L’appel de fonds exceptionnel : une « fuite vers l’avant » de nombreux syndics en cas de difficulté de trésorerie

22/09/2015 Dossiers conseils Conseil

L’appel de fonds exceptionnel :

une « fuite vers l’avant » de nombreux syndics en cas de difficulté de trésorerie

 
  1. Introduction

Depuis l’obligation, sans dérogation possible, d’ouverture d’un compte bancaire séparé pour les copropriétés de plus de 16 lots (article 18, alinéa 5 de la loi du 10 juillet 1965 modifié par la loi ALUR), certains syndics se plaignent d’être « démunis » face à des copropriétés ayant des difficultés de trésorerie puisqu’ils ne peuvent plus « avancer de l’argent » à ces copropriétés, en piochant notamment dans la trésorerie des autres immeubles plus sains qu’ils gèrent (ce qui était tout à fait défendu, rappelons-le).
 
Dans un précédent article ( www.arc-copro.com/24bf ), nous vous expliquions comment un syndic avait contourné le problème, plutôt que de le traiter : tout simplement en demandant une autorisation de découvert auprès de la banque sans autorisation de l’assemblée générale et avec un taux non négligeable de 10% en cas de non-remboursement dans le délai imparti, pénalisant encore plus la copropriété. 
 
Nous allons voir maintenant comment procèdent d’autres syndics face au manque de trésorerie de certaines copropriétés.
 
  1. L’appel de fonds exceptionnel comme solution en cas de manque de trésorerie

 
D’autres syndics utilisent de façon systématique le recours aux appels de fonds exceptionnels lorsqu’ils sont confrontés à des problèmes de trésorerie.
 
Quels sont les risques et en quoi cela peut-il aggraver la situation de la copropriété ?
 
Tout d’abord, rappelons qu’un syndic n’a pas le droit de procéder à un appel de fonds exceptionnel sans décision préalable de l’assemblée générale (selon les articles 35 et 37 du décret du 17 mars 1967).
Par ailleurs, en procédant de cette manière, le syndic fait peser sur les bons payeurs le défaut de trésorerie en partie lié aux impayés de certains copropriétaires, mais aussi et surtout lié à un manque de rigueur dans sa gestion.
 
 

III.  Un exemple dramatique

 
Voici la situation relevée sur une copropriété que nous avons décidé de ne pas citer, puisque les copropriétaires mènent les actions nécessaires pour redresser la situation.
 
  1. Depuis des années, le budget prévisionnel est largement sous-estimé, entraînant chaque année d’importantes régularisations, créant inévitablement des situations d’impayés des copropriétaires les plus modestes.
 
  1. Lors de l’assemblée générale de 2014, le budget 2015 est fortement réévalué (il passe à 65.000 €).
 
  1. Malgré ce nouveau budget censé être adapté aux besoins de la copropriété, le syndic appelle, le 1er avril 2015, un complément aux copropriétaires (sans décision  préalable d’assemblée générale) de… 48 000 € ! Oui, vous avez bien lu, 74 % du budget annuel sur un seul appel !
 
Comment le syndic peut-il justifier un tel appel seulement trois mois après le début de l’exercice ?
 
  1.  Comment une telle situation peut-elle s’expliquer ?

 
La situation de la copropriété s’explique de la façon suivante :
 
  • le syndic a maintenu un budget sous-estimé pendant des années ;
  • les fortes régularisations annuelles ont mis en difficulté de plus en plus de copropriétaires, créant des situations d’impayés de plus en plus graves ;
  • plutôt que d’agir sur une meilleure maîtrise des charges et financière, le syndic a pris de plus en plus de retard dans le paiement des fournisseurs, le budget déjà insuffisant devenant encore plus insuffisant, etc.
 
À l’ARC, c’est ce que nous appelons « la fuite vers l’avant » : plutôt que de prendre les problèmes à la source (maîtriser les charges, réajuster le budget, traiter les impayés) le syndic déplace les problèmes en ne faisant que les aggraver (dette fournisseurs qui augmente, charges de plus en plus élevées, impayés non traités, etc.).
 
  1. Nos conseils

 
Il faut bien rappeler, que tant que l’appel de fonds n’est pas ratifié par l’assemblée générale, il n’est pas exigible et le syndic ne peut donc pas recouvrer cette somme auprès des copropriétaires.
 
Par ailleurs, voici nos conseils dans telles situations :
 
  1. Mettre en place une gestion prévisionnelle de la trésorerie
 
Afin d’éviter de vous retrouver dans cette situation, il faut opter pour un mode de gestion prévisionnel de la trésorerie de votre immeuble : faites régulièrement le point avec votre syndic pour connaître le niveau réel de la trésorerie et anticiper au mieux le manque de trésorerie.
 
Pour cela, vous pouvez demander à votre syndic un extrait du compte bancaire à la fin de chaque mois, à rapprocher avec le grand livre comptable pour connaître les factures enregistrées, mais non encore payées.
  1. Modifier les modalités d’appels de fonds
 
Lorsque vous votez le budget prévisionnel en assemblée générale, la résolution indique également les modalités d’appel de fonds (date des appels, montant des appels, etc.). Les appels de charge sont exigibles par défaut le premier jour de chaque trimestre. C’est le cas le plus courant, et c’est ce que prévoit la loi si le règlement de copropriété n’en dispose pas autrement ou si aucun autre calendrier d’appels n’a été décidé lors de l’assemblée générale.
 
Néanmoins, vous pouvez en décider autrement lorsque vous approuvez le budget prévisionnel en assemblée générale. Par exemple, si vous savez que de grosses factures tombent en début d’exercice (assurance par exemple) ou durant la période de chauffe (factures d’énergie), vous pouvez tout à fait prévoir d’appeler une plus grosse partie du budget prévisionnel sur les deux premiers appels de fonds.
 
Cette méthode peut permettre de réguler le niveau de trésorerie disponible tout au long de l’année et éviter le défaut de trésorerie à un instant T.
 
  1. Suivre de près le recouvrement des impayés
 
Nous l’avons vu dans l’exemple développé, si une copropriété connaît de grosses difficultés financières, il n’est pas rare que ce soit en partie à cause d’un recouvrement des impayés tardif et inefficace.
 
Nous vous conseillons donc de vérifier auprès de votre syndic que les procédures judiciaires envers les copropriétaires débiteurs sont correctement engagées (et dans les temps) sans frais inutiles. Pour cela, demandez à votre syndic une balance des copropriétaires en fin de trimestre, les extraits de compte des principaux débiteurs et un état du contentieux (procédures en cours). Pour plus d’informations sur la méthode à suivre, reportez-vous à notre article « Maîtriser et réduire les frais de recouvrement » : www.arc-copro.com/2g71,  et à notre guide ci-dessous.
 
Pour plus de conseils, consultez nos guides :
 

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