La procédure de déchéance du terme a été mise en place par la loi SRU du 13 décembre 2000 afin d’enrayer les impayés de charges, dont un bon nombre de copropriétés souffre à l’heure actuelle. Cette procédure a été modifiée par la loi ELAN du 23 novembre 2018.
Cette procédure permet d’agir vite face à des copropriétaires de mauvaise foi qui, bien qu’exigibles, refusent de payer leurs charges.
Le syndic a la faculté de demander au juge l’exigibilité immédiate des provisions du budget prévisionnel non encore échues de l’exercice en cours dès le premier impayé de charges, ainsi que le fonds travaux sur le même exercice.
I. Conditions de la procédure de déchéance du terme
Pour que le syndic puisse utiliser la procédure de déchéance du terme régi par l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965, deux conditions doivent être satisfaites pour que cette action puisse prospérer.
A - Vote du budget prévisionnel
Le budget prévisionnel doit être voté avant le début de l’exercice pour que le syndic puisse réclamer aux copropriétaires les provisions pour charges. En principe, les copropriétaires sont tenus de verser 4 provisions trimestrielles, exigibles le premier jour de chaque trimestre civil, chacune égale au quart du budget voté, sauf modalités différentes votées en assemblée générale.
Avant chaque date d’exigibilité, le syndic doit rappeler à chaque copropriétaire, par courrier simple, le montant de la provision qui lui incombe (art 35-2 décret 17 mars 1967) et qu’il devra donc régler à l’échéance.
A la date d’exigibilité, le copropriétaire doit s’acquitter de sa quote-part de charges (art 35, 2° décret du 17 mars 1967).
En cas de non-paiement d’un seul appel de charges, le syndic peut mettre en œuvre la procédure de déchéance du terme.
Elle permet, outre le paiement des trimestres exigibles encore dus sur l’exercice en cours, d’obtenir le paiement de la totalité des autres trimestres de charges de l’année comptable, non encore échus.
Précisons que la procédure de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 concerne :
- les provisions de charges courantes du budget prévisionnel en cours qui ont été votées et appelées ;
- les provisions de charges courantes du budget prévisionnel en cours qui ont été votées et non encore appelées parce que la date d’exigibilité n’est pas survenue mais sont devenues exigible par la déchéance du terme ;
- les provisions de charges travaux qui ont été votées et appelées ;
- les provisions de charges travaux qui ont été votées et non encore appelées parce que la date d’exigibilité n’est pas survenue, mais sont devenues exigibles par la déchéance du terme ;
- les cotisations du fonds travaux votées et appelées ;
- les cotisations du fonds travaux votées mais non encore appelées parce que la date d’exigibilité n’est pas survenue, mais sont devenues exigibles par la déchéance du terme ;
- les arriérés de charges des exercices clos précédents et approuvés par l’assemblée générale.
II. Les modalités de mise en œuvre de la procédure
La procédure se décompose en 2 étapes : dès le premier impayé de charges, le syndic doit procéder par voie de mise en demeure par lettre RAR avant de saisir le président du Tribunal Judiciaire aux fins de constater la déchéance du terme des autres provisions de charges sur le même exercice comptable.
A - Une mise en demeure restée infructueuse
Le syndic doit donc au préalable mettre en demeure par lettre RAR ou lettre recommandée électronique si le copropriétaire a donné son accord, le copropriétaire de payer dans un délai de 30 jours.
Cette mise en demeure devra reprendre le texte de l’article 19-2 et rappeler que su les charges ne sont pas réglées dans le délai susmentionné, le syndic saisira le président du tribunal judiciaire.
A défaut de régularisation dans le délai imparti, les autres provisions non encore échues au titre du budget prévisionnel de l’exercice en cours deviennent immédiatement exigibles (c’est-à-dire que le terme tombe) ainsi que la cotisation au fonds de travaux obligatoire.
Le délai de 30 jours débute le lendemain de la première présentation de la lettre au domicile du copropriétaire (art. 64 décret du 17 mars 1967).
A défaut de paiement à cette échéance, le syndic peut alors passer à la phase contentieuse du recouvrement de créance.
B - Saisine du Président du Tribunal Judiciaire (TJ) « selon la procédure accélérée au fonds »
La saisine du tribunal peut être mise en œuvre par le syndic sans autorisation préalable de l’assemblée générale (art. 55 décret du 17 mars 1967) aux fins de faire constater l’existence de la créance du syndicat des copropriétaires.
Le syndic doit saisir le président du TJ du lieu de situation de l’immeuble qui va statuer « selon la procédure accélérée au fonds ». Cette procédure ne nécessite pas le recours à un avocat pour les dettes inférieures à 10.000 euros. Pour toutes les dettes supérieures à ce montant, la présence de l’avocat est obligatoire.
Si la dette est inférieure ou égale à 5000€, une tentative de conciliation est obligatoire.
Le Président du TJ va constater l’existence de charges exigibles non encore payées.
Il prononcera alors la déchéance du terme des charges de l’exercice en cours qui deviennent immédiatement exigibles.
Et il aura alors la faculté de condamner le copropriétaire débiteur à payer l’intégralité des charges du budget prévisionnel, des travaux et du fonds travaux de l’exercice concerné encore dues.
Il rendra sa décision par voie d’ordonnance ayant autorité de la chose jugée.
La décision prononcée pourra faire l’objet de voies de recours de droit commun tels que l’appel.
Cette procédure va permettre au syndicat des copropriétaires d’obtenir une décision sur le fond.
Cette décision sera assortie de l’exécution provisoire de plein droit. Elle pourra ainsi être exécutée même si le copropriétaire débiteur interjette appel. D’où l’intérêt de cette procédure.
Le syndic peut ainsi s’adresser à un commissaire de justice (nouvelle nomination de l’huissier de justice) afin de procéder par voie de saisie sur les biens du copropriétaire débiteur (saisie attribution, saisie des rémunérations, saisie vente). Le syndic pourra même envisager la saisie du lot, avec l’autorisation préalable de l’assemblée générale si le copropriétaire ne s’exécute pas.
Rajoutons que cette décision permet également de saisir les créances de loyers du copropriétaire bailleur défaillant jusqu’à extinction de sa dette à l’égard du syndicat des copropriétaires.
En conclusion, la déchéance du terme est une procédure intéressante et efficace puisqu’elle permet de recouvrer rapidement les créances à l’encontre des copropriétaires récurrents et de mauvaise foi.
Malheureusement, celle-ci est peu utilisée dans la pratique alors soyez vigilant et rapprochez-vous de votre syndic afin de lui rappeler l’existence de cette procédure !