Paris, le 7 janvier 2021
L’ordonnance du 30 octobre 2019 a réformé en profondeur la loi du 10 juillet 1965 en instituant notamment un nouveau mode de participation des copropriétaires aux assemblées générales : le vote par correspondance.
Ce dispositif est entré en vigueur le 4 juillet 2020 à la suite de la publication du décret et de l’arrêté du 2 juillet 2020, qui ont non seulement encadré ce nouveau système, et défini le formulaire type, qui doit impérativement être joint à la convocation d’assemblée générale.
En raison de la pandémie de la Covid-19 et des mesures sanitaires restrictives, la quasi-totalité des syndics professionnels ont opté pour tenir les assemblées générales par correspondance.
Or, cette alternative devait être une solution par défaut, sachant que l’ordonnance du 20 mai 2020, qui a instauré ces mesures provisoires, a prévu que les assemblées générales devaient se tenir en priorité en visioconférence ou audioconférence.
La volonté du gouvernement consistait à maintenir les échanges et débats entre copropriétaires de manière dématérialisée, afin de voter des résolutions conformes à leur volonté majoritaire.
Néanmoins, soit par incapacité technique (alors qu’en parallèle les syndics non professionnels ont réussi à assurer la visioconférence), soit par stratégie, la plupart des syndics professionnels ont opté pour la tenue des assemblées générales exclusivement par vote par correspondance, neutralisant ainsi toute démocratie participative des copropriétaires pourtant primordiale au fonctionnement optimisé de leur résidence.
Les conséquences se sont révélées dramatiques.
Dans beaucoup de copropriété, le taux de participation des copropriétaires n’a pas dépassé les 30% aboutissant à une majorité insuffisante pour adopter en première ou seconde lecture certaines résolutions essentielles, comme l’élection du syndic, du conseil syndical, voire l’adoption de travaux collectifs.
Plus scandaleux, certains syndics professionnels ont profité de cette situation pour élaborer seuls l’ordre du jour, sans associer le conseil syndical, afin d’introduire des résolutions abusives qui ne pourront pas être amendées du fait de l’absence de tenue d’assemblée générale en présentiel ou même de manière électronique.
Ainsi, certains syndics professionnels ont demandé plus de 50% d’augmentation de leurs honoraires de gestion courante, d’autres ont passé en force un mandat de trois ans, d’autres encore ont imposé leurs filiales pour la souscription de contrats essentiels comme celui de l’assurance multirisques immeuble.
Les copropriétaires se sont alors retrouvés « au pied du mur », ayant comme seule alternative de voter « pour », sachant qu’à défaut la copropriété se retrouverait dépourvue de syndic ou de contrat d’assurance.
Les conséquences de ce «hold up» ont généré des attitudes de précaution et même de protection de copropriétaires, qui pour certains n’ont pas rempli et/ou expédié au syndic leur formulaire de vote par correspondance. D’autres ont naïvement amendé les projets de résolutions établis, cependant les amendements ne seront pas pris en compte par le syndic.
Et pour cause, les résolutions présentées dans les formulaires de vote sont figées, permettant uniquement au copropriétaire de voter « pour », « contre » ou « abstention » sans pouvoir les amender afin qu’elles soient plus en conformité avec les intérêts de la copropriété.
Les désagréments ne se limitent pas uniquement à ce constat désastreux, puisqu’en parallèle commencent à émerger de nouveaux abus de syndics professionnels concernant l’usage du vote par correspondance.
Certains prétendent que le dépouillement des formulaires de vote justifie une rémunération complémentaire, alors que cette prestation n’est pas prévue dans le contrat type de syndic.
Le plus scandaleux, est que cette tâche se réalise pendant les heures ouvrables du cabinet et qu’en parallèle les syndics n’ont pas déduit de leurs honoraires de gestion courante le temps gagné du fait de l’absence effective de tenue d’assemblées générales en présentiel.
Rappelons que cette possibilité de tenir les assemblées générales de manière exclusivement dématérialisée est possible jusqu’au 1er avril 2021, conformément à l’ordonnance n°2020-1400 du 18 novembre 2020.
Un dossier qui ne fait que commencer…
Gérard Andrieux, Emile Hagège,
Président de l’ARC Directeur général de l’ARC