Ordonnance « Copropriété » : la FNAIM prendrait–elle ses rêves pour des réalités ?

15/11/2019 Actu juridique Actualité juridique

Nous avons publié récemment un article expliquant comment les présidents de chambres professionnelles ont obtenu du gouvernement que soit introduite dans l’ordonnance copropriété la possibilité pour les syndics professionnels de proposer en parallèle de leur contrat de mandat d’autres contrats de prestations de services.

Nous avons alors mis en exergue pourquoi cette disposition était limitée et surtout en totale contradiction avec l’article 66 du décret du 20 juin 1970 qui interdit à un syndic de percevoir d’autres rémunérations que celles liées à leur mandat de syndic.

Ceci étant, voyons comment la FNAIM présente le nouveau dispositif prévu dans l’ordonnance copropriété qui dépasse la caricature.

C’est simple, si l’ARC n’avait pas lu le communiqué de presse on aurait pensé qu’il s’agit d’un sketch.

Néanmoins, avant de présenter la communication de la FNAIM, recontextualisons la situation.

I. Un contrat type et non un contrat socle

La demande initiale de la FNAIM était de remettre en question le contrat type de syndic réglementaire pour le substituer par un contrat socle.


Celui-ci devait prévoir un tronc commun avec des tâches minimales que doit assurer le syndic tout en pouvant ajouter d’autres prestations à son bon vouloir ou à l’imagination foisonnante des professionnels.

Le ministère de la Justice et l’ARC se sont opposés catégoriquement à cette approche qui faisait reculer les acquis de la loi ALUR en confirmant le maintien du contrat type qui limite les prestations pouvant faire l’objet d’une facturation supplémentaire et même en prévoyant des sanctions lourdes pour les syndics qui ne respecteraient pas le contrat type allant jusqu’à 15 000 euros d’amende administrative.

En revanche, l’ordonnance a prévu dans l’article 16 qui modifie l’article 18-1 A de la loi du 10 juillet 1965 la disposition suivante :

« II.-Le syndic peut conclure avec le syndicat une convention portant sur des prestations de services autres que celles relevant de sa mission de syndic, après autorisation expresse de l'assemblée générale donnée à la majorité des voix exprimées de tous les copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance. Ces prestations ne peuvent figurer dans le contrat de syndic. »

Maintenant qu’on connaît le contexte, voyons ce que publie dans son communiqué de presse la FNAIM (il ne s’agit pas d’un poisson d’avril, d’autant plus qu’on est en novembre).

II. Une communication démagogique et surréaliste

Lors des réunions de travail au sein du CNTGI, l’ARC a expliqué que si cette disposition passait, alors les syndics allaient demain proposer des services de livraison de croissants ou de journaux ou encore de babysitting.

Bien évidemment, il s’agissait d’exagérer la situation afin de mettre en exergue les dérives probables.

Mais comme nous allons le constater, même les idées les plus folles et incohérentes, les syndics sont prêts à les reprendre à partir du moment où il y a de l’argent à se faire.

Voici l’extrait du communiqué de presse de la FNAIM qui reprend les affirmations de son président :

actu

La FNAIM, du moins son président, semble n’avoir rien compris.

Il ne s’agit nullement d’un contrat socle, mais au contraire du maintien du contrat type de mandat incompressible et qui ne peut faire l’objet d’aucun rajout ou amendement.

Par ailleurs, le communiqué confirme que les syndics vont être « l’Amazon » des services à la personne proposant du gardiennage, mais également du babysitting et du dogsitting…

Oui ! On ne rêve pas. Les syndics souhaitent proposer des services pour garder les enfants ou les chiens : on est dans la cinquième dimension.

Ça y est, les syndics ne se refusent plus rien !

Peut-être demain aurons-nous des services de dépannage de clé perdue, de vente de sous-vêtements ou de jambon de Bayonne, etc.

Et entre temps, des copropriétés qui galèrent avec une gestion de leur immeuble approximative.

Heureusement la FNAIM n’a pas bien lu et compris les dispositions légales issues de l’ordonnance.

En effet, il est prévu que le syndic puisse soumettre au cours de l’assemblée générale  des contrats de prestations de services autres que celles relevant de sa mission de gestion, mais qui concernent le syndicat des copropriétaires.

Il s’agit bien de contrats souscrits avec le syndicat des copropriétaires et surtout qui est en conformité avec son objet social qui est l’administration de l’immeuble.

Ainsi, il est impossible que les syndics proposent du babysitting ou du dogsitting qui ne releve nullement de l’objet du syndicat des copropriétaires.

Le plus misérable est qu’à aucun moment la FNAIM n’évoque des services qui concernent réellement la copropriété et les enjeux auxquels elle doit faire face.

En tout cas, ils nous auront bien fait rire.

Sacrée FNAIM, si elle n’existait, on n’aurait pas pensé à l’inventer !