En 2016, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a lancé une enquête pour contrôler le respect par les syndics professionnels du contrat-type tel que défini par le décret du 26 mars 2015.
Le constat était sans appel puisque même si les syndics ont mis en place le nouveau contrat-type, 63% des établissements contrôlés qui représentent 41% des contrats étudiés présentent des anomalies.
Voici un extrait des affirmations de la DGCCRF :
« Les manquements consistent fréquemment à en supprimer des paragraphes ou des clauses, ce qui est contraire au principe d’un contrat type et rend plus difficile pour les copropriétaires la comparaison entre syndics.
En effet, le fait de supprimer une mention au lieu de la rayer (tout en la laissant figurer dans le document) n’est pas conforme à l’objectif poursuivi par la loi d’information complète des copropriétaires quant aux choix offerts par le contrat.
Ainsi, dans un tel cas de figure, les copropriétaires ne peuvent s’engager de manière éclairée. »
En 2018 une nouvelle enquête a été diligentée par la DGCCRF afin de réaliser un nouveau point sur le respect strict du contrat-type.
Le constat est tout aussi calamiteux puisque 46% des établissements de syndics ont un contrat-type qui présente une ou plusieurs anomalies.
Le plus scandaleux est qu’il s’agit de pratiques commerciales trompeuses économiquement préjudiciables pour le syndicat des copropriétaires.
Voyons les principaux points relevés.
I. Des facturations illégales
Sans grande surprise, le nerf de la guerre reste les profits avec un nombre très important de pratiques illégales constatées qui demandent une certaine expertise et dextérité pour les identifier.
Dans la prochaine revue de l’ARC, l’ensemble des points sera étayé afin de permettre au conseil syndical de les identifier, évitant ainsi à la copropriété de se retrouver lésée.
Dans les facturations, plusieurs types d’anomalies ont été constatées :
- une clause de revalorisation du prix du forfait fixée au premier jour de l’exercice comptable, et non douze mois après la date de désignation du syndic, qui a pour conséquence de revaloriser le forfait moins de douze mois après le début du contrat ;
- la facturation des honoraires du forfait sur la base de l’exercice comptable au lieu de la durée du contrat, ce qui entraîne une facturation du syndicat des copropriétaires sur une période inférieure à douze mois ;
- la facturation de frais de relance avant mise en demeure alors que cette facturation au copropriétaire défaillant n’est possible qu’à compter de la mise en demeure de celui-ci ;
- la facturation de frais de reprographie concernant les missions du syndic (par exemple : les documents nécessaires pour l’assemblée générale annuelle) alors qu’ils doivent être intégrés dans le montant forfaitaire.
D’autres anomalies ont été relevées :
- la facturation d’ouverture de compte bancaire séparé alors que cette prestation doit être prévue dans le forfait ;
- la facturation de l’actualisation de l’état-daté lorsque la date de signature de l’acte de vente est reportée ;
- des honoraires forfaitaires relatifs aux travaux et études techniques or, cette rémunération ne peut se déterminer que sous la forme d’un pourcentage du montant hors taxe des travaux, à un taux dégressif ;
- l’absence de compte bancaire séparé alors que les syndics de copropriété ont l’obligation d’ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat de copropriétaires ;
- la facturation d’un pré-état daté au copropriétaire cédant, sans commande préalable ;
- la majoration des heures passées en assemblée générale et en assemblée générale supplémentaire au-delà de la plage horaire ou de la durée prévue alors que ces heures supplémentaires sont déterminées selon un coût horaire qui ne peut être majoré ;
- des prix excessifs au regard de la prestation fournie, notamment pour l’immatriculation de la copropriété au registre des copropriétés et l’établissement de l’état daté.
II. La détection d’indices de pratiques anticoncurrentielles (PAC) : des suspicions d’ententes.
Au-delà de pratiques commerciales trompeuses, la DGCCRF a relevé des pratiques anticoncurrentielles qui ont pour but de geler les prix du marché, grâce à des ententes entre les syndics professionnels et les prestataires de service.
Ce point n’est pas une révélation pour l’ARC, puisqu’à plusieurs reprises nous avons dénoncé l’envolée des charges de copropriété qui est due à un défaut de mise en concurrence des prestataires, renforcée par une collusion entre le syndic et les sociétés marchandes.
Voici donc l’analyse de la répression des fraudes.
« Les syndics déterminent généralement le prix des prestations en fonction de l’état de la copropriété, du nombre de lots et des spécificités de la copropriété notamment lorsqu’il s’agit de la reprise d’un syndic bénévole.
Les investigations menées par les enquêteurs des brigades interrégionales d’enquêtes de la concurrence (BIEC) ont relevé plusieurs indices de pratiques pouvant fausser le jeu de la concurrence. Il s’agissait de suspicions d’entente entre :
- syndics issus d’un même groupe, mais disposant, en première analyse, d’une autonomie sur le plan commercial (donc susceptibles de constituer des entités économiques distinctes au sens du droit de la concurrence), et situés dans une zone de chalandise commune ;
- syndics indépendants exerçant dans une même zone de chalandise ;
- un promoteur immobilier et un syndic. Dans ce cas, le syndic provisoire est devenu le syndic définitif lors de l’assemblée générale, sans mise en concurrence. Le fait que les promoteurs immobiliers délèguent la gestion de la copropriété systématiquement au même syndic de copropriété ou à un syndic issu d’une holding commune ou d’un même groupe a pour effet de verrouiller le marché dès le départ. En outre, les copropriétaires ignorent généralement les liens capitalistiques existant entre le promoteur immobilier et le syndic provisoire devenu le syndic officiel (or, informer sur le lien capitalistique unissant deux entités est une obligation prévue par la loi Hoguet[1]).
Par ailleurs, les agents ont également relevé des pratiques pouvant fausser la concurrence entre des prestataires de services intervenant dans le secteur immobilier, notamment la similitude des prix et des prestations proposées, des tâches, des modalités d’exécution et des conditions de résiliation des contrats pour plusieurs prestataires positionnés sur les marchés des contrats d’installation, de relevés et de maintenance.. »