L’extranet de la copropriété : un outil qui va devenir ultra stratégique

09/04/2019 Actions Action

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, modifié par la loi ALUR, a introduit une obligation faite au syndic de mettre à la disposition de la copropriété un extranet.

Celui-ci doit prévoir deux accès sécurisés différenciés : l’un pour le conseil syndical et l’autre pour les copropriétaires.

Plus de quatre ans après son entrée en vigueur, nous constatons que cet extranet est très peu utilisé par les conseillers syndicaux et surtout par les copropriétaires pour la bonne et simple raison que figure dans cet outil très peu de documents ayant des informations pratiques et stratégiques pour eux.

Grâce à l’intervention de l’ARC, dans le cadre de la loi ELAN, il est à présent prévu la publication d’un décret qui doit fixer la liste des pièces et documents minimaux qui devront figurer aussi bien dans l’espace du conseil syndical que dans celui du copropriétaire.

Les principaux acteurs de la copropriété (les professionnels et l’ARC) sont actuellement sollicités par les pouvoirs publics pour donner leur avis sur le projet de décret.

Notre association a fait connaître sa position, à savoir que cet outil doit être avant tout un moyen de garantir une transparence des données et informations à l’égard des conseillers syndicaux et des copropriétaires (voir l’article suivant : https://arc-copro.fr/documentation/notre-reflexion-sur-le-futur-decret-extranet).

Ainsi, il est clair que cet outil va devenir, pour l’ensemble des acteurs de la copropriété, que ce soit le conseil syndical, les copropriétaires mais aussi le syndic, un outil stratégique.

Voyons cela de plus près.

I. Un util à plusieurs facettes

La volonté des pouvoirs publics est que l’extranet soit surtout utilisé pour que les copropriétaires et les conseils syndicaux aient moins besoin de solliciter le gestionnaire et en contrepartie pour que le cabinet soit moins importuné par les copropriétaires.

Ainsi, le concept est de mettre en fonction du profil (conseil syndical ou copropriétaire) les documents susceptibles de les intéresser.

Pour les copropriétaires, il s’agira avant tout de leur donner leur situation comptable personnelle. Ainsi, figureront les appels de fonds, les règlements effectués, les informations pratiques, notamment pour remplir les données à renseigner lors de la promesse de vente ainsi que les documents et diagnostics à joindre.

Sur l’interface du conseil syndical, il s’agira principalement des documents comptables, juridiques et financiers tels que le grand livre, les relevés bancaires, les factures, le carnet d’entretien, les diagnostics…

Nous avons aussi demandé à ce que les informations administratives du syndic soient mises en ligne, telles que les attestations de la garantie financière, de l’assurance civile professionnelle ou encore de la carte professionnelle du syndic en place.

Là où il existe un point de friction avec les syndics est quand ces derniers souhaitent utiliser cette solution pour avant tout réduire leurs frais de fonctionnement au détriment des copropriétaires.

Pour cela, ils voudraient que les appels de fonds, ainsi que les pièces obligatoires à joindre à l’ordre du jour soient uniquement déposés dans l’espace sécurisé du copropriétaire, les dédouanant alors de faire des photocopies.

Ce point est essentiel pour eux puisque depuis l’entrée en vigueur du contrat type, les frais de photocopies doivent être inclus dans le forfait de base.

C’est pour cela que notre association reste ferme en indiquant que cela ne serait possible que si et seulement le copropriétaire donne son consentement exprès, en amont de la convocation d’assemblée générale, pour récupérer les pièces dans l’extranet de la copropriété ou encore les appels de fonds.

Il semble que la Chancellerie ait la même position, néanmoins, nous restons extrêmement vigilants.

En effet, au-delà des économies que cela génère pour le syndic sans contrepartie, il s’agit pour les copropriétaires de perdre en visibilité puisque neuf copropriétaires sur dix n’iront jamais consulter les pièces sur l’extranet et encore moins les imprimer avec leurs propres moyens.

II. Les sournoiseries possibles des syndics

Même si la Chancellerie semble nous suivre en imposant le consentement exprès du copropriétaire pour récupérer uniquement les pièces jointes de l’assemblée générale sur son extranet, il est possible que certains syndics utilisent des moyens sournois pour les contraindre à accepter.

Le concept est de conditionner l’accès à leur espace sécurisé dématérialisé en leur imposant d’accepter des conditions générales (en cochant la petite case en bas de l’écran).

En façade il s’agit de conditions d’utilisation, mais lorsqu’on regarde de plus près, le copropriétaire accepte d’être notifié de manière électronique, permettant ainsi que les pièces jointes à la convocation d’assemblée générale ou les appels de fonds ne soient plus envoyés en format papier mais uniquement mis dans l’espace « copropriétaire ».

Voilà pourquoi nous avons alerté la Chancellerie sur ces dérives probables, sachant que certains syndics commencent déjà à conditionner l’accès à l’extranet avec des conditions générales d’utilisation.

Néanmoins, la réponse de la Chancellerie est sans équivoque puisqu’elle nous a affirmé que l’accès à l’outil ne devait être conditionné par aucune clause sachant que la loi n’en prévoit pas.

Par conséquent, si vous vous retrouvez devant cette situation, indiquez au syndic que l’ouverture de l’extranet de la copropriété ne doit prévoir aucune condition d’utilisation préalable.

S’il refuse, nous serons ravis d’aider le conseil syndical à engager une action judiciaire à l’encontre du syndic pour vente forcée.

En effet, le syndic impose l’accès à un service qu’il est dans l’obligation de fournir à des conditions qui n’ont rien à voir avec l’objet de la prestation.

Nous sommes déjà dans les startingblocks, nous attendons la demande officielle d’un conseil syndical !