ABUS N° 4591 : Pigeon, je te plumerai encore et toujours

13/12/2019 Abus Abus

Certains syndics professionnels n’ont aucun scrupule à prendre les copropriétaires pour des pigeons qu’ils peuvent plumer à leur guise.

Pour cela, ils inventent sans cesse de nouvelles ruses dont l’ARC se fait l’écho dès qu’elle en a connaissance afin de mettre en garde les conseils syndicaux qui ont la tâche d’assister et de contrôler les syndics.

Certains syndics rusés se disent qu’au lieu d’inventer de nouveaux moyens de facturer des prestations de manière illicite, ce qui va alerter l’ARC qui va aussitôt les épingler, il est préférable d’utiliser un moyen connu et déjà dénoncé, en se disant que l’ARC ne va pas crier au loup à chaque fois, au risque de se répéter et de lasser ses adhérents et ses lecteurs.

C’est mal connaître l’ARC !

Nous l’avons dit et redit, mais nous allons le redire encore : il existe un contrat type de syndic qui n’est pas un menu à la carte où chaque syndic choisirait ce qui lui plaît mais qui est un menu imposé

Pour marquer l’importance qu’il accorde à ce contrat type de syndic, le pouvoir réglementaire l’a intégré dans l’annexe du décret 67-223 du 17 mars 1967, qui est LE décret qui régit les modalités d’application de la loi fondatrice de la copropriété actuelle, à savoir la loi 65-557 du 10 juillet 1965.

Ce contrat-type prévoit expressément que « le forfait convenu entre les parties comprend toutes les prestations fournies par le syndic au titre de sa mission ». Cela signifie qu’il n’est pas possible de contourner la réglementation en sous-traitant aux frais du syndicat des copropriétaires certains composant de la mission que doit remplir le syndic.

C’est évident, mais certains syndics sont vraiment d’une telle mauvaise foi qu’il faut souvent leur taper sur la tête pour que l’évidence commence à apparaître dans leur esprit. Jean COCTEAU ne connaissait pas les syndics quand il a dit que « un général ne se rend jamais, même à l’évidence », sinon il aurait dit qu’un syndic ne se rend en général jamais, surtout à l’évidence.

C’est en matière de gestion de personnel que les abus sont fréquents.

En particulier, certains syndics continuent de facturer aux syndicats de copropriétaires la mise à jour du Document Unique sur l’Evaluation des Risques pour la Santé et la Sécurité des Travailleurs (DUERSST), devant obligatoirement être mis à jour chaque année ou à chaque changement important, ainsi que la tenue de l’entretien professionnel biannuel prévu par le Code du travail.

L’argumentaire est particulièrement pervers : ces syndics font mettre à jour le DUERSST ou font tenir les entretiens professionnels par une société spécialisée en arguant qu’aucun honoraire de syndic ne serait facturé, que la réglementation serait ainsi bien respectée, que cette prestation ne pourrait pas être assurée par ces syndics qui n’auraient pas la compétence pour cette tâche (défense de rire) et qui ne seraient pas assurés pour cela (défense de rire aux éclats), tandis que l’intervention d’une société extérieure devrait en conséquence être supportée par le syndicat des copropriétaires employeur.

Ces arguties, pour le dire gentiment, ou ces mensonges trompeurs pour dire la vérité, ne résistent pas au fait que la réglementation prévoit que « le forfait convenu entre les parties comprend toutes les prestations fournies par le syndic au titre de sa mission » et que le syndic n’a, en conséquence, pas le droit de facturer directement ou indirectement ce qu’il choisit de ne pas faire dans sa mission.

L’annexe II du décret susvisé fournit une liste de prestations exhaustives pouvant donner lieu à une facturation de la part du syndic et, malgré tous nos efforts, nous n’avons pas trouvé que le syndic pouvait facturer ce qu’il avait décidé de sous-traiter.

Nous avons à l’inverse trouvé dans l’annexe I de ce décret qui donne la liste non limitative des prestations incluses dans le forfait, que le syndic devait, en matière de gestion du personnel, établir les attestations et les déclarations obligatoires (VI-24°), assurer la gestion de la formation du personnel du syndicat (VI-27°) ainsi que mettre en place et tenir à jour le document unique d'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs (VI-26°).

Les entretiens professionnels étant des prestations incluses dans les prestations prévues par la réglementation et en tous cas exclues des prestations facturables en supplément des tâches courantes du syndic, ils doivent donc être tenus au titre de la mission des syndics et dans le cadre du forfait. Sinon, demain nous verrions les bulletins de salaire établis par des cabinets d’experts comptables facturés aux copropriétaires, avec les mêmes arguments. Puis suivront les déclarations sociales, l’établissement des contrats de travail et ainsi de suite…

Quant au DUERSST, c’est écrit en toutes lettres.

Nous affirmons ainsi que la facturation des entretiens professionnels et la mise à jour du DUERSST est irrecevable et qu’elle ne peut donc pas figurer dans les relevés généraux des dépenses.

Si le syndic refuse de se rendre à l’évidence, il ne reste qu’une seule solution, sans omettre d’envisager de changer de syndic car ce problème ne devrait pas être le seul que rencontre le syndicat des copropriétaires avec ce syndic : il s’agit de refuser en assemblée générale les factures illicites.

Nous disons bien qu’il s’agit de refuser et non d’émettre une vague réserve dont ne tiendra aucun compte le syndic : le président de séance doit donc corriger le montant des charges soumis à l’approbation de l’assemblée générale.

Prenons un exemple : le montant des charges proposé par le syndic est de 100 000 € tandis que le conseil syndical entend refuser une facture d’entretien professionnel de 200 €. Le président de séance va donc faire voter l’assemblée générale sur « un montant de charges de 99 800 €, après le refus de 200 € de facture d’entretien professionnel ».

Le syndic ne peut pas s’opposer à la modification de la résolution et doit transcrire dans le procès-verbal ce que lui dicte le président de séance. Les 200 € refusés ne peuvent pas être répartis aux copropriétaires et devront donc être pris en charge par le syndic.

En conclusion, s’il est facile de plumer un pigeon ignorant, cela devient une autre affaire quand le pigeon devient savant, grâce à l’ARC.