Suite à la suspension ou au report dus aux restrictions sanitaires, la préparation des assemblées générales de 2020 reprend progressivement.
Cette étape, dans un climat juridico-sanitaire exceptionnel, peut conduire à des approximations et des irrégularités des propositions d’ordre du jour de l’assemblée générale 2020 par des syndics professionnels, comme le révèle celle éditée pour une petite copropriété parisienne par le Cabinet Gestion A.D., qui ne se représente pas au demeurant à un nouveau mandat.
I. Irrégularités relatives à la gestion courante
Dans cette proposition d’ordre du jour rédigée fin mai 2020 par le syndic Cabinet Gestion A.D. pour une petite copropriété parisienne de 15 lots principaux, ce professionnel de l’immobilier soumet au vote la question :
- inutile et non prévue légalement du maintien du compte bancaire « séparé du SDC » auprès de l’établissement financier dépositaire, et ce, par un vote à la majorité absolue des voix du syndicat (art. 25 de la loi du 10 juillet 1965).
En effet, l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ne prévoit nullement l’obligation pour le syndicat de confirmer en assemblée générale la conservation de son compte bancaire séparé auprès de l’établissement financier dépositaire, mais simplement la possibilité pour celle-ci d’imposer une banque déterminée, si celle retenue par le syndic ne lui convient pas ;
- sur la désignation d’un autre professionnel à la fonction de syndic, sans prévoir expressément la durée de son mandat, alors même que cette indication (et pas seulement les dates calendaire de prise d’effet et d’échéance) s’impose selon l’article 29 du décret du 17 mars 1967
II. Irrégularités concernant les prestations exceptionnelles
Outre les non-conformités courantes mentionnées ci-dessus, la proposition d’ordre du jour de l’assemblée générale de 2020 du syndic Gestion A.D. comporte des failles sur des points exceptionnels (hors budget prévisionnel de fonctionnement), à savoir une question :
- incompréhensible sur l’affectation du fonds travaux, puisque celle-ci ne précise pas expressément la nature des travaux envisagés (rappel à une décision ambiguë de l’assemblée générale de 2018 sur une somme de 1.600,00 euros en charges ascenseur, sous-entendant une délégation de pouvoir en la matière au profit du conseil syndical) et comporte de plus une option dans le même projet de résolution.
Une telle présentation ne permet donc pas aux copropriétaires de pouvoir se prononcer en connaissance de cause et de délibérer sur chacune des alternatives, en l’absence d’une sous-résolution sur chacun des volets.
Outre le manque de transparence, cette situation se révèle juridiquement litigieuse et expose, en cas d’adoption en l’état, la résolution à une action judiciaire en annulation par un copropriétaire opposant ou défaillant ;
- sur une délégation de pouvoir au conseil syndical pour l’achat des paillassons des portes palières des lots.
Sauf mention contraire du règlement de copropriété, ces installations constituent des parties privatives, dont l’entretien incombe exclusivement à chaque copropriétaire concerné (art. 2 de la loi du 10 juillet 1965).
Il en résulte que l’assemblée générale ne peut pas consentir un mandat en la matière au conseil syndical, puisque son objet porte en principe sur les parties communes et les équipements collectifs (art. 3 et 14 de la loi du 10 juillet 1965).
Si l’on peut comprendre l’approche pragmatique d’un tel projet (préservation de l’harmonie de l’immeuble et l’obtention d’un prix compétitif pour les copropriétaires par un achat groupé), celui-ci ne peut résulter que d’une initiative privée entre copropriétaires et aucunement d’une décision de l’assemblée générale hors domaine de compétence, et donc susceptible d’invalidation judiciaire ;
- double sur l’adaptation du règlement de copropriété consistant :
* d’une part, pour 4.000,00 euros T.T.C. à supprimer les clauses « réputées non écrites », c’est-à-dire contraires à la loi, ce qui fait cher le simple gommage au regard du montant proposé notamment par l’ARC pour cette même intervention ;
* d’autre part, pour 1.500,00 euros pour la « remise à plat » du règlement de copropriété et ses modificatifs, imputée dans le budget prévisionnel de fonctionnement.
Outre le montant pharamineux d’une telle opération, puisque à ces montants s’ajoutent les frais d’enregistrement de 2.500,00 euros et de 300,00 euros d’honoraires du syndic, celle-ci comporte :
* un objet imprécis ;
* une illégalité, dans la mesure où l’approbation d’un avenant au règlement de copropriété ne représente pas une prestation ordinaire relevant du budget prévisionnel de fonctionnement (art. 14-1 de la loi du 10 juillet 1965), mais d’un tâche exceptionnelle supposant un compte et des appels spécifiques (art. 14-2 de la loi du 10 juillet 1965).
En proposant l’intégration illicite du volet « remise à plat » par rapport à « l’adaptation » du règlement de copropriété, le Cabinet Gestion A.D. induit en erreur les copropriétaires sur le montant réel de l’opération, qui :
* ne se situe pas, comme il le prétend, à 6.800,00 euros (4.000 + 2.500 + 300 euros) ;
* est en définitive de 8.300,00 euros (4.000 + 1.500 + 2.500 + 300 euros), soit une surfacturation déguisée de 22 %.
La vigilance demeure de mise en cette veille de nouvel opus des assemblées générales 2020 post pandémie, afin de débusquer et écarter les propositions de résolutions iniques, qui peuvent émaner y compris de syndics non professionnels sur le départ.