Une approche démagogique de la mise en place du fonds travaux

21/02/2017 Actions Action

Une approche démagogique de la mise en place du fonds travaux

 

Un récent article de presse a fustigé la mise en place du fonds travaux en le considérant comme une nouvelle charge mise en place par « l’État », pour le citer, qui permet au syndic de facturer de nouveaux frais de gestion.

 

Nous allons expliquer pourquoi cette analyse est à la fois démagogique et antinomique aux dispositions légales.

  1. Le fonds travaux : un atout pour les copropriétés

La loi ALUR du 24 mars 2014 a prévu la mise en place obligatoire d’un fonds travaux dans la quasi-totalité des copropriétés. Cette disposition s’est imposée car la majeure partie du parc des copropriétés de France est vieillissante (plus du quart a été construit avant 1950, seulement 15 % après 2000) sans que pour autant ne soient votés en assemblée générale des travaux pour les rénover.

Cette situation s’explique principalement parce que les travaux en copropriété coûtent cher, pouvant atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros, incitant les copropriétaires à retarder, voire ajourner leur réalisation. 

Les lois précédentes avaient effectivement prévu la possibilité de constituer une réserve travaux, mais cette dernière n’était généralement pas mise en place ou alimentée de façon aléatoire, en raison de son caractère facultatif.

La constitution d’un fonds travaux s’est donc imposée, sachant que la grande question en copropriété n’est pas tant le vote que le financement.

Ce dispositif est donc doublement vertueux. D’une part, il permet de changer les équipements lorsqu’ils deviennent vétustes, afin d’éviter des changements fréquents de pièces ou une surconsommation des énergies ; et d’autre part, maintenir le standing de la copropriété en augmentant la valeur vénale du logement.

  1. Le fonds travaux : un élan vers la maîtrise des charges

La mise en place du fonds travaux doit inciter la copropriété à entrer dans une politique de maîtrise des charges afin de faire en sorte que les économies réalisées permettent de financer le fonds travaux.

Concrètement, l’objectif est que, pour des appels de charges constants, le copropriétaire paie aussi bien sa quote-part de budget courant que celle du fonds travaux.

Cette préconisation est loin d’être utopique, sachant que plusieurs copropriétés adhérentes à l’ARC ont pu réduire leur budget prévisionnel de plus de 20 %.

Les leviers pour réaliser des économies de charges passent souvent par une négociation du tarif du gaz ou une mise en concurrence du contrat d’assurance pour lequel il est possible de réaliser des économies substantielles.

  1. Un fonds travaux : de nouveaux frais de gestion ?

L’article de presse affirme que « dans cette affaire le seul à tirer son épingle du jeu sera le syndic de copropriété. Il ne manquera pas l’occasion de facturer de nouveaux frais de gestion ».

Cette affirmation est dénouée de toute réalité juridique et réglementaire compte tenu du fait que la loi ALUR a mis en place un contrat type de syndic qui précise de manière exhaustive les prestations pouvant faire l’objet d’une facturation supplémentaire.

Or, aussi bien la constitution, la gestion ou la mise en place du fonds travaux ne sont pas des tâches pouvant faire l’objet d’honoraires supplémentaires. Ce journaliste fait donc un procès d’intention aux syndics, nonobstant le fait que nous avons déjà épinglé des syndics qui réclamaient des honoraires supplémentaires pour la gestion de ce fonds.

Mais encore, le législateur a voulu sécuriser au mieux ce dispositif en exigeant que les sommes afférentes au fonds travaux soient déposées sur un compte bancaire séparé et rémunéré. L’intérêt est de faire en sorte que les produits financiers générés par ce placement puissent être mis au seul profit du syndicat des copropriétaires.

Le fonds travaux est donc une mesure incitative qui a déjà fait ses preuves dans différents pays, notamment au Canada (Québec) qui a très vite compris que les 5 % minimums légaux étaient largement insuffisants et qu’il était nécessaire de l’abonder de manière beaucoup plus importante.

  1. La mise en place de fonds travaux : une mesure vertueuse

Nous sommes conscients que ce dispositif est mal perçu par un nombre important de copropriétaires.

Cette situation s’explique principalement pour deux raisons :

  • un manque de confiance dans le syndic à gérer honnêtement les fonds du syndicat des copropriétaires ;
  • une loi qui a toujours considéré la copropriété comme l’addition de divers logements privatifs, et les a régit en conséquence faisant primer l’intérêt individuel.

Alors que la copropriété doit être appréhendée comme une entité englobant des lots privatifs mais que l’intérêt commun général doit être la priorité du législateur face à la copropriété.

Néanmoins, il faut convenir que l’abondement du fonds travaux correspond en réalité à un droit d’usage des parties et des équipements communs de la copropriété.

Au même titre qu’un copropriétaire va épargner pour refaire tous les dix ans la peinture de sa cuisine, il doit admettre qu’il faut prévoir une réserve pour assurer le financement du ravalement de son immeuble.

Il s’agit donc d’une mesure de bon aloi qui implique une dynamique d’entretien et de conservation des immeubles plutôt qu’une mesure contraignante dénuée de tout bon sens.