Dans le cadre de la loi ELAN, plusieurs décrets d’application concernant le secteur de la copropriété devaient être publiés.
Le Premier Ministre nous a assuré qu’il éviterait les écueils de la loi ALUR en s’engageant à publier dans les six mois à compter de l’entrée en vigueur de la loi ELAN (le 24 novembre 2018), les décrets d’application.
La semaine dernière, en l’espace de deux jours, pas moins de trois décrets d’application concernant la copropriété ont été publiés sur des dispositions stratégiques.
Présentons brièvement les trois décrets d’application sachant que nous ferons une analyse plus poussée à travers différents dossiers publiés aussi bien sur notre site internet que sur notre revue trimestrielle.
I. Décret n° 2019-502 du 23 mai 2019 relatif à la liste minimale des documents dématérialisés concernant la copropriété accessibles sur un espace sécurisé en ligne
Depuis l’entrée en vigueur de l’obligation pour les syndics professionnels de fournir à leurs copropriétés mandantes un espace dématérialisé sécurisé (1er janvier 2015), l’ARC a constaté qu’il s’agissait de coquilles vides dans lesquelles aucun document stratégique n’était fourni.
Notre association a donc demandé que soit intégrée dans la loi ELAN une disposition prévoyant la publication d’un décret devant préciser les documents minimum à faire figurer aussi bien dans l’espace du conseil syndical que dans celui des copropriétaires.
C’est dans ce cadre, que l’article 205 de la loi ELAN a introduit dans l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 la publication d’un décret en ce sens.
Le décret n° 2019-502 du 23 mai 2019 prévoit en réalité trois espaces différents, l’un commun à l’ensemble des copropriétaires, un deuxième pour chacun des copropriétaires individuels et enfin un troisième pour le conseil syndical.
De toute évidence, ce décret a été exploité en premier lieu pour permettre aux copropriétaires qui souhaitent vendre leur lot de ne pas être contraints de passer par leur syndic pour que leur soient fournis les documents et données comptables nécessaires à remettre au vendeur avant la promesse d’achat.
Ainsi, ce décret impose de mettre en ligne l’ensemble de ces informations telles que le carnet d’entretien ou les diagnostics, le fonds travaux rattaché au lot ou les charges du budget prévisionnel des deux derniers exercices.
Le corollaire est que les informations fournies dans l’espace du conseil syndical sont extrêmement sommaires, ne lui permettant pas d’accéder facilement et rapidement aux documents stratégiques de la copropriété, comme par exemple le grand livre, pour pouvoir assurer sa mission de contrôler.
Et pourtant, rappelons que l’obligation d’extranet était la contrepartie proposée par les professionnels pour maintenir la dérogation de compte bancaire séparé pour les copropriétés de moins de 16 lots en s’engageant à fournir au conseil syndical l’ensemble des informations et des documents dématérialisés lui permettant de contrôler la gestion de la copropriété.
Une question reste en suspens qui est l'actualisation des documents mis en ligne et qui devrait vraisemblablement être traitée dans le cadre du décret relatif aux modalités traitant de la participation des copropriétés aux assemblées générales par voie numérique.
Ce décret devrait entrer en vigueur au 1er juillet 2020, sachant qu’originellement, la date était fixée au 1er janvier, justifiant qu’on ait demandé des explications au ministère de la justice.
L’ARC consacrera le dossier du mois de juin, publié sur notre site internet, à l’analyse de ce décret.
Pour prendre connaissance du décret, vous pouvez cliquer sur le lien suivant : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2019/5/23/2019-502/jo/texte
II. Décret n° 2019-503 du 23 mai 2019 fixant le montant minimal des pénalités applicables au syndic de copropriété en cas d'absence de communication des pièces au conseil syndical
Devant les difficultés rencontrées par le conseil syndical pour obtenir de son syndic des documents de la copropriété, et ce malgré les droits qui lui sont conférés, l’ARC a réclamé la publication d’un décret fixant un montant de pénalités par jour en cas de retard de remise des pièces.
L’article 203 de la loi ELAN, qui a modifié l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965, a prévu cette disposition en renvoyant à la publication d’un décret d’application.
Le décret 2019-503 du 23 mai 2019 a fixé le montant à 15 euros par jour de retard qui, conformément à l’article 21, seront imputables à compter d’un mois après la demande du conseil syndical qui est restée sans suite.
Ces pénalités devront être imputées sur les honoraires de base, sans pouvoir fixer de plafond.
Ce décret est une véritable révolution car pour la première fois il est prévu des sanctions à l’égard des syndics qui ne respecteraient pas leurs obligations légales qu’ils ont envers le conseil syndical.
Ceci étant, une difficulté majeure doit être traitée qui est la mise en application concrète de ce décret, notamment en rendant opposables les pénalités à l’égard du syndic.
Un dossier spécial sera publié sur notre prochaine revue afin d’expliquer à nos adhérents la démarche à suivre.
Pour prendre connaissance du décret, vous pouvez cliquer sur le lien suivant :
https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2019/5/23/2019-503/jo/texte
III. Décret n°2019-496 du 22 mai 2019 relatif à la détermination individuelle de la quantité de chaleur, de froid et d'eau chaude sanitaire consommée et à la répartition des frais de chauffage, de refroidissement et d'eau chaude sanitaire, dans les immeubles collectifs à usage d'habitation ou à usage d'habitation et professionnel
Aussi bien l’ARC que les bailleurs sociaux ont à plusieurs reprises expliqué aux pouvoirs publics les difficultés juridiques, financières et surtout techniques qu’implique l’installation des répartiteurs de frais de chauffage, pouvant entraîner non seulement un frein à la rénovation énergétique des immeubles, mais aussi de lourds contentieux en matière de contestation de répartition des charges de chauffage.
Le décret n°2019-496 du 22 mai 2019, pris en application de l’article 71 de la loi ELAN, modifiant l’article L241-9 du Code de l’énergie, prévoit trois strates d’obligations pour les copropriétés.
1. Tout d’abord l’installation de compteurs individuels d’énergie thermique permettant d’identifier pour chaque appartement les consommations réelles de chauffage.
2. Lorsque cela n’est pas possible, il faudra alors installer des répartiteurs de frais de chauffage pour mesurer la consommation de chaleur au niveau de chaque radiateur dans la mesure où cela est techniquement possible ou économiquement rentable, c'est-à-dire que cela n'entraîne pas « des coûts excessifs au regard des économies d’énergie attendues ».
Autrement dit, si l’un des deux cas est avéré, l’installation de répartiteurs de frais de chauffage n’est pas obligatoire.
Le décret ne donne aucun repère concernant l’appréciation du terme « excessif » ni ne précise les opérations qu’il faut intégrer pour déterminer si l’installation est rentable.
Pour répondre à cette question, un arrêté doit être publié, devant préciser les cas d’impossibilité d’installation de compteurs individuels ou bien de répartiteurs de frais de chauffage pour des raisons techniques ou économiques.
Dans ce cas, le syndicat des copropriétaires devra établir une étude justifiant de cette impossibilité technique ou du coût excessif.
Cette étude va entraîner un coût pour la copropriété, impliquant que notre coopérative technique va proposer des solutions pour en maîtriser les effets.
3. Enfin, dans le cas où il n’est pas possible d’installer des répartiteurs de frais de chauffage, un arrêté devra préciser les méthodes alternatives susceptibles d’être employées pour évaluer la quantité de chaleur consommée dans chaque logement.
Comme on le constate, ce décret doit être complété par un arrêté qui sera stratégique puisqu’il déterminera quelles sont les copropriétés qui seront en définitive contraintes d’installer des répartiteurs de frais de chauffage.
Nous espérons que la volonté des pouvoirs publics est d’inciter les copropriétés énergivores à réaliser des travaux permettant la réduction des consommations plutôt que de les obliger à installer des répartiteurs de frais de chauffage qui, au-delà de répondre au lobby des installateurs, n’apportent aucune plus-value.
Pour prendre connaissance du décret, vous pouvez cliquer sur le lien suivant :