Loi de transition énergétique ou loi de transition financière ?

14/06/2016 Actions Action

Loi de transition énergétique ou loi de transition financière ?

 
Décidément, on pourrait se demander si les pouvoirs publics sont plus intéressés par la transition énergétique ou par les lobbies économiques qui veulent tirer profit à tout prix de nouvelles obligations.
 
En effet, les décrets ou projets d’application de la loi sur la transition énergétique paraissent parfois être une manne financière pour l’ensemble des professionnels au détriment des copropriétés.
 
Encore récemment, c’est in extremis que, grâce à la vigilance de l’ARC, les conséquences négatives de l’obligation d’individualiser les frais de chauffage ont pu être réduites de manière importante.
 
Voici qu’à présent il nous faut monter au créneau - à nouveau - face à un projet de loi qui permettrait de mettre à la disposition des tiers des données stratégiques et confidentielles des copropriétés.
 
Revenons tout d’abord sur la façon dont l’ARC a réussi à obtenir une atténuation de l’obligation d’installation de répartiteurs de frais de chaleur dans l’ensemble des copropriétés, pour ensuite faire un focus sur le projet de décret relatif à la mise à disposition des personnes publiques des données relatives à la consommation et production d’électricité et de gaz.
  1. Une dispense in extremis de l’installation de frais de chauffage

Avant même l’entrée en vigueur de la loi pour la transition énergétique, la quasi-totalité des professionnels et des associations et en premier lieu desquels l’ARC, avait dénoncé les limites technologiques des répartiteurs de frais de chaleur dans les appartements.
 
Pire, il n’a pas été démontré que ce type d’installation était réellement rentable pour les copropriétaires. Elle peut même au contraire s’avérer franchement très coûteuse.
 
Malgré cette opposition quasi générale à l’obligation d’individualiser les frais de chauffage, à l’exception bien évidemment du Syndicat de la Mesure, présidé par le PDG du groupe ISTA (leader du comptage d’eau et d’énergie), la Ministre de l’environnement avait fait part l’année dernière de sa volonté d’imposer tout de même l’installation de répartiteurs de frais de chaleur dans les appartements.
 
Le 31 mai 2016, le décret et l’arrêté relatifs à cette disposition ont été enfin publiés.
 
Il en ressort, après lecture attentive par l’ARC des textes réglementaires, que seuls les immeubles pouvant installer un équipement permettant de déterminer la quantité de chaleur fournie dans chaque local occupé seront contraints par cette obligation, ce qui n’est possible que dans une minorité de copropriété comme nous le détaillons dans notre dossier du mois de juin 2016 : www.arc-copro.com/jtmu.
 
Cela réduit donc considérablement le champ d’application de cette disposition au regret sûrement des professionnels.
 
Concernant les répartiteurs, il semble donc bien que la Ministre ait finalement privilégié l’intérêt général au lieu des lobbies particuliers.
 
  1. Un risque de communication des consommations d’électricité et de chauffage des copropriétés à des tiers

 
Depuis, nous avons eu connaissance du « projet de décret et d’arrêté relatif à la mise à disposition des données relatives à l’énergie ». Ces textes prévoient de donner la possibilité de diffuser à des tiers des informations annuelles de consommation d’énergie des copropriétés.
 
Pire, ce texte réglementaire prévoit même que la grande majorité des données seront disponibles gratuitement sur internet.
 
Quant aux demandes plus fines, notamment celles relatives à l’accès aux listes précises de bâtiments, elles seront facturées selon les tarifs de catalogues de prestations des opérateurs.
 
Ainsi, ce texte réglementaire offre donc une possibilité pour les différents fournisseurs d’énergie, installateurs de chaudières ou sociétés de ravalement d’accéder à un vivier de copropriétés qui seraient susceptibles d’être intéressées par ce type de service.
 
Il s’agit donc d’un gigantesque portefeuille de clientèle mis à la disposition des professionnels qui n’auront plus qu’à piocher pour récupérer des clients potentiels.
 
Ce projet de texte réglementaire est pour nous inacceptable.
 
En effet, il n’est pas possible que des copropriétés qui, rappelons-le, sont des immeubles privés, puissent être dépouillées de leurs données personnelles pour être mises dans les mains de professionnels sans avoir expressément donné leur consentement.
 
L’ARC a donc saisi à nouveau le Ministère de l’Environnement pour repréciser que la transition énergétique n’est pas un prétexte pour accepter toutes les demandes des professionnels et de leurs lobbies.
 
Voici le texte adressé au Ministère à ce sujet : « L’ARC fait part de son opposition à la diffusion à des tiers privés ou au grand public de données permettant l’identification de copropriétés. L’ARC pense que le premier effet d’une telle diffusion sera la multiplication d’un démarchage commercial agressif et trompeur, et ira à l’encontre d’une approche de la rénovation qui se doit d’être indépendante, cohérente et de qualité ».