ABUS DE LA SEMAINE N° 4593 : Le ministre du Logement et de la Ville vend la mèche sur le tarif plafonné de l’état daté avant la réunion au sein du CNTGI

17/12/2019 Abus Abus

Voilà maintenant presque six ans que la loi ALUR a prévu la publication d’un décret devant plafonner le tarif de l’état daté qui est un acte dont le syndic a le monopole pour son établissement.

Le 5 mars dernier, lors du dixième anniversaire de la répression des fraudes, le Premier Ministre s’est engagé pour le pouvoir d’achat des copropriétaires, notamment en confirmant la publication de ce décret.

Depuis, la situation a avancé, mais pas forcément dans le bon sens, et ce notamment depuis que le ministre du Logement et de la Ville a chipé la politesse aux instances en annonçant le tarif plafonné réglementairement qui semble-t-il a été arbitré par le Premier Ministre, lui-même qui arguait vouloir défendre le portefeuille des copropriétaires.

Voyons ce que prévoit l’ordonnance « Copropriété » sur ce sujet, et surtout les annonces du ministre chargé de la Ville et du Logement (au nom du Premier Ministre).

I. Un recadrement des dispositifs de la facturation de l’état daté

Au-delà du tarif plafonné qui est un point crucial, au vu des abus tarifaires qui sont devenus inacceptables, se pose aussi la question de l’encadrement du coût de l’état daté.

En effet, l’ARC a révélé aux ministères de la Justice et du Logement que certains syndics allaient compenser le plafonnement du prix de l’état daté par une facturation calculée en fonction du nombre de lots mutés, même s’il ne s’agit que d’une transaction.

Autrement dit, lorsque le copropriétaire vend son logement ainsi que sa cave, le syndic facturera deux prestations distinctes.

C’est d’ailleurs ce que certains syndics ont déjà mis en place.

Pour éviter ce type d’abus l’ordonnance « Copropriété » du 30 octobre 2019 a précisé que le tarif englobe l’intégralité de la mutation et ce peu importe le nombre de lots mutés.

C’est déjà ça de gagné !

En parallèle, plusieurs réunions de travail avec les professionnels, mais aussi avec la répression des fraudes ont été tenues afin de définir quel est le « bon » prix plafonné de l’état daté.

Pour cela, l’ARC est restée factuelle en présentant des éléments concrets afin qu’en parallèle les professionnels puissent aussi argumenter sur cette même base.

Deux arguments ont été avancés par notre association.

L’obligation liée à l’état daté remonte aux années 2000, impliquant que le développement informatique financé par les syndics est largement amorti, ne pouvant justifier un tarif aussi exorbitant.

De plus, l’ARC a démontré que les propres concepteurs de logiciels se targuaient de générer l’état daté en deux minutes (voir l’article Après l’immatriculation initiale des copropriétés, le masque tombe en matière de temps nécessaire pour l’établissement de l’état daté), confirmant que le prix acceptable et justifiable ne peut en aucun cas supérieur à 150 euros.

Alors, après toutes ces vérités, M. Denormandie, ministre chargé de la Ville et du Logement, a profité du congrès de la FNAIM pour annoncer le tarif qui serait retenu.

II. Un tarif démagogique qui fait même rire les professionnels

A partir du moment où les pouvoirs publics souhaitent plafonner un tarif, cela implique qu’il doit être équilibré, prenant en considération le vrai coût pour son établissement.

Il serait en effet illogique et incohérent que les pouvoirs publics qui sont censés être impartiaux et surtout dans une position de défense du pouvoir d’achat des copropriétaires prévoient un tarif réglementé démagogique et injustifiable.

Et pourtant, à l’occasion du congrès de la FNAIM, M. Denormandie, ministre chargé de la Ville et du Logement, a annoncé que le tarif réglementaire fixé et même arbitré par le Premier Ministre serait de 380 euros TTC.

Oui ! Trois cents quatre-vingts euros TTC pour une tâche qui ne prend pas plus d’une dizaine de minutes.

Sans aucun doute, il s’agit d’un tarif qui a pour objet d’obtenir la sympathie des professionnels de l’immobilier au détriment du pouvoir d’achat des copropriétaires et surtout de la réalité technique et économique.

Plus scandaleux, ce tarif n’a même pas encore été débattu au CNTGI et d’autres instances sont toujours en cours de réflexion pour déterminer le tarif plafonné acceptable.

Alors il y a deux approches. Soit M. Denormandie est dans le secret des Dieux, avançant des informations avant même que les débats soient clôturés, soit dans l’euphorie des professionnels il s’est emballé en annonçant un tarif démagogique, mais qui convient grassement aux syndics alors qu’il n’est pas encore définitivement tranché.

L’avenir nous le dira…