La clause d’aggravation des charges en cas d’impayés à l’ordre du jour d’une assemblée générale : une clause illégale dont il faut refuser le vote!

21/04/2015 Dossiers conseils Conseil

La clause d’aggravation des charges en cas d’impayés à l’ordre du jour d’une assemblée générale : une clause illégale dont il faut refuser le vote!

 

 

On observe assez souvent dans les convocations des Assemblées générales, la mise au vote d’une clause d’aggravation des charges.

 

Ce type de clause prévoit de mettre à la charge du copropriétaire défaillant tous les frais liés à l’aggravation des charges communes en cas de dégradation des parties communes par exemple ou en cas d’impayés.

 

Or bien souvent, ces clauses sont tout simplement…illégales ! Nous allons donc voir en quoi elles le sont et le risque qu’elles représentent pour une copropriété.

 

  1. Les cas d’étude

 

Voici deux modèles types de résolution d’aggravation des charges :

 

  • Cabinet ATM Noisy-Le-Sec :

 

Résolution 16, votée à la majorité de l’article 24 de la Loi du 10.07.1965 – « L’Assemblée décide que l’ensemble des frais et dépens qu’aura à supporter le Syndicat des Copropriétaires dans le cadre des procédures en recouvrement de charges sera intégralement mis à la charge des Copropriétaires à l’origine desdites procédures[…] Le Syndicat décide que tous les frais et honoraires spéciaux du Syndic perçus au titre des actions dûment justifiées en recouvrement de charges […] seront imputés en totalité au Copropriétaire débiteur. Les conditions de recouvrement sont fixées par le contrat du Syndic. »

 

  • Cabinet BARRA NACERI :

 

Résolution 13, votée à la majorité de l’article 24 – « Principe de remboursement au syndicat par les copropriétaires concernés, de tous les frais exposés en aggravation de charges […] L’Assemblée générale décide que tout copropriétaire concerné devra rembourser au syndicat, les frais exposés en aggravation de charges en étant la conséquence : […] de recouvrement d’impayés. Il en sera ainsi pour toutes les dépenses avancées par le syndicat des copropriétaires rendues nécessaires […] pour relance suite à impayés, recouvrement des charges, et suivi de procédure contentieuse du syndic. »

 

  1. Qu'est-ce qui est illégal dans ces clauses ?

 

Le non-respect de la loi !

 

Les deux clauses proposées sont illégales parce qu’elles ne respectent pas l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 qui fixe les seuls frais imputables sur le compte du copropriétaire débiteur. Il s’agit des frais de mise en demeure, de relance et de prise d’hypothèque (qui passe au préalable par un commandement de payer par un huissier) à compter de la mise en demeure. Pour complément d’information, les intérêts légaux courent à partir de la lettre en accusé-réception de mise en demeure et sont également imputables directement sur le compte du débiteur.

 

Le décret du 26 mars 2015 définissant le contrat type de syndic de copropriété vient également encadrer les frais imputables directement sur le compte des copropriétaires débiteurs. Il est en effet dit à l’article 9.1 du décret que le syndic peut imputer des frais et honoraires sur le compte des débiteurs concernant les procédures suivantes : celle fixée à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ainsi que le dépôt d’une requête en injonction de payer, la conclusion d’un protocole d’accord par acte sous seing privé, la constitution du dossier transmis à l’auxiliaire de justice et le suivi des dossiers transmis à l’avocat uniquement en cas de diligences exceptionnelles.

 

Par ailleurs, attention à l’imputation des frais irrépétibles au titre de l’article 700 du Code de procédure civile : honoraires d’avocat, frais de déplacement et coût des démarches administratives (sur justificatif) fixés souverainement par le Juge ainsi que les dépens au titre de l’article 695 du Code de procédure civile : les frais d’assignation et de signification du jugement par huissier, etc. Ces frais ne doivent être imputés sur le compte du copropriétaire débiteur qu’une fois que le jugement a été rendu par le Juge et pas avant !

 

Des clauses nulles et non avenues dans le Règlement de copropriété

 

Ces clauses d’aggravation des charges introduites dans les règlements de copropriété n’étant pas en conformité avec la loi sont considérées comme nulles et non avenues. Qui plus est, elles sont votées à la majorité simple (article 24) au lieu de la double majorité de l’article 26.

 

  1. Quel est le risque principal pour la copropriété avec ces clauses d’aggravation des charges illégales?

 

En faisant croire aux copropriétaires que TOUS les frais liés au recouvrement des impayés sont imputables directement sur le compte du copropriétaire débiteur, ces clauses d’aggravation des charges illégales trompent le syndicat des copropriétaires !

 

Ainsi, les conseils syndicaux ne pensent pas à vérifier et négocier les procédures de recouvrement pratiquées par le syndic. Le décret du 26 mars 2015 sur le contrat type du syndic devrait toutefois permettre de limiter les abus sur ce plan.

 

Par ailleurs, les conseils syndicaux ne pensent pas non plus à négocier les frais et honoraires du syndic concernant le recouvrement des charges.

 

Enfin, ce type de clause ne les incite pas non plus à contrôler les actions menées par le syndic sur ce plan. Les frais de recouvrement imputés par le syndic sont également moins transparents ainsi.

 

La copropriété va donc se retrouver avec des dérives importantes en termes de recouvrement d’impayés : multiplication d’actes coûteux, inutiles et honoraires de syndics qui explosent !

 

Une fois le jugement rendu, certains frais liés au recouvrement de la dette auront été rejetés par le Juge car qualifiés comme « non nécessaires » par le Juge. Ces sommes vont alors être transférées du compte du débiteur vers les charges communes générales. Ainsi, c’est le syndicat des copropriétaires qui va devoir payer ces frais.  Autrement dit, la clause d’aggravation des charges va finalement, se retourner contre le syndicat des copropriétaires !

 

  1. Les conseils de l’ARC

 

Finalement, même si les clauses d’aggravation des charges en cas d’impayés peuvent avoir un effet « dissuasif » auprès des débiteurs qualifiés de « mauvaise foi », elles n’offrent pas un grand intérêt pour les syndicats des copropriétaires.

 

La loi venant en effet déjà préciser les frais imputables au copropriétaire défaillant. Ces clauses peuvent même au contraire, porter préjudice au syndicat des copropriétaires comme on l’a vu !

 

Il est beaucoup plus efficace pour un conseil syndical de mener les actions suivantes que de faire voter une clause d’aggravation des charges en cas d’impayés en Assemblée générale:

  • Bien vérifier que les procédures de recouvrement dans le contrat de syndic sont conformes à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 et au Décret du 26 mars 2015 définissant le contrat type de syndic ;
  • En cas de besoin d’un avocat pour les procédures contentieuses, il faudra négocier avec précision les frais de l’avocat avec la mise en place d’un forfait ;
  • De manière générale il faudra négocier les frais et honoraires du syndic sur les procédures de recouvrement ;
  • Suivre les impayés : tenir un tableau de suivi des dossiers impayés, faire des points réguliers avec le syndic pour savoir l’état d’avancement des procédures et les actions menées par le syndic pour recouvrer les impayés (tous les trimestres) ;
  • Bien, vérifiez que l’huissier saisi délivre les actes, mais ne recouvre pas les sommes, car ce dernier prélève alors des honoraires sur les encaissements ;
  • Une fois les jugements rendus, il faut contrôler la bonne imputation des frais par le syndic: compte du copropriétaire débiteur ou compte du syndicat des copropriétaires et calcul des intérêts légaux  en cas de frais abusifs et non prévus au contrat de syndic, rejetés par le Juge, négociez-leur prise en charge par le syndic.

 

 

 

Guide : La copropriété pratique en 300 questions mis à jour de la loi ALUR

 

 

 

www.arc-copro.com/5gy5

 

 

 

 

Abus 3522 : www.arc-copro.com/9vcw    

 

Article du 04.02.2015 «  Clause d’aggravation des charges : c’est le juge qui décide » www.arc-copro.com/3n2r

 

Article du bulletin de l’ARC – numéro du 1er trimestre 2014 - « Impayés : Imputation des frais de recouvrement des impayés » (page 18 à 23)

 

Article du 31.03.2015 «  Le décret sur le contrat type de syndic : l’ARC et l’UFC-Que-Choisir entendues à 80% »

 

 

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