Le Copro 100 dans les copropriétés en difficulté : facilitateur de travaux, mais à quel prix ?

12/06/2018 Actions Action

Rénovation énergétique, ravalement, réparations importantes… La réalisation de gros travaux crée d’importants besoins en trésorerie aux copropriétés.

Pour les résoudre, les syndicats de copropriétaires sous dispositif public (OPAH, POPAC, PDS) peuvent avoir recours à deux solutions (non exclusives) : le préfinancement des subventions publiques collectives, possible grâce au prêt relais, et/ou la souscription d’un emprunt collectif à adhésion individuelle, tel le Copro 100.

I. Le Copro 100 : une réponse simple et rapide aux besoins de financement  des travaux en copropriété…

Pour rappel,mémoire l’article 103 de la loi n°2012-387 du 22 mars 2012, dite « loi Warsmann », indique qu’un syndicat peut juridiquement contracter un prêt et les articles 26-4 et suivants de la loi du 10 juillet 1964 l’organisent au sein de la copropriété.

Le Copro 100 est un prêt contracté au nom du syndicat, pour le compte des seuls copropriétaires qui décident d’y adhérer, à hauteur du montant de leur quote-part travaux.

Une garantie « défaillance au paiement des charges de remboursement » du Comptoir Financier de Garantie (CFG) permet de désolidariser les copropriétaires, rendant les copropriétaires individuels seuls responsables dudit prêt.

Les conditions d’obtention de ce prêt reposent sur le montant et la structure des impayés des copropriétaires envers le syndicat.

 Sont ainsi éligibles les copropriétés avec un taux d’impayés de charges courantes uniquement inférieur à 15 % (sachant que les copropriétaires dont la dette de charges courantes est égale ou inférieure à 2 trimestres de charges ne sont pas comptabilisés).

A cette condition viennent s’ajouter trois autres critères :

  • la somme globale de l’emprunt doit atteindre au moins 15 000 € ;
  • 2 copropriétaires au moins doivent souscrire au prêt ;
  • la quote-part individuelle travaux ne doit pas être inférieure à 1000 €.

En principe, tout copropriétaire dans une copropriété répondant aux conditions ci-dessus et souhaitant recourir à cet emprunt est éligible.

Il s’agit en effet d’un prêt sans limitation d’âge, qui ne nécessite pas d’hypothèque ni de caution bancaire, ni de conditions de revenus et de taux d’endettement préalable… Il peut être souscrit pour l’intégralité de la quote-part du copropriétaire ou seulement pour une partie.

II. … mais ce prêt peut présenter des risques pour les copropriétaires et, in fine, pour la copropriété.

Le Copro 100 facilite ainsi le financement, et donc la réalisation des travaux, grâce à l’obtention rapide de la quote-part travaux de tous les copropriétaires.

Cela permet aux copropriétaires d’être en capacité de payer leurs charges travaux sans passer par ce crédit, ou bien de ne pas être pénalisés par des copropriétaires en incapacité de réunir les sommes dues sans un prêt.

C’est donc toute la copropriété qui, à première vue, bénéficie de ce dispositif, permettant la mise en œuvre de travaux indispensables à sa conservation et son bon entretien.

Mais cette situation présente un effet pervers de taille : en effet, un copropriétaire peut avoir souscrit un Copro 100 sans pour autant être en capacité de le rembourser, ou tout du moins de supporter une nouvelle charge dans son budget… Cela impactera  alors à moyen terme, au-delà de sa situation personnelle, la santé financière de la copropriété, si ses charges de copropriété venaient à ne plus être payées, entrainant des frais de procédures - très souvent avancés ou supportés (en cas de rejet par le juge) par les copropriétaires – voire des irrécouvrables, sommes définitivement perdues à l’issue de la vente d’un lot supportées par l’ensemble du syndicat…

Nous retrouvons ainsi une incohérence conséquente : alors que les conditions de l’obtention de ce crédit reposent en théorie sur le taux d’impayés de la copropriété, indicateur de la situation financière du syndicat des copropriétaires, la responsabilité du remboursement repose sur les copropriétaires individuellement.

Conclusion :

Si la loi ne prévoit aucun lien de solidarité entre les copropriétaires, dans les faits, et en cas d’impayés non maîtrisés, ce lien peut exister bel et bien : un prêt contracté au nom du syndicat mais pour le compte de copropriétaires individuels n’y changera rien dans une copropriété en difficulté, telle que notre expérience nous permet de l’affirmer !

Pour que le Copro 100 soit une solution saine et pérenne répondant au besoin de trésorerie des copropriétés en difficultés, dont le besoin en travaux est indéniable, il serait judicieux qu’en parallèle de l’étude du dossier de la copropriété, se fasse une  étude des dossiers individuels.

Cela permettrait de tenir compte de la situation financière personnelle de chaque copropriétaire et ainsi de mieux évaluer la capacité de chacun à faire face aux engagements financiers susceptibles d’être pris, évitant à ces copropriétés déjà fragiles de retomber dans la spirale de la dégradation.