Le syndicat des copropriétaires, qui envisage des travaux d’entretien des parties communes, peut décider de renforcer leur bonne exécution par l’entreprise de bâtiment, en sollicitant que celle-ci soit surveillée durant leur réalisation par une tierce personne compétente, un architecte, ingénieur ou bureau de contrôle.
Ce recours, qui ne revêt pas en principe un caractère impératif, ne garantit pas toujours au syndicat une gestion sereine d’un chantier souvent onéreux, lorsque le prétendu professionnel retenu, tel M. Pierre BARTHUEL, usurpe le titre d’architecte.
I. Recours à un architecte : modalités d’exercice de la profession, sanctions pénales et administratives en cas d’infractions
Une petite copropriété d’Ile de France adopte en assemblée générale des travaux de réfection de parties communes par une entreprise de bâtiment. Elle décide de plus de confier le 6 juin 2018 son suivi technique à un « architecte » D.P.L.G., M. Pierre BARTHUEL, selon une proposition de contrat de maitrise d’œuvre établie par ce dernier et annexé à sa convocation.
Le syndicat opte pour un architecte D.P.L.G. dans un souci de réalisation optimisée de ces travaux majeurs, un tel intervenant étant selon la loi du 10 janvier 1977 :
- diplômé d’une école d’architecte (7 ans d’études), lui permettant d’assurer la maitrise d’œuvre de travaux de bâtiment (art. 9 et 10) ;
- tenu de souscrire une assurance professionnelle pour les désordres qui résulteraient de sa défaillance dans le cadre de sa mission (art. 16.) ;
- impérativement membre de l’Ordre des architectes, sanctionnant administrativement les éventuels manquements de ses sociétaires (art. 21 et s.).
Des malfaçons sur l’ouvrage en 2018/2019, (qui se soldent par un surcout de plusieurs milliers d’euros) et la carence du maitre de l’art, alertent le syndic non professionnel et les copropriétaires sur la compétence de l’entrepreneur, mais aussi et surtout de « l’architecte ».
Le syndic décide en juin 2019 d’avertir, l’Ordre des architectes de l’Oise, auquel M. Pierre BARTHUEL était affilié selon la stipulation de sa convention de maitrise d’œuvre approuvée en assemblée générale.
Le 8 juillet 2019, l’Ordre des architectes transmet ces mêmes doléances auprès de la Direction Départementale de la Protection des Populations (D.D.P.P.) rattachée auprès de la préfecture.
La réponse de la D.D.P.P. en date du 5 septembre 2019 communiquée au syndic par un courriel de l’Ordre des architectes de l’Oise du 10 septembre 2019 souligne la radiation de :
- M. Pierre BARTHUEL de cette organisation professionnelle depuis plus de 4 ans (avril 2015) ;
- la société d’architecture de M. Pierre BARTHUEL depuis plus de 10 ans (30 septembre 2009) auprès du Tribunal de Commerce de Paris (siège social de son cabinet, conformément au numéro S.I.R.E.N. mentionné dans sa convention de maitrise d’œuvre).
Autrement dit, le syndic s’aperçoit que M. PIERRE BARTUEL exerce en toute illégalité la fonction d’architecte :
- au regard d’une société commerciale inexistante depuis plus de 10 ans ;
- sans disposer du statut légal correspondant depuis plus de 4 ans.
En ce qui concerne cette dernière infraction celle-ci est constitutive selon l’article L 433-17 du Code pénal d’un délit pénal sanctionné par un an d’emprisonnement et 15.000 euros d’amende, voire d’une peine complémentaire d’interdiction d’exercer l’activité professionnelle pendant 5 ans.
Il suffit pour cela de déposer plainte auprès d’un service de police, de gendarmerie ou directement auprès du Procureur de la République près le Tribunal judiciaire.
II. Recours à un architecte : précautions et indemnisation civile en présence d’un manquement dommageable à sa mission de maitrise d’œuvre
Cette expérience fâcheuse vécue par cette copropriété francilienne doit interpeller les syndicats, qui songent à faire des travaux d’entretien majeurs sur leurs parties communes et équipements.
Il convient donc de s’employer, par l’intermédiaire du syndic, à obtenir un maximum de données sur le maitre d’œuvre escompté, en vérifiant que :
- celui-ci est bien inscrit auprès de l’Ordre des architectes régional, en saisissant directement cette organisation professionnelle ;
- sa société commerciale demeure active et en bonne santé financière, en sollicitant du Tribunal de commerce, son extrait KBIS et ses derniers comptes publiés ;
- il dispose bien d’une assurance professionnelle obligatoire en cours de validité, en exigeant l’attestation éditée annuellement par sa compagnie.
Si le syndicat n’a pas eu recours préalablement à ce maitre d’œuvre, il peut requérir de celui-ci, des références de conseils syndicaux sur l’immeuble duquel il a officié et rentrer en contact avec ces derniers, afin d’obtenir confirmation sur son aptitude à mener à bien un marché similaire.
Enfin, si le syndicat se voit confronté à une défaillance identique, et qu’une tentative de solution amiable avec l’architecte ou sa compagnie d’assurance se révèle infructueuse (mise en demeure restée sans effet durant le délai consenti dans la missive), l’alternative s’avère contentieuse.
Outre le volet pénal abordé précédemment, le syndicat peut habiliter en assemblée générale son syndic, à poursuivre l’architecte fautif et/ou sa compagnie d’assurance professionnelle en réparation de son préjudice sur le terrain civil, et ce, par un vote à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 (art. 55 du décret du 17 mars 1967).
Cela suppose :
- d’apporter par tout moyen la preuve de la faute dommageable (art. 9 du Code de procédure civile) ;
- que l’assemblée générale n’ait pas entériné les faits incriminés (rejet du compte travaux intégrant les honoraires de l’architecte) selon l’article 17 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- que les manquements ne soient pas prescrits conformément à la garantie légale ou contractuelle correspondante, variable selon les cas (entre 2 et 10 ans).
En conclusion, l’architecte peut bien évidemment favoriser la réalisation de travaux de bâtiment par l’entrepreneur, pleinement conforme aux contrats respectifs.
Il n’en demeure pas moins, que le syndicat doit s’évertuer à prévenir des incapacités légales et techniques du maitre d’œuvre, en réunissant un maximum d’informations justifiant de sa compétence, avant d’accepter son contrat de maitrise d’œuvre en assemblée générale.
Dans le cas contraire, l’option contentieuse du syndicat à l’égard du prestataire défaillant peut se révéler aléatoire et/ou onéreuse.