services de police, de gendarmerie (un officier de police judiciaire), ou le maire de faire intervenir la fourrière sur une copropriété afin d’enlever un véhicule à la « demande du responsable des lieux », le syndic au nom du syndicat (art. L 325-12 du Code de la route).

Et ce texte précise les deux cas pour lesquels la mise en fourrière peut être requise, à savoir un véhicule :

- « laissé sans droit », cela signifie garé pour ne pas dire abandonné sur une partie commune de la copropriété qui n’est destinée à cet effet dans le règlement de copropriété ou suite aux aménagements votés par l’assemblée générale;

- « privé d’éléments indispensables à son utilisation normale et insusceptible de réparation immédiate », autrement dit une automobile « épave ».

Autrement dit, à défaut de suppression de l’irrégularité par l’automobiliste dans un délai déterminé, suite à une mise en demeure notifiée par le syndic, ce dernier peut requérir des services de police et de gendarmerie, l’intervention de la fourrière pour l’enlèvement du véhicule.

 II. Les obligations du syndic : il ne peut mettre en cause un véhicule que s’il est garé en violation du règlement de copropriété

Dans le cas en question, une résidence en copropriété sise à Trappes (78) a pour syndic, FONCIA MANSART.

Ce dernier interroge le commissariat de Trappes et demande l’identité du propriétaire d’un véhicule garé de manière permanente sur les parties communes.

Le commissariat communique l’identité du propriétaire du véhicule au syndic, et quelques mois plus tard la police municipale procède à l’enlèvement du véhicule, puis à sa vente à une casse automobile.

En réalité, le véhicule était garé sur un emplacement de stationnement privatif.

N’ayant jamais été informé au préalable, son véhicule ayant été enlevé puis vendu, le copropriétaire et automobiliste assigne alors le syndic FONCIA MANSART en réparation de son préjudice financier et moral.

Le T.G.I. de Versailles, n’ayant pas fait droit à sa demande, ce copropriétaire conteste ce jugement auprès de la Cour d’Appel de Versailles. Cette dernière, dans son arrêt n° 16 - 01287 du 23 novembre 2017 casse la décision de première instance.

Les juges reconnaissent la faute du syndic FONCIA MANSART, qui a d’ailleurs tenté de se décharger de sa responsabilité sur le syndicat des copropriétaires et la police, et le condamne personnellement à indemniser le préjudice du copropriétaire sur le terrain de la responsabilité civile délictuelle (art. 1240 du Code civil) :

«… La société Foncia Mansart fait valoir, que le courrier de demande de renseignement est imputable au syndicat de copropriétaires qu'elle ne fait que représenter et non pas au syndic, et que l'enlèvement et la destruction du véhicule résultent de l'initiative des services de la police municipale de Trappes.

Il est de principe qu'un copropriétaire a la possibilité d'agir en responsabilité directement contre le syndic pour faute commise en dehors, mais également dans le cadre de sa mission. Le syndic, investi du pouvoir d'administrer et conserver l'immeuble en copropriété, est ainsi responsable à l'égard de chaque copropriétaire des fautes commises dans l'accomplissement de sa mission, ce qui condamne donc l'exigence que la faute commise par le syndic soit détachable de la fonction. En conséquence, la société Foncia Mansart est mal fondée à soutenir que M. D. ne pourrait agir que contre le syndicat des copropriétaires. »

Il est certain que la société FONCIA MANSART a commis une faute en écrivant au commissariat de police de Trappes pour demander les coordonnées du propriétaire d'un véhicule dont elle prétendait à tort qu’il était stationné sur les parties communes.

Il lui suffisait en effet de vérifier au préalable la réalité du stationnement « sauvage » sur des parties communes, puis de solliciter le propriétaire de cet emplacement de parking pour obtenir l'information qui lui faisait défaut.

Nous avons également relevé que le syndic ne fournit aucune explication sur le motif qui l’a conduit à s’intéresser à ce cas.

C'est d'ailleurs ce que lui a fait remarquer le commandant de police par courrier du 5 octobre 2011 adressé à FONCIA MANSART dans lequel il écrit notamment :

« Le propriétaire en question n'a été destinataire d'aucun courrier de votre part afin de le mettre en demeure de déplacer son véhicule alors que vous saviez, avant de nous solliciter, qui en était le propriétaire. Vous aviez donc tout loisir de l'informer de la procédure qui risquait d'être mise en place. Les échanges que vous avez entretenus avec lui prouvent d'ailleurs que vous étiez en possession de ce renseignement. Je vous rappelle que cet emplacement de parking est la propriété de l'intéressé et que, par conséquent, il est en droit d'y laisser sa voiture aussi longtemps qu'il le désire. Ce véhicule n'était donc pas stationné dans les parties communes comme vous l'avez déclaré dans votre lettre du 9 février dernier. Par conséquent nous sommes en présence de propos mensongers ou pour le moins erronés qui n'engagent que vous et pour lesquels vous devez en assumer les conséquences pécuniaires. »

La cour d’appel en a donc déduit :

« En conséquence, il apparaît que le courrier que la société Foncia Mansart a écrit le 9 février 2011 en dénonçant une situation inexacte au commissariat et sans prendre la peine au préalable de contacter le propriétaire de l'emplacement de stationnement en cause a bien été à l'origine de l'enlèvement injustifié du véhicule puis de la destruction du véhicule de M. D. sans ce courrier sollicitant par ailleurs des renseignements qu'elle n'avait pas qualité pour obtenir, ce dommage ne se serait pas produit, quand bien même d'autres éléments ont concouru à sa réalisation. »

Plus fort encore, le syndic connaissait parfaitement la situation du véhicule en cause puisque le 14 octobre 2009, il avait écrit au propriétaire afin de lui signaler que sur son parking 111 se trouvait un véhicule poussiéreux dépourvu d'attestation d'assurance valide. C’est la preuve soit d’un manque de suivi soit d’une mauvaise foi du syndic…

Un syndic doit être très vigilant quand il demande des renseignements concernant le propriétaire d’un véhicule et/ou quand il sollicite de l’officier de police judiciaire l’enlèvement d’un véhicule.

Il convient de préciser que FONCIA MANSART s’est limité à ce courrier demandant un renseignement.

Le syndic n’a pas demandé l’enlèvement du véhicule. C’est la police municipale qui est à l'initiative de l'enlèvement du véhicule, comme précisé dans un courrier, cela : « résulte d'une convention de coordination entre ce service et le commissariat afin d'agir plus promptement à la demande des bailleurs et donc de répondre à votre attente dans les meilleurs délais. »

Mais la cour a considéré que ce courrier était une des causes sans laquelle ce préjudice ne serait pas arrivé, et que cela suffisait pour mettre en jeu la seule responsabilité du syndic et pas celle de la police municipale.

Avant de solliciter l’intervention de la fourrière, via les services de police, le syndic doit impérativement vérifier que le véhicule stationne en toute irrégularité, c’est-à-dire « sans droit, ni titre » ou se trouve en état « d’épave ».