L’ARC saisit les ministères du Logement et de l’Ecologie suite à l’arrêté concernant l’individualisation des frais de chauffage

04/10/2019 Actions Action

Le 10 septembre dernier, a été publié l’arrêté concernant l’encadrement de l’individualisation des frais de chauffage qui indique la formule permettant de déterminer si le coût de l’installation des équipements est économiquement rentable au regard de la baisse des consommations énergétiques générées.

A notre grande stupéfaction, ce texte réglementaire présente que l’installation de répartiteurs de chaleur permettrait une baisse énergétique de 15 % (ce qui représente une réduction de deux degrés de la température de chauffage) ce qui est équivalent à une performance après avoir réalisé une isolation thermique par l’extérieur (ravalement).

Au-delà de cette aberration qui fait le bonheur des installateurs, le risque est que les copropriétaires se dissuadent de voter des travaux de rénovation énergétiques au motif que l’on arriverait à atteindre les mêmes baisses de chauffage en installant simplement des répartiteurs qui représentent un coût ridicule par rapport à un ravalement.

L’ARC a publié un communiqué de presse pour mettre en évidence l’hérésie de cet arrêté et le manque de sérieux des administrations (voir article : Communiqué de presse L’arrêté sur l’individualisation des frais de chauffage inutile, contreproductif et télécommandé).

En parallèle, l’ARC a saisi les ministres de l’Ecologie et du Logement pour mettre en évidence l’incohérence des dispositions prises par leur administration qui se trouvent en contradiction totale avec les objectifs affichés des 500 000 logements rénovés par an.

Plus que cela, nous leur avons expliqué que les lobbys des grands groupes et en particulier des installateurs d’individualisation ne pouvaient pas dicter la réglementation, mettant en difficulté les copropriétaires et les objectifs de rénovation.

« Objet : Moratoire sur l’arrêté du 6 septembre 2019 concernant l’individualisation des frais de chauffage

Monsieur le Ministre,

En tant que directeur général de la principale association représentative des intérêts des syndicats des copropriétaires comptant plus de 14 000 copropriétés adhérentes, je me permets de vous saisir au sujet du récent arrêté du 6 septembre dernier concernant l’individualisation des frais de chauffage.

En préliminaire, je tiens à vous indiquer que notre association qui intervient sur l’ensemble du territoire français milite depuis plusieurs années pour inciter les copropriétaires et conseillers syndicaux à réaliser au sein de leurs immeubles des travaux d’entretien et de rénovation, y compris énergétique.

Pour cela, nous embauchons à temps plein des architectes, des thermiciens, des juristes et des comptables afin de permettre aux syndics bénévoles, ainsi qu’aux conseillers syndicaux de disposer de l’ensemble des assistances nécessaires pour engager un plan pluriannuel de travaux au sein de leur copropriété qui comprend un volet énergétique.

Cette mobilisation est indispensable car, comme vous le savez, les difficultés sont nombreuses : problèmes de financement, absentéisme des copropriétaires aux assemblées générales, manque de mobilisation et de formation des syndics, complexités à définir un projet global, etc.

Afin de répondre à cette situation, nous faisons preuve de pédagogie en essayant de répondre à l’ensemble des difficultés ou arguments de bonne ou de mauvaise foi qui auraient pour objet de geler, voire d’annuler les travaux projetés.

C’est avec stupéfaction que nous avons pris connaissance de l’arrêté du 6 septembre 2019 qui encadre l’obligation d’individualisation des frais de chaleur et qui se trouve être contraire à la politique de travaux de rénovation énergétique des immeubles pourtant promue par les pouvoirs publics.

En effet, afin d’éviter que l’individualisation des frais de chauffage soit un frein à la réalisation de travaux de rénovation énergétique, l’article 71 de la loi ELAN qui a modifié l’article 241-9 du Code de l’Energie a prévu une dérogation à ce dispositif à partir du moment où il est avéré que son coût serait excessif au regard des économies énergétiques attendues.

Or, l’arrêté du 6 septembre 2019 étend cette obligation à la quasi-totalité des copropriétés puisqu’il impose une formule qui part du postulat que les économies réalisées par ce type d’appareillage entraîneraient une réduction énergétique de 15 %, ce qui correspond une baisse de deux degrés de la température de chauffage.

Ce pourcentage est tout à fait aberrant puisqu’il serait le même que celui d’une copropriété qui réaliserait une isolation thermique par l’extérieur (ravalement).

Ce taux de 15 % n’est donc pas crédible et trouve son origine dans le fait que les services de l’ADEME ont dû se contenter des résultats donnés par le Syndicat de la Mesure, qui de manière partiale n’ont pas été transparents sur les causes des économies constatées.

En effet, dans de nombreux cas, ces copropriétés « tests » qui ont installé des répartiteurs de frais de chaleur ont bénéficié en parallèle de travaux de rénovation énergétique, voire même d’un changement de chaudière.

Il est donc évident que la baisse des consommations énergétiques est essentiellement due à la réalisation de ces travaux plutôt qu’à la simple installation de répartiteurs.

Pire, dans certains cas, l’individualisation des frais de chauffage n’a pas entraîné une économie, mais au contraire une augmentation des charges, notamment pour les copropriétés de moins de 50 lots qui, rappelons-le, sont largement majoritaires sur le territoire français.

Cet arrêté est dramatique pour la politique de rénovation énergétique des immeubles, puisqu’il présente l’individualisation des frais de chaleur comme étant aussi performante que la réalisation de travaux énergétiques.

Il est probable que cette situation nous entraîne vers un nouveau barrage à la réalisation de travaux, sachant que les copropriétaires opteront pour la solution la plus économique qui permet une baisse énergétique équivalente à un ravalement, à savoir l’installation de répartiteurs.

C’est face à ce contexte que nous vous demandons d’instaurer un moratoire sur la mise en application de cet arrêté afin de déterminer de manière transparente si l’installation des répartiteurs de frais de chaleur permet effectivement une réduction de la consommation énergétique et, le cas échéant, à quelle hauteur.

Pour cela, une étude indépendante pourrait être menée au cours des six prochains mois, sachant que nous sommes en mesure de vous fournir plusieurs copropriétés qui ont individualisé leurs frais de chaleur et qui aujourd’hui pour diverses raisons regrettent la pose des répartiteurs.

Mon équipe technique et moi-même restons à votre entière disposition pour vous apporter toute information complémentaire sur ce sujet, sachant que nous avons diligenté auprès d’un bureau d’étude indépendant une analyse technique sur la fiabilité et le rendement des répartiteurs de frais de chaleur.

Je profite de ce courrier pour réitérer mon invitation à la séance inaugurale de notre onzième salon de la copropriété qui se tiendra le mercredi 16 octobre à 10h00, pour laquelle, sauf erreur de ma part, je n’ai pas obtenu de réponse officielle.

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en nos salutations les plus distinguées. »