La loi « malus-bonus » ou « bonus-malus » va repasser au Sénat. Qu’en pensons-nous ?

16/04/2013 Actions Action

 

La loi « malus-bonus » ou « bonus-malus » va repasser au Sénat.

Qu’en pensons-nous ?

 

 

  • I. La loi malus-bonus revient

 

Après avoir été maltraitée par le Sénat la loi « malus-bonus » a été remaniée par l’Assemblée Nationale et va repasser au Sénat.

 

Si l’on doit admettre que le dispositif prévu a été amélioré et rendu un peu moins confus et complexe (tout en restant ce qu’on appelle une « usine à gaz »), nous estimons que celui-ci reste globalement inadapté aux copropriétés avec chauffage collectif et eau chaude collective.

 

Sollicité par la Commission des lois du Sénat nous avons donc donné notre point de vue. Pour mieux faire comprendre notre « réponse », revenons sur quelques aspects de la loi « bonus-malus » appliqués aux copropriétés avec chauffage collectif et eau chaude collective.

 

  • II. La loi malus-bonus et la copropriété

 

  1. La loi prévoit d’affecter des « volumes » de consommations pour le seul chauffage à chaque copropriété en fonction de sa situation et du nombre de personnes vivant dans chaque logement.

Si la copropriété consomme plus, elle paiera un malus ; si elle consomme moins, elle aura un bonus.

Outre le fait que le calcul de ce « volume » relèvera de la gymnastique technico-bureaucratique, se pose un problème : celui de la part concernant le réchauffement de l’eau chaude. Ce problème rend pour nous quasi-impossible l’application de la loi dans ce cas, comme nous l’expliquons aux sénateurs.

 

  1. Pour permettre l’application du malus-bonus aux utilisateurs y compris dans les copropriétés avec chauffage collectif, la loi malus-bonus prévoit d’anticiper de deux ans et trois mois la date concernant l’obligation de poser des répartiteurs des frais de chaleur dans les immeubles dans lesquels la consommation est supérieure à un certain quota.

Les députés n’ont visiblement pas vu les conséquences désastreuses de cette mesure. Nous l’expliquons aux sénateurs.

 

  1. Autre point : la loi abaisse la majorité requise pour voter la pose de répartiteurs de frais de chaleur. Là encore les députés et les sénateurs - sous prétexte de faire notre bonheur - sont en train d’ouvrir la porte à tous les abus. Nous leur expliquons pourquoi.

 

 

  • III. Notre mail à la Commission des lois du Sénat

 

Commission des affaires économiques

Sénat Palais du Luxembourg

 

  • Objet : loi malus-bonus

 

Cher Monsieur,

 

Je reviens vers vous sur le texte soumis au Sénat.

  1. Premier point : dans les copropriétés avec chauffage collectif et eau chaude collective nous nous demandons comment un fournisseur pourra déduire lui-même la part affectée à l'eau chaude dans les copropriétés où l'eau chaude est produite par la même chaudière qui fournit le chauffage, et alors même que les compteurs d'eau chaude ne mesurent pas des calories, mais des volumes (et qu'il n'existe aucun ratio, la quantité de calories par mètre-cube étant fonction de l'installation, du bouclage, du calorifuge...) ?
  1. Nous prenons acte que l’Assemblée a finalement renoncé (suite à nos interventions) à imposer le vote de la mise en place de répartiteurs de frais de chaleur dans toutes les copropriétés avec chauffage collectif, se contentant - ce qui est déjà beaucoup trop - d’abaisser la majorité requise.

En ce qui concerne cette baisse de majorité,  nous continuons à penser que c’est une erreur et qu’elle va engendrer des pressions et manœuvres des prestataires de services et des syndics pour obtenir l’adhésion des assemblées générales (vote de contrats de dix ans coûteux).

 

Il faut, en effet savoir, qu’il est assez simple de faire pression sur une assemblée générale, le syndic détenant par ailleurs - directement (via les mandats de gestion) ou indirectement - des pouvoirs.

 

Or nous répétons - car cela n’est pas facile à admettre - que les syndics sont intéressés au développement de la mise en place des répartiteurs parce qu’ils facturent des honoraires supplémentaires de « gestion » : l’un des plus gros syndics de Paris - le cabinet DEGUELDRE - va jusqu’à prendre 10 € par an et par radiateur - soit 60 € pour un F4 qui se rajoute aux 70 € en moyenne facturés par le prestataire.

 

Répétons que les répartiteurs favorisent les logements bien situés ainsi que les « vols de calories » et défavorisent les autres.

Vous trouverez jointe la lettre que nous adressons au Conseil Économique, Social et Environnemental concernant non seulement les illusions qui entravent les répartiteurs, mais aussi les effets pervers de ce dispositif dans les immeubles mal isolés.

 

  • À noter : rien ne justifie de modifier la majorité requise puisque la loi oblige par ailleurs, la pose de répartiteurs dans les immeubles qui consomment plus qu’une certaine quantité par mètre carré (décret du 23 avril 2012 et arrêté du 27 août).

 

  1. En ce qui concerne le fait de ramener au 1er janvier 2015 l’obligation qui est aujourd’hui au 1er mars 2017, c’est - selon nous - une pure folie. Pourquoi ?
  1. d’abord les prestataires sur la place (type ISTA, PROXISERVE, ou les sociétés filiales de GDF-Suez ou EDF, etc.) sont déjà saturés de demandes et - de fait - assurent un travail de mauvaise qualité :
  • robinets thermostatiques mal installés ;
  • compteurs ou répartiteurs mal posés et de mauvaise qualité (problème de télé-relevé) ;
  • problèmes nombreux concernant les calculs des coefficients de pondération, etc.
  1. ensuite cela laissera aux assemblées générales au maximum DEUX assemblées générales (celle de 2013 et celle de 2014) pour voter, sur le choix d’un contrat de pose-location-relevé des répartiteurs ou de compteurs. Il y aura donc goulot d’étranglement et donc ABSENCE de véritable mise en concurrence. Pire il y aura sans doute entente (entre les grands prestataires) et imposition de prix excessifs. Imaginez les assemblées générales en 2014 obligées de voter un contrat, sachant que TOUS les contrats sont des contrats de DIX ans.

 

En précipitant ainsi la pose des répartiteurs, le Parlement va une fois encore (comme avec les ascenseurs) livrer les usagers à une pression commerciale impossible à contourner, sachant - nous le répétons - que les syndics de copropriété feront tout pour profiter eux aussi de la bonne aubaine.

 

  • À noter : nous avons lu avec l’exposé de l’amendement :

 

« À l’heure actuelle, l’obligation d’installation de compteurs individuels est fixée à 2017. Il convient d’avancer cette date afin de permettre une application égalitaire et juste du dispositif du bonus-malus ».

 

L’auteur de cet amendement de « bonne intention » n’a visiblement pas  eu connaissance des contraintes des copropriétés (assemblées générales) ni n’a compris qu’il allait créer un goulot d’étranglement.

 

Nous restons à votre disposition pour répondre à toutes vos questions, et vous prions de recevoir, Monsieur, l’assurance de nos salutations distinguées.

 

 

 

Bruno DHONT

 

Directeur de l’ARC ».